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Photo : Sonia Barcet Licences d’entrepreneur de spectacle : 1 – 1-1051707 / 2 – 1-1051708 / 3 – 1-1051709 LE RETOUR AU DÉSERT Bernard-Marie Koltès / Arnaud Meunier CRÉATION COMÉDIE REVUE DE PRESSE www.lacomedie.fr direction Arnaud Meunier contact presse nationale Nicole Czarniak contact presse régionale Charlyne Azzalin 06 80 18 22 75 / [email protected] 04 77 25 37 85 / [email protected]

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LE RETOUR AU DÉSERTBernard-Marie Koltès / Arnaud Meunier

CRÉATIONCOMÉDIE

REVUE DE PRESSE

www.lacomedie.frdirection Arnaud Meunier

contact presse nationale Nicole Czarniak contact presse régionale Charlyne Azzalin

06 80 18 22 75 / [email protected] 04 77 25 37 85 / [email protected]

PRESSE NATIONALE

CRITIQUES

Les Échos Philippe Chevilley 08/10/2015

Scène Web Stéphane Capron 02/10/2015

Les Trois coups Trina Mounier 08/10/2015

Hier au théâtre Thomas Ngo Hong-Roche 12/10/2015

Allegro Théâtre Joshka Schidlow 19/10/2015

AVANT-PAPIERS

Télérama 09/09/2015

La Terrasse Catherine Robert septembre 2015

PRESSE RÉGIONALE

CRITIQUES

Le Progrès Gilette Duroure 02/10/2015

AVANT-PAPIERS

Exit Mag Luc Hernandez 02/09/2015

Le Progrès Muriel Catalano 18/09/2015

L’Essor de la Loire Florence Barnola 26/09/2015

L’Essor de la Loire septembre 2015

Poly Magazine Dorothée Lachmann octobre 2015

L’Alsace 14 octobre 2015

Dernières nouvelles d’Alsace Veneranda Paladino 10 octobre 2015

Le Petit Bulletin Florence Barnola septembre 2015

TÉLÉVISIONFrance 3 Françoise Boissonnat Journal 01/10/2015

TL7 Chantale Joassard Journal 30/09/2015

RADIOFrance Inter Stéphane Capron Journal 05/10/2015

France Bleu Saint-Étienne Loire

Laure Grac reportage autour de la création

du 28/09 au 02/10/2015

France Bleu Saint-Étienne Loire

Julien Trambouze Agenda 07/10/2015

Activ’Radio Etienne Jacob Journal 29/09/2015

PRESSE NATIONALE

CRITIQUES

Date : 08 OCT 15

Périodicité : QuotidienOJD : 122744

Page de l'article : p.13Journaliste : Philippe Chevilley

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SAINT-ETIENNE 6744745400506Tous droits réservés à l'éditeur

IDEES & DEBATS

art&cuttureLe « Désert » retrouvéd'Arnaud MeunierPhilippe [email protected]

Arnaud Meunier a choisi lebon moment pour nousfaire réentendre la pièce deBernard-Marie Koltès, crééeen 1988 par Patrice Chéreau.Un« ovni »,dixitledirecteurde la Comédie de Saint-Etienne, qui mêle la comédie et le drame,l'intime et la grande histoire, le réalisme et lefantastique... « Retour au désert » est uneœuvre sidérante, avec ses vérités et ses riresétranglés. Elle nous parle des rapports âpresentre la France et l'Algérie, du racisme, dè laperte d'identité, de la mesquinerie d'une cer-taine bourgeoisie de province...

Arnaud Meunier a pensé à la montée del'extrême droite dans la France rurale, enmettant en scène ce vrai-faux vaudeville quivoit s'affronter un frère et une sœur dans uneville de l'est de la France. Mathilde rentred'Algérie en guerre, avec sa fille Fatima et sonfils Edouard, pour récupérer sa maison, oùvit son frère Adrien, directeur d'usine, flan-qué d'une femme alcoolique et d'un fils idiot.

Magnifiques monologuesSous l'œil blasé des domestiques,Madame Queuleu et Aziz, s'instaure un pugi-lat permanent. Mathilde veut régler sescomptes avec Adrien et ses amis notables,qui préparent en secret un attentat contre uncafé arabe. L'apparition d'un fantôme (la pre-

THÉÀTRELe Retour au désertDe Bernard-Marie KoltèsMS Arnaud MeunierComédie de Saint-Etienne(04 77 251414), Jusqu'aull oct. Puis tournée (Paris,Th. de la Ville, 20-31 janv.).

mière femme d'Adrien) etl'intrusion d'un parachu-tiste dans le jardin ajoutent àl'hystérie ambiante.

Tel un f u n a m b u l e ,Arnaud Meunier voltige surle fil de la comédie noire. Ilfait un sort au réalisme,dans le beau décor oniriqued'une maison mangée par

son jardin. La haine, noyée dans l'humournoir, apparaît presque joyeuse ; le peud'amour, suggéré par les mots pudiques deKoltès, est mis en relief. On entend tout de cesmagnifiques monologues, où les personna-ges disent leur perte de repères, leur désir des'échapper, jusqu'à cette bluffante envoléedans les cintres d'Edouard.

Arnaud Meunier a su s'entourer de qua-torze excellents comédiens. CatherineFliegel réussit là où Jacqueline Maillan avaitéchoué à la création : elle porte toute l'ambi-guïté de Mathilde, sa malice désespérée, sahargne chaleureuse. Encore un brin hési-tant, Didier Bezace est en bonne voie de maî-triser le personnage truculent et pathétiqued'Adrien. Isabelle Sadoyan incarne avec uneéclatante drôlerie Madame Queuleu. Khei-reddine Lardjam est impeccable dans le rôled'Aziz, l'Arabe à l'identité déchirée... Unegrande tournée en France est prévue pour ce« Retour au désert » limpide et cinglant.L'occasion de redécouvrir une œuvre excep-tionnelle qui en dit long sur l'aridité destemps. •

Arnaud Meunier: « Avec Retour au désert, on est entre Gogol, Flaubert et Shakespeare »

@ Sonia Barcet

Bernard-Marie Koltès a écrit « Le Retour au désert » en 1988 pour Jacqueline Maillan. Un rôle à contre emploi pour la comédienne, reine du boulevard. A la création, la mise en scène de Patrice Chéreau fait sensation. Cette pièce est d’une actualité inouïe, elle parle du racisme latent dans la société française et de l’histoire coloniale du pays. Arnaud Meunier, le directeur de la Comédie de Saint-Etienne remonte la pièce avec Catherine Hiegel et Didier Bezace. Rencontre avec le metteur en scène.

La pièce de Koltès écrite en 1988 est furieusement d’actualité dans cette France qui se radicalise. Est-ce que c’est l’une des raisons qui vous a poussé à monter cette pièce ?

Je pense qu’il faut que l’on parle de l’Algérie. Il y a un refus de vouloir parler de notre passé colonial. Cette histoire n’est pas transmise, n’est pas enseignée, elle est secrète, elle est taboue, du coup cela fermente et cela remonte à la surface. Lorsque j’ai vu la version montée par Jacques Nichet, beaucoup de répliques me sont restées en mémoire. Notamment le passage ou Aziz dit « Je ne suis plus algérien, ni français, je suis un couillon ». Et pour la monter il fallait trouver le bon duo d’acteurs.

Koltès dit des choses fortes sur le repli d’une certaine France qui a peur de l’étranger. Koltès décrit le racisme latent.

Koltès disait que le jour où le Front National dépasserait les 8% il fuirait au Portugal ! Il serait effaré aujourd’hui. La pièce n’a pas pris une ride. Koltès veut nous faire rire de l’égocentrisme et de l’arrogance d’une petite bourgeoisie provinciale étriquée convaincue de son fait, que le France reste un grand pays magnifique qui n’a pas besoin de s’ouvrir sur l’autre, sur l’étranger et qui se ferme. Il avait envie de faire une comédie avec cette matière et cela n’a pas pris une ride. Dès 1988, il écrit une pièce avec des répliques en arabe, où deux personnages sont arabes, où un parachutiste est noir, il était précurseur quand on voit aujourd’hui nos débats sur la diversité. Il utilise l’arme du rire. On est entre Gogol, Flaubert et Shakespeare.

Et dans cette pièce il règle aussi ses comptes avec sa Lorraine natale

C’est sa pièce la plus autobiographique de Koltès. Il se livre. Il parle de Metz. Tous les personnages portent des noms de quartiers de la ville, le nom de la famille c’est la rue principale. Et il porte le fer là où ça fait mal. La pièce est formidable car elle mêle une comédie sur une histoire de famille avec des éléments biographiques et ses souvenirs d’enfance sur les évènements en Algérie et en France à cette époque là. Metz était une ville de garnison. Massu en était le Gouverneur militaire en 1960 et on a commencé à jeter des arabes dans la Meuse bien avant Paris.

Propos recueillis par Stéphane CAPRON

SCENEWEB – 2 octobre 2015

SCÈNE WEB 02/10/2015

Familles, je vous hais

C’est presque un vaudeville et c’est signé Koltès. De ce météore, on attendait la lucidité, le cynisme, mais pas vraiment cette comédie flamboyante, bruyante… C’est cette pièce pourtant qu’a choisie de monter Arnaud Meunier. Son « Retour au désert » apporte encore la preuve qu’il est un grand metteur en scène.

Début des années 1960. Mathilde revient d’Algérie avec armes et bagages et enfants. Avec armes surtout, et son frère Adrien qui occupait jusque-là la maison familiale ne s’y trompe pas : ce n’est pas une victime qui rentre, chassée de ce pays d’emprunt comme beaucoup, mais une femme qui entend d’abord récupérer son bien et régler quelques comptes, en un mot faire la guerre. Dès le début, tout est dit, sans masque, sans fard. Dans la bouche de ce notable sans doute habitué aux ronds de jambe et autres hypocrisies commodes, aucune place pour le doute, aucune pour l’accueil. Pas un mot de bienvenue : « Quand repars-tu ? ».

Dès les premiers mots, on est au-delà des bienséances et du bon ton. La réponse de Mathilde est elle aussi sans ambiguïté : « Je suis revenue pour rester et reprendre cette maison qui m’appartient, tu as eu l’usine, cela suffit ».

Autant dire que les portes vont claquer et les yeux se dessiller. Du vaudeville bourgeois dans lequel on lâcherait la vérité toute crue, c’est-à-dire politiquement incorrecte sans dissimulation, Freud dirait « avant le surmoi »…

Vaudeville politiquement incorrect

Car tout n’est pas encore dit, et ces premières paroles vont ouvrir la porte à un grand déballage : Adrien révèle que Mathilde est une mère célibataire qui s’est fait engrosser d’on ne sait qui ; elle rétorque que sa première femme est morte dans des conditions bizarres et que la seconde épouse (présente à côté d’Adrien et qui prend tout de face avec une tranquillité désarmante) n’est qu’une sotte, une potiche prétentieuse et vulgaire, etc. Tout ce que fait ou a fait l’un met l’autre hors de lui et l’entraîne à son tour dans l’injure et l’invective. C’est que Mathilde fait voler en éclats tous les faux-semblants, par exemple en appelant sa fille Fatima… Impensable ces années-là dans une petite ville de l’est de la France, provocateur, un prénom à supprimer et rayer de la carte comme un horrible secret de famille… Fatima, elle n’y songe pas !

Car en arrière-plan de cette demeure cernée de hauts murs, il y a la France, celle qui bastonne et qui jette à la Seine des gens dont les prénoms sont de la même origine que celui-ci, justement. Des meurtres immédiatement oubliés, pardonnés et dont on fait semblant de ne rien savoir. Le racisme cru s’exhibe dans la famille, dans ce refus d’entendre un prénom trop chargé d’histoire, dans ce foulard porté par la jeune fille et hâtivement délaissé. Il y aura encore un parachutiste africain tombé du ciel au propre comme au figuré (d’où sort-il celui-là qui déteint dans cette maisonnée résolument blanche ? De quelle guerre coloniale débarque-t-il ?…). Cette irruption loufoque n’est pas la seule concession au fantastique dans la pièce : des fantômes s’y promènent la nuit et tiennent de bien étranges discours.

Deux grands fauves en liberté : Hiegel et Bezace

Deux heures de combats de mots, de violence à nu entre le frère et la sœur qui vont passer comme un éclair, rythmées par de courtes pauses, fantastiques, poétiques, irréelles, bien nécessaires aux deux adversaires pour se reprendre. Des affrontements qui plongent leurs racines dans l’enfance et, d’une certaine manière, apportent familiarité et sécurité : ne perçoit-on pas toute la perversité, la dimension ludique de cette joute qui les autorise à maltraiter tout le monde au passage ?

LES TROIS COUPS 08 OCT. 2015

Bien sûr, on s’amuse beaucoup de cette cruauté, de ces répliques qui font mouche, de ces provocations scandaleuses. C’est la seconde composante du vaudeville : la violence y est incroyablement drôle.

Pour incarner ces deux fauves qui prennent tant de plaisir à se disputer, il fallait deux grands acteurs. Catherine Hiegel est Mathilde, elle en a la gouaille, la force, la présence résolue. Quant à Didier Bezace, il est tout aussi évidemment Adrien, un roc, bien campé dans ses certitudes, assuré de régner en maître et dont l’univers va lentement se fissurer. Leur jeu se complète, leurs répliques se renvoient la balle, c’est un match dont on suit l’avancée passionnément. Les autres comédiens sont à l’unisson, notamment René Turquois en Mathieu, fils de son père, effacé, un peu perdu, à côté de lui-même… Ou Isabelle Sadoyan, la vieille bonne qui connaît tout de cette famille et à qui reviendra le mot de la fin… grinçant et glaçant !

Enfin, il convient de saluer l’excellent travail du scénographe Damien Caille-Perret qui a conçu un décor tout de portes coulissantes en verre : on pénètre à l’intérieur pour découvrir l’intimité puis, grâce aux lumières de Nicolas Marie, on reste à l’extérieur pour l’arrivée de Mathilde ou pour voir passer les fantômes la nuit. Non seulement ce décor est absolument efficace puisqu’il permet toutes les combinaisons, mais il est aussi esthétiquement abouti par sa légèreté même, offrant des images d’une grande beauté.

En un mot une vraie réussite où la splendeur d’un texte est servie par des acteurs toujours justes et précis.

Par Trina Mounier

LES TROIS COUPS – 8 octobre 2015

LES TROIS COUPS 08 OCT. 2015

Entre Hiegel et Bezace, la guerre fratricide est déclarée ! À la tête de la Comédie de Saint-Étienne depuis 2011, Arnaud Meunier enveloppe Le retour au désert d’un troublant et salutaire parfum d’actualité. À travers la pièce de Koltès, le jeune metteur en scène dénonce les résurgences nationalistes et la montée en puissance de l’extrême-droite, sans laisser de côté la veine comique clairement prônée par le dramaturge. Avec Catherine Hiegel et Didier Bezace en maîtres de cérémonie de cet inquiétant vaudeville, la cellule familiale explose avec une cruelle drôlerie.

Dans une petite ville de province française au début des années soixante, la famille Serpenoise voit son tranquille équilibre contrarié par le retour au bercail de Mathilde, la sœur aînée, accompagnée de ses deux enfants, Fatima et Édouard. Fuyant la guerre d’Algérie, la caractérielle arrose les germes du conflit en revendiquant ses droits à la propriété familiale. Son frère Adrien ne l’entend pas de cette oreille et conteste l’héritage à travers une âpre lutte de pouvoir. Marie, la première femme d’Adrien, hante les lieux tandis qu’un attentat se prépare dans un café tenu par un Algérien…

Protéiforme, Le Retour au désert désarçonne. Koltès a imaginé une pièce hybride à la croisée des genres, empruntant allègrement au conte fantastique, au brûlot politique, aux envolées scientifiques ou au boulevard le plus farfelu. Composée en séquences ultra hétérogènes, cette étrange comédie ménage ses effets de rupture avec un art d’équilibriste brillamment consommé par Arnaud Meunier.

Jardin fantastique

S’appropriant avec doigté la partition kaléidoscopique koltésienne, il s’emploie à se montrer aussi divertissant que revendicateur. Grâce à l’immense pelouse conçue par Damien Caille-Perret, le metteur en scène symbolise un jardin d’Éden perverti par le poison de l’argent et de la rancune et également une symbiose avec la nature. Régis par leurs instincts de bêtes, voire de primates, les vieillards et leur progéniture s’engagent dans une lutte sans merci pour reprendre possession à la fois du terrain concret mais aussi de leur être.

Dans cette ambiance crépusculaire, les quatorze comédiens s’en donnent à cœur joie. À commencer par l’incomparable Catherine Hiegel qui avait déjà joué dans cette pièce au Français, sous la houlette de Muriel Mayette le personnage insignifiant de Marthe. Cette fois-ci, elle se voit distribuée dans un rôle à la hauteur de son génie. L’ironie mordante et la voracité castratrice de Mathilde semblent taillées sur mesure pour cette attachante ogresse. De sa voix caverneuse, elle mène la danse avec une détermination de sorcière vindicative tout en dévoilant des failles intimes avec une émotion sur le fil. Face à elle, Didier Bezace ressemble à un nounours tâchant de faire face avec dignité à sa furie de sœur. Incarnant un industriel littéralement enfermé dans une tour d’ivoire et ignorant du monde extérieur, il perd progressivement de son prestige avec brio. Le tandem parvient également à procurer par petites touches des shoots de pure complicité, l’air de rien. Hiegel et Bezace ont su restituer toute la complexité de la relation fraternelle mêlée de tendresse et de haine.

René Turquois, lui, s’érige à merveille en symbole des enfants révoltés désirant se dégager de l’influence néfaste des paternels. Sans âge, le comédien ressemble à la fois à un gamin soumis, un adolescent en voie d’émancipation et un adulte empêtré dans les contradictions du guerrier, entre volonté de devenir un héros et peur inhérente de la mort. Enfin, Isabelle Sadoyan épate en femme de ménage sensée et énergique et Kheireddine Lardjam en impose en domestique blasé et perdu dans sa quête identitaire.

Arnaud Meunier s’en sort donc haut la main avec ce Retour au désert. D’une intelligence vive, sa mise en scène reflète des préoccupations pleinement d’aujourd’hui. Portée par une belle brochette de comédiens, cette version n’aura aucun mal à s’imposer au cours de l’impressionnante tournée qui s’annonce. On guette avec impatience son prochain travail…

Thomas Ngo Hong-Roche

HIER AU THÉÄTRE – 12 octobre 2015

HIER AU THÉÂTRE 12 OCT. 2015

Le retour au désert de Bernard-Marie Koltès

Le désert dont il est question dans le titre de la pièce est le fin fond de la province française où revient Mathilde accompagnée de deux enfants. Elle a quitté l'Algérie qui, en ce début des années 60, est en ébullition. Le climat de la maison familiale qu'elle a rejoint n'est pas non plus des plus guilleret. L'accueil d'Adrien, son frère - qui y vit avec sa deuxième épouse qui bibine du matin au soir et un fils qui rêve d'ailleurs mais n'a pas le droit de franchir la porte du jardin - n'est pas franchement enthousiaste. Jamais à cours d'une réflexion vacharde, Mathilde semble décidée à aviver les tensions. La guerre civile ne ravage pas seulement l'Algérie. Elle se déroule aussi dans la demeure familiale où, pour ne pas apaiser les esprits rôde le fantôme de Marie, la première femme d'Adrien, le maître de maison et où surgit sans crier gare un parachutiste noir. Bernard-Marie Koltès écrivit cette pièce pour Jacqueline Maillant qui du à son extravagant tempérament comique de devenir la reine du théâtre de boulevard. En 1988, elle créa sous la direction de Patrice Chereau le rôle de Mathilde. Comédienne aussi douée pour la farce que pour le tragique, Catherine Hiégel se glisse aujourd'hui avec superbe dans la peau et les nerfs de ce personnage. Elle a trouvé en Didier Bezace un partenaire à sa démesure. Comme le reste de la distribution est à l'avenant, le spectacle mis en scène avec une effarante perspicacité par Arnaud Meunier est de ceux qui ne s'oublient pas. D'autant que la pièce, où alternent dialogues et longs monologues dans lesquels chacun en dit long sur lui-même et sur une société dont le fonctionnement ne peut qu'engendrer de la haine, semble annoncer le triomphe actuel des populismes. On sait combien Koltès tenait à ce qu'un personnage maghrébin ou originaire d'Afrique noire soit joué par un interprète de la même identité. Aujourd'hui signe des temps désolants que nous traversons un metteur en scène qui fut proche de Chéreau confie le rôle d'Othello à un acteur vedette blanc. Il serait honteux de ne pas y trouver à redire. Le spectacle créé à La Comédie de Saint Etienne entame sous peu sa tournée qui le mènera dans un premier temps le 4 nov à la Scène nationale d'Albi, les 9 et 10 nov au Grand R -Scène Nationale de la Roche - sur- Yon et le 1er nov au Théâtre Jean-Vilar de Vitry-sur-Seine.

Joshka Schidlow

ALLÉGRO THÉÂTRE 19 OCT. 2015

PRESSE ÉCRITE NATIONALE

AVANT-PAPIERS

TÉLÉRAMA 9 SEPT. 2015

Date : SEPT 15

Pays : FrancePériodicité : MensuelOJD : 71455

Page de l'article : p.18Journaliste : Catherine Robert

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THÉÂTRE

ENTRETIEN >• ARNAUD MEUNIER

LA COMÉDIE DE SAINT-ETIENNE / RETOUR AU DÉSERTDE BERNARD-MARIE KOLTÈS / MES ARNAUD MEUNIER

RIREDE CE QU'ON NE DIT PASArnaud Meunier réunit Catherine Hiegel et Didier Bezace pour incarner leduo central d'une fable provinciale à l'humour noir, qui convoque zonesd'ombre de la mémoire coloniale et revenants.

Quel est le thème de Retour au désert ?Arnaud Meunier: La pièce se situe dans lesannées 60 Mathilde rentre d'Algérie retrou-ver la maison familiale où règne son frère,Adrien, riche industriel et notable proche desmilieux de l'OAS Même si rien n'est exacte-ment nommé, on imagine la Lorraine natalede Koltès, originaire de Metz. Le désert surlequel joue le titre n'est pas celui d'où revientMathilde le désert, c'est la province fran-çaise. La pièce traite profondément de nosrelations avec l'Algérie et surtout des fan-tômes qui hantent ces relations. Le sujet estd'autant plus fort que beaucoup de notrehistoire actuelle se joue autour de cette par-tie de notre histoire peu ou mal enseignée,douloureuse, complexe Paradoxalement, peude pièces ont été écrites sur ce sujet lorsquej'en ai cherché une à monter, je ne voyais pasde grand texte, à part celui de Koltès

Le théâtre joue-t-il, à cet égard, un rôle histo-rique et politique ?A. M. : Le théâtre apporte sa pierre J'ai beau-coup d'admiration pour Michel Vinaver, et jecroîs, comme il le dit, que le théâtre est faitpour ébranler les certitudes et peut contri-buer au progrès Évidemment, le théâtre nefera pas ce que les politiques n'osent pasfaire. Il faut pourtant rappeler que la relation

entre la France et l'Algérie concerne un Fran-çais sur trois, de près ou de lom . entre ceuxqui sont nés la-bas, ceux qui y ont grandi,y ont fait leur service militaire ou la guerre,c'est considérable ' Koltès a grandi dans uneville militaire, et à Metz comme à Paris, il ya eu des Algériens jetés dans la rivière Celourd passé l'a marque. Et il continue a nousmarquer dans la mesure où il rebondit sur lesdébats actuels. Les gens qui ont vécu cettehistoire sont toujours vivants demeure unbrasier sur lequel soufflent régulièrement lespolitiques, entre les débats sur le rôle positifde la colonisation, l'mstrumentalisation del'électorat pied-noir ou harki En début d'an-née, les attentats ont poussé les gens a enparler a nouveau.

Sur un sujet aussi brûlant, Koltès écrit pour-tant une comédie...A. M. : Ce que j'aime avec cette pièce, c'estqu'elle est atypique Elle est basée sur desfaits violents, maîs elle est d'abord unecomédie Koltès, qui regrettait qu'on prenneses pièces trop au sérieux, passe par le rirepour porter le fer au plus profond, et son rireest féroce et grinçant. Le moteur de la pièceamené à rire de ce qu'on ne peut pas direPourtant, le fond est inquiétant : Adrien etses amis flirtent avec l'extrême droite , il est

Date : SEPT 15

Pays : FrancePériodicité : MensuelOJD : 71455

Page de l'article : p.18Journaliste : Catherine Robert

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Le metteur en scène Arnaud Meunier.

question du secret des provinces françaises,des femmes dont on se débarrasse, commele rappelle le fantôme de la premiere époused'Adrien. Cette comédie s'organise autour d'unduo de monstres sacrés Jacqueline Maillanet Michel Piccoli à la création, Myriam Boyeret François Chattot dans la mise en scène deMichel J'ai rêvé au tandem entre CatherineHiegel et Didier Bezace, qui ont tous les deuxla force de caractère des personnages Lapièce n'est jouable que quand on trouve ceduo central. Après l'avoir trouvé, j'ai déclenchéle projet, et l'urgence m'en est apparue encoreplus grande depuis janvier.

Pourquoi ?A. M.: Ces événements nous imposent uneresponsabilité accrue, autant dans le réper-toire qu'on choisit que dans la manière dont

"KOLTÈS, QUI REGRETTAITQU'ON PRENNE SESPIÈCES TROP AU SÉRIEUX,PASSE PAR LE RIRE POURPORTER LE FER AU PLUSPROFOND."ARNAUD MEUNIER

on partage le travail avec les populationsNous avons orienté notre programmation avecdes spectacles qui interroge l'autre, l'étran-ger, et nous avons réorienté les ateliers depratique théâtrale menés par La Comédie deSaint-Etienne, allant davantage où les chosessont plus fragiles, plus sensibles, dans lescollèges, dans la rencontre avec les jeunesnon scolarisés Ces événements ont produitdiverses réactions certains sont tétanisés,d'autre découragés et d'autres cherchent àaller de l'avant. Il y a eu plusieurs phases dansces réactions, et du travail reste à faire, dansla mesure où les questions sont lom d'êtreréglées

Propos recueillis par Catherine Robert

'{•WLa Comédie de Saint-Etienne, Centre IBDramatique National, 7 av. Émile-Loubet, *Hi

42000 Saint-Etienne. Du 1er au 11 octobre 2015,à 20 h, sauf tes samedis 3 et 10 à 17 h et ledimanche 11 à 15h ; relâche les 4 et 5 octobre.En tournée jusqu'en février 2016 Tél. 04 77 25 1414.

PRESSE ÉCRITE RÉGIONALE

CRITIQUES

LA TRIBUNE / LE PROGRÈS 02/10/2015

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EXIT MAGDate : SEPT 15Pays : France

Périodicité : Mensuel Page de l'article : p.15Journaliste : A.B.

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Le Retour au desertde Bernard Marie HottesMise en scened Arnaud MeunierCrèationDu jeudi leraudimanche II octobre a20 h a la Comédie deSaint EtienneDe 16 a 21 €wwwlacomediefrPuis du mercredi 3 aujeudi II fevrier 2016aux Celestins grandesalle en collaborationavec le TNFDe l7a35€www celestins lyonorg

RobertoZuceoteBernard-Marie KoltesMise en scene deRichard BrunelCrèation Du jeudi 12au jeudi 19 novembre a20 h a la Comédie deValence De 16 a 24 €0475784170wwwcomediedevalence com

RobertoZuccoet Le Retour au desertde Bernard-Marie Koltes

Arnau

DEUX CREATIONS dans les^ deux lieux de la règion les

mieux habites par le theâ-tre contemporain Apres avoir to usdeux accueilli Patrice Chereau, lesduecteurs respectifs des Comédiede Valence et Comédie de Saint-Etienne se lancent de concert a l'as-saut des fantômes, nombreux, deBernard Marie Koltes, un des dermers mythes du théâtre français.

D'abord avec la figure du tueur enserie ennemi public n°l RobertoZucco La piece de Koltes n'est paspour autant réductible a une fictiondocumentée Pour le metteur enscène, le personnage eponymen'est iii un monstre m un heros. Lapièce ne cherche pas a expliquer,mais suit simplement la trajectoireextraordinaire de ce personnage« qui déraille », au fil de ses rencon

Tartuffe, trois fois mis en pièce !ON CONNAÎT TARTUFFE com-

^ me I histoire d un tauxdévot qui profite de la

bigoterie fanatique d un chef defamille bourgeois pour vivre à sescrochets Beaucoup joucc, cettepiece a souvent ctc interprétéedans sa dimension moralisatriceMaîs cette conception paraîtaujourd'hui dépassée Dans lestrois productions qu'il nous seradonné de voir cette annee a Lyon,aucune ne semble faire de lamorale religieuse l'enjeu principalde la pièce. Bien au contraire, auThéâtre de la Croix-Rousse, BenoîtLambert veut faire de Tartuffe un« voyou sympathique » Avec sa seenographie moderne et élégante(aucune rcfcrcnce au XYII11, èostume pour les hommes et robespour les femmes), le metteur enscene insiste sur l'arnaque Pourqu'on y croie, il a choisi de faireincarner cette famille qui se trans-forme en champ de bataille pal unetroupe. La dimension sociale prendle pas sur la réflexion religieuse,illustrant I opposition perpétuelleentre les classes et les générations

Dans son Tartuffe d'après Tartuffed'après Tartuffe d'après Molière(sic), Guillaume Bailhart (au TNGen novembre) se détache lui aussidu contexte politico religieux de lapiece, ct supprime carrémentl'acte y pour finir sur Ic triomphede Tartuffe dans un seul en scèneatypique et gonfle (lire notre por-trait p 10) II s'agit la d'un retourau projet initial de Molière qui n'arajouté le fameux deus ex machinamoralisateur de l'acte final quepour evitei la censure Comédienpassionnant, déjà auteur du savou-reux Les Chevaliers, l'artiste trouvecette fois dans le cadre rigide del'alexandrin un espace de libertéincroyable Quant a la création deCharhc Blake au Radiant, on en saitencore peu de chose l'affiche sem-ble convoquer l'univers du westernspaghetti, situant la piece dans I Ita-lie du Sud tandis que la plaquettequi classe la pièce « immanqua-ble ' » insiste sur l'histoire de clanfamilial elles mécanismes de l'es-croquerie. Wait andree. SiTartuffeest toujours « wanted », il n'estjamais fmi . « A B

Tartuffe d'aprèsTartuffe d'aprèsTartuffe A lyresMolière seul en scenede Guillaume BailliartDu mardi 3 au mardi10 novembre au TNGLes Ateliers 5 rue duPetit David Lyon 2'Des 14 ans dans lecadre du festivalMicro MondesTarifs a déterminerwww Ing lyonfrPu is du mercredi 9 auvendredi II decembreau theatre La Mouche aSaint GemsLavala19 h 30 (ven 20 h 30)De9a l6€www la mouche fr

Tartuffe ou l'imposteurde Molière mise enscene Benoit LambertDu mardi I" au samedi12 mars 2016 a 20 h auTheatre de la Croix Rousse(sam 19 h 30 dim16h) De20a26Swww croix rousse com

Tartuffe ou l'imposteurde Molière mise enscene Charhe BlakeCrèationMardi 26 janvier 2016a 20h30au RadiantBellevueaCaluireD e 2 1 a 2 5 €www radiant bellevuefr

tres, comme avec une improbablegamme Pour passer du métro àune cuisine, ou a un jardin publicRichard Brunel a imagine unespace mystérieusement mouvantLe metteur en scène peut alois seconcentrer sur l'aspect mystiquedu personnage, comme une méta-phore de la violence du monde, etnous entraîne avec lui dans sacourse folle contre ou vers la mort..Avec un casting de choix, Pic Marmai dans le rôle-titre, et des come-diens aussi passionnants queSamira Sedira ou Thibault Vmçonen seconds rôles Moins souventmontee, plus directement politiqueen apparence, Le Retour au deser ts'inspire de l'Histoire ûanco-algé-rienne, maîs sui le ton de la comé-die cette lois, pour ceux qui voudraitcantonner Koltes a un théâtre peti-tement intellectuel. Une redécouverte signée Arnaud Meunier, mettant enfin en scene cc qui n'estsouvent que Ic vain mot dc « divcrsite » au theâtre, avec la crème dela crème des comédiens DidierBezace, Catherine I Iiegel et IsabelleSadoyan au milieu d'un casting plé-thorique La Comédie de Saint -Étienne reste le plus beau chantierouvert du théâtre coiitempoiain. •

LA TRIBUNE / LE PROGRÈS 02/10/2015

La rentrée théâtrale de la Comédie de Saint-Étienne se fait avec la création de son directeur, Arnaud Meunier. « Le Retour au Désert » est un très beau texte signé par un de nos meilleurs auteurs contemporains, Bernard-Marie Koltès. En bonus, Catherine Hiegel et Didier Bezace s'y donnent la réplique.

Début des années 60 dans l’est de la France, Mathilde revient d’Algérie avec ses deux enfants. Après 15 ans d’absence, elle retrouve son frère Adrien dans la maison familiale… Le grand auteur dramatique Bernard-Marie Koltès a écrit cette histoire de famille, de fratrie qui se déchire, Le Retour au désert, en pensant à Jacqueline Maillan pour le rôle de Mathilde. En 1988, elle jouera aux côtés de Michel Piccoli dans la mise en scène de Patrice Chéreau. Un drôle de couple a priori, à moins que le dramaturge n’ait voulu évoquer un thème dramatique avec pour arme l’humour ? Jacqueline Maillan, comé-dienne de boulevard, avait la profondeur d’une tragédienne et trouvait en Piccoli un fabuleux partenaire. Arnaud Meunier a confié les deux rôles à des grands noms du théâtre : Catherine Hiegel et Didier Bezace. Le binôme interroge moins mais est aussi intéressant à bien des égards. Catherine Hiegel, au caractère bien trempé, est une comédienne « sérieuse », un monstre sacré des planches, pensionnaire de la Comédie française depuis presque 40 ans, et qui pourtant n’hésite pas à jouer dans des comédies type Gazon maudit. Quant à Didier Bezace, il dégage une forme de douceur mais on pressent qu’il peut mordre, il est l’un des créateurs du Théâtre de l’Aquarium et a été le directeur du Théâtre de la Commune d’Au-bervilliers pendant de nombreuses années, il sera à jamais le Lulu de L.627 de Tavernier. Ces deux acteurs justifient déjà d’aller voir la mise en scène d’Arnaud Meunier, la beauté de la langue de Koltès constitue une deuxième raison. Nous avons assisté à une répétition avec Mathilde/Catherine Hiegel qui présage un bon crû, on a hâte de voir l’intégralité.

Florence Barnola

L’ESSOR DE LA LOIRE 26/09/2015

L’ESSOR DE LA LOIRE SEPT. 2015

POLYDate : OCT 15Pays : France

Périodicité : Mensuel Page de l'article : p.26-27Journaliste : Dorothée Lachmann

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passé (re)composéEn s'emparant du Retour au désert, Arnaud Meunier nous place faceà l'urgence d'affronter les fantômes du passé colonial de la France.Sur fond de Guerre d'Algérie, la langue prodigieuse de Koltès estportée par deux monstres sacrés, Catherine Hiegel et Didier Bezace.

Par Dorothée LachmannPhotos de répétition dc Sonia Barcct

À Mulhouse, à I .i I itature,^ endredi 16 et samedi 17octobre038936 28 28www .lafilature.org

A Thionville, au theatre,mercredi 18 et jeudi 19novembre038282 1492www .nest-theatre.fi-

«Lia guerre d'Algérie, c'est la pous-sière qu'on cache sous le tapis. Plusde cinquante ans après, on n'arrive

toujours pas à faire la lumière sur ce quis'est vraiment passé. La France ne fait passon travail de mémoire. » Arnaud Meunier,directeur de la Comédie de Saint-Etienne, esthanté depuis longtemps par cette « mémoirepleine de ronces. Parce que je sens intime-ment qu'une bonne partie de notre histoirecollective s'est nouée là-bas. Que notre rela-tion à l'autre, aux étrangers, à l'immigration,reste liée à ce passé colonial sous silence. »

De Metz à OranEn 2002, année de l'Algérie en France, il parttravailler à Oran et décide de jumeler sa com-

pagnie avec celle de Kheireddine Lardjam.Dès lors, il n'a de cesse dc trouver la piècequi raconterait cette trajectoire communeaux deux rives de la Méditerranée. « C'estune histoire d'amour impossible, mais unehistoire d'amour quand même », assure-t-il.En relisant Le Retour au désert, l'évidencesurgit. Cette pièce, Bernard-Marie Koltès lafait remonter à ses souvenirs d'enfance, àMetz, ville de militaires qui connut les pre-mières exactions contre les Algériens dansl'Hexagone. En 1988, lors de sa création, il enracontait la genèse. « En province, tout cela sepassait quand même d'une manière étrange :l'Algérie semblait ne pas exister et pourtantles cafés explosaient et on jetait les Arabesdans les fleuves. Il y avait cette violence-là,

POLYDate : OCT 15Pays : France

Périodicité : Mensuel Page de l'article : p.26-27Journaliste : Dorothée Lachmann

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à laquelle un enfant est sensible et à laquelleU ne comprend rien. Entre douze et treizeans, les impressions sont décisives, je croisque c'est là que tout se décide. Tout. Moi, évi-demment, en ce qui me concerne c'est proba-blement cela qui m'a amené à m'intéresserdavantage aux étrangers qu'aux Français.J'ai très vite compris que c'étaient eux le sangneuf de la France, que si la France vivait surle seul sang des Français, cela deviendrait uncauchemar, quelque chose comme la Suisse.La stérilité totale sur le plan artistique et surtous les plans. » Écrire sur les non-dits, ceuxqui empoisonnent. Nous sommes au débutdes années 1960, dans une ville de province.Après quinze ans passés en Algérie, Mathildeest de retour avec ses enfants Edouard etFatima dans la maison familiale, où résideson frère Adrien, un notable autoritaire quil'accuse de fuir la guerre et de revendiquerson héritage. D'un caractère sans compromis,elle fera rapidement voler en éclats les faux-semblants d'ordre et de paix de cette petitecommunauté bourgeoise, tandis que la vio-lence, les insultes et la haine déferlent sur elle.

Monstres sacrés« Koltès détestait la médiocrité, la mesqui-nerie. Toute son oeuvre relève de l'intime, dela révolte, de la rage », souligne le metteuren scène. Mais au-delà du propos, Le Retourau désert naît aussi du désir de l'auteurd'offrir un rôle à une actrice peu coutumièredu théâtre public et qu'il admire passionné-ment : Jacqueline Maillan. Ce sera donc unecomédie, écrite pour elle. Noire, grinçante,ironique. Dans ce terrible affrontement entrele frère et la sœur, Michel Piccoli lui donnela réplique, sous la direction de Patrice Ché-reau. Construite sur ce duo de personnagesextrêmement forts, la pièce exige d'être portéepar des monstres sacrés, « troubles et inquié-tants ». En choisissant Catherine Hiegel, dontla prodigieuse carrière s'est ancrée pendantquatre décennies à la Comédie-Française,et Didier Bezace, qui dirigea longtemps leThéâtre de la Commune daubervilliers touten poursuivant une brillante carrière au ci-néma, Arnaud Meunier réunit pour la pre-mière fois sur scène deux acteurs puissantsqui vont se déchirer. « Ce duo frère / sœurest en quelque sorte la métaphore de cetteguerre perpétuelle entre la France et l'Algé-rie », éclaire Arnaud Meunier. Autour d'euxgravitent une foule de personnages, famille,notables, domestique algérien, tenancier decafé arabe, parachutiste noir... « Koltès a

vraiment été un précurseur pour écrire desrôles destinés à des comédiens qui n'étaientpas forcément blancs. » II y a les êtres dechair et de sang, et puis les fantômes. Commecelui de l'épouse d'Adrien. Comme tout cequ'on veut cacher et qui finit fatalement parremonter à la surface. Arnaud Meunier aainsi choisi d'explorer la dimension fantas-tique et onirique de ce texte à la fois drôle etinquiétant, hanté par des revenants qui sontnos parts d'ombre. Et par des questions quirésonnent si fort, comme celles de Mathilde :« En Algérie, je suis une étrangère et je rêvede la France ; en France, je suis encore plusétrangère et je rêve d'Alger. Est-ce que lapatrie, c'est l'endroit où l'on n'est pas ? J'enai marre de ne pas être à ma place et de nepas savoir où est ma place. Mais les patriesn'existent pas, nulle part, non. » •

Date : 14 OCT 15

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THÉÂTRE

« Le retour au désertpar Arnaud Meunier

Le retour au désert, de Bernard-Marie Koltès, mise en scène parArnaud Meunier, est présentedans la grande salle de la Filatu-re vendredi 16 et samedi 17 oc-tobre.

Pour cette création, 13 comé-diens sont réunis autour du duocentral que forment CatherineHiegel et Didier Bezace. Unecomédie féroce qui lève le voilesur les secrets enfouis d'unebourgeoisie sur le déclin et surla mémoire interdite de notrehistoire collective.

Dans la pièce de Bernard-MarieKoltès, ily a du vraisemblable etdu surnaturel, du rire et deslarmes, un frère et une sœur quis'aiment et se haïssent. Mathil-de traverse la Méditerranée. El-le rentre chez elle, dans lamaison où vit son frère Adrien,un notable. Mathilde vient ré-clamer son dû, sa part de l'héri-tage. Avec elle, c'est la guerrequi rampe jusqu'à ce coin deprovince et va s'y faire enten-dre. Nous sommes dans les an-nées GO, l'Algérie règle soncompte à la France coloniale.Arnaud Meunier signe cette re-

présentation avec un sens aigudu contexte politique actuel. Aumoment où les extrêmes sur-fent sur les pulsions enfouies, iln'est pas inutile d'aller voir deplus près de quoi sont faites nosparts d'ombre.

Trois rendez-vous en entrée li-bre sont proposés autour duspectacle.

Intro-minute vendredi 16 octo-bre à 19 h 30.

Lecture, lever de rideau samedi17 octobre à 18 h 30.

(Psych) analyse d'une œuvre sa-medi 17 octobre à 21 h 15. Ren-contre-débat avec les artistes etle psychanalyste Jean-Pierre Ad-jedj à l'issue du spectacle.

Y ALLER Vendredi 16 octobre à20 h et samedi 17 octobre à19 h, à la Filature, 20 allée Na-than-Katz à Mulhouse. Rensei-gnements et réservations au03.89.36.28.28/www.lafilatu-re.org. Tarif plein 27 €/réduit de6 € à 22 € la place, création le1er octobre à la Comédie deSaint-Etienne.

Date : 10 OCT 15

Pays : FrancePériodicité : QuotidienOJD : 163692

Journaliste : Veneranda Paladino

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MULHOUSE à La Filature

Le retour dè KoltèsCréé cesjoursderniersàlaComédiedeSaint-Étienneparson directeur Arnaud Meunier,

Leretour au désert de Bernard-Marie Koltèspuiseàl'énergie d'une comédie féroce,incarnée par le duo inattendu de Catherine Hiegel et DidierBezace.Ànepas rater.

En racontant la genèse de sapièce, Bernard-Marie Kol-tès évoquait ses souvenirsd'enfance, à Metz, ville de

militaires. « On peut éprouver desémotions à partir des événementsqui se déroulent au dehors. En pro-vince, tout cela se passait quandmême d'une manière étrange :l'Algérie semblait ne pas exister etpourtant les cafés explosaient eton jetait les Arabes dans les fleu-ves. Il y avait cette violence-là, àlaquelle un enfant est sensible et àlaquelle il ne comprend rien ».À partir de ces incompréhensions,des secrets, des non-dits, Koltèsécritle retour au désert(éd. Minuit,1988), y convoque notre histoirecoloniale, ses zones d'ombre. Le re-tour au désert s'origine aussi d'uneadmiration pour une actrice peuhabituelle du théâtre public : Jac-queline Maillan, la reine du boule-vard français.Pour elle, Koltès imagine le per-sonnage de Mathilde Serpenoisequi rentre d'Algérie avec enfants etbagages pour retrouver la maisonfamiliale. L'action se situe dansune ville de province à l'Est de laFrance, au début des années 60.Violemment accueillie par Adrienson frère qui l'accuse de fuir laguerre et de revendiquer sa partd'héritage, Mathilde fait voler en

Le retour au désert, avec Didier Bezace et à l'extrémité du plateau,Catherine Hiegel. (PHOTO SONIA BARCET)

éclats les conventions bourgeoi-ses, les visions étriquées et racis-tes. De la même manière, l'auteurcasse les codes d'un théâtre rétif àla comédie, essentiellement blancet bourgeois.Pour donner la réplique à Mathil-de, Patrice Chéreau qui met inau-guralement en scène le texte authéâtre du Rond-Point, à Paris, le28 septembre 1988, confie le rôledu frère à Michel Piccoli. En s'em-parant de retour au désert, le direc-teur de la Comédie de Saint-Étienne/Centre dramatiquenational, Arnaud Meunier rêve

d'un nouveau choc de monstressacrés. Il choisit de mettre en pré-sence l'exceptionnelle CatherineHiegel et l'immense Didier Beza-ce. « À partir d'eux et avec eux, jeveux imaginer un spectacle dètroupe, où l'on retrouve mes com-plices (dont Kheireddine Lardjamqui a présente à La Filature, en jan-vier demier, Page en construction,écrit par Fabrice Melquiot autourde l'histoire franco-algérienne,ndlr) précise dans sa note d'inten-tion le metteur en scène, line co-médie féroce comme un geste salu-taire, lin sursaut par le plateau ».

Qui s'impose dans le contexte poli-tique actuel d'exacerbation des na-tionalismes et des populismes ;dans ces temps troubles où la hai-ne de l'autre, la violence, la peur etle racisme déferlent.C'est du côté du fantastique qu'Ar-naud Meunier tire la pièce de Kol-tès. Y réifier les fantômes qui han-tent l'histoire franco-algérienne, etfait entendre l'humour noir agis-sant la langue dialoguée, rythméeet musicale de Koltès.Entre intérieurs et extérieurs, lascénographie repose sur deux élé-ments : un jardin fantastique,mystérieux sur lequel est poséeune construction architecturale vi-trée, modulable, parfois occultéepar un rideau qui sous l'effet de lavidéo, du son, des lumières et duvent s'anime. Et balise Le retour audésert, ovni théâtral qui d'un sujetdouloureux, grave, intime em-prunte les chemins de la libertéouverts par la comédie. •

VENERANDAPALADINO

> Le 16 octobre à 20h, le 17 à 19h,à La Filature. Durée : 2 h environ.Intro-minutele 16 à 19h30,lecture, lever de rideau le 17 à18h30,suivià21hl5dela(psuch)analyse de l'œuvre.Plus d'infos : lafilature.org ;0389362828.