Milindapañha: les questions de Milinda (II)

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    Milindapaha

    LES QUESTIONS DE MILINDALivre I

    Les antcdents

    Pubbayoga

    Traduit du pali par Louis FINOT (1864 -1935)Directeur de l'cole franaise d'Extrme

    Orient et professeur au Collge de France

    http://www.lesquestionsdemilinda.org/

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    Inexistence de lindividu.

    Le roi s'approcha de Ngasena et, lui ayantadress les compliments ordinaires decivilit, il s'assit son ct. Ngasena luirendit ses politesses, de sorte qu'il luiinspira des dispositions favorables. Alors leroi commena l'entretien :

    Comment vous appelle-t-on, Vnrable ?Quel est votre nom ? On m'appelle Ngasena : c'est ainsi que mesconfrres me dsignent. Mais, roi, bien queles parents donnent leurs enfants un nom telque Ngasena, Srasena, Vrasena, Shasena,c'est l seulement une appellation, une notionvulgaire, une expression courante, un simplenom : il n'y a pas l-dessous d'individu. coutez, vous tous, les cinq cents Yonakaset les quatre-vingt mille moines ! VoiciNgasena qui dit : Il n'y a pas l-dessousd'individu ! Est-il possible de l'admettre ?

    Mais, vnrable Ngasena, s'il n'y a pasd'individu, qui donc vous donne des robes,des aliments, des logements, des remdes,des ustensiles, et qui en use ? Qui pratique lavertu ? Qui se livre la mditation ? Quiralise le Chemin, le Fruit, le Nibbna (46) ?Qui se livre au meurtre, au vol, l'impuret,

    au mensonge, l'alcool ? Qui commet lescinq pchs (47) ? Il n'y a donc ni bien nimal, pas d'auteur ou d'instigateur des actes

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    salutaires et pernicieux, pas de fruit, pas de

    maturation des bonnes et des mauvaisesactions ! Si, Ngasena, celui qui vous tuen'existe pas, il n'y a donc pas de meurtre ! Iln'y a rien chez vous : ni matres, niprcepteurs, ni ordination ! Quand tu dis : Mes confrres m'appellent Ngasena ,quel est ce Ngasena dont tu parles ? Est-ce

    les cheveux qui sont Ngasena ? Non, mahrja. Est-ce les poils, les ongles, les dents, lapeau, la chair, les tendons, les os, la moelle,les reins, le cur, le foie, le derme, la rate,

    les poumons, l'intestin, le msentre, lesaliments non digrs, les rsidus de ladigestion, la bile, le phlegme, le pus, le sang,la sueur, la graisse, les larmes, l'huile de lapeau, la salive, le mucus nasal, la synovie,l'urine, le cerveau (48) ? Non. mahrja. Ou bien, est-ce la forme, la sensation, la

    perception, les formations, la conscience(49) ? Non, mahrja. Est-ce donc la runion de ces cinqlments : forme, sensation, perception,formations, conscience ? Non, mahrja.

    Est-ce une chose distincte des cinqlments ? Non, mahrja.

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    J'ai beau t'interroger : je ne vois pas de

    Ngasena. Qu'est-ce que Ngasena ? Un motet rien de plus. Ta parole, Vnrable, estfausse et mensongre : il n'y a pas deNgasena ! Tu es, roi, dlicat comme un prince, trsdlicat. S'il t'arrive de marcher, midi, sur laterre chaude, sur le sable brlant, foulant

    aux pieds les asprits du gravier, destessons et du sable, tes pieds souffrent, toncorps est las, ton me puise, et laconscience de ton corps s'accompagne demalaise... Es-tu venu pied ou au moyend'un vhicule ? Je ne vais pas pied, Vnrable, je suisvenu en char. Puisque tu es venu en char, mahrja,dfinis-moi ce char. Est-ce le timon qui est lechar ? Non, Vnrable. Est-ce l'essieu, les roues, la caisse de la

    voiture, le support du dais, le joug, les rnes,l'aiguillon ? Non, Vnrable. Est-ce donc la runion de toutes ceschoses. Non, Vnrable. Est-ce une chose distincte de tout cela ?

    Non, vnrable. J'ai beau t'interroger : je ne vois pas dechar. Qu'est-ce qu'un char ? Un mot et rien

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    de plus. Ta parole, mahrja, est fausse et

    mensongre : il n'y a pas de char. Tu es lepremier parmi les rois du Jambudpa : de quidonc as-tu peur pour mentir ainsi ? coutez,vous tous, les cinq cents Yonakas et lesquatre-vingt mille moines ! Le roi Milindaque voici a dit : Je suis venu en char. Or,invit dfinir le char, il ne peut prouver

    l'existence du char. Peut-on admettre cela ?

    A ces mots les cinq cents Yonakasacclamrent Ngasena et dirent au roiMilinda : Maintenant, mahrja, rponds situ le peux ! Le roi reprit la parole. Je ne mens pas, Vnrable : c'est cause dutimon, etc., que se forme l'appellation, lanotion commune, l'expression courante, lenom de char . Trs bien, mahrja ! Tu sais ce qu'est lechar. De mme c'est cause des cheveux, etc.,que se forme l'appellation, la notion

    commune, l'expression courante le nom de Ngasena : mais en ralit il n'y a pas ld'individu. La religieuse Vajir l'a dit enprsence du Bouddha (50) :De mme que la combinaison des pices donne

    lieu au mot char ,ainsi l'existence des

    Khandhas donne lieu la convention

    d' tre vivant . Merveilleux, Ngasena ! Admirable,Ngasena ! Tu as rpondu tous les artifices

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    de ma question. Si le Bouddha tait ici, il

    t'applaudirait. Trs bien, trs bien, Ngasena !

    Le nombre

    Combien d'annes de profession as-tu,vnrable Ngasena ? Sept ans.

    Qu'est-ce que sept ? Est-ce toi qui es septou le nombre qui est sept ?En ce moment, l'ombre du roi, orne detoutes les parures, en grand costume, sevoyait sur le sol et sur une jarre d'eau.Ngasena lui dit : Voici ton ombre, mahrja, qui se voit surle sol, sur cette jarre d'eau. Est-ce toi qui esle roi, ou l'ombre qui est le roi ? C'est moi qui suis le roi, non l'ombre :l'ombre se produit cause de moi. De mme, mahrja, c'est le nombre desannes qui est sept, ce n'est pas moi, mais

    c'est cause de moi que sept se produit,tout comme l'ombre. Merveilleux, Ngasena ! Admirable,Ngasena !

    Divers modes de discussion.

    Voudras-tu, Vnrable, discuter avecmoi ?

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    Si tu discutes la manire des sages, oui ;

    si tu discutes la manire des rois, non. Comment discutent les sages ? Dans la discussion, on est pris, on sedgage, on inflige une critique et on la subit,chacun a le dessus tour tour : les sages nes'en irritent pas. Telle est leur manire dediscuter.

    Et quelle est celle des rois ? Les rois professent une opinion : siquelqu'un la contredit, ils le font btonner.Voil comme discutent les rois. Je discuterai en sage, non en roi. QueVotre Rvrence discute avec moi en toutelibert, comme avec un religieux, un novice,un fidle ou un serviteur du couvent. N'ayezaucune crainte. C'est bien, mahrja.

    Escarmouche

    Vnrable Ngasena, je vous interrogerai. Interroge, rnahrja. Je vous ai dj interrog. Et je t'ai dj rpondu.

    Que m'avez-vous rpondu ? Que m'as-tu demand ?

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    Prparatifs de lentrevue.

    Alors le roi Milinda se dit : Ce religieux estsavant et capable de discuter avec moi. Lespoints sur lesquels je dsire l'interroger sontnombreux : avant que j'aie achev, le soleilse couchera. Il vaudrait mieux que cetentretien et lieu dans mon palais. Il dit

    donc Devamantiya : Informe SaRvrence que la discussion aura lieu dansmon palais. Cela dit, le roi Milinda se leva,prit cong et, montant cheval, s'loigna enrptant comme une leon : Ngasena,Ngasena ! . Vnrable , dit Devamantiya Ngasena, le roi dit que la discussionaura lieu dans son palais. Bien , rpondit le thera.Le lendemain matin, Devamantiya,Anantakya, Mankura, Sabbadinna seprsentrent devant le roi et luidemandrent : Maharja, le vnrable

    Ngasena doit-il venir ? Oui, qu'il vienne. Avec combien de religieux ? Avec autant de religieux qu'il voudra. Il pourrait , dit Sabbadinna, venir avecdix religieux. Le roi rpta : Qu'il vienne avec autant de religieux qu'il

    voudra. Une seconde fois Sabbadinna fit lamme proposition et reut la mme rponse.Et comme il insistait encore, le roi rpliqua :

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    Tous les prparatifs sont faits. Je dis : Qu'il

    vienne avec autant de religieux qu'ilvoudra ! Telle est ma volont, maisSabbadinna en a une autre ! Ne sommes-nous pas en tat de donner manger desmoines ? Cela dit, Sabbadinna se tint coi.

    Alors Devamantiya, Anantakya et Mankura

    allrent trouver Ngasena et lui dirent : Leroi vous invite venir avec autant dereligieux qu'il vous plaira. Et Ngasenas'tant vtu, ayant pris son bol et sonmanteau, fit son entre Sgal avec quatre-vingt mille religieux. Anantakya, tout enmarchant son ct, lui dit : Vnrable, lorsque je dis : Ngasena ,qu'est-ce qui est Ngasena ? Et que penses-tu que ce soit ? Le souffle intrieur, l'me ( jva) qui entreet sort, voil, je pense, ce qui est Ngasena. En ce cas, si le souffle une fois sorti ne

    rentrait pas, ou une fois rentr ne sortaitplus, l'homme vivrait-il ? Non, Vnrable. Ces sonneurs de conque qui soufflentdans les conques, ces joueurs de flte quisoufflent dans les fltes, ces sonneurs detrompe qui soufflent dans les trompes, est-

    ce que leur souffle rentre ? Non, Vnrable. Alors, pourquoi ne meurent-ils pas ?

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    Je ne suis pas capable de discuter avec un

    logicien tel que vous : dites-moi, Vnrable,ce qu'il en est. Ce n'est point l'me, ce sont desproprits du corps appeles aspiration etexpiration.Et le thera lui tint un discours surl'Abhidhamma, et Anantakya se dclara

    fidle laque.

    But de la vie religieuse.

    Ngasena entra dans le palais du roi ets'assit la place qui lui fut dsigne. Le roilui offrit de sa main, ainsi qu' sa suite, unrepas excellent. Il gratifia chaque religieuxd'une paire de vtements et Ngasena lui-mme de trois robes. Puis il lui dit : Vnrable Ngasena, veuillez rester iciavec dix religieux ; les autres peuvent seretirer. Le repas fini, quand Ngasena eut

    lav son bol et ses mains, il vint s'asseoirprs de lui sur un sige bas et lui dit : Vnrable Ngasena, de quoi parlerons-nous ? Nous sommes en qute d'un but. Parlonsdu but. Eh bien ! Quel est le but de votre sortie du

    monde ? Quelle est pour vous la findernire ?

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    Que la douleur prsente cesse, qu'aucune

    autre ne naisse : voil le but de notre sortiedu monde. Le Nibbna absolu : voil notrefin dernire. Est-ce que tous ceux qui sortent dumonde le font dans ce but ? Non. Il en est qui en sortent dans ce but,d'autres par crainte du roi ou des voleurs,

    d'autres cause de leurs dettes, d'autresenfin pour avoir un moyen d'existence. Maisceux qui en sortent correctement le fontdans le but que j'ai dit. Et vous-mme, Vnrable, est-ce dans cebut que vous avez quitt le monde ? J'tais encore un enfant cette poque et jen'avais pas clairement conscience de mon but.Mais je me disais : Ces asctes bouddhistessont savants : ils m'instruiront. Maintenant,instruit par eux, je sais et je vois quel est le butde la sortie du monde. Tu es habile, Ngasena (51).

    Cause des renaissances.

    Ngasena, se peut-il qu'un homme mortne renaisse pas ? L'un renat, l'autre ne renat pas. Celui quiest affect de passions renat ; celui qui en

    est dpouill ne renat pas (52). Et toi, Vnrable, renatras-tu ?

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    Si je conserve de l'attachement, je

    renatrai ; si j'en suis dbarrass, je nerenatrai pas.

    Moyens de dlivrance.

    Est-ce par l'attention concentre qu'onchappe la renaissance ?

    Par l'attention concentre, par la sagesseet par les autres tats d'me salutaires. Mais l'attention concentre n'est-elle pasla mme chose que la sagesse ? Non, ce sont deux choses diffrentes :l'attention concentre se rencontre chez leschvres, les moutons, les bufs, les buffles, les

    chameaux, les nes, jamais la sagesse.

    L'attention concentre et la sagesse.

    Quelle est la caractristique de l'attention

    concentre et celle de la sagesse ? L'une se dfinit par la comprhension,l'autre par l'excision. Comment cela ? Donne-moi unecomparaison. Tu connais les moissonneurs, mahrja ? Je les connais.

    Comment moissonnent-ils l'orge ?

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    De la main gauche ils saisissent un

    faisceau d'orge, de la main droite, armed'une faucille, ils le coupent. De mme, mahrja, l'ascte par l'attentionconcentre rassemble son esprit, et par lasagesse tranche les passions. C'est pourquoil'une est caractrise par la comprhension,l'autre par l'excision.

    La vertu.

    Tu as dit, Ngasena : et par les autrestats d'me salutaires . Quels sont-ils ? La vertu, la foi, l'nergie, la rflexion, lerecueillement. Quelle est la caractristique de la vertu ? La vertu est dfinie comme la base. Lavertu est la base de tous les tats d'mesalutaires : Facults, Forces, lments del'Intuition suprme, Voies, Mditations,Efforts, Conditions du pouvoir magique,

    Extases, mancipations, Recueillements,Conqutes spirituelles. Fonds sur la vertu,les tats d'me salutaires ne prissent pas. Donne-moi une comparaison. De mme que toutes les espces deplantes croissent, poussent et sedveloppent en s'appuyant sur la terre, en se

    basant sur la terre, de mme, c'est ens'appuyant sur la vertu, en se basant sur lavertu que l'ascte dveloppe en lui-mme

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    les cinq facults : foi, nergie, rflexion,

    recueillement, sagesse. Donne-moi une autre comparaison. De mme que tous les travaux de forces'excutent en prenant la terre pour pointd'appui, pour base, de mme c'est ens'appuyant sur la vertu, en se basant sur lavertu, que l'ascte cultive en lui-mme les

    cinq facults. Donne-moi une autre comparaison. De mme qu'un constructeur de ville,voulant crer une ville, commence par ennettoyer l'emplacement, enlve les soucheset les broussailles, aplanit le terrain, et passeensuite au trac des rues, des places et descarrefours, ainsi c'est en s'appuyant sur lavertu, en se basant sur la vertu, que l'asctecultive en lui-mme les cinq facults. Donne-moi une autre comparaison. De mme qu'un acrobate, voulant exhiberson art, fait d'abord dfoncer la terre, enlever

    les graviers et les tessons, aplanir le sol, etqu'alors seulement il exhibe son art sur un soldoux, ainsi c'est en s'appuyant sur la vertu, ense basant sur la vertu, que l'ascte cultive enlui-mme les cinq facults.

    Le Bienheureux, roi, a dit :

    C'est en s'appuyant sur la vertu que l'hommesage cultivant la pense et la sagesse, que le

    moine fervent et prudent

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    peut dbroussailler cette brousse [de la vie]

    (53). Voici la base, comme la terre est celle destres vivants ; voici la racine de tout progrs

    dans le bien ; voici le point de dpart de tout

    l'enseignement du Bouddha :

    c'est le Code des rgles de l'excellent

    Ptimokkha (54).

    La foi

    Quelle est, vnrable Ngasena, lacaractristique de la foi ? La purification et l'lan. Comment a-t-elle pour caractristique lapurification ? La foi qui s'lve limine les obstacles,l'esprit libr des obstacles devient limpideet pur. Voil comment la foi a pourcaractristique la purification. Donne-moi une comparaison. Imagine un grand roi en marche avec son

    arme au complet, qui traverse une petiterivire. Au passage des lphants, deschevaux, des chars, des fantassins, l'eauagite, battue, devient trouble et bourbeuse.La rivire franchie, le roi commande sesserviteurs de lui apporter de l'eau boire.Suppose qu'ils aient une pierre purifier

    l'eau et qu'ils la jettent dans l'eau : aussittles coquillages et les herbes aquatiques sontcarts, la bourbe se dpose, l'eau devient

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    limpide et pure et les serviteurs peuvent

    l'apporter au roi en disant : Que le roiboive ! L'eau, c'est l'esprit ; les serviteurs,c'est l'ascte ; les coquillages, les herbes, labourbe, ce sont les passions ; la pierre purifier l'eau, c'est la foi : par elle lesobstacles sont limins et l'esprit devientlimpide et pur.

    Voil comment la foi a pour caractristiquela purification. Et comment a-t-elle pour caractristiquel'lan ? En ce que l'ascte, voyant d'autres espritsdlivrs, s'lance pour conqurir l'tat desotpanna, de sakadgmi, d'angmi,d'arhat (55), fait effort pour obtenir ce qu'iln'a pas obtenu, atteindre ce qu'il n'a pasatteint, raliser ce qu'il n'a pas ralis : c'estpar l que la foi a pour caractristique l'lan. Donne-moi une comparaison. Suppose qu'une grande pluie tombe sur

    une montagne et que l'eau, suivant la pente,aprs avoir combl les creux, les crevasses,les plis de la montagne, se dverse dans unerivire et la fasse dborder sur ses deuxrives. Une foule de gens survient. Elle ignoresi l'eau est profonde ou non et se tientanxieuse sur le bord. Mais voici venir un

    homme, conscient de son pouvoir et de saforce : il serre troitement sa ceinture, sautedans l'eau et traverse ; ce que voyant, la

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    foule traverse son tour. De mme, l'ascte,

    voyant d'autres esprits dlivrs, s'lancepour conqurir les degrs successifs de lasaintet. Voil comment la foi a pourcaractristique l'lan.

    Le Bienheureux dit, dans le Samyuttanikya(1, 214) : Par la foi il traverse le courant, par

    la foi il traverse l'ocan ; par l'nergie ilfranchit la douleur, par la sagesse il est

    purifi.

    Lnergie.

    Ngasena, quelle est la caractristique del'nergie ? Le soutien. Soutenus par elle, les tatsd'me salutaires ne s'affaissent pas. Donne-moi une comparaison. Comme une maison qui menace ruine, sielle est taye par une seule pice de bois,

    ne tombe pas : ainsi l'nergie a pourcaractristique le soutien ; soutenus par elle,les tats d'me salutaires ne s'affaissent pas. Donne-moi une autre comparaison. Comme une petite arme, oblige dereculer devant une grande, si le roi envoie son secours des troupes de soutien, fait

    son tour reculer la grande arme : ainsil'nergie a pour caractristique le soutien.

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    Le Bienheureux a dit : O religieux, le disciple

    dou d'nergie limine ce qui est pernicieux,dveloppe ce qui est salutaire, limine ce quiest blmable, dveloppe ce qui estirrprochable et se garde pur.

    La rflexion.

    Ngasena, quelle est la caractristique dela rflexion ? Le dnombrement et l'admission. Comment a-t-elle pour caractristique lednombrement ? La rflexion dnombre les tats d'me quise produisent : salutaires ou pernicieux,blmables ou irrprochables, vils ouexcellents, noirs ou blancs, avec leurssubdivisions : voici, se dit-elle, les quatremditations, les quatre efforts, les quatrebases du pouvoir magique, les cinq facults,les cinq forces, les sept lments de la Bodhi,

    la noble Voie aux huit membres (56), voici laquitude, la clairvoyance, la science, ladlivrance (57). En consquence de cetexamen, l'ascte recherche les tats d'mequi sont rechercher, vite ceux qui sont viter, pratique ceux qui sont pratiquer,rejette ceux qui sont rejeter. C'est ainsi que

    la rflexion a pour caractristique lednombrement. Donne-moi une comparaison.

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    Comme le trsorier d'un roi lui remmore

    matin et soir sa grandeur en lui numrantses possessions : O roi, vous possdez tantd'lphants, tant de chevaux, tant de chars,tant de fantassins, tant d'or et de richesses :que Votre Majest se le rappelle ! , demme la rflexion dnombre les tatsd'me : voil comment elle a pour

    caractristique le dnombrement. Et comment a-t-elle pour caractristiquel'admission ? La rflexion examine les catgories destats d'me bons ou mauvais ; elle juge lesuns bons, les autres mauvais ; les uns utiles,les autres nuisibles. En consquence, l'ascterejette les mauvais et admet les bons. Voilcomment la rflexion a pour caractristiquel'admission. Donne-moi une comparaison. Comme le ministre d'un roi sait quelssont, par rapport au roi, les hommes bons ou

    mauvais, utiles ou nuisibles, rejette les unset admet les autres : ainsi la rflexion.Le Bienheureux a dit (S., V, 115) : Larflexion sert tous.

    Le recueillement

    Ngasena, quelle est la caractristique durecueillement ?

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    La suprmatie. Les tats d'me salutaires

    ont tous pour chef le recueillement ; lerecueillement est un sommet dont ils sont lebas, les pentes, les flancs. Donne-moi une comparaison. Dans une maison pinacle, tous leschevrons aboutissent au fate, sontinfrieurs au fate, descendent du fate ; le

    fate est dit leur chef. II en est de mme durecueillement l'gard des tats d'me. Donne-moi une autre comparaison. Quand un roi part en guerre avec unearme quatre corps, tous ses corpsd'arme : lphants, chevaux, chars,infanterie, l'ont pour chef, marchent sous sesordres. Il en est de mme du recueillement.Le Bienheureux a dit (S., III, 13) : O religieux,cultivez le recueillement : l'homme recueillivoit la ralit.

    La sagesse

    Ngasena, quelles sont lescaractristiques de la sagesse ? L'excision (j'en ai dj parl) etl'illumination (58) Comment a-t-elle pour caractristiquel'illumination ?

    La sagesse dissipe les tnbres del'ignorance, produit la clart de la science,fait briller la lumire de la connaissance,

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    rvle les vrits saintes ; par elle l'ascte

    acquiert une intelligence parfaite del'impermanence, de la douleur, del'impersonnalit. Donne-moi une comparaison. Si on porte un flambeau dans une maisonobscure, il dissipe les tnbres, produit laclart, fait briller la lumire, rvle les

    formes : il en est de mme de la sagesse.

    tats dme divers, rsultat unique

    Ngasena, ces tats d'me, qui sontdiffrents, produisent-ils un mme rsultat ? Oui : ils ont tous pour rsultat de dtruireles passions. Comment cela ? Donne-moi unecomparaison. De mme que des corps d'armediffrents : lphants, chevaux, chars,infanterie, concourent au mme rsultat : la

    dfaite de l'arme ennemie, de mme les tatsd'me diffrents concourent au mmersultat : la destruction des passions

    Le lien entre les renaissances

    Ngasena, celui qui renat est-il le mme

    ou un autre ? Ni le mme, ni un autre. Donne-moi une comparaison.

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    Lorsque tu tais enfant, mahrja, un

    tendre enfant, faible, couch sur le dos,tais-tu le mme qu'aujourd'hui o tu esgrand ? Non, Vnrable, j'tais autre. S'il en est ainsi, mahraja, tu n'as ni mre,ni pre, ni prcepteur ! Tu ne peux avoir tform aux arts, la vertu, la sagesse ! Il y a

    donc une mre nouvelle pour chaque nouveltat de l'embryon, une mre pour le petitenfant et une autre pour l'homme fait !Autre est donc celui qui s'instruit, autre celuiqui est instruit ; autre l'auteur d'un crime,autre celui qui on coupe les mains et lespieds ! Non, certes, Vnrable, qu'en dis-tu toi-mme ? C'est moi qui tais un enfant et qui suismaintenant un homme. L'tre humain sesdivers stades tire son unit de son corps. Donne-moi une comparaison.

    Si on allume un flambeau, peut-il brlertoute la nuit ? Assurment. La flamme de la dernire veille est-elle lamme que la flamme de la seconde, et celle-ci la mme que celle de la premire veille ? Non.

    Y a-t-il donc un flambeau diffrent chacune des trois veilles ?

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    Non. C'est le mme flambeau qui a brl

    toute la nuit. De mme, mahrja, l'enchanement desdhammas est continu : l'un se montre enmme temps que l'autre disparat ; il n'y aen quelque sorte entre eux ni prcdent, nisuivant. Par suite, ce n'est ni le mme, ni unautre qui recueille le dernier acte de

    conscience. Donne-moi une autre comparaison. Si on trait du lait, qui devient ensuite dulait caill, puis du beurre frais, puis dubeurre clarifi, est-on en droit de dire que lelait frais est le mme que le lait caill, que lebeurre frais, que le beurre clarifi ? Non, mais tous procdent du mme. Il en est de mme de l'enchanement desdhammas.

    LArhat sait quil ne renatra plus

    Ngasena, celui qui ne doit plus renatresait-il qu'il ne renatra plus ? Oui, il le sait. Comment le sait-il ? Par la disparition de la cause, de lacondition qui fait que l'on renat. Donne-moi une comparaison.

    Suppose un laboureur qui, aprs avoirlabour, sem et rempli son grenier, cesseensuite de labourer et de semer, mais mange

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    le grain qu'il a en rserve, ou le vend, ou en

    dispose selon les circonstances. Celaboureur sait-il que son grenier ne seremplira pas ? Il le sait. Comment le sait-il ? Par la disparition de la cause, del'occasion en vertu de laquelle le grenier se

    remplissait. De mme celui qui ne doit pas renatre saitqu'il ne renatra plus, parce que la cause,l'occasion de sa renaissance a disparu.

    Lintelligence, la sagesse et lerreur.

    Ngasena, celui qui possde l'intelligencepossde-t-il la sagesse ? Oui, mahrja. L'intelligence est-elle donc la mme choseque la sagesse ? Oui.

    Celui qui possde l'intelligence, lasagesse, peut-il errer ou non ? Il peut errer sur certains points ; surd'autres, non. Sur quels points peut-il errer ? Sur des sciences qu'il n'a pas tudies,sur une contre o il n'est pas all, sur le

    sens d'un terme qu'il n'a jamais entendu. Sur quels points ne peut-il pas errer ?

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    paysans ont-ils aprs cela l'ide de continuer

    la manoeuvre des jarres ? Certes non ! Arrire les jarres ! A quoibon les jarres ? Pareilles ces cinq jarres sont les cinqfacults : foi, nergie, rflexion,recueillement, sagesse. Pareil aux paysans,l'ascte. Pareilles au feu, les passions.

    Comme le feu est teint par les cinq jarresd'eau, ainsi les passions sont touffes par lasagesse et, une fois touffes, ne renaissentpas. Ainsi la sagesse, ayant jou son rle,disparat, mais les connaissances qu'elle aprocures subsistent. Donne-moi encore une comparaison. Suppose un mdecin qui prend cinqracines mdicinales, les pile ensemble et lesfait prendre son malade : le malade estguri. Est-ce que le mdecin aura la pensede lui administrer derechef ce remde ? Certainement non : quoi bon ?

    Pareilles aux cinq racines mdicinalessont les cinq facults susdites ; pareil aumdecin est l'ascte ; pareilles la maladiesont les passions ; pareil au malade,l'inconverti ; et de mme que les humeurspeccantes sont expulses par les cinqdrogues et qu'ainsi le malade se trouve

    guri, de mme les passions sont expulsespar les cinq facults et, une fois expulses,ne renaissent pas. Ainsi la sagesse, ayant

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    jou son rle, disparat ; mais les

    connaissances qu'elle a procuressubsistent. Donne-moi encore une comparaison. Suppose un combattant, un guerrier quientre dans la mle avec cinq flches pourvaincre l'arme ennemie et qui, ayant lancces cinq flches, voit cette arme en

    droute : aura-t-il la pense de continuer faire usage de ses flches ? Certainement non : quoi bon ? Pareilles aux cinq flches sont les cinqfacults ; pareil au guerrier, l'ascte ; pareilles l'arme ennemie, les passions ; et de mmeque par les cinq flches l'arme ennemie estrompue, ainsi les passions sont brises par lescinq facults et, une fois brises, ne renaissentplus. Ainsi la sagesse, ayant jou son rle,disparat ; mais les connaissances qu'elle aprocures subsistent.

    Sensations de lArhat

    Ngasena, celui qui ne doit pas renatreprouve-t-il des sensations douloureuses ? Il en est qu'il prouve, d'autres qu'iln'prouve pas. Lesquelles ?

    Il peut prouver des souffrancesphysiques ; des souffrances mentales, non. Pourquoi ?

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    Parce que la cause, l'occasion des

    souffrances physiques n'a pas disparu,tandis que celle des souffrances mentales adisparu. Le Bienheureux a dit : Il ne peutprouver qu'une sorte de sensationphysique, mais non la sensation mentale. S'il souffre, pourquoi n'achve-t-il pas son

    extinction par la mort ? Mahrja, l'Arhat n'a ni penchant niaversion. Les saints ne font pas tomber le fruitvert, ils le cueillent quand il est mr. Il a tdit par le thera Sriputta, Marchal de la Loi :

    Je ne dsire pas la mort, je ne dsire pas la vie.

    J'attends mon heure, comme le serviteur attend

    ses gages (59)

    Diversit des sensations

    Ngasena, la sensation agrable est-ellesalutaire, pernicieuse ou neutre ?

    Elle peut tre l'un ou l'autre. Mais si la sensation salutaire n'est pasdouloureuse et si la sensation douloureusen'est pas salutaire, salutaire et douloureux est une associationimpossible [de mme que pernicieux et agrable ].

    Vois ce serviteur, mahrja. Supposequ'on lui mette dans une main une boule de

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    fer chaude et dans l'autre une boule de

    glace : ces deux boules le brleront-elles ? Oui. Sont-elles toutes deux chaudes ou toutesdeux glaces ? Non. Reconnais le faible de ton raisonnement :si c'est le chaud qui brle, les deux boules

    n'tant pas chaudes, il est impossible quetoutes deux brlent ; si c'est le froid quibrle, les deux boules n'tant pas froides,mme impossibilit. Je ne suis pas capable de tenir tte undisputeur tel que toi : dis-moi ce qu'il en est.Alors le thera lui fit un expos tir del'Abhidhamma : Il y a six plaisirs fondssur la vie de famille et six fonds sur la vieasctique ; six dplaisirs fonds sur la vie defamille et six sur la vie asctique ; six tatsindiffrents fonds sur la vie de famille et sixsur la vie asctique ; soit six sixaines de

    trente-six sensations, qui peuvent trepasses, prsentes ou futures : ce qui fait entout cent huit sensations.

    Renaissance du Nom-et-forme

    Ngasena, qu'est-ce qui renat ?

    Le Nom-et-forme. Est-ce le prsent Nom-et-forme quirenat ?

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    Non. Le prsent Nom-et-forme accomplit

    un acte bon ou mauvais ; et en consquencede cet acte un autre Nom-et-forme renat. Si ce n'est pas le mme Nom-et-forme quirenat, le dernier ne se trouve-t-il pas ainsiaffranchi des pchs antrieurs ? S'il n'y avait pas renaissance, il le seraiten effet ; mais il y a renaissance, c'est

    pourquoi il ne l'est pas. Donne-moi une comparaison. Suppose qu'un homme prenne desmangues un autre. Le propritaire desmangues le saisit et le mne devant le roi enl'accusant de vol. Si l'accus rpond : Ce nesont pas les mangues de cet homme que j'aiemportes : autres les mangues qu'il aplantes, autres celles que j'ai emportes ; jen'ai encouru aucune punition , cet hommeest-il coupable ? Il l'est. Pourquoi ?

    Parce que, quoi qu'il en dise, les derniresmangues sont solidaires des premires. De mme, mahrja, quand le Nom-et-forme accomplit un acte bon ou mauvais,c'est cet acte qui dtermine la renaissanced'un autre Nom-etforme ; on ne peut doncdire que celui-ci soit affranchi des pchs

    antrieurs. Donne-moi une autre comparaison.

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    Suppose qu'un homme prenne un autre

    du riz ou des cannes sucre : mmeraisonnement. Autre exemple : un homme,en hiver, allume du feu dans les champs. Il sechauffe, puis s'en va sans teindre le feu, quibrle le champ d'un autre. Le propritairedu champ le saisit et le mne devant le roi enl'accusant d'avoir incendi son champ. Si

    l'accus rpond : Ce n'est pas moi qui aiincendi le champ de cet homme : autre lefeu que j'ai laiss sans l'teindre, autre le feuqui a brl son champ ; je n'ai encouruaucune punition , cet homme est-ilcoupable ? Il l'est. Pourquoi ? Parce que, quoi qu'il en dise, le dernierfeu est solidaire du premier. De mme pour le Nom-et-forme. Donne-moi une autre comparaison. Un homme monte avec un flambeau

    l'tage suprieur de sa maison et y prendson repas. Le flambeau met le feu au chaumedu toit, le chaume la maison, la maison auvillage. Les villageois se saisissent del'homme : Pourquoi as-tu incendi levillage ? Je n'ai pas incendi le village.Autre le feu la lueur duquel j'ai mang,

    autre le feu qui a brl le village. Tout ense disputant, ils viennent en ta prsence. Aqui adjugeras-tu le procs ?

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    Aux villageois.

    Pourquoi ? Parce que, quoi qu'en dise la partieadverse, le feu qui a brl le village est sortide l'autre. Il en est de mme du Nom-et-forme. Sansdoute celui qui renat est autre que celui quimeurt mais il en procde : on ne peut donc

    dire qu'il soit affranchi des pchsantrieurs. Donne-moi une autre comparaison. Un homme pouse une enfant, paie la dotet s'en va. La petite grandit, devient nubile :un autre homme la choisit, paie la dot etclbre ses noces avec elle. Le premierrevient et lui reproche d'avoir pous safemme : Je n'ai pas pous ta femme , ditle second mari ; autre la petite fille que tuas pouse et paye, autre la jeune fillenubile que j'ai pouse et paye. Tout en sedisputant, ils comparaissent devant toi. A

    qui, mahrja, adjugeras-tu le procs ? Au premier. Pourquoi ? Parce que, quoi qu'en dise l'autre, lajeune fille procde de l'enfant. Il en est de mme du Nom-et-forme. Donne-moi une autre comparaison.

    Un homme achte d'un vacher un pot delait : il le lui laisse en dpt et part, enannonant qu'il viendra le chercher le

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    lendemain. Le lendemain, le lait s'est chang

    en caillebottes. L'acheteur revient : Donne-moi mon pot de lait. L'autre lui prsentedes caillebottes. Il proteste : C'est du laitque je t'ai achet et non des caillebottes !C'est que le lait s'est, ton insu, chang encaillebottes ! Tout en se disputant ilscomparaissent devant toi : qui, mahrja,

    adjugeras-tu le procs ? Au vacher. Pourquoi ? Parce que, quoi qu'en dise l'autre, lescaillebottes procdent du lait. Il en est de mme du Nom-et-forme.

    Remontrance

    Ngasena, toi-mme renatras-tu ? Pourquoi me rptes-tu cette question,mahrja (60) ? Ne t'ai-je pas dj rpondu : Si je conserve de l'attachement, je

    renatrai ; si j'en suis dbarrass, je nerenatrai pas ? Donne-moi une comparaison. Suppose qu'un homme rende service auroi et que le roi satisfait lui donne unefonction qui lui permette de vivre au sein detous les plaisirs. Si cet homme se plaignait

    de l'ingratitude du roi, agirait-ilcorrectement ? Non, Vnrable.

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    Eh bien ! mahrja, pourquoi agis-tu de la

    sorte en me posant une question laquelle j'aidj rpondu ?

    Le Nom et la Forme

    Ngasena, tu as parl du Nom-et-forme.Mais qu'est-ce que le Nomet qu'est-ce que

    la Forme ? Ce qui est matriel, c'est la Forme ; lestats intellectuels et sensitifs, c'est l leNom. Pourquoi le Nom ne peut-il renatreisolment, ou la Forme isolment ? C'est parce qu'ils s'appuient l'un surl'autre qu'ils renaissent toujours ensemble. Donne-moi une comparaison. La poule, par exemple : s'il n'y avait pas enelle un germe, il ne se formerait pas d'oeuf : legerme et l'oeuf sont conditionns l'un parl'autre ; leur naissance est simultane. De

    mme, s'il n'y avait pas de Nom, il n'y auraitpas de Forme ; le Nom et la Forme sontconditionns l'un par l'autre ; leur naissanceest simultane. C'est ainsi qu'ils se sontproduits pendant une dure indfinie.

    Quest-ce que la dure ?

    Ngasena, tu parles d'une dureindfinie : qu'appelle-t-on dure ?

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    La dure passe, future et prsente.

    Mais la dure existe-t-elle ? Il faut distinguer celle qui existe et celle quin'existe pas. Les formations qui sont passes,disparues, vanouies, transformes,appartiennent la dure inexistante. Cellesqui sont productives de consquences ou quiont en elles la possibilit d'en produire ou qui

    donnent lieu une autre naissance,appartiennent la dure existante. Les tresqui, leur mort, renaissent ailleurs sont de ladure existante. Les tres qui, leur mort, nerenaissent pas ailleurs, sont de la dureinexistante. Les tres entrs dans leParinibbna sont de la dure inexistante enraison de leur complte extinction

    Origine de la dure

    Ngasena, quelle est la racine de la durepasse, future et prsente ?

    L'ignorance. De l'ignorance driventsuccessivement les formations, laconscience, le Nom-et-forme, les six sens, lecontact, la sensation, la soif, l'attachement,l'existence, la naissance, la vieillesse, lamort, le chagrin, le deuil, la souffrance, lemcontentement, le dsespoir. Ainsi de

    toute cette dure l'origine estinconnaissable.

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    L'origine est inconnaissable , dis-tu.

    Donne-moi une comparaison. On dpose une petite graine dans laterre : il en sort un germe qui pousse, crot,se dveloppe, porte fruit ; une graine de cefruit dpose dans la terre donne un germequi pousse, se dveloppe et porte fruit. Cettesuccession a-t-elle une fin ?

    Non. De mme l'origine de la dure estinconnaissable. Donne-moi une autre comparaison. De la poule nat l'oeuf, de l'oeuf la pouleet ainsi de suite. Donne-moi une autre comparaison.Le thera traa un cercle sur la terre et dit auroi : Le cercle a-t-il un bout ? Non. Il en est de mme des cercles dont a parlBhagavat : en consquence de l'oeil et des

    formes se produit la perception visuelle : larunion des trois constitue le contact ; ducontact nat la sensation, de la sensation, lasoif, de la soif l'acte, de l'acte nat de nouveaul'oeil ; ainsi cet enchanement n'a pas de fin.De mme l'origine de la dure estinconnaissable.

    Le point de dpart

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    Ngasena, tu viens de parler d'origine.

    Qu'entends-tu par cette origine ? J'entends par origine la dure passe. Quand tu dis que l'origine estinconnaissable, entends-tu par l touteorigine ? Non : il y en a une qui est connaissable,une autre qui est inconnaissable.

    Laquelle ? Le moment dont on peut dire qu'avant luil'ignorance n'existait absolument pas, c'estl l'origine inconnaissable. Mais si un trequi n'existait pas prend naissance, ou si,aprs avoir exist, il disparat : c'est l uneorigine connaissable. Ngasena, tu dis que ce qui n'existait pas,prend naissance, et qu'aprs avoir exist, ildisparat : tant ainsi coup aux deuxextrmits, il ne peut que s'teindre. Mais ce qui est coup des deux cts nepeut-il se dvelopper ?

    Sans doute, mais ce n'est pas l le sens dema question. Je demande : peut-il sedvelopper par ses extrmits ? Oui, il le peut. Donne-moi une comparaison.

    Le thera rpliqua par la comparaison de

    l'arbre et par la maxime que les khandassont les germes de toute douleur (61).

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    Naissance des formations

    Ngasena, y a-t-il des formations quinaissent ? Il y en a. Lesquelles ?Lorsque lil existe, ainsi que les formes, seproduit la facult de perception visuelle ; de

    celle-ci naissent successivement le contactvisuel, la sensation, la soif, l'attachement,l'existence, la naissance, la vieillesse, la mort,la douleur : voil l'origine de toute douleur.Mais s'il n'y a ni oeil, ni formes, la facult deperception visuelle ne nat pas, ni ses drivs :voil la cessation de toute douleur.

    Aucune formation ne sort du nant

    Ngasena, y a-t-il des formations quinaissent du nant ? Il n'y en a pas : toutes les formations qui

    naissent avaient dj une certaine existence. Donne-moi une comparaison. Cette maison o tu es assis est-elle sortiedu nant ? Non : il n'y a rien ici qui n'existtprcdemment : le bois tait dans la fort,l'argile dans la terre ; la maison est issue de

    l'effort des hommes et des femmes qui atransform ces matriaux.

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    De mme il n'y a pas de formations qui

    sortent du nant. Donne-moi une autre comparaison. Lorsqu'on plante dans la terre desgraines qui croissent, poussent, sedveloppent, deviennent des arbres quiportent des fleurs et des fruits, ces arbres nesont pas sortis du nant, ils existaient

    auparavant [sous forme de graines]. Il en estde mme des formations. Donne-moi une autre comparaison. Lorsqu'un potier extrait du sol de l'argileavec laquelle il fabrique des pots, ces pots nesortent pas du nant : ils existaientauparavant [sous forme d'argile]. Il en est demme des formations. Donne-moi une autre comparaison. S'il n'y avait dans une vn ni chevalet (?)(62), ni peau, ni corps, ni cheville, nimanche, ni corde, ni archet, ni effort humain,le son natrait-il ? Non. S'il n'y avait

    ni arani (63), ni courroie, ni amadou, nieffort humain, le feu natrait-il ? Non. S'il n'yavait ni lentille, ni chaleur du soleil, ni bousesche, le feu natrait-il ? Non. S'il n'y avait nimiroir, ni lumire, ni visage, l'image natrait-elle ? Non. De mme, il n'y a pas deformations qui naissent du nant : elles

    existaient auparavant.

    Lme nexiste pas

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    Ngasena, le Vedagu existe-t-il ? Qu'appelles-tu Vedagu, mahrja ? L'me qui habite en nous, qui voit la formeavec l'oeil, entend le son avec l'oreille, respirel'odeur avec le nez, gote la saveur par lalangue, touche les objets tangibles par lecorps, connat les phnomnes par le sens

    interne ; qui, comme nous pouvons, nous,assis dans ce palais, regarder par la fentrequ'il nous plat de choisir : l'est, l'ouest, aunord, au sud, peut, elle aussi, regarder parla porte qui lui plat. Je vais te parler des cinq portes (64),mahrja : coute et prte-moi attention.Si l'me intrieure voit la forme par l'oeil, comme nous pouvons, nous, assis dans cepalais, voir la forme par l'une quelconquedes quatre fentres qu'il nous plat dechoisir, il en rsulte que cette meintrieure pourrait voir la forme par

    l'oreille, le nez, la langue, le corps, le sensinterne, entendre le son par l'oeil, le nez, etc.En est-il ainsi ? Non, Vnrable. Tes assertions ne concordent pas (65) Autre chose : si les fentres treillis decette salle o nous sommes assis taient

    arraches, nous pourrions, en nous tournantvers le dehors, voir plus aisment les formesdans un large espace. Cette me intrieure

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    pourrait-elle, les yeux tant arrachs, voir

    plus aisment les formes dans un largeespace ? Les oreilles, le nez, la langue, lecorps tant lacrs, pourrait-elle plusaisment et dans un large espace entendreles sons, respirer les odeurs, goter lessaveurs, toucher les objets tangibles (66) ? Non, Vnrable.

    Tes assertions ne concordent pas. Autre chose : si Dinna, que voici, sortantde cette salle, se tenait sous le porche,saurais-tu qu'il est sorti sous le porche ? Oui, Vnrable. Et s'il rentrait et se tenait devant toi, lesaurais-tu ? Oui, Vnrable. De mme cette me intrieure, si ondposait sur la langue une substance d'unecertaine saveur, saurait-elle qu'elle est aigre,sale, amre, acide, astringente ou douce ? Oui, Vnrable.

    Et si cette saveur avait pntr dansl'intestin, l'me intrieure la reconnatrait-elle encore ? Non, Vnrable. Tes assertions ne concordent pas (67). Autre chose. Suppose qu'on apporte centjarres de vin de palmier et qu'on en

    remplisse une cuve, puis qu'ayant billonnun homme, on le jette dans cette cuve :

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    saurait-il si le vin de palmier est doux ou

    non ? Non, il ne le saurait pas. Pourquoi ? Parce que le vin de palmier ne pntreraitpas dans sa bouche. Tes assertions ne concordent pas (68). Je ne suis pas capable de discuter avec un

    dialecticien tel que toi. Dis-moi ce qu'il enest.

    Le thera lui fit alors un expos tir del'Abhidhamma. Comme consquence de l'oeilet des formes se produit la perceptionvisuelle ; et les tats de conscience quil'accompagnent contact, sensation,conception, pense, concentration, sens de lavitalit, attention se produisent enconsquence [de celui qui prcde]. Il n'y apas l de Vedagu.

    Perception des organes et du sensinterne.

    Ngasena, l o se produit la perceptionde l'oeil, la perception du sens interne seproduit-elle aussi ? Oui.

    Laquelle se produit la premire ? La perception de l'oeil.

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    Est-ce donc que la premire commande

    l'autre de se produire aussitt qu'elle-mme ; ou est-ce la seconde qui dit lapremire : Ds que tu te produiras, je meproduirai aussi ? Non, mahrja, elles n'changent pas deparoles. Comment donc se fait-il que l'une suive

    l'autre immdiatement ? En raison de la pente, de la porte, duprcdent, de la pratique. Comment ce fait a-t-il lieu en raison de lapente ? donne moi une comparaison. Quand il pleut, o l'eau coule-t-elle ? O le terrain est en pente. S'il pleut une autre fois, o l'eau coulera-t-elle ? L o l'eau prcdente a coul. Est-ce que la premire eau dit laseconde : L o je coule, coule aussi ? Oula seconde dit-elle la premire : L o tu

    couleras, je coulerai aussi ? Non, Vnrable, elles n'changent pas deparoles : elles coulent en raison de la pente. Il en est ainsi de la perception de l'oeil etde la perception du sens interne. Comment ces deux perceptions sesuivent-elles en raison de la porte ? Donne-

    moi une comparaison. Suppose une ville frontire entoure demurs et de tours solides, avec une seule

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    porte. Si un homme veut en sortir, par o

    sortira-t-il ? Par la porte. Et si un autre homme veut en sortir, paro sortira-t-il ? Par la porte. Se sont-ils donc entendus ensemble ? Non : ils ont tous deux pass au mme

    endroit parce que l est la porte. Il en est de mme de la perception del'oeil et de la perception du sens interne. Comment ces deux perceptions sesuivent-elles en raison du prcdent ?Donne-moi une comparaison. Une premire charrette est en marche ;o passera la suivante ? Par le mme chemin que la premire. Se sont-elles donc entendues ensemble ? Non : la seconde suit la premire enraison du prcdent qu'elle a cr. Il en est de mme des deux perceptions.

    Comment se suivent-elles en raison de lapratique ? Donne-moi une comparaison. Dans les sciences telles que le langage desdoigts (69), le calcul, l'estimation, l'criture,on commence par tre maladroit : maisensuite, par l'action attentive, par lapratique, on devient adroit : de mme, par

    l'effet de la pratique, ds que se produit laperception de l'oeil, la perception du sensinterne se produit immdiatement. [Le

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    raisonnement est le mme pour les

    perceptions auditive, olfactive, gustative,tactile : chacune est suivie de mme par uneperception mentale.]

    Perception du sens interne et sensation.

    Ngasena, l o se produit la perception

    du sens interne, la sensation se produit-elleaussi ? Oui, mahrja. L o se produit laperception du sens interne, l se produisentaussi le contact, la sensation, l'ide, lapense, la rflexion, l'analyse et tous lestats de conscience qui ont pour chef de filele contact. Quelle est la caractristique du contact ? Le fait de toucher. Donne-moi une comparaison. Suppose deux bliers qui cossent, deuxmains ou deux cymbales qu'on frappe l'une

    contre l'autre : l'un des bliers, l'une desmains, l'une des cymbales est l'oeil, l'autre laforme ; leur rencontre, c'est le contact.

    Caractristiques de la sensation

    Ngasena, quelle est la caractristique de

    la sensation (70) ? Le fait de sentir et le fait de jouir. Donne-moi une comparaison.

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    Suppose un homme qui a rendu service au

    roi et que le roi, satisfait, a revtu d'unecharge, grce laquelle il vit au sein desplaisirs. Cet homme se dit : J'ai autrefois renduservice au roi ; le roi satisfait m'a donn unecharge ; c'est en raison de ce fait que j'prouvetelle sensation. Ou bien encore : suppose unhomme qui a fait une bonne action et qui,

    aprs sa mort, va au ciel o il vit au sein desplaisirs. Cet homme se dit : J'ai fait autrefoistelle bonne oeuvre ; c'est pourquoi j'prouvemaintenant telle sensation.

    Caractristiques de la rcognition

    Ngasena, quelle est la caractristique dela rcognition ? Le fait de reconnatre. Que reconnat-on ?Le noir, le jaune, le rouge, le blanc, le rose. Donne-moi une comparaison. De mme que le trsorier du roi, entrant

    dans le trsor, en apercevant les objetsappartenant au roi, les reconnat selon leurcouleur : noir, jaune, rouge, blanc, rose ; demme la rcognition a pour caractristique lefait de reconnatre.

    Caractristiques de la pense.

    Quelle est la caractristique de lapense ?

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    Le fait de penser et le fait de prparer.

    Donne-moi une comparaison. De mme qu'un homme, ayant prpar dupoison, et l'ayant bu et fait boire d'autres,prouve de la souffrance et en cause autrui,ainsi un individu, ayant conu une mauvaiseaction, tombe aprs la mort dans l'enfer et yentrane ses imitateurs. Et de mme qu'un

    homme, ayant prpar un mlange de beurreclarifi, de beurre frais, d'huile, de miel, demlasse, et l'ayant bu et fait boire d'autres,prouve du plaisir et en procure autrui, ainsiun individu, ayant conu une bonne action,entre aprs sa mort dans le ciel et y conduitses imitateurs. C'est ainsi que la pense a pourcaractristique le fait de penser et deprparer.

    Caractristiques de la conscience.

    Ngasena, quelle est la caractristique de

    la conscience ? L'aperception. Donne-moi une comparaison. Comme le gardien d'une ville, assis dans uncarrefour au centre de la ville, peut apercevoirquiconque arrive par l'est, le sud, l'ouest, lenord ; ainsi l'homme aperoit au moyen de la

    conscience la forme qu'il voit par l'oeil, le sonqu'il entend par l'oreille, l'odeur qu'il respirepar le nez, la saveur qu'il gote par la langue,

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    l'objet tangible qu'il touche par le corps, les

    tats mentaux qu'il peroit par le sens interne.C'est ainsi que la conscience a pourcaractristique l'aperception.

    Caractristiques de la conception.

    Ngasena, quelle est la caractristique de

    la conception ? L'adaptation. Donne-moi une comparaison. Comme un charpentier adapte une pice debois sa mortaise, ainsi la conception a pourcaractristique l'adaptation.

    Caractristiques du raisonnement

    Ngasena, quelle est la caractristique duraisonnement ? La vibration ( anumajjana). Donne-moi une comparaison.

    Un gong de bronze qu'on bat rend unersonance prolonge : le fait de battre, c'est laconception ( vitakka) ; la rsonance, c'est leraisonnement ( vicra).

    Indivisibilit des tats de conscience.

    Ngasena, ces tats de conscience tantcombins, est-il possible de les dissocier etd'assigner chacun d'eux sa nature

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    particulire en disant : voici le contact, la

    sensation, la rcognition, la pense, laconscience, la conception, le raisonnement ? Non, c'est impossible. Donne-moi une comparaison. Suppose que le cuisinier d'un roi fasse unjus ou une sauce, en y mettant du lait caill,du sel, du gingembre, du cumin, du poivre et

    d'autres pices ; et que le roi lui dise : Apporte-moi la saveur du lait caill, du sel,etc. Serait-il possible de dmler ces picesainsi combines et d'en sparer chaquesaveur : l'aigre, le sal, l'amer, l'acide,l'astringent, le doux ? Non, assurment, quoique toutes soientprsentes avec leur caractristiqueparticulire. Il en est de mme des tats de consciencecombins.

    Le sel

    Le thera dit : Le sel, roi, est-il reconnaissable parl'oeil ? Oui, Vnrable. Rflchis bien ce que tu dis. Je me trompe, il est reconnaissable par la

    langue. C'est exact.

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    Mais est-ce tout le sel qui est

    reconnaissable par la langue ? Oui. En ce cas, comment le sel est-il apportdans des charrettes boeufs ? C'est du sel etseulement du sel qu'elles apportent [bienqu'aucune langue n'y ait got] ! Non, ce n'est pas seulement du sel. [La

    charge des charrettes] combine desdhammas ressortissant diffrentsdomaines des sens : sel et poids. Peut-on peser du sel sur une balance ? Oui, Vnrable. Non, c'est le poids qu'on pse sur labalance.

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    Notes :

    (46) Chacun des quatre degrs quiconduisent la saintet parfaite (Nibbna)se subdivise en deux : le Chemin (magga) etle Fruit (phala), c'est--dire la poursuite et lapossession. L'ensemble de ces tapes

    constitue la Noble Voie aux huit membres(ariyoatthangiko maggo).

    (47) Pancnantariyakammam, les cinqactes immdiatement punis : tuer sa mre,son pre, un arhat, verser le sang d'unBouddha, introduire un schisme dansl'glise.

    (48) Ce sont les 32 lments du corps. Cf.par exemple Khuddakaptha, IV.

    (49) Les cinq Khandhas : rpa, vedan,

    sa, sankhra, vinam.

    (50) Samyutta-nikya, 1. 135.

    (51) Toutes les rponses de Ngasena sontsuivies de cette rplique ; nous lasupprimerons dsormais.

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    (52) Voici les quivalents plis des termes

    techniques employs dans les 7 et suiv.de notre traduction.

    Passion : kilesaAttachement : updnaAttention concentre : yoniso manasikraSagesse : pa

    Vertu : slamFoi : saddhnergie : viriyamRflexion : satiRecueillement : samdhiFacults : indriyaForce : balalments de l'Intuition suprme : bojjhangaVoies : maggaMditations : satipatthnaEfforts : sammappadhnaConditions du pouvoir magique : iddhipdaExtases : jhna

    mancipations : vimokkhaRecueillements :samdhiConqutes spirituelles : sampatti

    (53) Samyutta-nikya, I, 13, 165.

    (54) Formulaire de la confession des

    moines.

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    (55) Le sotpanna est celui qui est entr

    dans le courant qui mne au salut ; lesakadgmi, celui qui n'a plus qu'une vieterrestre traverser ; l'angmi, celui qui nedoit plus revenir sur la terre ; larhat, le saintqui doit entrer en mourant dans le Nibbnaabsolu.

    (56) Ces sept groupes, que Rhys Davidsappelle les Sept Joyaux de la Loi , d'aprsune expression du Cullavagga, IX, 1, 4 =Vinaya, t. II, p. 240, comprennent les 37 tats mentaux auxiliaires de la Bodhi (bodhippakkhik dhamm) :

    4 mditations ( satipatthna) :- mditation sur l'impuret du corps(kynupassan satipatthnam) ;- mditation sur les vices de la sensation(vedannupassan satipatthnam) ;- mditation sur le caractre phmre de la

    pense (cittnupassan satipatthnam) ;- mditation sur les conditions de l'existence(dhammnu-passan satipatthnam) ;

    4 efforts (sammappadhna) :- effort pour prvenir la naissance desmauvais dhammas ( anuppannnam

    akusalnamdhammnam anuppdya)

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    - effort pour liminer les mauvais dhammas

    existants ( uppannnamak. dh. pahnya) ;- effort pour susciter la naissance des bonsdhammas ( anuppannnam kusalnamdhammnam uppdya) ;- effort pour conserver et dvelopper lesbons dhammas existants (uppannnam k.db. thitiy vepullya).

    4 bases du pouvoir magique (iddhipda) ;- volont ( chando) ;- nergie ( viriyam) ;- pense ( cittam) ;- investigation ( vimams).

    5 facults ( indriya) et 5 forces ( bala) ;- foi ( saddhindriyam, saddhbalam) ;- nergie ( viriyindriyam, viriyabalam) ;- rflexion ( satindriyam, satibalam) ;- recueillement ( samdhindriyam,samdhibalam) ;

    - sagesse (paindriyam, pabalam).

    7 lments de la Sambodhi :rflexion (sati-sambojjhanga) ;investigation(dhammavicaya-sambojjhanga)nergie (viriya-sambojjhanga) ;joie (pti-sambojjhanga) ;

    calme (passaddhi-sambojjhanga) ;recueillement (samddhi-sambojjhanga) ;

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    quanimit (upekhd-sambojjhanga) ;

    La Noble Voie aux huit membres. Voir note46.

    (57) Quitude, samatha ; clairvoyance,vipassan ; science, vijj ; dlivrance,vimutti.

    (58) Cette dfinition complte, celle qui a tdonne plus haut ( 9) et qui n'avait pourbut que de faire ressortir la diffrence entrela sagesse et l'attention concentre.

    (59) Theragth, 606, 1.002.

    (60) Cf. supra, 7.

    (61) Passage obscur et sans doutecorrompu.

    (62) Pattam : probablement le chevalet sur

    lequel les cordes sont tendues.

    (63) Arani, les morceaux de bois au moyendesquels on allume le feu par frottement. Letexte distingue trois pices : arani,uttarrani, uttarapotaka. Les deuxpremires sont videmment les deux

    principaux morceaux de bois, la troisimeest inconnue.

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    (64) Les cinq organes des sens.

    (65) C'est--dire que la comparaison desorganes et des fentres est boiteuse : onpeut voir les formes par une fentrequelconque, mais non par un organequelconque.

    (66) Le texte de Trenckner (p. 55, 1. 28)porte : imesu jalavatapanesu ugghatitesu, ces fentres treillis tant ouvertes . Maisdans un passage parallle (p. 86, 1. 27 =infra III, 44), ugghatitesu est remplac paruppatitesu, tant arraches : que cetteleon doive tre galement adopte dans leprsent passage, c'est ce que confirme laversion chinoise, dont je dois lacommunication M. Demiville.

    (67) L'me devrait percevoir une saveurdans l'intestin aussi bien que dans la bouche,

    puisqu'on voit un homme l'intrieur aussibien qu' l'extrieur d'une salle.

    (68) Si une fentre est ferme, on peutregarder par la fentre voisine : donc l'meprive de l'organe du got, devraitreconnatre une saveur au moyen des

    organes voisins.

    (69) Mudd ; cf. note 19.

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    (70) Voici les quivalents plis des termestechniques contenus dans ce paragraphe etles suivants :- sensation : vedan- rcognition : sa- pense : cetan- conscience : vina

    - conception : vitakka- raisonnement : vicra