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Les relations Familiales dans Un amour impossible de Christine Angot Présenté par Dr. Abir Chéhata Maître de conférences Département de langue et de littérature françaises Université de Damiette

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Les relations Familiales

dans

Un amour impossible

de Christine Angot

Présenté par

Dr. Abir Chéhata

Maître de conférences

Département de langue et de littérature

françaises

Université de Damiette

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Vol. 51 - 44 - April 2019

« ʽʽ Je

reche

rche

le

vrai ,

et

C’est le vrai qui crée

l’émotionʼʼ »

(Angot

(c)Télérama Mise

en ligne

23/08/2015. P.2)

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Introduction

Christine Angot, publie son roman ʽʽ Un amour

impossibleʼʼ(1)

en 2015. Celui-ci forme le dernier volet d’une

triologie renfermant l’inceste (1999) et une semaine de vacances

(2012). Chacun de ses romans représente un événement, un sujet

à polémique.

Christine Angot est « L’une des figures littéraires françaises les

plus controversées de nos jours […] autant que pour les polémiques dans

les médias concernant les relations incertaines entre la figure de l’écrivaine

et le droit des autres à la vie privée. »(2)

Dans ʽʽ Un amour impossibleʼʼ, Christine Angot traite le

sujet crucial des ʽʽdifférences de classe ʼʼ à travers une histoire

simple, touchante qu’elle raconte avec authenticité ainsi que

sincérité. Ce roman fait l’objet d’une adaptation

cinématographique : Un amour impossible de Catherine Corsini

et d’une adaptation théâtrale au centre dramatique national

(CDN) de Besançon en décembre 2016 et au théâtre de l’Odéon

en 2017.

Dans ce romam, Christine Angot narre La rencontre de son

père Pierre et de sa mère Rachel à Châteauroux fin des années

50. Les deux sont issus de milieux sociaux différents, Rachel

Schwartz, d’origine juive, issue d’un milieu campagnard,

1) Angot (C), Un amour impossible, Flammarion, 2015. 22) Dalmé (A), Aventures et expériences littéraires, Editions Rodopi B.V,

Amsterdam- New-York, 2014, p.10

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populaire, travaille à la sécurité sociale en tant que dactylo dès

l’âge de dix-sept ans, tandis que Pierre Angot, issu d’un milieu

bourgeois parisien, est traducteur à la base américaine de la

Martinerie.

Entre les deux naît un grand amour passionné. Malgré les

difficultés dressées, ils ne cessent de se retrouver jusqu’ à la

naissance de leur enfant Christine qu’ils ont voulu ensemble. Ils

se sont assez aimés, assez pour faire un enfant mais pas

suffisamment pour se marier !

« (…) Or, d’emblée, ce qui frappe,

c’est que l’amour entre la mère et

son amant, Pierre, est un marché

de dupes, une étrange relation

dans laquelle tout semble simple,

clair, parfaitement explicite et où

chacun ne donne que ce qu’il a

bien voulu, ne reçoit que ce qu’il

peut, en toute lucidité. »(1)

Dans notre recherche intitulée ʽʽLes relations familiales

ʼʼ,

nous allons nous concentrer sur cette famille, sur la mère Rachel,

le père Pierre et la fille Christine.

Rencontre inévitable de pierre et de

Rachel

1) Chancé (D), « Christine Angot, Un amour impossible », p.4, en ligne : https://www.oedipe.org/spectacle/litterature/amourimpossible , consulté le 24/12/2018.

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Les rencontres de Rachel et de pierre se succèdent : ils

vont au cinéma, au restaurant, à des soirées dansantes, le week-

end ils sortent, Pierre loue une voiture et ils partent. Les jours de

la semaine, il passe la chercher au bureau ou bien il va chez elle.

« (…) Très vite, ils se sont vus tous les

jours. » (1)

Les deux amants se sont liés l’un à l’autre : Rachel est

fascinée par cet homme éduqué, cultivé auprès duquel elle «

découvrait un monde. Un monde d’intimité, de paroles constantes, de

questions, de réponses (…) les détails inattendus, les mots nouveaux. Les

comparaisons, surprenantes, inédites, à contre-courant, osées. Des idées

qu’elle n’avait jamais entendu exprimer. » (2)

Quant à lui, il est attiré par la beauté de Rachel, qu’il ne

cesse d’admirer et de flatter.

« - S’il n’y avait pas eu tes yeux, ça ne serait

pas

arrivé, tu le sais ? Ils sont si beaux, tes

beaux yeux verts. (…)Tu es une très jolie

femme Rachel. Tu le sais ?

(…) - Toi tu as du charme, c’est plus

intéressant, tu es plus que beau . » (3)

1) Angot(C), Un amour impossible, Flammarion 2015, p.10 2) Idem. 3) Angot (C), Un amour impossible, op.cit., p.24

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De plus, Pierre ajoute encore ses sensations quand il est

proche d’elle. Il exprime son admiration et sa flatterie pour la

séduire de plus en plus.

« (…) Il se concentrait sur la sensation que ses

mains éprouvaient quand il la caressait. Ses

doigts s’attardaient sur une zone précise,

pour trouver quelle matière exacte la texture

de ce petit espace évoquait.

(…)-Comme tu as les mains douces, Rachel,

c’est merveilleux. Elles ne sont pas

seulement belles, c’est du velours. Tu as un

véritable fluide.» (1)

Le physique de la femme intéresse Pierre, surtout quand il

précise comment ces qualités corporelles peuvent captiver les

regards des autres hommes.

« – Tu as un très beau corps. Tu pourrais

avoir

de très beaux hommes.» (2)

Pourtant, nous remarquons l’espace qu’installe Pierre entre

lui et Rachel pour garder sa liberté et éviter l’amour conjugal.

Pour lui : « C’est un amour prévisible puisqu’ils l’attendent, qu’ils

l’attendent pour des raisons précises. Un peux ennuyeux, comme tout ce qui

est prévisible. » (3)

1) Ibid, p.12-13 2) Ibid., p.24 3) Un amour impossible, op.cit., p.14

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Il ajoute

« (…) la rencontre inévitable est imprévisible,

(…) elle ne s’intègre pas à une vie

raisonnable. Mais, elle est d’une nature

tellement autre, qu’elle ne perturbe pas

l’ordre social puisqu’elle y échappe.» (1)

Toutefois, Pierre déclare à Rachel qu’il ne souhaite pas le

mariage, mais il veut d’elle un enfant. Une demande perverse

dite à une femme à cette époque-là, qu’on veut d’elle un enfant,

mais qu’on ne l’épousera pas. Cette demande montre comment

pierre tient énormément à sa liberté et ne désire guère la perdre.

« -Moi !? … Moi non. Je veux pouvoir faire ce

que je veux.» (2)

Notons encore que pierre prend en dédain l’amour

conjugal, mais son mépris contre cet amour se modifie quand il

dit à Rachel.

« - si tu avais été riche, j’aurais sûrement

réfléchi.» (3)

Ceci montre que son refus de se marier dans ce cas précis

avec Rachel relève d’une sélection sociale.

Parallèlement, il réclame à Rachel d’être toujours avec lui,

et que rien ne changera. Mais la fin du contrat de Pierre à la

Martinerie comme traducteur l’oblige de quitter Châteauroux et

1) Idem. 2) Ibid., p.25 3) Ibid, p.47

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d’aller à Paris. Ainsi, il demande à Rachel d’y venir s’installer et

de continuer à se voir. Mais, Rachel lui répond qu’elle ne peut

pas vivre dans une petite chambre, et aller à la Sécurité. Elle lui

pose ensuite deux questions principales :

« (…) Tu me présenterais à ta famille ? Ou

est-ce qu’il y aurait une séparation complète

entre ta vie et moi ?» (1)

À son tour, Pierre réplique

« - Ce n’est pas le plus important. Si ? sur

certains domaines, il y aurait une séparation,

oui, bien sûr. Mais tu serais libre de ton

temps. Tu es attachée à des conventions au

fond toi Rachel, (…) Je ne t’épouserai pas, et

tu le sais, on en a déjà parlé .» (2)

Après cette réponse égoïste et injuste de la part de Pierre,

Rachel décide de ne pas le suivre et de demeurer à Châteauroux.

Selon elle « Le rêve des filles de l’époque était d’épouser

quelqu’un qui leur permettait de rester chez elles. De ne pas être obligées

de travailler.» (3)

Malgré la réponse décisive de Pierre de ne pas se marier, il

ne cesse pas de demander à Rachel de venir à Paris.

« -(…)- si tu veux venir à Paris, tu me tiens au

courant.(…) (…) si tu as l’intention de

1) Un amour impossible, op.cit., p.41 2) Idem 3) Ibid, p.29

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quitter Châteauroux, ne néglige pas de me

tenir au courant.» (1)

Les deux amants s’embrassent follement et se séparent sur

le parvis de la gare. Quinze jours après, Rachel reçoit la première

lettre de Pierre dans laquelle il lui annonce son nouvel emploi

intéressant dans une compagnie d’aviation après avoir passé un

examen avec succès et qu’il faut aller à Toulouse. Il n’oublie pas

à la fin d’embrasser ses belles mains.

Rachel lui répond. Il réécrit tout de suite que sa lettre lui

fait grand plaisir, qu’elle est très gentille.

« (…) J’ai été heureux de retrouver ton

parfum en regrettant qu’il ne s’y mêle pas

celui de ta peau.» (2)

Vers la fin de sa deuxième lettre, Pierre ajoute «(…) J’aurais

besoin que ta main longue et apaisante se glisse de temps en temps dans la

mienne. Ça me ferait du bien» (3)

Quelques semaines plus tard, Rachel écrit à Pierre lui

demandant qu’il fallait absolument se voir et annonçant qu’elle

est enceinte. Une réponse rapide lui apprend qu’il ne peut pas

venir à Châteauroux avant la fin de l’été et qu’il a besoin de

partir en Italie en vacances. Cette réponse est suivie d’une carte

postée de Milan représentant la cathédrale, et d’une autre postée

de Rome figurant le visage de La Pietà, en noir et blanc, et dans

laquelle il annonce son retour à en-tête du Marcelin. Il lui

1) Ibid,, pp.42-43 2) Un amour impossible, op.cit., p.p.42-43 3) Ibid, p.44

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propose de venir passer une semaine de vacances avec lui à

l’hôtel de Beaulieu-sur-Mer.

Le fait que Rachel l’informe de sa grossesse ne change

rien dans sa vie. Il continue à vivre comme un homme libre sans

responsabilité.

« - Tu es enceinte, mais que tu le sois

effectivement

ne change rien Rachel. N’est-ce pas ?

On en avait parlé. N’est-ce pas ?.» (1)

Pierre parvient à transmettre à Rachel sa décision prise en

avance avec une telle clarté qu’elle accepte sa conduite au nom

de la liberté.

Pierre est conscient, certes, de sa supériorité sociale par

rapport à Rachel. Cette différence se manifeste quand il lui

corrige son langage en lui apprenant qu’elle ne peut pas dire « si,

ça se trouve.» Mais « s’il se trouve.» (2)

Le refus de Pierre amène Rachel à déclarer à sa mère

qu’elle est enceinte. Les deux femmes se sont assises à la table

de la cuisine, et la décision est prise : Rachel va rester chez sa

mère à Châteauroux.

Une courte lettre arrive de Pierre expliquant sa situation

financière qui «frôle la banqueroute (…)Je n’ai pas encore pu rendre un

sou à mon père des 8000 francs qu’il m’a prêtés. Et, si mon frère n’est

1) Ibid, p.47 2) Un amour impossible, op.cit., p.23

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toujours pas en mesure de régler ce qu’il m’a emprunté, le percepteur, lui,

s’est occupé de moi.» (1)

Ces mots sont accompagnés d’un billet de cinquante francs

en remboursement de la somme que Rachel lui avait avancée

pour jouer au Palais de la Méditerranée.

Seule, Rachel doit rester pour accoucher, et

vraisemblablement pour déclarer l’enfant. L’assistante sociale de

la caisse, une amie à Rachel « connaissait des cas où l’homme ne

voulait pas de la femme mais voulait l’enfant. Pendant que celle-ci était

immobilisée à l’hôpital, il allait à la mairie, le reconnaissait, l’épouse

devenait la mère officielle. Pour contrer ce genre de situation, une loi

venait de passer. C’étaient les toutes premières dispositions en direction des

enfants issus de couples non mariés. Elle permettait à la mère de

reconnaître l’enfant avant la naissance par une procédure en deux phases.

(…) aller à la mairie munie d’un certificat de grossesse, et y retourner

après l’accouchement avec le certificat de l’hôpital, pour préciser le sexe,

le prénom et la date de naissance .» (2)

Naissance de Christine

Rachel avez entendu parler d’une clinique où on n’y faisait

que les accouchements et d’un médecin très renommé. Elle

décida donc que ce serait là qu’elle accoucherait.

Dès qu’elle a senti les premières douleurs vers onze heures

du soir, sa mère est allée chercher M. Ligot, un voisin habitant

dans la même allée pour les conduire à la clinique où on l’a

1) Ibid, pp.48-49 2) Ibid, pp.49-50

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installée dans une chambre. Tout allait bien mais, à un moment,

les contractions se sont arrêtées.

« (...) un effet d’origine psychologique, dont on

aurait trouvé l’explication dans la façon dont

les derniers mois s’étaient écoulés.

L’accouchement est devenu compliqué. IL était

trop tard pour faire une césarienne… » (1)

Signalons encore ce fait qu’« il a fallu introduire les forceps

sans toucher [l’enfant], en faisant bien attention à [sa] tête. » (2) or

lorsqu’elle s’est réveillée, elle était encore dans les brumes de

l’anesthésie, sa mère s’est approchée d’elle en lui disant :

« - Tu as une belle petite fille » (3)

La sage-femme a remarqué que Rachel était très pâle suite

à une hémorragie interne. L’infirmière ne savait que faire ?

Appelant alors le médecin, ils « lui ont fait des transfusions en

urgence. On lui en a fait une première avec du sang universel. Puis on a

testé son groupe sanguin, et on lui en a fait une deuxième.» (4)

Rachel et sa fille sont restées dix jours à l’hôpital et sa

mère venait les voir tous les jours. Son oncle, sa tante et tous les

gens proches venaient aussi.

1) Un amour impossible, op.cit., p.51 2) Ibid., p.52 3) Idem. 4) Idem.

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Après la sortie de l’hôpital, Rachel écrivit à Pierre en lui

demandant de venir la voir. Il lui envoya un télégramme.

« Désolé, matériellement impossible venir

aujourd’hui, Pierre. » (1)

IL est venu lorsque sa fille avait cinq mois, il est resté une

journée et il est reparti le soir même mais avant qu’il ne parte,

elle lui a demandé.

« - Ça serait bien que tu reconnaisses Christine.

- Je vais réfléchir. Je te dirai. » (2)

A la fin de quelques semaines, n’ayant pas de nouvelles de

Pierre, Rachel lui envoya une lettre qui lui est revenue avec

l’indication : « n’habite plus à [cette] adresse. » (3)

Elle prit alors le train pour Paris, s’est présentée à l’accueil

de chez Michelin, seule adresse qu’elle avait pour parler au

directeur, le père de Pierre.

« On l’a introduite dans un bureau. (…)

- Je vous en prie mademoiselle.

- votre fils et moi avons une petite fille.

Il était au courant (…) il ne se sentait pas

responsable.

- Je ne peux rien vous dire de spécial, je suis un

père ! » (4)

1) Un amour impossible, op.cit., p.53 2) Idem. 3) Idem. 4) Idem.

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Le reste de L’entretien s’est passé sans heurt, il a parlé à

Rachel d’une manière calme.

Quelques semaines plus tard, elle reçut une lettre de

Strasbourg dans laquelle Pierre lui donnait sa nouvelle adresse.

Pour fêter les deux ans de Christine, Rachel a décidé

d’aller à Arcachon dans un petit hôtel. Elle lui a écrit en

l’invitant de venir y passer le week-end du 14 juillet.

Pierre a refusé d’y aller sous prétexte de la longue

distance, du travail à terminer chez lui pour ne pas le laisser

traîner et il termina sa lettre en disant :

« Mais je, serai tout de même près de toi par la

pensée. Bonnes vacances et une bonne brise de

mer ! » (1)

Malgré les difficultés rencontrées par une mère célibataire

à cette époque et qui, en plus, vivait dans une petite ville.

« (…) elle n’avait pas de regret. (…) Elle ne

regrettait pas d’avoir décliné la proposition de

vivre à Paris. Rétrospectivement elle mesurait

l’erreur qu’elle avait failli commettre.

Qu’aurait elle fait là-bas, seule avec [sa fille]

dans une petite chambre, avec lui qui serait

venu la voir de temps en temps, sans la

présenter à ses parents, sans l’épouser, sans lui

offrir aucune stabilité, aucune protection, aucun

environnement social, alors qu’elle aurait été

1) Un amour impossible, op.cit., p.55

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dans un lieu inconnu, sans aide, sans soutien ?

». (1)

Enfance enjouée de Christine

Dès sa naissance, Christine a mené une vie heureuse avec

sa mère Rachel et sa grand-mère, sans aucun rapport avec son

père Pierre. Une ambiance chaleureuse et tendre régnait toujours

dans leur maison. Le milieu familial sensible facilita le contact

de la petite avec le monde extérieur.

« À trois ans, J’allais chez l’épicier toute seule, et

je circulais librement dans les limites de

quelques rues. Les voisins me croisaient dans le

chemin. Ils me demandaient de leur chanter une

chanson, de danser le twist, je n’avais pas

besoin de musique.» (2)

En outre « (…) le soir, on dînait dans la cuisine. Parfois, au cours

du repas, tout à coup je me levais. Je faisais le tour de la table,

j’embrassais ma mère, puis ma grand- mère, ou l’inverse. Je les serrais

dans mes bras. Et je me rasseyais. J’adorais ma grand- mère. J’aimais ma

mère.

- Plus loin que l’in fini. » (3)

Ces passages fournissent des connotations à ce qu’Angot,

dans l’interview de Le Monde, nomme le savoir féminin. Car ces

passages de l’enfance de Christine et le savoir féminin sont,

selon elle, liés à la joie d’être un enfant comme elle l’a dit :

1) Ibid, p.56 2) Un amour impossible, op.cit., p.56 3) Idem.

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« Moi, je m’efforce de faire en sorte que ce

savoir-là remplisse la page. C’est indéfinissable

le savoir féminin. (…) on le voit dans le regard

de certaines femmes, d’autres n’en veulent pas,

elles veulent vivre au royaume du savoir

masculin. Le savoir féminin, (…) est lié à la

gaieté intense qu’on a à être une fille. » (1)

L’enfance d’Angot est chargée du savoir féminin : Un

univers régné par deux femmes : la mère, la grand - mère et un

univers dans lequel l’existence d’un savoir masculin est

totalement absent. C’est peut – être la cause pour laquelle c’est

un univers heureux.

Enfant, Christine vivait un amour fort, profond, clair avec

sa mère. Ses impressions ressenties l’ont emmenée à dire.

« (...) Dès que j’ai su écrire, j’ai écrit des poèmes

sur sa beauté. Et sur les sentiments que

j’éprouvais. (…) je dessinais les plans de la

maison idéale où on habiterait quand j’aurais

grandi.» (2)

Si Rachel souhaite l’amour de Pierre, elle le désire avec

respect ; aussi c’est pourquoi elle s’est appuyée sur son travail.

1) Birnbaum (J), « Christine Angot : « Il n’y a pas de vérité hors de la littérature » » in le Monde, p.2, https://www.lemonde.fr/festival/article/2015/09/08/christine-angot-il-n-y-a-pas-de-verite-hors-de-la-litterature_4737433_4415198.html, consulté le 24/12/2018

2) Un amour impossible, op.cit., p.57

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« presque toutes les femmes s’arrêtaient de

travailler au mariage, ou à la naissance de leur

premier enfant. Le soir, elles étaient à la sortie

des classes. Ma mère était une des rares qui n’y

étaient pas, elle sortait du bureau trop tard.» (1)

À l’encontre, Rachel essayait de compenser sa fille.

Chaque samedi, le jour de son congé, elle venait à la sortie de

l’école et les deux faisaient un tour par le centre-ville. Elles

s’arrêtaient devant une pâtisserie vendant « des palets aux noisettes.

» (2) et elles parlaient de ce qui s’était passé durant la journée. Et

même si Christine était seule, elle jouerait avec sa poupée, elle

regarderait le jardin, l’énorme cerisier, les tomates, les ivis et les

poiriers.

« ʽʽC’est quoi, avoir une mèreʼʼ s’interrogeait

depuis des décennies l’écrivain, achoppant à

trouver les mots pour le dire. La question a

enfin trouvé sa réponse dans ʽʽUn amour

impossibleʽʽ, son nouveau roman. Christine

Angot (…) [écrit] (…) sur l’amour, sur

l’enfance (…) il s’agit de faire surgir sur le

papier une vérité sur l’humain, l’expérience

commune, les relations entre les individus et ce

dont elles sont tissées. Une vérité trop nette,

trop crûment révélée pour cela insoutenable,

aux yeux de certains ?

Sans doute est-ce là ce qui nourrit la

rage des détracteurs de cette femme sensible

1) Ibid, p.62 2) Ibid, p.63

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réservée, toujours attentive et souriante

lorsqu’on la rencontre. » (1)

Notons encore.

« la rupture avec [Pierre] n’avait pas été nette.

Rien [n’interdisait à Rachel] d’espérer un

revirement. Elle ne supportait pas que soit

inscrit « née de père inconnu (…) c’était une

mention fausse. Injuste. Elle espérait qu’elle

serait corrigée. (…) ses reprises de contact

avaient un deuxième objectif, le revoir ». » (2)

De nouveau, une lettre envoyée de Pierre annonçait qu’il

avait trouvé un emploi durable et avantageux au conseil de

l’Europe comme fonctionnaire international qui encadrait le

groupe des traducteurs de langues indo – européennes et réalisait

quelques missions à titre personnel.

En été, à l’âge de quatre ans de Christine, Rachel a voulu

choisir un lieu de vacances pas trop éloigné de Strasbourg.

C’était les Vosges. À Gérard-mer.

« Il est venu nous voir une journée. On a fait du

pédalo sur le lac. J’étais contente. Je l’ai

appelé papa. Une photo a été prise par un

photographe de rue. J’avais une robe à

bretelles, un bandeau rouge dans les cheveux,

1) Crom (N), Christine Angot : ´´je recherche le vrai, et c’est le vrai qui crée l’émotion´´, p.p.3-4, https://www.telerama.fr/livre/christine-angot-je-recherche-le-vrai-et-c-est-le-vrai-qui-cree-l-emotion,130283.php, consulté le 24/12/2018. 2) Un amour impossible, op.cit., p.66

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Vol. 51 - 61 - April 2019

(…) le souvenir s’est effacé de ma mémoire.

Mais la photo a été grandie et dupliquée. » (1)

L’année d’après, Rachel a choisi le Jura. Dans la lettre

suivie de Pierre, il a demandé d’abord de préciser quand elles

passeraient leurs vacances, afin qu’il s’arrangeât pour aller faire

un tour de ce côté-là. Il l’a informée ensuite de la mort de sa

mère, suicidée en sautant du quatrième étage.

À son tour, Rachel lui écrivit une gentille lettre pour

consoler sa douleur.

Le changement d’école a eu lieu lorsque Christine eut cinq

ans. Sa grand-mère n’avait plus la force de lui préparer un

déjeuner. De plus, son école n’avait pas de cantine or « l’école

privée de la ville, Jeanne – de – France (…) faisait pension, c’était juste à

côté de la maison. Les notables de Châteauroux et les agriculteurs de la

région qui préféraient que leurs enfants ne soient pas scolarisés à la

compagne, y mettaient leur fille. »(2)

La mère de Rachel est frappée d’une tuberculose, un peu

singulière, « le mal de Pott » (3) une maladie qui se logeait dans les

reins et ne se soignait qu’allongée sur un lit. Dans cet état, elle

suffoquait. Traiter une de ses maladies excitait l’autre. Elle fut

donc transportée à l’hôpital où elle est tombée dans le coma.

Tous les soirs, en sortant du bureau, Rachel allait la voir.

Elle tenait dans la sienne sa main abattue. Un soir, ses yeux se

sont ouverts, et elle serra ses doigts fortement en disant à

1) Ibid., p.67 2) Un amour impossible, op.cit., pp.68-69 3) Idem

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Vol. 51 - 62 - April 2019

Rachel « A !!! Ma fille » (1). Puis fermant les yeux et elle rendit le

dernier soupir.

Pierre lui écrivit une lettre délicate après avoir appris la

nouvelle pour la réconforter. Puis, il lui a expliqué qu’il était

impossible de la rencontrer à Lons- le-Saulnier aux dates fixées

vu la difficulté d’obtenir ses vacances en juillet. Ses dates ne

peuvent pas être modifiées « À moins que toi tu puisses changer, et

prendre tes vacances en août. Dans ce cas-là, je pourrais certainement

m’absenter le temps nécessaire. » (2)

Pierre, Rachel et Christine sont allés à Lons-le-Saulnier, en

août, et la journée s’est passée parfaitement. Le rythme des

lettres a recommencé. Vers la fin d’année, elle en a reçu une

finissant par ces mots :

« J’ai envie de vous voir. J’en ai très envie. » (3)

Rachel a cru qu’avec le temps écoulé et ayant perdu sa

mère, Pierre avait mûri. Dans son lit, quand elle fermait les yeux,

la phrase venait la bercer et l’empêcher de dormir. Elle reçut une

nouvelle lettre de Pierre dans laquelle il précisait le jour et

l’heure de son arrivée. Il a frappé à la porte. Optimiste, Rachel

souriait. C’était lui. Elle a essayé de rappeler à sa petite fille de

six ans, Christine, son père en lui disant :

« - C’est ton papa.

1) Idem 2) Un amour impossible, op.cit., p.70 3) Ibid., p.71

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Vol. 51 - 63 - April 2019

(…) - Mais si Christine voyons tu le

connais. Tu l’as vu à Gérardmer quand tu étais

toute petite. Tu te souviens qu’on avait fait du

pédalo ?....... Eh bien,

C’était avec ton papa ... » (1)

Le mariage de Pierre

Après le dîner, Pierre déclara son mariage à Rachel. Celle-

ci a été complètement abasourdie par cette nouvelle,

premièrement parce qu’elle avait espéré autre chose tout à fait

différent, tenant compte du «J’ai envie de vous voir» (2)

.

Deuxièmement parce qu’il rajoutait « Je suis très heureux. En

particulier d’épouser une Allemande. » (3)

Rachel l’écouta jusqu’à la fin. Mais l’effort qu’elle

déployait pour ne rien laisser apparaître la trompait. Quant à

Pierre, celui-ci a essayé de lui dire qu’il « n’avait pas les mêmes

rapports avec sa femme, qu’il n’était pas tendre de la même façon. » (4)

Mais il était trop tard. Elle l’a laissé dormir à la maison et

de bonne heure le matin, elle l’a expulsé avec insistance.

« On n’a plus rien à faire ensemble. » (…)

Maintenant, tu t’en vas.»(5)

En effet, Pierre l’avait vraiment blessée, opprimée et en

plus l’avait humilié à un tel degré qu’elle « s’est effondrée. En

1) Ibid., p.p.72-73 2) Idem 3) Un amour impossible, op.cit., p.p.72-73

4) Ibid., p.74 5) Ibid., p.76

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Vol. 51 - 64 - April 2019

sanglots. Elle pleurait d’autant plus que la surprise était totale. Comment

aurait-elle pu imaginer, la veille, qu’elle se retrouverait dans cet état le

lendemain ?

C’était le trou noir. »(1)

C’était la première fois que le contact s’était disloqué.

Pierre était parti. Il lui a découvert un nouveau monde et elle

avait eu pour lui des sentiments qu’elle n’avait guère ressentis

préalablement.

Ne voulant pas rester toutes les deux à la maison, Rachel a

décidé d’aller chez sa sœur et son mari. Christine a joué avec leur

fille Marie – Hélène dehors toute la matinée en frottant des

petites poignées de terre entre leurs deux paumes.

Quant à Rachel, elle a suivi sa sœur dans le salon en

s’accusant qu’elle avait été bête, naïve. Elle y avait estimé

« (…) Tout ça à partir d’une petite phrase.

« J’ai envie de vous voir. J’en ai très envie » Et

voilà elle s’était mise à extrapoler » (2)

La maison de Rachel avait besoin de plusieurs travaux :

isoler les murs, installer une salle de bains et encore renouveler la

toiture. C’est pourquoi elle l’a mise en vente.

Selon un acquéreur, la valeur de la maison était celle du

jardin, et il en payait une petite somme. De suite, Rachel a fait

une demande de logement pour la cité Saint-Jean, quartier

apparemment américain qui se situait à la bordure de la

1) Ibid., p.74 2) Un amour impossible, op.cit., p.75

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Vol. 51 - 65 - April 2019

campagne exactement après les rues calmes sortant des

boulevards.

Rachel et Christine sont allées habiter au septième étage

d’une tour ayant dix-huit.

De plus en plus, les liens d’amour unissent les deux

personnages féminins. Rachel – Christine, mère – fille et fille –

mère. La présence, la protection, la compréhension de la mère

remplissent des pages et des pages du roman vis-à-vis les

compliments adressés de la petite fille envers sa mère.

«Elle lisait mes rédactions, mes bulletins et mes

appréciations avec sa main chaude sur la

mienne.

- C’est bien, c’est très bien ma bichette. Je

caressais le dos de sa main. Ou je suivais avec

mon doigt le parcours de ses veines. Je la

retournais et je caressais la paume.

- Ah la la , ma petite bichette.

(…) - je t’assure, tu devrais faire un concours de

beauté des mains maman. Tu le gagnerais. J’en

suis sûre.» (1)

Le samedi, Christine accompagnait sa mère dans les

magasins. Lorsque Rachel entre dans une cabine, Christine

l’attendait dehors. A la sortie, Christine la regardait puis

regardait le reflet dans la glace et les deux se souriaient dans le

miroir.

1) Ibid., p.81

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Vol. 51 - 66 - April 2019

« De retour dans sa cabine, parfois elle rouvrait

le rideau, et dans l’embrasure elle me faisait un

clin d’œil. » (1)

À l’école Jeanne – de – France, Christine était entourée de

filles riches qui avaient des bonnes. Pendant leur anniversaire,

des domestiques, en gants blancs, servaient des orangeades ainsi

que des boules de glace.

Christine ne voulait pas fêter son anniversaire dans le

quartier pour ne pas les faire venir. Alors, sa mère Rachel l’a

convaincue de faire venir ses camarades de classe, de jouer dans

son dressing.

« On a ri dans la petite pièce noire, puis on a

défilé avec ses jupes et ses chaussures. (…)

quand leurs mères sont venues les chercher,

elles voulaient rester.

- Tu vois que ça s’est bien passé. On n’a pas

besoin d’habiter dans un parc pour passer une

bonne journée quand même.» (2)

Non seulement, Christine écrivait des poèmes sur la

beauté, les sentiments éprouvés envers sa tendre mère mais elle a

découvert encore qu’elle avait inventé des mots pour la désigner.

« (…) J’ajoutais des terminaisons au mot «

maman ». Je le faisais durer dans ma bouche.

Je jouais avec la prononciation. (…) Certains

1) Un amour impossible, op.cit., p.83 2) Ibid., p.85

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Vol. 51 - 67 - April 2019

baisers portaient des noms. J’avais baptisé

«bibi complet» celui qui commençait par le

front, descendait sur les paupières, les joues, le

menton er se terminait par un baiser sur les

deux oreilles. » (1)

En outre, en posant la question du pouvoir de l’écriture et

comment Christine se débrouillait avec ce pouvoir, Elle a

répondu :

« (…) Mon écriture, elle n’est pas dans ma

poche, hein ! je ne la possède pas. C’est une

impuissance au contraire. (…) le pouvoir de

l’écriture ne cesse de s’en aller, ne cesse de

mourir. Je n’en dispose pas. Ce n’est pas un

don. Je n’ai aucun don !

En revanche, j’ai un désir, ça oui.

Un désir d’écriture. C’est l’écriture qui a un

pouvoir sur moi. Par l’attraction qu’elle exerce

sur moi, et j’ai une volonté. Une volonté dingue.

Ça prend beaucoup de temps d’identifier

quelque chose d’intéressant. Mais une fois que

je l’ai identifié, alors, là, vraiment, je ne lâche

pas. » (2)

Ajoutons encore

1) Un amour impossible, op.cit., p.86 2) Birnbaum (J), « Christine Angot : « Il n’y a pas de vérité hors de la

littérature » » in le Monde, p.4, https://www.lemonde.fr/festival/article/2015/09/08/christine-angot-il-n-y-a-pas-de-verite-hors-de-la-litterature_4737433_4415198.html, consulté le 24/12/2018

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Vol. 51 - 68 - April 2019

« (…)(…) Le premier travail de l’écrivain, c’est

l’attention aux choses. Ensuite vient la

perception sensible. Puis trouver les moyens de

dire, pour montrer ces choses. Et que les mots

deviennent une voix. (…) Il y a une autre chose

encore (…) c’est accepter d’avoir ça à faire.

Accepter le fait que ce sera la part principale de

votre vie. Pour moi, ça continue d’être une

épreuve. Je n’ai pas envie de faire autre chose,

mais quand même un truc spécial, l’écriture. » (1)

Un soir, après le dîner, en se massant les mains avec la

crème, Rachel parlait avec Christine d’elle, de ses rêves, des

projets qui ne se réaliseraient peut-être plus et des images qui

l’obsédaient.

« - Tu sais, Christine, un jour j’ai fait un rêve. J’y

pense souvent à ce rêve. Je suis dans un tunnel,

un très très long tunnel, et je marche. (…) et

j’en vois pas le bout de ce tunnel. Comme s’il

avait pas de fin. À un moment, j’aperçois une

petite lumière. (…) très loin.

(…) La lumière s’agrandit. Mais j’en sors

toujours pas de ce tunnel. Et puis tout à coup :

j’en sors. Et juste à ce moment- là, un bébé me

tombe dans les bras. Et je sais que c’est toi. » (2)

1) Crom (N), Christine Angot : ´´je recherche le vrai, et c’est le vrai qui crée l’émotion´´, p.8, https://www.telerama.fr/livre/christine-angot-je-recherche-le-vrai-et-c-est-le-vrai-qui-cree-l-emotion,130283.php, consulté le 24/12/2018.

2) Un amour impossible, op.cit., p.87

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Vol. 51 - 69 - April 2019

Le rêve de Rachel signale dans quelle mesure la naissance

de Christine l’a orientée vers la lumière. On peut donc entrevoir

que Christine a donné un sens à sa vie, une autre belle image de

son maternel.

En tant que mère, Rachel parvient à partager et à

transmettre des sentiments de joie et de légèreté. C’est ce que

Christine indique après avoir vu sa mère tout d’un coup se mettre

à chanter, à danser.

«- T’es gaie toi maman.

(…)- Oh oui ! Tu danses, tu chantes, tu ris. Oh

Oui maman. T’es gaie. » (1)

Le changement du travail de Rachel

La sécurité sociale régissait l’assurance maladie et

réglementerait des établissements hospitaliers payés par les

cotisations. À Gireugne, à cinq kilomètres de Châteauroux, un

hôpital venait d’être édifié. C’était une institution révolutionnaire

rompant avec les asiles de fous.

Gireugne se rapporterait à l’évolution de la psychiatrie

mettant en cause la notion de normalité en s’intéressant aux

psychoses, sans isoler ceux qui en enduraient du reste de

l’humanité.

1) Idem

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Vol. 51 - 70 - April 2019

Le poste de secrétaire de direction était « à pourvoir »(1)

Rachel posa son postulat et après un entretien avec le médecin

directeur, elle a été enrôlée. Elle rencontrait des psychiatres, des

psychanalyses, ayant des conversations avec eux. Elle lisait,

apprenait. Elle s’accordait bien avec le médecin directeur dont le

travail la concernait.

Sur le trottoir, Christine a assisté à un dialogue entre deux

petites filles de son âge. L’une d’elles a demandé à l’autre « Il est

où ton père ?». L’autre lui a répondu : « J’en ai pas. » (2)

Racontant ce dialogue entendu à sa mère. Rachel, à son

tour, elle lui a répondu

« - Pourtant, cette fille a un père. Tout le monde

en a un. Tu le sais Christine. On en a déjà

parlé. Sa maman ne lui a peut-être pas dit. Mais

elle en a un. (…)Elle ne le connaît peut-être

pas, mais elle en a un. (…)Toi aussi tu en as un.

(…) tu ne le connais pas. Ou plutôt, tu ne t’en

souviens pas mais tu l’as vu. » (3)

Un soir, Rachel a accompagné sa petite fille chez une

psychologue qui lui a posé des questions, et lui a demandé de

dessiner une famille.

Il est le temps de signaler que

«(…) Paivio, dont les travaux initiaux ne

considéraient les variations de l’activité

1) Un amour impossible, op.cit., p.96 2) Idem 3) Ibid., p.p.97-98

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Vol. 51 - 71 - April 2019

d’imagerie que par rapport à un attribut

linguistique de matériel à apprendre (noms

concrets ou noms abstraits), donc à l’intérieur

même du registre verbal, prit également en

considération les processus de représentation

imagée mis en jeu chez le sujet par la

présentation directe de matériels concrets en

général des dessins. » (1)

Après avoir vu son dessin, la psychologue l’a

encouragée en lui articulant :

« (…) Tu as dessiné une famille équilibrée. C’est

très bien. (…)

- Le père tu l’as fait tout petit. C’est un tout petit

bon homme, mais il est là. C’est très bien. Il est

tout petit dans un coin de ta feuille, mais il

existe. Tu as fait une petite fille, qui a à peu

près la même taille que le père. Mais c’est

bien. Parce que tout le monde est là, tout le

monde est à sa place. Et tu as fait une mère.

Mais une mère … mais une mère (…) Énorme.

Qui prend toute la page. » (2)

Rachel a reçu un appel d’une amie, Mme Borgeais, avec

qui elle travaillait à la caisse l’avertissant que Pierre téléphone, et

qu’on lui a dit que tu ne travaillais plus et que tu étais à

Gireugne.

1) Denis(M), les Images Mentales, Paris, éditions PUF, 1979, p.p.39-40 2) Un amour impossible, op.cit., p.99

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Vol. 51 - 72 - April 2019

Quelques minutes après, son poste sonnait. La voix de

Pierre était claire, il lui a annoncé en disant

« - Je t’appelle parce que j’ai quelque chose à te

dire, Rachel. Je vais sans doute quitter

Strasbourg, et me rapprocher de vous.

[Mon] père venait de prendre sa retraite.

Michelin [m’]offrait le poste de directeur.» (1)

Puis, il l’a questionnée :

« - Ce n’est pas trop dur l’hôpital ?

(…) - ça fait combien de temps, que tu es dans

cet hôpital, je ne savais pas……» (2)

Par sa réponse, Rachel a essayé de lui faire comprendre

qu’elle n’était plus internée, qu’elle occupait sa position au

travail en étant comme responsable du personnel et secrétaire du

médecin directeur.

C’était la première fois qu’elle réentendait la voix de

Pierre depuis le matin où elle l’avait chassé en lui disant «

maintenant tu t’en vas » (3)

Après cette scène, Rachel avait complètement cessé de

penser à lui. Elle avait repris confiance en elle-même et avait

évolué dans son travail. En effet, Rachel a besoin d’un amour

d’homme à côté de son amour maternel, deux genres d’amour

dont Christine ne concevait plus la différence. Rachel tente alors

de les faire distinguer à sa fille.

1) Ibid., p.101 2) Un amour impossible, op.cit., p.101 3) Ibid., p.102

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Vol. 51 - 73 - April 2019

« (…) l’amour entre une mère et son enfant (…)

ne meurt jamais. Il ne se finit jamais. C’est un

amour éternel. L’amour entre un homme et une

femme c’est autre chose. Il peut ne pas être

éternel. Mais il est très fort aussi.» (1)

Même si la différence entre les deux genres d’amour est si

claire. La dernière phrase de Rachel peut reflète que ses

expériences amoureuses ont été tellement négatives.

Ce dialogue a entraîné Christine à poser à sa mère deux

questions essentielles : La première, pourquoi n’est-elle pas

mariée avec son père ?

Alors, Rachel a répondu

« (…) il était pas stable sur le plan de son avenir

professionnel. Et il voulait rester libre. Il y a

plusieurs raisons qui se sont conjuguées…….» (2)

De plus,

« - Il avait des idées précises sur le genre de

femme qu’il voulait,(…) Il voulait une femme

plus docile je pense.

(…) - Eh bien (…) Ma famille, mes origines, mon

milieu (…) c’était pas ce qu’il recherchait. (…)

Il voulait quelqu’un qu’il puisse présenter à sa

famille, qui le valorise sur ce plan-là. » (3)

1) Ibid., p.104 2) Un amour impossible, op.cit., p.104 3) Idem

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Vol. 51 - 74 - April 2019

La deuxième mais Pourquoi vous avez voulu un enfant ?

« - On t’a voulue tous les deux Christine. Parce

qu’on s’aimait. Lui aussi.

Crois-moi. On s’est beaucoup aimés ton papa

et moi. Beaucoup beaucoup. » (1)

L’adolescence de Christine

Sachant son entrée dans l’adolescence, Rachel a essayé de

parler à Christine de cette période en la renseignant des

transformations subies prouvant qu’elle avait grandi. Pierre n’a

pas pris le poste chez Michelin parce que le salaire qu’on lui

offrait ne lui plaisait pas. « Il n’y a pas eu de rapprochements

géographiques. » (2) Mais les coups de fil avaient changé les choses.

Pierre appelait Rachel de temps à autre à Gireugne, de son

bureau, au conseil plutôt que de chez lui, les deux se racontaient

leur situation présente.

Lui, il vivait à Strasbourg près du quartier de l’Orangerie

avec sa femme et son petit fils, François, prénom qu’ils avaient

choisi s’il s’agirait d’un garçon.

Une nouvelle phase a débuté et le rythme épistolaire a

recommencé. Pierre a écrit deux lettres mises dans la même

enveloppe : l’une expédiée à Rachel dans laquelle il parlait de

plusieurs ennuis venus ronger son optimiste. Le plus grave a été

l’obligation de quitter son logement car la propriétaire désirait la

1) Ibid., p.105 2) Ibid., p.106

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Vol. 51 - 75 - April 2019

vendre. Puis, il lui a dit qu’il lui a téléphoné mais sans arriver à

l’atteindre. D’après la réponse faite à son bureau, il a appris que

Christine était malade c’est pourquoi elle est rentrée à la maison.

L’autre lettre était destinée à Christine pour la remercier de sa

jolie carte envoyée et lui dire que ce n’est pas grave de se

repentir à cause de sa maladie au deuxième trimestre, et qu’il est

sûr qu’elle rattrapera son retard et qu’elle sera la première de sa

classe.

De nouveau, les lettres se sont espacées, Pierre était très

préoccupé de la maladie de son père : Alzheimer.

« Cet homme qu’il avait tant admiré lisait le

même numéro du Monde toute la journée, il ne

le reconnaissait plus, il était devenu

incontinent, (…) les infirmières le traitaient

comme un enfant.» (1)

Rachel a reçu une lettre où il lui apprenait son décès.

Quelques semaines après, il l’a appelée en lui proposant de le

suivre à Paris. À son retour, Rachel a donné à sa fille un paquet

en lui disant :

«- Tiens Christine. C’est de la part de ton papa.» (2)

Le sac contenait une poche en plastique colorée, c’était un

globe terrestre à gonfler, où il y avait un demi-cercle en plastique

dur sur lequel les méridiens étaient étalonnés. On y retenait les

1) Un amour impossible, op.cit., p.108 2) Idem

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Vol. 51 - 76 - April 2019

valves du ballon. On pouvait le faire manier en tous

sens. L’ensemble était immobile et léger.

« (…) les pères utilisent les objets comme

prétexte pour entrer en contact physique avec

l’enfant (…) par exemple en utilisant plus

souvent les objets d’une manière inhabituelle.

(…) D’après le Camus (1995), l’enfant a tout

autant besoin de stimulations, d’impulsions,

d’incitations que de sécurité et de stabilité. Le

père agit [en incitant] l’enfant à prendre des

initiatives, à explorer, à s’aventurer, à se

mesurer à l’obstacle, (…) En d’autres mots, le

père jouerait un rôle essentiel dans

l’autonomisation et l’ouverture au monde (le

Camus,1995).» (1)

Rachel a montré à Christine le Brésil en lui expliquant que

c’était la demande de son père. Alors Christine s’est posée la

question « - Pourquoi le Brésil ?» (2)

Rachel lui répondit :

« Parce que c’est grand je suppose. Il m’a dit «

tu lui montreras le Brésil, c’est un grand pays

». C’est tout ce qu’il a dit. »

(…) _

Écoute, moi (…) il m’a rien dit d’autre :

T’as qu’à lui écrire, si tu veux savoir

exactement, moi je sais pas. » (3)

1) Paquette (D), « La relation père-enfant et l'ouverture au monde »,

Enfance, 2004/2 (Vol. 56), pages 205 à 225. En ligne :

https://www.cairn.info/revue-enfance1-2004-2-page-205.htm

2) Un amour impossible, op.cit., p.108 3) Idem

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Vol. 51 - 77 - April 2019

Une lettre de Pierre à Christine exprimait son admiration

pour ses résultats scolaire tout en lui communiquant son désir de

recevoir une autre lettre d’elle, où elle lui raconterait ce qu’elle

faisait en classe ou à quoi elle aimait jouer. Lui aussi, il lui

raconterait ce qu’il aimait. De cette manière, ils se connaîtront

quand ils pourront se voir.

À la fin, Pierre a répondu à sa question posée : « Pourquoi le

Brésil ? Peut-être parce que c’est un pays dont toute la richesse est dans

l’avenir, comme toi à qui le globe était destiné » (1)

Pour connaître de plus en plus Christine, Pierre a tenté de

rapprocher la distance qui l’a longtemps séparée de sa fille.

Étant adulte, Rachel a déclaré à Christine qu’elles avaient

une possibilité de quitter Châteauroux car il y avait un poste à la

Sécurité sociale de Reims. Puis, elle lui a fait comprendre petit à

petit la situation d’une manière logique

«(…) si tu fais la connaissance de ton papa un

jour, c’est plus près de Strasbourg. Beaucoup

plus. (…) Il y a une nouvelle loi sur la filiation

qui vient de passer. (…) Il faut que je voie avec

lui, mais si ton papa est d’accord, il suffirait

qu’il aille chez un notaire pour faire modifier la

succession, et après à la mairie de

Châteauroux. C’est tout. (…) Il y aurait plus

marqué «de père inconnu» sur le livret de

1) Un amour impossible, op.cit., p.109

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Vol. 51 - 78 - April 2019

famille (…) Tu porterais un nouveau nom. C’est

un grand changement. » (1)

Encore, Rachel a encore ajouté :

«(…) Tu aimerais connaître ton papa ? Et porter

son nom ? Si on va à Reims, ça peut se faire

discrètement. (…) Si ça se fait avant la fin de

l’année, on pourrait t’inscrire à l’école sous ton

nouveau nom.

(…) tu serais reconnue comme sa fille (…) Au

même titre que ses enfants légitimes. (…) Si on

va à Reims, on n’aurait pas besoin de raconter

notre vie à tout le monde. » (2)

À toutes ces explications détaillées de la part de Rachel,

Christine lui a répondu :

« - ça serait marrant, je serai dans les A. À

l’école, quand on fera l’appel, je serai la

première. (…) Et c’est plus facile à épeler. Mes

copines croient qu’il est mort. Là je pourrais en

parler.» (3)

Lorsque Christine eut treize ans, Pierre avait réservé deux

chambres à Strasbourg, il a téléphoné à Rachel, celle-ci a noté

l’adresse, ils se sont mis d’accord sur un jour et un horaire. Puis,

elle a tendu l’appareil à Christine qui, à son tour, s’est exprimée

1) Ibid., p.p.111-112 2) Idem 3) Un amour impossible, op.cit., p.113

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Vol. 51 - 79 - April 2019

« J’entendais sa voix pour la première fois. Des

larmes me sont venues. Je n’ai pas pu parler. » (1)

Quant à la rencontre avec le père, cette rencontre est

devenue pour Christine un moment d’agitation, de sensibilité

qu’elle a décrit :

« Je me suis jetée dans ses bras, collée contre lui,

J’ai pleuré quelques minutes comme ça, blottie.

» (2)

La voiture de Pierre était garée devant l’hôtel, il a tenu la

porte pour que Rachel s’installe, a ouvert à Christine à l’arrière,

il a fait le tour de la voiture et il s’est mis au volant en les

conduisant au buffet de la gare qui avait des spécialités

alsaciennes.

Christine fut très attirée par son père non par degrés mais

complètement ce qui l’a amenée à dire à sa mère

« - Il est formidable maman. Je pensais pas que

j’avais un papa aussi extraordinaire. (…) C’est

la première fois de ma vie que je parle avec

quelqu’un d’aussi intelligent !

(…)- Tu as entendu, quand je lui ai demandé de

me parler en allemand ?T’as entendu son

accent ? Et en anglais ? Tu as vu comme c’est

beau ! Tu te rends compte qu’en Allemagne on

1) Ibid, p.114 2) Ibid, p.115

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Vol. 51 - 80 - April 2019

le prend pour un Allemand. Et que c’est comme

ça dans plusieurs pas !?

(…) C’est géniale d’être aussi intelligent. Et

aussi cultivé.» (1)

Christine n’a pas cessé de montrer son admiration pour son

père. Elle a continué à dire à sa mère

«(…) Si j’avais vécu avec lui, tu te rends compte

tout ce que j’aurais appris. Et tout ce que je

saurais aujourd’hui …» (2)

Rachel, Pierre, Christine sont allés ensuite à Gérardmer. Ils

ont déjeuné, et se sont promenés au bord du lac

« [Christine] était heureuse de l’avoir vu. Triste de

le voir partir. C’était tout le temps une arrivée un

départ. Rien n’était stable.» (3)

Un appel de Gireugne annonçait à Rachel qu’elle était

reçue première. Elle a donné son congé à la zup et écrivit à

Pierre en s’excusant du temps passé depuis sa dernière lettre. Elle

avait été occupée par sa candidature. Elle était tellement prise.

Rachel et sa fille allaient donc déménager.

La succession de Christine

1) Un amour impossible, op.cit., p.116 2) Idem. 3) Ibid., p.119 zup : zone à urbaniser par autorité

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Vol. 51 - 81 - April 2019

Pierre a accepté de reconnaître sa fille, mais son notaire de

Strasbourg lui a conseillé de bien réfléchir. La modification ne

serait de toute façon efficace qu’après celle de son état civil.

Celle-ci devait se faire à la mairie de Châteauroux en s’y

présentant en personne. Une visite était décidée fin novembre.

Ayant conduit tout l’après-midi pour arriver à la zup,

Pierre était très épuisé. Rachel lui a fait visiter l’appartement.

Quand Christine est allée se coucher. Les deux se sont assis dans

le salon.

Soudainement, Pierre lui a dit :

« - Je ne vais pas reconnaître Christine, je suis

désolé Rachel. (…) je ne vais pas la

reconnaître, c’est une mauvaise idée, je

t’assure. J’ai bien réfléchi. » (1)

Rachel lui a répondu :

« - Quoi ? Mais tu es venu pour ça !? Tu es en

train de me dire que tu as changé d’avis !?» (2)

À son tour Pierre a essayé de se défendre en lui expliquant

« - (…) ce changement t’arrange peut-être toi,

mais à l’intérieur de ma famille ce serait une

source de difficultés. (…)

- Christine n’a pas de lien avec le reste de ma

famille. Je ne vais pas l’imposer à mes beaux-

parents. Il n’y a aucune raison. (…) Je n’ai pas

1) Un amour impossible, op.cit., P.123 2) Idem

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Vol. 51 - 82 - April 2019

à leur faire subir une situation qui ne les

concerne pas que du reste ils ignorent.» (1)

Rachel, elle aussi, a tenté de défendre jusqu’au bout sa cause en

insistant

« - (…) Tu trouves ça juste toi que Christine entre

dans la vie avec «née de père inconnu» comme état

civil. Toute sa vie il faudra qu’elle porte ça. Alors

que tu as la possibilité de la reconnaître. » (2)

Rachel et pierre ont discuté longtemps, mais le lendemain

ils sont allés à la mairie de Châteauroux, et la mention « née de

père inconnu » a disparu.

Pierre Bourdieu diffère de Christine Angot, il « s’intéresse

au social et, une fois qu’il a décrypté le social, il vient à l’amour. (…)

[Angot] ne fait pas ce chemin-là. [Elle] prend le sentiment, [Elle] regarde,

et qu’est-ce qu’[elle] trouve à l’intérieur ? Comme partout les oppositions

sociales, les conflits, y compris dans cet amour entre mère et fille. (…)

Toutes les vies sont différentes, mais les sentiments sont les mêmes. » (3)

Après le déménagement de Rachel aux Chatillons, zone

périphérique au nord de Reims, une lettre de Pierre lui a été

envoyée dans laquelle il exprimait son plaisir d’apprendre par

Christine l’adresse de son nouvel appartement, son désir de

1) Idem 2) Ibid., P.124 3) Birnbaum (J), « Christine Angot : « Il n’y a pas de vérité hors de la

littérature » » in le Monde, p.3, https://www.lemonde.fr/festival/article/2015/09/08/christine-angot-il-n-y-a-pas-de-verite-hors-de-la-litterature_4737433_4415198.html, consulté le 24/12/2018

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Vol. 51 - 83 - April 2019

passer quelques jours avec elles et à la fin de sa lettre, il finissait

par son émerveillement de connaître qu’elle a si bien défendu son

procès intelligemment et son regret de même de la réponse qu’il

a faite parce qu’il la croyait vraie, et qui l’a blessée.

Lorsque Christine eut 14 ans, Pierre est venu la chercher à

la sortie de l’école. Ils sont allés aux Chatillons, et elle lui a fait

visiter l’appartement. Quelques heures plus tard, Rachel est

rentrée du travail. Les trois sont allés au Continental, Pierre

savait très bien choisir les meilleurs restaurants, les plats et les

desserts spécialisés. Il les a interrogées sur l’installation,

l’isolement de la ville, les difficultés du travail, les études

et l’école.

Quelques semaines après, une grande enveloppe de

Strasbourg est arrivée renfermant la copie de l’acte notarié par

lequel Christine figurait sur la succession. Il y avait l’état civil

complet du père avec la date de son mariage

« Celle-ci était postérieure de six mois à la visite

de Châteauroux qui s’est terminée par «

maintenant tu t’en vas.» (1)

Dans une lettre suivante, Pierre a proposé à Rachel de lui

verser cent cinquante francs, une sorte de pension alimentaire.

Elle a accepté sans aucun mot.

1) Un amour impossible, op.cit., p.133

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Vol. 51 - 84 - April 2019

À propos de Christine, il venait la voir d’une façon

régulière, il la prenait de l’école, les deux partaient pour le week-

end ce soir même, et dînaient à l’hôtel de la Paix « avec le

pépiement au fond sonore, et la vue des oiseaux qui sautillaient d’une petite

branche à l’autre.» (1)

Le matin, ils partaient. Ou bien il la ramenait en voiture,

ou bien il la laissait à la gare pour prendre le train. Quant à

Rachel, Christine l’attendait à la sortie de la caisse le soir. Les

deux commençaient le stade de la découverte de leur nouveau

milieu.

« Il y avait une grande Maison de la culture au

cœur d’un ensemble culturel et positif. Cet

ensemble était composé d’une MJC, d’une

patinoire et d’une piscine olympique. La salle

de théâtre faisait cinq cents places ...» (2)

Un dimanche, elles ont décidé d’aller voir une pièce qui

était formidable. Elles ont dîné face à face dans la cuisine en se

souvenant de l’enfance dans laquelle Rachel lui faisait un gâteau

à la Floraline de temps de temps à autre.

Mais finissant le stade de la découverte. Le face à face est

devenu très ennuyeux, ce qui a emmené Christine à dire :

« - J’en ai marre moi, on fait rien, on s’ennuie.

C’est pas intéressant ! Quel ennui. (…) qu’est-

1) Un amour impossible, op.cit., p.134 MJC maison des jeunes et de la culture

2) Ibid, p.p.136,137

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Vol. 51 - 85 - April 2019

ce que c’est ennuyeux ! Qu’est-ce qu’elle est

pas intéressante cette vie ! Je m’ennuie moi ici.

» (1)

Répondant à sa fille, Rachel lui a clairement expliqué sa

situation d’une manière si évidente

« - Excuse-moi Christine, je peux pas t’offrir plus

que ce que je t’offre. On est allées se promener,

On est allées au cinéma. Je peux pas faire plus.

J’avoue. J’ai mes limites. J’ai pas le salaire de

ton père, ni sa culture, je le regrette. (…) Et je

ne suis sûrement pas aussi intéressante que lui,

je te l’accorde. Je voudrais bien moi aussi

pouvoir t’offrir des choses qui t’intéressent. » (2)

Certes, Pierre a montré à Christine un monde extrêmement

plus large que celui qu’elle avait partagé avec sa mère. Il lui a

fait connaître le monde extérieur. La relation entre Christine et

son père se renforce en même temps que celle de Christine et sa

mère s’affaiblit peu à peu. Or un jour, Christine s’est confiée à sa

mère en lui apprenant comment son père l’avait insulté pendant

la semaine qu’elle avait passé chez lui.

« - (…) Un jour, après le déjeuner, on sortait

pour aller faire un tour. (…) Il était sur le palier

et je l’ai suivi. Je suis sortie sur le palier. Et j’ai

fermé la porte. À ce moment-là il s’est rendu

compte que la clé était à l’intérieur. (…) Et là

maman, il s’est mis à m’accuser. (…) Il m’a dit

1) Un amour impossible, op.cit., p.139 2) Idem

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Vol. 51 - 86 - April 2019

qu’on fermait pas la porte soi-même, quand on

n’était pas chez soi. (…) c’était grossier. (…)

c’était impoli. (…) Il me parlait comme si j’étais

du poisson pourri. C’était horrible. Ça a duré

tout l’après-midi. » (1)

Ou encore

« (…) Rejeter la faute sur l’autre, médire de lui

en le faisant passer pour mauvais permet non

seulement de se défouler, mais aussi de se

blanchir. Jamais responsable (.), jamais

coupable(.) : tout ce qui va mal est toujours la

faute des autres.» (2)

Un autre incident a été raconté par Christine changeant son

avis sur son père.

« - (…) Le matin, lui il partait tôt. Je prenais mon

petit déjeuner après son départ. Et à midi, il

rentrait. (…) j’avais oublié de ranger la

bouteille de lait dans le frigidaire, après mon

petit déjeuner. Quand il a vu que le lait était

encore sur la table, (…) C’était horrible (…). Il

m’a dit des choses, des choses, mais des choses,

horribles. Horribles. (…) En criant fort. Fort,

fort. Tellement fort. » (3)

Rachel a pu bien saisir la situation racontée par sa fille.

Mère comme fille ont vécu une vie sans père. Le père de Rachel

1) Ibid., p.p.148-149 2) Hirogoyen (Marie-france), Le harcèlement moral, Éditions de la

Découverte et Syos, Paris,1998, p.162 3) Ibid, p.p.150-151

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Vol. 51 - 87 - April 2019

fut absent pendant une longue période de onze ans, mais quand

elle l’a retrouvé, elle sentit rapidement qu’il ne la voulait pas. Par

son prononciation hachée, il lui a dit «- Tes cousins sont beaux. Tu es

laide ! » « Ils sont intelligents. Tu es bête !» « Ils sont instruits. Tu es

ignorante ! » (1)

Ces insultes dites avec une telle cruauté, rudesse que

Rachel en fut presque paralysée. Les insultes n’étaient pas

justifiées, or ce qui était clair c’est qu’il l’humiliait totalement et

lui transmettait un sentiment de honte et d’infériorité.

Au début du mois de juin, la tante, l’oncle et les cousines

sont venus voir Rachel et Christine. Ils ont visité la cathédrale et

sont allés place d’Erlon. En fin d’après-midi, Pierre a téléphoné

en l’informant de faire un crochet par la Champagne au lieu de

rentrer chez lui. Le lendemain, la porte a sonné, Christine a fait

les présentations.

Pierre s’est montré très gentil et curieux aux yeux de tous.

« (…) le discours du pervers narcissique trouve

des auditeurs qu’il arrive à séduire et qui sont

insensibles à l’humiliation subie par la victime.

» (2)

Quelques mois plus tard, Marc, l’ami de Rachel l’a

appelée à la Caisse pour se voir. Dans la voiture à l’arrêt, il lui a

appris une nouvelle catastrophique

1) Ibid, p.35 2) Hirigoyen (Marie France), Le harcèlement moral, op.cit., p.128

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Vol. 51 - 88 - April 2019

« (…) Il ne faut absolument pas que [Christine]

aille à Paris ce week-end (…) car [son père] la

sodomise depuis des années. » (1)

Rachel a mis un temps pour comprendre de quoi s’agissait-

il ? puis, elle a reçu un coup sur la tête. Ensuite, sa température

est montée jusqu’à 41 degrés hospitalisée, elle est demeurée dix

jours.

« (…) le viol est un acte criminel, une torture à

caractère sexuel, mais avant tout une tentative

de mise à mort, un essai de meurtre. Le viol est

un meurtre qui laisse la victime vivante. (…) le

viol est une confrontation brutale avec la

mort……» (2)

En outre

« L’image traumatique atteint le noyau de

l’identité de la victime. (…) L’individu ne sera

jamais plus comme avant car cette image a

franchi le seuil du refoulement et réveille (…)

des angoisses que la victime n’éprouvait pas

auparavant. » (3)

Christine a écrit à son père qu’elle ne voulait jamais le

voir. Alors, Pierre lui a répondu par une lettre exprimant son

désappointement et sa blessure.

« (…) Ce que tu as raconté à ta maman est grave,

c’est un couteau que tu plantes dans mon cœur

1) Un amour impossible, op.cit., p.156 2) Cormon (V), viol et renaissance, l’Archipel, 2004, p.p. 34-3 3) Un amour impossible, op.cit., p.40

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Vol. 51 - 89 - April 2019

(…) faire ta connaissance a été un grand

bonheur, mais j’éprouve aujourd’hui le

sentiment de m’être trompé sur toi. Tu te

rendras compte, sans doute plus tard, de la

douleur que tu m’infliges. » (1)

Ou encore

« (…) (…) ce parfait salaud, pervers, vaniteux,

sûr de lui, menteur, hâbleur, égoïste, le lecteur

s’étonne qu’il ait pu traverser l’existence et

celle des autres, détruire ces vies, sans jamais

être accusé, affecté, sans honte, sans regret ni

procès.

(…) les sentiments d’un lecteur qui bout de haine,

de fureur, contre ce sale type, est l’un des

ressorts dramatiques tout en implicite, de cette

lecture. » (2)

Pierre a continué d’envoyer cent cinquante francs par mois

Mais deux ans plus tard, après l’anniversaire de Christine de ses

dix-huit ans, Rachel a reçu une lettre l’informant de l’arrêt du

versement.

Devant cet acte malhonnête, Rachel a voulu expliquer à sa

fille son point de vue concernant ce sujet « - (…) si j’avais voulu,

j’aurais pu l’obliger à me verser une pension alimentaire correcte, jusqu’à

la fin de tes études. Il aurait fallu que j’aille devant un tribunal. Et surtout,

1) Ibid., p.157 2) Chancé (D), « Christine Angot, Un amour impossible », p.5, en ligne : https://www.oedipe.org/spectacle/litterature/amourimpossible , consulté le 24/12/2018.

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Vol. 51 - 90 - April 2019

que je m’en occupe avant que t’aies dix-huit ans. Ça doit être fait avant la

majorité de l’enfant. Bon. Là c’est plus possible. Il est malin le père Angot,

il est bien renseigné. » (1)

Alors, Christine lui a demandé :

«Pourquoi tu l’as pas fait quand il était encore

temps ?

(...) ç’aurait été normal maman. Tu aurais dû.

Même pour moi. » (2)

Enfin, Rachel lui répondit simplement :

« - (…) J’ai jamais voulu placer les choses sur ce terrain-là.

(…) - Je lui ai jamais demandé d’argent, j’allais pas commencer. » (3)

Rachel rappelait parfois Charlie, le fiancé de ses dix-sept

ans. Ou Jean-Dubois. Quand il s’agissait d’écoulement du temps,

de ses premières amours. Puis elle franchissait plusieurs années

arrivant immédiatement à André qu’elle trouvait qu’ils se

ressemblaient. C’est pourquoi ils se sont mariés un jour d’été.

Quant à Christine, elle emménageait avec Claude, le fils

du directeur de la Caisse. Elle le connaissait depuis longtemps : il

passait voir son père à la sécurité sociale.

Rachel s’est installée avec André dans le même quartier :

les deux immeubles étaient dissociés par une petite allée.

1) Un amour impossible, op.cit., p.158 2) Idem 3) Idem

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Vol. 51 - 91 - April 2019

«(…) Du balcon de sa cuisine elle voyait mes

fenêtres, on se croisait tous les jours, et on se

téléphonait plusieurs fois par jour.» (1)

Pour ne pas être inquiète à propos de Christine, Rachel lui

a demandé comment était sa relation avec Claude. Mais la

réponse montre l’exécration, la répulsion et la rancune envers son

père en disant :

«(…) Ce que j’ai vécu m’empêche de vivre bien

(...).

- Des fois j’ai envie d’aller voir mon père et de

tout casser chez lui.

(…)- J’aimerais bien qu’il prenne conscience

qu’il a foutu ma vie en l’air, tu vois. C’est tout.

» (2)

En plus, « Le refus de dialogue est une façon de dire, sans

l’exprimer directement avec des mots, que l’autre ne vous intéresse pas ou

même qu’il n’existe pas. (…) Avec les pervers, le discours est tortueux, sans

explications, et conduit à une aliénation mutuelle.» (3)

Tous ces sentiments négatifs envers le père ont conduit

Christine à ne pas ouvrir la porte à son demi-frère, François,

quand il était venu la voir chez elle, d’après un rendez-vous fixé

entre eux.

« - Une première fois j’ai pas répondu. Il a

attendu, et il a résonné. La deuxième fois j’ai

1) Ibid., p.161 2) Un amour impossible, op.cit., p.161 3) Hirigoyen (Marie-France), Le harcèlement moral, op.cit., p.118

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Vol. 51 - 92 - April 2019

pas répondu non plus. Il a résonné, j’ai toujours

pas répondu. (…) ça a duré environ une heure.

Comme ça. Avant de résonner il attendait, plus

ou moins longtemps » (1)

Ayant pitié de lui, Rachel l’a qualifié de « - Pauvre. » (2)

ajoutant encore «(…) lui il était là, il est venu, il avait envie de te voir, il

est au courant de rien lui…»(3)

Alors, Christine a rétorqué

« (…) Essaye de comprendre. S’il te plaît. J’en ai

besoin. Essaye d’être de mon côté. De l’être

vraiment. » (4)

Après la naissance de Léonore, la fille de Christine et de

Claude, ils ont vécu à Montpellier. Elle écrivit à sa mère

l’informant de son essai de faire un livre

« qui serait une longue lettre où je te parlerais.

(…) je ne sais pas ce que ça donnera, je n’en

ferai peut-être rien. (…) ça commençait à me

faire souffrir de parler de toi, surtout de notre

amour, de l’image que j’ai de toi, faite de

souvenirs d’attente, de tellement de bonheur. » (5)

1) Un amour impossible, op.cit., p.168 2) Ibid., p.169 3) Idem 4) Un amour impossible, op.cit., p.170 5) Ibid., p.172

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Vol. 51 - 93 - April 2019

Un peu avant l’âge de la retraite, Rachel a quitté la Caisse

après avoir atteint le nombre d’années cotisées nécessaire. Elle et

André ont déménagé à Montpellier. De nouveau, Rachel et

Christine habitaient la même ville.

« On se promenait, on faisait les magasins, on

s’arrêtait à une terrasse. Il y avait plusieurs

grandes places lumineuses, bordées de cafés, où

le soleil tapait. » (1)

La mort de Pierre

Frappé d’Alzheimer, Pierre est mort. Christine ne l’avait

pas vu depuis dix ans, or elle a appris son décès par un coup de

fil de son demi-frère. Le lendemain, Rachel et Christine se sont

croisées.

Les phrases énoncées par Rachel soulignent son

indifférence totale face à la nouvelle.

« - Non. j’ai pas de chagrin.

(…)- Je suis ni contente ni pas contente.

(…) J’ai tellement pleuré pour lui. Je crois que

pour lui j’ai plus de larmes. J’avais déja

beaucoup pleuré avant.» (2)

Ou encore

« (…)(…) L’amour impossible entre le père et la

mère devient ainsi la source d’un amour

impossible entre mère et fille comme il est à

1) Idem 2) Un amour impossible, op.cit., p.175

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Vol. 51 - 94 - April 2019

l’origine d’un autre amour impossible entre

père et fille. Il n’y a que des amours impossibles

ici, ou plus exactement, des amours possibles,

puis qu’ils ont existé, mais horribles. » (1)

Quant à Christine, elle aimerait bien aller au cimetière « (..)

Avant j’en rêvais de cet enterrement. J’imaginais sa famille en train de

pleurer, dans une église, et moi au fond, en train de les narguer, et de les

suivre (…) j’aurais peut-être dit quelque chose. Je l’attendais ce moment. Et

puis finalement tu vois c’est plus compliqué. Je comprends pas que tu

ressentes rien. Tu ressens rien !?....» (2)

Christine a fait un pas en avant pour quitter sa mère et

continuer son chemin mais Rachel l’a retenue en disant :

« - Écoute-moi bien Christine je vais te dire

quelque chose : si, même mort, ton père doit

encore nous séparer, je ne suis pas d’accord.» (3)

Durant les années suivantes, Christine a commencé à

attribuer ses échecs à sa mère. Elle l’accusait d’avoir trouvé en

son père un coupable facile, de ne pas avoir réfléchi à sa

responsabilité dans ce qui s’était passé. Elle lui conseillait de ne

plus s’étonner donc de la difficulté dans laquelle succombait la

relation.

1)Chancé (D), « Christine Angot, Un amour impossible », p.3, en ligne : https://www.oedipe.org/spectacle/litterature/amourimpossible , consulté le 24/12/2018.

2) Ibid., p.175 3) Ibid., p.176

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Vol. 51 - 95 - April 2019

Elle lui disait de plus qu’elle était, certes, la victime de

leur égoïsme à tous les deux.

« L’intimité physique n’était plus possible. La

promiscuité, le petit déjeuner, les habitudes

alimentaires, la voir en robe de chambre,

regarder le journal télévisé ensemble. C’était

fini tout ça. Ça avait disparu.» (1)

Christine habitait à Paris avec sa fille Léonore. Rachel

venait les voir, elle dormait seulement à la maison lors de

l’absence de sa fille. Un soir, Christine lui a proposé de rester à

dîner.

« Le couvert était mis. On s’est assises. Et on a

commencé à se servir, tout d’un coup je me suis

relevée :

- Pardon je peux pas supporter. (…) Je suis

fatiguée, (…) je ne peux pas. (…) je suis

désolée. Je peux pas continuer à bavarder

comme ça. (…) Faire semblant, tout ça je peux

plus.

(…) - Tu veux bien partir maman s’il te plaît.

(…) - Je suis désolée.» (2)

Tout de suite, Rachel a accepté de quitter en disant à sa

fille de n’être plus désolée, il n’y avait pas de problème. Quand

Rachel fut de retour à Montpellier, Christine lui téléphona en

pleurant, en l’accusant d’avoir envahi sa vie de sorte qu’elle ne

1) Un amour impossible, op.cit., p.177 2) Ibid., p.p.178-179

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Vol. 51 - 96 - April 2019

pouvait plus vivre la sienne. Que tout tournait autour d’elle d’une

façon que Christine n’arrêtait pas de la chercher. En outre,

Christine se moquait d’elle parce qu’elle a eu recours à un

psychologue à l’âge de ses trois ans.

« (…) Elle avait sûrement fait des erreurs. Elle

avait sans doute manqué de lucidité. Elle s’était

certainement déchargée de sa responsabilité à

mon égard, quand j’avais rencontré mon père,

estimant qu’elle le pouvait après toute ces

années.» (1)

Les deux se voyaient comme deux étrangères qui n’ont

rien à se confier. Leurs rencontres étaient catégoriques, sans âme,

consacrées à des questions concrètes.

La divergence d’opinions a poussé Christine à ne plus

l’appeler maman

« (…) tout seul, sans intention, sans décision. Peu

à peu. Ça n’avait pas été prémédité. Au

début, la fréquence du mot avait baissé. Comme

s’il n’était plus nécessaire. Ensuite, il avait pris

une tonalité gênante. Il était devenu bizarre,

décalé. Puis il avait disparu. Totalement. Il

m’était devenu impossible de le prononcer. » (2)

Le jour de la fête des mères, Christine a appelé sa mère

pour lui souhaiter une bonne fête. Les deux se sont rencontrées

pour aller au cinéma. À peine un sujet de conversation était-il

1) Ibid., p.181 2) Un amour impossible, op.cit., p.182

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projeté, Christine avait envie de passer à un autre ou de lui dire

au revoir d’une manière violente. Quelque fois, elle raccrochait

vite sans lui donner le temps de prononcer sa phrase.

Face à ces réactions, Rachel ne l’appelait jamais d’elle-

même sauf si un temps très long s’était écoulé. Elle laissait alors

un message sur le répondeur ou elle parlait dans l’appareil d’une

façon aimable,

« Si une émotion émergeait, ni l’une ni l’autre ne

l’extériorisait. Comme s’il n’y avait rien.

(…) On était à la merci des ondes, de l’humeur,

du moment, de L’ambiance, du sujet…… » (1)

Lorsque Rachel et Christine se retrouvaient, Rachel était

tendue, essayant de voiler son inquiétude. Contrairement à la fois

suivante, elle avait le même sourire d’autrefois, les mêmes yeux

brillants

« Ce qui s’est passé ensuite a été une surprise.

Des sentiments très anciens, qu’on croyait

perdus, qui dataient de sa jeunesse à elle et à

moi de mon enfance, ont commencé à

réapparaître. (…) on ne les espérait plus. Ça

s’est fait sans qu’on s’en rende compte. » (2)

En outre, ce roman « affirme quelque chose d’assez heureux, à

savoir que l’amour maternel, c’est-à-dire l’amour pour la mère et l’amour

de la mère, n’a pas été détruit, même si une bonne moitié du livre montre

1) Ibid., p.185 2) Un amour impossible, op.cit., p.185

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les assauts qu’il a subis et à quel point il pouvait sembler abîmé, voire

perdu. » (1)

La règle du jeu

Arrivant enfin à une grande scène d’explication et de

justification qui s’est révélée lors de la rencontre de Rachel, 83

ans, avec Christine pendant plusieurs semaines dans le même

café, nous lecteurs, nous assistons à ce malentendu entre les deux

personnages.

Christine a commencé par questionner sa mère en lui

disant :

« - Pourquoi tu n’as rien vu ? » (2)

La phrase lue de Bruno « Elle est aveugle la dame ?» (3) l’a

choquée, elle a tant réfléchi en affirmant

« (…) oui. Sans doute j’étais aveugle. Crois bien

que je le regrette. J’ai été tellement aveugle,

tellement. Tellement. » (4)

À cet instant, Christine lui a demandé de lui pardonner

pour l’avoir dévaluée et dévalorisée, et d’avoir passé sa vie à la

1) Crom (N), Christine Angot : ´´je recherche le vrai, et c’est le vrai qui crée l’émotion´´, p.11, en ligne : https://www.telerama.fr/livre/christine-angot-je-recherche-le-vrai-et-c-est-le-vrai-qui-cree-l-emotion,130283.php, consulté le 24/12/2018.

2) Ibid., p.201 3) Ibid., p.193 4) Idem

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Vol. 51 - 99 - April 2019

critiquer. En effet, si Rachel accepte l’infériorité qu’elle a senti

vis-à-vis de Pierre, elle ne peut pas l’agréer de Christine c’est

pourquoi elle lui a avoué :

« - Après avoir vu ton père, quand tu rentrais à la

maison, t’étais mal. Et je pensais que c’était

parce que tu me retrouvais. J’avais perdu

confiance en notre affection (…) J’avais une

perte de confiance totale. En nous. En notre

relation. (…) Je pensais que tu étais mal parce

que tu n’avais pas envie de me voir, de me

retrouver moi parce que tu ne m’aimais plus. » (1)

Le manque de confiance de Rachel est dû à la question du

rejet de la part de son père au passé, c’est pourquoi qu’elle

trouvait normal que sa fille, aussi, la rejette. Quant à sa situation

face à Pierre, elle s’est sentie souvent inférieure

« (…) Par rapport à ton père, j’étais moins

instruite, moins intelligente, socialement moins

bien. Je pensais que ton choix était fait. Ça me

paraissait logique. Pour moi, c’était normal.» (2)

Selon l’optique cixousienne, Christine se « dé-censure ».

Elle ne dissimule pas les viols sexuels commis par son père. Elle

1) Un amour impossible, op.cit., p.202 2) Idem

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réussit donc à s’arracher de sa « place de coupable » (1) et de se

libérer des chaînes de la peur et de la honte relatives à l’ancienne

femme. Elle explique alors à sa mère comment elle a compris

l’histoire incestueuse commise par son père :

« - … Il y a une logique maman, il y a une

logique dans tout ça. Il y a une logique de fer.

C’est pas une petite histoire personnelle tu

comprends. C’est pas une histoire privée. (…)

Là c’est l’organisation de la société qui est

enjeu, à travers ce qui nous est arrivé. La

sélection des gens entre eux. (…) Tu as raison

de dire que tu as été rejetée. C’est une vaste

entreprise de rejet. Social, pensé, voulu.

Organisé. Et admis. Par tout le monde. » (2)

Christine arrive à surpasser le niveau personnel de son

histoire en mettant la main sur la logique « L’organisation de la

société.» (3)

Quant à Rachel, elle n’a pas réussi à concevoir cette

logique. De plus en plus, Christine a essayé d’expliquer en

éclairant peu à peu la situation à sa mère «(…) Pour humilier

quelqu’un, le mieux c’est de lui faire honte, tu le sais. Et qu’est ce qui

pouvait te rendre plus honteuse que ça, (…) la mère d’une fille à qui son

père fait ça ? tu as été rejetée en raison de ton identité maman. Pas en

raison de l’être humain que tu étais. (…) Pas de la personne que tu étais. Et

1) Cixous, (H), Le rire de la Méduse et autres ironies, Paris, Galilée, 2010, p.45 2) Un amour impossible, op.cit., p.202-203 3) Idem

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ce rejet allait jusqu’à faire ça à ta fille. (…) Tu ne devais pas sortir de ton

tunnel. Tu pouvais juste rêver d’en sortir. » (1)

Pierre a déjà humilié Rachel sans hésitation comme un

homme supérieur à la femme « (…) l’homme selon cixous est guidé par

des valeurs dominantes comme la raison, la logique et le contrôle, ce qui

peut expliquer « son rapport obsessionnel au fonctionnement à dominer.» (2)

D’autre part, Christine a marqué que même si l’inceste

était commis envers elle, c’était de même un acte ciblé à Rachel

vraiment, cet acte avait des répercussions négatives sur ses

relations intimes, en particulier sa relation avec son propre mari,

Claude.

Encore, Christine a continué pour éclairer, analyser ce qui

s’était passé, le prétexte derrière cet acte affreux.

« (…) il ne pouvait pas y avoir des conséquences

sociales entre vous. Le but était de te faire

perdre. Vous pouviez avoir une relation, mais à

condition de respecter certaines règles, qui

garantissaient que tu n’infiltrerais pas son

monde. (…) la séparation de vos deux mondes

devait être établie, et la supériorité du sien

devait être maintenue, bien au-dessus. Il ne

fallait pas qu’il y ait de fusion. » (3)

La reconnaissance judiciaire de Pierre comme père légal

était la raison pour laquelle il a commencé sa relation incestueuse

1) Idem 2) Cf. le rire de la méduse et autres ironies, op.cit., p.58 3) Un amour impossible, op.cit., p.205

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avec Christine. L’inceste commis par Pierre était un acte planifié,

décidé, un moyen d’annuler les liens paternels crées par cette

reconnaissance de l’acte de naissance.

Si Rachel savait ou même doutait de cet acte commis par

Pierre, elle n’aurait jamais déployé plusieurs tentatives pour le

convaincre de reconnaître sa fille.

C’était d’ailleurs la seule fois que Rachel prenne une décision

entre elle et Pierre, et pour ceci elle a payé un prix démesuré

parce qu’elle avait dépassé les règles de leur logique

« (…) c’était contraire à la logique de leur camp.

(…)(…) Dans leur monde on n’a pas d’enfant

avec une juive, surtout si elle a pas d’argent et

qu’il n’y a rien à obtenir d’elle. » (1)

Pierre a voulu écraser, affaiblir Rachel comme individu

pour lui faire connaître que sa conviction et son amour maternels

pour sa fille Christine ne sont guère protégés par la sélection

sociale comme l’a montré Christine en affirmant :

« (…) il te fait descendre d’un cran de plus. C’est

toi qui baisses. (…)(…) Lui il reste stable, et il

assure son rang, et toi tu descends. (…) Chaque

fois tu as avancé un pion sur l’échiquier, il a

trouvé un moyen pour te faire reculer. Et ce

qu’il a fait avec moi est le dernier moyen qu’il a

trouvé, enfin de course, pour te claquer la porte

au nez, et en donnant en prime un tour de clé

supplémentaire dans la serrure. Sur le plan

1) Ibid., pp.210-211

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Vol. 51 - 103 - April 2019

tactique, c’est un coup magistral. C’est un coup

de maître. (…) Et c’est un coup définitif. » (1)

Christine se laisse aller à une quête-enquête jusqu’à

l’arrivée à la résolution finale. Cette quête-enquête est aussi,

assemblée, par l’auteure, à force d’informations, de détails pour

déceler le mystère de l’aveuglement de la mère en lui pardonnant

et en disant :

« - Tu es quelqu’un de bien maman.

- Ça change quoi ?

- Ça change tout. Tout.» (2)

Ça change tout, exactement "Tout" dans la dimension que

Christine arrive à voir le bon côté de sa mère, de même, elle

arrive à voir l’autre.

Selon Cixous, la femme […] ne dénie pas, elle ne haït pas, elle

observe, elle approche, elle cherche à voir l’autre femme, l’enfant, l’amant,

non pour consolider son narcissisme, […] mais pour mieux faire l’amour,

pour inventer l’Amour Autre. .» (3)

En outre Cixous continue

« regarder – penser – chercher l’autre dans

l’autre […] c’est difficile. Ce n’est pas

impossible : et c’est cela qui nourrit la vie, un

amour qui ne s’entretient pas de désir inquiet

qui pare au manque et veut confondre l’étrange,

1) Idem 2) Un amour impossible, op.cit., p.194 3) Cf. le rire de la méduse et autres ironies, op.cit., p.67

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mais qui se réjouit de l’échange qui multiplie. » (1)

Finalement, c’est le passage à l’universel qui qualifiera la

réconciliation finale entre Rachel et sa fille. On suppose

qu’Angot raconte sa propre histoire, alors qu’elle épluche la

question des rapports du pouvoir, des rapports sociaux.

Bien qu’elle remâche sans cesse le passé, Christine Angot

possède un pouvoir original de nous ramener, nous lecteurs, au

présent puisque ce qui compte vraiment est " l’ici et maintenant

". Ainsi se termine le roman " un amour impossible " par un mot

que Rachel écrit à sa fille : « Mais, trêve de nostalgie, c’est aujourd’hui

et maintenant. » (2)

Conclusion

La nouvelle génération d’écrivaines féminines englobant

des noms comme Christine Angot, Virginie Despentes, Marie

Ndiaye, Marie Nimier et Amélie Nothomb n’essaye pas

« précisément à affirmer l’identité féminine, mais plutôt à la problématiser,

et à explorer son côté troublant : le trauma, la maladie, la mort et surtout

les relations compliquées entre désir, sexe et violence. » (3)

Écrire des romans aussi personnels doit être un exercice

singulier et émouvant pour une écrivaine exigeant tant d’amour

et d’impartialité.

1) Idem 2) Un amour impossible, op.cit., p.217 3) Aventures et expériences littéraires, op.cit., p.6

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Christine Angot nous livre un ʽʽamour impossibleʼʼ, roman

sans concession d’une grande pudeur. Avec ses dialogues

naturels, ses ponctuations et ses nombreuses exclamations, ce

roman raconte une douleur aussi bien physique que morale. En

reliant ces plaies aux différences sociales et culturelles subies,

l’écrivaine recherche par l’écriture, un essai de consolation, et

d’apaisement en l’absence de guérison.

ʽʽUn amour impossibleʼʼ, est un roman fort poignant

chargé de sa part d’ombres mais aussi enveloppé d’une splendide

lumière.

Ce roman vient enter le récit d’enfance de l’écrivaine et le

rôle qu’elle jouera, à son insu, dans l’intrigue perverse de son

père.

Le roman révèle également un amour mère-fille

témoignant d’un drame familial, celui de l’inceste, ainsi que

l’apparition d’une vocation, l’écriture. Parallèlement se tisse en

trame de fond une ambiance haineuse antisémite.

Par pudeur, Christine Angot ne dévoile rien de ce qui s’est

passé entre son père et elle pendant les week-ends. Ce silence de

même que le refus absolu d’employer le mot inceste sont voulus.

Cet incident immoral donne de la force à son écriture et à la

fragilité d’une vie difficile à vivre.

« L’écriture féminine va souvent dans le tissu des

images et des sensations, créer un autre ordre,

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Vol. 51 - 106 - April 2019

spontanément hors-la-loi. L’inceste n’y est plus

interdit…. » (1)

Angot écrit comme on parle, en flux perpétuel, pas

d’ornements excessifs. De cette alchimie des phrases simples,

brèves émane un attrait, une délicatesse primitifs.

À la fois digne, apaisée, Angot capte les mots bruts, les

mots anciens qu’elle vise retranscrire avant de s’enfuir.

Des pages et des pages ouvertes aux émotions et aux

réflexions qui sont aussi riches que nombreuses.

La vérité des faits n’élimine nullement qu’Angot a écrit un

roman mais représente également la vérité des mots. Son travail

d’écrivaine réside en la recherche du mot juste.

Cette justesse ainsi que cette simplicité nous offrent une

écriture sans apprêts conférant une grande intensité à une

narration cherchant l’effacement totale de l’écrivaine.

Christine Angot « cherche à reconstruire en quelque sorte « la

vraie vie » dans ses textes. Ses textes réveillent d’ailleurs à ses lecteurs de

fortes émotions puisque dans ses récits elle parle de ses expériences très

intimes et traumatiques avec un détachement distant et objectif,…….. » (2)

1) Didier (B), l’écriture femme, Paris, Puf/ériture, 1981, p.37. 2) Cixous (H), L’ECRITURE FEMININE – UN AMOUR POSSIBLE ? Une analyse de l’écriture féminine dans « Un amour impossible » de Christine Angot, 2017, p.9 En ligne : https://gupea.ub.gu.se/handle/2077/53228

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ʽʽ Un amour impossible ʼʼ soude le pacte du roman social,

qui à partir de l’histoire personnelle rejoint l’histoire universelle

des hommes. Ce roman représente un récit de maintenant mais

aussi de tous les temps.

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Vol. 51 - 108 - April 2019

Bibliographie

I. Corpus

Angot (C), Un amour impossible, Flammarion,2015

II. Œuvres de Christine Angot

- l’Inceste, Éditions stock, 1999.

- Sujet Angot, Éditions pocket 2000.

- Quitter la ville, Éditions le livre de poche, 2002.

- Peau d’âne, Éditions stock 2003.

- Les désaxés, Éditions stock 2004.

- Léonore toujours, Éditions Fayard 2007.

- Rendez-vous, Éditions Gallimard 2008.

- Le marché des amants, Éditions points 2009.

- les Petits, Éditions Flammarion 2011.

- Une semaine de vacances, Éditions Flammarion

2012.

- La petite foule, Éditions Flammarion 2014.

III. Ouvrages généraux

- Beauvoir, (S) Le deuxième sexe, Tome Ⅰ et Ⅱ, Paris,

Gallimard,1976.

- Cixous, (H) Le rire de la Méduse et autres ironies,

Paris, Galilée, 2010.

- Dalmé, (A) Aventures et éxpériences littéraires,

Éditions Rodopi B.V, Amsterdame-Newyork,2014.

- Denis, (M), les images mentales, Éditions P.u.f. Paris

1979.

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Vol. 51 - 109 - April 2019

- Didier, (B), L’écriture femme, Paris, Puf/

écriture,1981.

IV. Ouvrages psychologiques

- Audet (J) & Katz (J), précis de victimologie

générale, Dunod,1999.

- Bessoles (PH) Le Meurtre au féminin, Éditions

Théétète,2000.

- Cormon (V), Viol et renaissance, L’Archipel,

2004.

- Féroé (F), De l’inconscient d’avoir été violée, Albin

Michel, 2002.

- Hirigoyen (Marie-France) Le harcèlement moral,

Éditions la découverte et Syros, Paris, 1998.

- Vigarello (G), Histoire du viol, Seuil, 1998.

V. Sitographie

- http/www/ledireetlecrire.com

- http/www.sailly-labourse.fr

- https://www.letemps.ch/culture/

- file://users/home/downloads/faut-il-lire-le-dernier-

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- https://fr.wikipedia.org/wiki/un-amour-impossible.

- https://www.telerama.fr/livre/christine-angot-je-

recherche-le-vrai-et-c-est-le-vrai-qui-cree-l-

emotion,130283.php, consulté le 24/12/2018.

- https://journals.openedition.org/clio218.

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Vol. 51 - 110 - April 2019

-

https:/www.lemonde.fr/festival/article/2015/08/26/

Christine-angot-il-n-y-a-pas-de-vérité-hors-de-la-

littérature-4737433-445198html.

- https://gupea.ub.gu.se/handle/2077/53228

-

https://www.oedipe.org/spectacle/littérature/amouri

mpossible.

- https://www.marieclaire.fr/rencontreavec-

Christine-Angot-pour-un-amour-

impossoble,751052

- https://www.la-psychologie.com/complexe-

oeolipe.htm.

- https://www.cairn.info/revue-enfance-1-2004-2-

page-205.htm.

Table des matières

Introduction p.3

Rencontre inévitable de pierre et de

Rachel

p.4

Naissance de Christine p.10

Enfance enjouée de Christine p.12

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Vol. 51 - 111 - April 2019

Le mariage de Pierre p.17

Le changement du travail de Rachel p.23

L’adolescence de Christine p.26

La succession de Christine p.31

La mort de Pierre p.41

La règle du jeu p.45

Conclusion

p.50