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    D/2014/0095/247ISBN 978-2-503-55360-3

    Printed in the E.U. on acid-free paper 

    © 2014 Brepols Publishers n.v., Turnhout, Belgium

     All rights reserved. No part of this publication may be reproduced,stored in a retrieval system, or transmitted, in any form or by any means,

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    APOCRYPHA

    Revue fondée en 1990par

    Jean-Claude PICARD et PierreGEOLTRAIN

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    APOCRYPHA

    REVUE INTERNATIONALE DES LITTÉRATURES APOCRYPHES

    INTER NATIONAL JOU RNAL OF APOCRYPHAL LITERATURES

    Directeur de la publicationJ.-D. DUBOIS

    Secrétaires de rédactionR. BURNET et A. VAN  DEN K ERCHOVE

    Comité de lectureF. AMSLER , R. GOUNELLE, S.C. MIMOUNI,

    E. R OSE, J.-M. R OESSLI, S. VOICU

    Comité scientifque I. BACKUS, B. BOUVIER , Z. IZYDORCZYK ,

    S. JONES, E. JUNOD, A. LE BOULLUEC, J.-N. PERÈS,P. PIOVANELLI, M. STAROWIEYSKI

    Revue publiée avec le concours scientifque delʼAssociation pour lʼÉtude de la Littérature Apocryphe Chrétienne(A.E.L.A.C.)

    et dela Société pour lʼÉtude de la Littérature Apocryphe Chrétienne

    (S.E.L.A.C.)

     Adresse du secrétariat de la revue :187, rue Belliard

    F-75018 PARIS

    [email protected]

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    SOMMAIRE

    « La fn de la vie de Thècle dans les manuscrits des  Actes de Paul etThècle. Édition des textes additionnels »

     par Jean-Daniel K AESTLI et Willy R ORDORF .................................... 9

    « The Habakkuk Section in ‘Bel and the Snake’ : The Rabbinic Per-spective »

     par Zvi R ON .................................................................................... 103

    « The Ambiguity of Gender : Representations of Wicked Women asGroup Identity Markers from the Book of  Proverbs  to the Pseudo-Clementine Homilies »

     par Daniele TRIPALDI .......................................................................   113

    « A Quotation from the Questions of Bartholomew in an early Medie-val Latin Sermon »

     par Stephen PELLE ........................................................................... 133

    « Some Remarks on the Merkabah’s Vision in the Greek   Life of Adamand Eve »

     par Magdalena DIAZ ARAUJO ........................................................... 151« La fgure d’Adam dans les  Extraits du gnostique valentinien Théo-dote »

     par Jean-Daniel DUBOIS .................................................................. 171

    « Gematria e acrostico di Adamo : nuovi testimoni » par Sever VOICU .............................................................................. 181

    « Qui a dit qu’Adam avait péché ? Adam et Ève dans les  Homélies  pseudo-clémentines »

     par Frédéric AMSLER 

     ....................................................................... 195« Étude critique : Antonio Orbe, Introduction à la théologie des  ii e et iii 

    e siècles » par Cecilia A NTONELLI ..................................................................... 211

    R ECENSIONS .............................................................................................. 229

    LIVRES REÇUS ............................................................................................ 277

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    10.1484/J.APOCRA.5.103625  Apocrypha 25, 2014, p. 9-101

     Jean-Daniel KAESTLI Université de LausanneWilly RORDORF 

    Université de Neuchâtel

    LA FIN DE LA VIE DE THÈCLEDANS LES MANUSCRITS DES  ACTES

     DE PAUL ET THÈCLE. ÉDITIONDES TEXTES ADDITIONNELS

     À l’origine, l’histoire de Thècle faisait partie des Actes de Paul  et s’achevait par ces mots : « après avoir illuminé beaucoup de gens parla parole de Dieu, elle s’endormit d’un beau sommeil ». Lorsqu’elle aété transmise comme texte indépendant, elle n’a conservé cette n pri-mitive mentionnant la mort de Thècle que dans une partie des témoins grecs des Actes de Paul et Thècle  (APThe). Sur les 41 manuscrits uti-lisés par Willy Rordorf et Jean-Daniel Kaestli pour la nouvelle édition(à paraître dans la Series apocryphorum  du Corpus christianorum ), 28

    contiennent des versions remaniées et parfois considérablement ampli- ées de la n de la vie de Thècle, que nous appelons « textes addition-nels ». Ces textes, numérotés de I à VIII à des ns d’analyse, ont des

    attaches variées avec le corps des APThe et se combinent entre eux dansles manuscrits de manière très diverse. Ils sont édités et traduits ici demanière à faire apparaître clairement la nale propre à chaque manu-

     scrit. L’une de ces nales, qui mentionne la célébration de la mémoire

    de Thècle dans la « demeure sainte » où repose sa dépouille mortellequi s’est miraculeusement enfoncée sous terre, est inédite (textes I + II). L’histoire du complot des médecins de Séleucie et de la dispari-

    tion miraculeuse de Thècle vivante dans le rocher, transmise sous deux formes, est conservée dans une version plus ancienne dans le texte VIque dans le texte III – à l’exception de l’épisode interpolé de la guéri- son de la lle de Proclianos. Les textes IV et V, qui forment une unité,

    constituent le préambule et le corps d’une lettre adressée à l’autoritéimpériale, racontant les circonstances de la confection et de la trans-mission de « la véritable image de la sainte apôtre ». Des extraits decette lettre, anonyme dans les APTh, sont cités et attribués à Basile deSéleucie ( V e  s.) par Nicéphore de Constantinople (  IX e  s.) et dans un o-rilège de textes en faveur du culte des images. Le texte VII correspondà la nale « romaine » des APThe, rapportant le voyage souterrain, la

    mort et la sépulture de Thècle à Rome. Le texte VIII est la réécriture par Syméon Métaphraste, sur la base des textes I + III, de l’histoiredu complot des médecins et de la disparition de Thècle dans le rocher.

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    Originally, the story of Thecla was an integral part of the Acts ofPaul  and ended with the words : « and after she had enlightened manywith the word of God, she slept a good sleep ». When the story was

    transmitted independently, this original ending mentionning Thecla’sdeath was retained only in a limited part of the Greek witnesses of theActs of Paul and Thecla (APThe). The new edition of this text preparedby Willy Rordorf and Jean-Daniel Kaestli (to be published in the Cor- pus christianorum, Series apocryphorum ) is based on 41 manuscripts ;28 witnesses contain « additional texts », that is to say revised andamplied versions of the last part of Thecla’s life. These items, number- ed from I to VIII, are variously connected with the body of the APTheand combine with each other in different ways in the manuscripts. Inthe following edition and translation they are presented so as to show

    clearly the ending of each individual manuscript. One of these endingsis unedited : it describes the celebration of the memory of Thecla « inher holy house », in the place where her mortal remains went downmiraculously into the earth (texts I +II). There are two versions of the plot of the physicians of Seleucia against Thecla and her going aliveinto the rock to escape the licentious young men ; the original formis better preserved in text VI than in text III – except for the inter- polated story of the healing of Proclianos’ daughter. Text IV and textV form a unit ; they are the preamble and the body of an anonymousletter to the imperial power, narrating how « the true image of theholy apostle » Thecla had been providentially painted and preserved inSeleucia. Extracts of the same letter, attributed to Basil of Seleucia (5th century), are quoted by Nicephorus of Constantinople (9th  century) andin a orilegium of texts defending the cult of images. Text VII is the

    « Roman ending », stating that Thecla went underground to Rom, diedand was buried there. Text VIII, borrowed from Symeon Metaphrastes,is a wordy rewriting, based on texts I + III, of the the tale of the phy- sicians’ plot against Thecla and her entering alive into the rock.

    Les  Actes de Paul et Thècle  (APThe), transmis comme texte indé- pendant en grec et dans une série de versions anciennes, font partie àl’origine d’une œuvre plus vaste, les  Actes de Paul , comme l’attestela version copte conservée dans le papyrus de Heidelberg. Une nou-velle édition des APThe, préparée par nos soins, va paraître dans un prochain volume de la Series apocryphorum  du Corpus christianorum consacré aux  Actes de Paul . Cette édition des APThe se fonde sur lacollation de 45 manuscrits médiévaux, répartis en trois grandes famillestextuelles (A, B et C) et un groupe de « manuscrits divers ». Comme

    l’édition de Lipsius1, elle s’achève au chap. 43 par les mots suivants :

    1.  R, A. LIPSIUS – M. BONNET,  Acta apostolorum apocrypha, I, Leipzig 1891(réimpr. Darmstadt 1959), p. XCIV-CVI (introduction) et 235-272 (texte).

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    « Rendant ainsi témoignage, elle partit pour Séleucie ; et après avoirilluminé beaucoup de gens par la parole de Dieu, elle s’endormit d’un beau sommeil » (καὶ ταῦτα διαμαρτυρουμένη ἀπῆλθεν εἰς Σελεύκειαν,

    καὶ πολλοὺς φωτίσασα τῷ λόγῳ τοῦ θεοῦ μετὰ καλοῦ ὕπνου ἐκοιμήθη).Telle devait être la n primitive de l’histoire de Thècle lorsqu’elle fai-sait partie intégrante des  Actes de Paul . En grec, elle n’est conservéesous cette forme brève que dans une partie des manuscrits. Souvent,elle a fait l’objet de divers remaniements et amplications, parfoisconsidérables.

    Dans les pages qui suivent, nous désignons ces remaniements etamplications secondaires par le terme de « textes additionnels » et nousles classons en les numérotant de I à VIII. Nous commencerons par lescaractériser brièvement et par donner la liste des manuscrits qui les

    transmettent. Nous présenterons ensuite leur contenu, la manière dontils se combinent entre eux et les liens qu’ils entretiennent avec le textedes APThe. Nous nous demanderons enn s’il est possible d’établir uneliation entre ces diverses versions de la n de la vie de Thècle et deles mettre en rapport avec l’évolution du culte de la sainte à Séleucie.

    Les textes additionnels : identité, transmission et correspon-dance avec les numéros de la BHG

    Les Actes de Paul et Thècle dans la BHG.  Dans la 3e

      éditionde la BHG (1957), onze numéros différents donnent des informationsrelatives aux APThe, auxquels s’est ajouté un numéro supplémentairedans le  Novum Auctarium  (1984)2. François Halkin a puisé les infor-mations de la BHG dans les éditions existantes, essentiellement cellede Lipsius (ce sont les chiffres non suivis d’une lettre) ou directementdans les manuscrits (chiffres suivis d’une lettre). Sa dette envers Lip-sius est à l’origine de la distinction qu’il opère entre cinq desinit   dif-férents des  APThe  d’une part, et quatre additions ( Additamenta  I-IV)d’autre part. Cette distinction est malheureuse, car elle occulte le fait

    que, dans trois cas, desinit   et additamentum  s’enchaînent sans solutionde continuité. (1) Dans le Barocc. 180 (G = 45), la phrase reproduiteen BHG 1711 n’est pas un desinit , mais elle est immédiatement suiviede BHG 1715 ( Additamentum  II). (2) Dans les manuscrits transmettantla nale « romaine » (A B C chez Lipsius = groupe C, 35-42 sauf 38dans la nouvelle édition), la phrase BHG 1712 (des. c) fait bloc avecBHG 1714 ( Additamentum  I). (3) Dans le Vat. gr. 1190 (M = 47), la phrase καὶ ταύτας ἤσθιεν ὅλην τὴν ἑβδομάδα de BHG 1713 (des. d) a pour suite immédiate BHG 1716, Συνέβη δὲ κατ᾿ ἐκεῖνον τὸν καιρὸν.

    2.  F. HALKIN,  Bibliotheca Hagiographica Graeca , 3e  éd. (Subsidia hagio- graphica, 8a), 3 vol., Bruxelles 1957, vol. 2, p. 267-269 ; F. HALKIN,  Novum Auctarium Bibliothecae Hagiographicae Graecae  (Subsidia hagiographica, 65),Bruxelles 1984, p. 200-201.

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    Autre facteur de confusion : les  Miracula  répertoriés sous BHG 1718met 1718n n’ont rien à voir, du point de vue de la tradition manuscrite,avec le livre II de l’ouvrage du Ps-Basile de Séleucie répertorié sous

    BHG 1718 (Acta a. Basilio ep. Seleuciae. Liber II. Miracula XLVI). Lesmiracles en question ont lieu du vivant même de Thècle, alors que lesmiracles rapportés par le Ps-Basile se produisent après son départ dece monde3.

    Texte I. Forme ampliée du chap. 43 des APThe. Au lieu du simple« Rendant ainsi témoignage, elle partit pour Séleucie » (καὶ ταῦτα δια-μαρτυρουμένη ἀπῆλθεν εἰς Σελεύκειαν) du texte primitif, le texte Irapporte l’insuccès de la prédication de Thècle adressée à sa mèreThéoclie et sa visite au tombeau de Daphné où elle avait naguère ren-

    contré Paul et Onésiphore, puis mentionne son départ pour Séleucie oùelle illumine beaucoup de gens. Il est transmis, plus ou moins com- plètement, dans les manuscrits 26.27.28.29.30 (groupe B, sauf 25) et45.46.47.48.49.50.51 (groupe « divers »). Cf. BHG 1711.

    Texte II. Après « elle s’endormit d’un beau sommeil », ajout d’unecourte phrase sur le sort du corps de Thècle : « sa dépouille précieuses’étant enfoncée sous terre d’une manière digne de Dieu dans sademeure sainte, là où nous célébrons sa mémoire le 24 du mois deseptembre ». Cette phrase suit immédiatement le texte I dans les mss26 et 51 ; elle suit la n primitive dans la version slave. BHG 1713e.

    Texte III. Histoire du complot des médecins de Séleucie et de ladisparition miraculeuse de Thècle dans le rocher, selon la version dumanuscrit d’Oxford édité par Grabe et reproduit par Lipsius (G = 45).Transmis dans les mss 45, 48 et 49 (BHG 1715), à la suite immédiatedu texte I (BGH 1711).

    Texte IV. Préambule à la première personne de la Lettre sur l’imagevéritable de Thècle, avec emploi de titres protocolaires adressés auxempereurs. Transmis dans les mss 2, 9, 18 et 37. BHG 1718m, début.

    Texte V. Corps de la Lettre, rapportant les circonstances de la

    confection et de la transmission de l’image véritable de Thècle, suividu récit de la guérison d’un enfant paralytique, de la conversion de safamille et de la fondation d’une église de Sainte-Irène. En plus des mss2, 9, 18 et 37, le texte V est transmis par les mss 1, 3, 25, 29, 30, 46 et47, ainsi que par M (Marc. gr. 573) et P (Paris, gr. 1115) pour V,13-51.BHG 1718m, suite ; BHG 1718n, première partie.

    Texte VI. Histoire du complot des médecins de Séleucie et de ladisparition miraculeuse de Thècle dans le rocher, selon une version

    3.  Le choix malheureux du numéro 1718 pour identier ces miracles estcompensé par le fait que Halkin signale leur lien avec des pièces précédemmentinventoriées — il renvoie pour BHG 1718m à BHG 1716a ( Additamentum  IV)et pour BHG 1718n à BHG 1716 ( Additamentum  III) ; mais mieux aurait valules enregistrer sous le numéro 1716.

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    différente de celle du manuscrit d’Oxford édité par Grabe ; à l’intérieurde cette histoire, récit de la guérison de la lle de Proclianos (dans tousles manuscrits sauf 1 et 3). En plus des témoins mentionnés à propos

    du texte V, transmis également par 27 et 28. BHG 1716a ; BHG 1718m,dernière partie ; BHG 1718n, deuxième partie.Texte VII. Finale « romaine » : bref résumé de l’histoire du complot

    des médecins de Séleucie et de la disparition miraculeuse de Thècle dansle rocher ; puis voyage souterrain de Thècle à Rome ; là, elle apprendque l’apôtre Paul est mort, elle « s’endort d’un beau sommeil » et repose« à deux ou trois stades du tombeau de Paul son maître ». Transmis dansles manuscrits du groupe C (sauf 38), soit 35, 36, 37, 39, 30, 41, 42,ainsi que par le ms. 18. Texte répertorié sous BHG 1712 et BHG 1714.

    Texte VIII. À la suite de la nale primitive jusqu’à εἴτε τὸ τέκνον

    σου πάρεικά σοι (43,5), emprunt à Syméon Métaphraste de la réécri-ture des textes I (forme ampliée du chap. 43) et III (histoire du com- plot des médecins de Séleucie et de la disparition de Thècle dans lerocher). Texte transmis intégralement par les mss 4 et 38 et répertoriésous BHGna  1716k. Texte transmis partiellement par le ms. 2, à partirde ἐπεὶ οὖν οὐδὲν αἴτιον ἄλλο (PG 115, col. 844 A).

    Les manuscrits

    Des 45 manuscrits inventoriés des  Actes de Paul et Thècle, 41

    conservent la n du récit et sont accessibles. Sur ces 41 témoins, 28contiennent un ou plusieurs des textes additionnels qui viennent d’êtreénumérés. En voici la liste, dans l’ordre des familles auxquelles ils serattachent et des sigles qu’ils reçoivent dans l’édition du texte princi- pal des APThe (entre parenthèses : sigle du manuscrit dans l’édition deLipsius).

    Groupe A

    1 (I) Paris, Bibliothèque nationale,  gr. 1506 , parch., 278 × 198, 1 col.,204 fol., Xe  s. ;  APThe  1-43 : fol. 64r -72v; textes n° V-VI (BHG

    1718n) : fol. 72v-75v.2  Athos, Monastère Koutloumousiou, 56  (Lambros 3125), parch., 4o,

    1 col., 227 fol., XIIe  s. ;  APThe 1-43 (BHG 1710) : fol. 156r -164r  ;textes n° IV-V-VI (BHG 1718m) jusqu’à παρ᾿ αὐτῆς παρέχειαὐτῇ (VI,71) : fol. 164r -167v, suivis du texte n° VIII (BHG 1719 :Métaphraste, PG 115, 844 A – 845 C) : fol. 168r -169r .

    3  Dublin, Trinity College, 185  ( E.3.35), parch., 350 × 220, 2 col.,261 fol., XIe  s. ;  APThe 1-43, suivis du texte n° VI : fol. 30r-39v.

    4  Athos, Monastère Karakallou, 8 (6) (Lambros 1521), parch., 4o,

    2 col., 208 fol.,Xe

    /XIe

      s. ;  APThe  1-43, suivis du texte n° VIII(BHGn 1716k ; cf. BHG 1719) : fol. 26ra-32vb.9  Édimbourg, Bibliothèque de l’Université, 225, parch., 410 × 300,

    2 col., 14 p., XIe  s. ;  APThe 1-43 (BHG 1710) : p. 1a-11a ; textesn° IV-V-VI (BHG 1718m) : p. 11a-16a.

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    18  Oxford, Bibliothèque Bodléienne, Clarke 50, parch., 240 × 185,1 col., 269 fol., XIIe- XIIIe  s. ;  APThe 1-43, suivis du texte n° VII(BHG 1712 + 1714) : fol. 216r -224r  ; puis textes n° IV-V-VI

    (BHG 1718m) : fol. 224r 

    -227v

    .19 Istanbul, Bibliothèque du Patriarcat, Monastère de la Sainte Tri-nité (Halki), 102, parch., palimpseste, 275 × 190, 296 fol. ; écri-ture supérieure : a. 1435 ; écriture inférieure : XIe  s. ;  APThe  5-7 ;12-20 ; 28-36 : fol. 196v+201r   (196r +201v sont illisibles) ; 81v+86r   /81r +86v ; 144v+145r   / 144r +145v  (écriture inférieure) ; quelqueséléments lisibles du texte n° V et du texte n° VI : fol. 154v+158r   /154r +158v ; 157r   (écriture inférieure).

    Groupe B

    25 (F) Vatican, Vat. gr. 866 , parch., 380 × 300, 2 col., 414 fol., XIe  s. ; APThe  1-43 : fol. 27ra-30rb; textes n° V-VI (BHG 1718n) : fol.30va-32ra.

    26 (H) Oxford, Bibliothèque Bodléienne,  Auct. E.5.12  (olim Miscell. gr.77 ), parch., 220 × 150, 1 col., 428 fol., XIIe s. ;  APThe 1-4 ; 9-43,suivis des textes n° I-II (BHG 1713e) : fol. 414r -423v.

    27  Milan, Bibliothèque Ambrosienne,  D 92 sup. ( gr. 259), parch.,315 × 248, 2 col., 274 fol., XIe  s. ;  APThe 1-43 (cf. BHG 1711) :fol. 222r a-227ra ; texte n° VI (BHG 1716a) : fol. 227ra-228rb.

    28  Rome, Bibliothèque Angelica,  gr. 108 (B.2.2), parch., 347 ×

    250, 2 col., 288 fol., XIIe  s. ;  APThe  1-43 (cf. BHG 1711) :fol. 22vb-28rb; texte n° VI (BHG 1716a) : fol. 28rb-29vb.

    29  Vatican, Chigi R.VI.39 (gr. 31), parch., 285 × 192, 2 col.,219 fol., XIIe  s. ;  APThe  1-43 (cf. BHG 1711) : fol. 42vb-50ra;textes n° V-VI (BHG 1718n) : fol. 50ra-53ra.

    30  Sinaï, Monastère de Sainte-Catherine,  gr. 526 , parch., 290 ×225, 2 col., 235 fol., Xe  s. ;  APThe  1-43 (cf. BHG 1711) :fol. 33vb-39vb; textes n° V-VI (BHG 1718n) : fol. 39vb-42rb.

    Groupe C

    35 (A) Paris, Bibliothèque nationale,  gr. 520, parch., Xe-XIe  s., 440 p.,330 × 250, 2 col. :  APThe  1-43 (BHG 1712) : p. 39 b-50a ; texten° VII =  APThe 44-45 (BHG 1714) : p. 50a-b.

    36 (B) Paris, Bibliothèque nationale,  gr. 1454, parch., 360 × 250, 2 col.,180 fol., Xe  s. ;  APThe  1-43 (BHG 1712) : fol. 72ra-77va; texten° VII =  APThe 44-45 (BHG 1714) : fol. 77va-vb.

    37  Ochrida, Musée National, 4  (76), parch., 380 × 225, 2 col.,518 pages (moins les p. 490-499, sautées dans la numérota-tion), Xe  s. :  APThe 1-43 (BHG 1712) : p. 17 b-29 b: texte n° VII =

     APThe  44-45 (BHG 1714) : p. 29a-b ; puis textes n° IV-V-VI

    (BHG 1718m) : p. 29 b-35 b.38  Athos, Monastère Pantokratoros, 40 (Lambros 1074), parch.,

    4o, 1 col., 243 fol., XIe  s. ;  APThe  1-43, suivis du texte n° VIII(BHGn 1716k ; cf. BHG 1719) : fol. 13v-21v.

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    LA FIN DE LA VIE DE THÈCLE : TEXTES ADDITIONNELS 15

    39 (C) Paris, Bibliothèque nationale,  gr. 1468, parch., 366 × 262, 2 col.,405 fol., XIe  s. :  APThe  1-43 (BHG 1712) : fol. 38va-44ra; texten° VII =  APThe 44-45 (BHG 1714) : fol. 44ra-rb.

    40  Jérusalem, Bibliothèque du Patriarcat, Saint-Sabas 30, parch.,338 × 245, 2 col., 407 fol., Xe-XIe  s. ;  APThe 1-43 (BHG 1712) :fol. 24ra-28v b; texte n° VII =  APThe  44-45 (BHG 1714) :fol. 28vb-29ra.

    41  Vatican, Vat. gr. 1238, parch., palimpseste (fol. 12-201), 310 ×200 ; écriture supérieure : 2 col., a. 1195 ; écriture inférieure :2 col., XIe  s. :  APThe 1-43 (BHG 1712) : fol. 147 ; 171 ; 181 ; 27 ;186 ; 168 ; texte n° VII =  APThe 44-45 (BHG 1714) : fol. 176.

    42  Oxford, Bibliothèque Bodléienne, Clarke  43, parch., 290 × 220,2 col., 162 fol., XIIe  s. :  APThe  33,7 – 43,6 : fol. 16ra-17va; texten° VII =  APThe 44-45 (BHG 1714) : fol. 17va-vb.

    Groupe des manuscrits divers

    45 (G) Oxford, Bibliothèque Bodléienne,  Barocc. 180, parch., 310 ×250, 2 col., 219 fol., XIIe  s. ;  APThe 1,1-27,3 ; 32,2-43,7 (BHG1711) : fol. 34ra-41rb; texte n° III (BHG 1715) : fol. 41rb-42vb.

    46  Saint-Pétersbourg, Bibliothèque nationale de Russie,  gr. 213, parch., 2 col., 309 fol., XIIe  s. ;  APThe  1-43 (BHG 1713) :fol. 75rb-82vb ; textes n° V-VI (BHG 1716 ; cf. BHG 1718n) :

    fol. 82vb-86rb.47 (M) Vatican, Vat.  gr. 1190, parch., 305 × 205, 1 col., 1387 fol. (en

    3 vol.), a. 1542 ;  APThe  1-43 (BHG 1713) : fol. 1215r -1223v ;textes n° V-VI (BHG 1716 ; cf. BHG 1718n) : fol. 1223v-1228r .Vers la n du texte VI, après καὶ οὕτως ἐτελειώθη (VI,99), cemanuscrit ajoute un morceau, d’environ une page, qui n’a rien àvoir avec Thècle (fol. 1227v, ligne 13 – 1228r , ligne 22). Il s’agitd’une prière où un personnage féminin invoque l’aide de Gabrielet d’une multitude d’autres puissances angéliques. L’interpola-

    tion commence par les mots ἡ δέ φανεῖσαν ὄναρ τῆς ἁγίας ·εἰσῆλθεν ὁ Γαβριὴλ [legendum εἴσελθε ὦ Γαβριὴλ ?] τῆς χαρᾶς ὑπηρέτα καὶ πρόξενε · ἐπίσκεψαί με τὴν δεινῶς ἀσθενοῦντα etelle se termine ainsi : καὶ ἱκετεύω τὴν μεγαλόνοιαν, ἄχραντοι,ὅπως ἀπρόσκοπόν μου τὴν ζωὴν συντηρήσεται, ἀκαταίσχυντοντὴν ἐλπίδα. ταῦτα τὰ θαυμάσια ναδὴ ἡ ἁγία μάρτυς τοῦ Χριστοῦἐτελειώθην ἐν μηνὶ Σεπτεμβρίου εἰκάδι τετάρτῃ. Au bas dufol. 1228r , après la doxologie et l’Amen nal du texte VI, on litle titre rubriqué de la pièce suivante : βίος καὶ πολιτεία τοῦ ἁγίουἀγγέλου Γαβριὴλ τοῦ ἀρχιστρατήγου · τοῦ αὐτοῦ ποίημα τοῦκ[υρο]ῦ Παντολέοντος (= BHG 1287). L’origine et la fonctionde cette prière, tout comme la raison de son insertion à la n dela vie de Thècle, restent à déterminer. Nous nous proposons del’éditer et de l’étudier prochainement.

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    48  Milan, Bibliothèque Ambrosienne, C 123  sup. ( gr. 213), parch.,365 × 255, 2 col., 198 fol., XIe-XIIe  s. ;  APThe 1-43 (BHG 1711) :fol. 30ra-37va; texte n° III (BHG 1715) : fol. 37va-39ra.

    49  Milan, Bibliothèque Ambrosienne,  F 144 sup.  ( gr. 377 ), parch.,330 × 247, 2 col., fol. 12-171, XIIe  s. ;  APThe 1-43 (BHG 1711) :fol. 20ra- 24rb ; texte n° III (BHG 1715) : 24rb-25ra.

    50  Vatican, Vat. gr. 1631, parch., 360 × 260, 2 col., 229 fol., XIIe  s. ; APThe 1-43, avec texte n° I (cf. BHG 1711) : fol. 32ra-39vb.

    51  Saint-Pétersbourg, Bibliothèque nationale de Russie,  gr. 94, parch., 295 × 240, 2 col., 121 fol., XIIe  s. ;  APThe 1-43, suivis destextes n° I-II (BHG 1713e) : fol. 5rb-12r b.

    Manuscrits de Nicéphore de Constantinople,  Refutatio et Euersio

     Defnitionis Synodalis Anni 815, conservant une partie des textes

    IV–V (IV,1-2.7-11 et V,1-43)

    Nic NicC  et NicP

    NicC Paris, Bibliothèque nationale, Coislin. 93, bombycin, 345 × 210,1 col., 605 fol., Xe-XIe  s. ; textes IV-V (IV,1-2.7-11 et V ,1-45) :fol. 96r -97v.

    NicP Paris, Bibliothèque nationale,  gr. 1250, parch., 310 × 215,1 col., 330 fol. XIVe  s. ; textes IV-V (IV,1-2.7-11 et V ,1-45) :fol. 266v-267v.

    Manuscrits conservant une partie du texte V (V,12-45) dans un

    orilège en faveur du culte des images

    M Venise, Bibliothèque Marcienne,  gr. 573, parch., 224 fol., XIIe  s. ;texte V,12-45, avec d’importantes omissions, sous le titre Βασιλείουἐπισκόπου Σελευκείας ἐκ τῶν θαυμάτων τῆς ἁγίας πρωτομάρτυροςΘέκλης : fol. 14r -15r .

    P Paris, Bibliothèque nationale,  gr. 1115, papier, petit format, 1 col.,314 fol., copié en 1215 par Léon Cinnamos ; texte V,12-45, sousle titre τοῦ Βασιλείου ἐπισκόπου Σελευκείας ἐκ τῶν θαυμάτων

    τῆς πρωτομάρτυρος τοῦ Χριστοῦ Θέκλης εἰς τὸν Μυρσεῶνα :fol. 261v-262r .

    Version slave

    sla Gand, Bibliothèque de l’Université, ms. 408, édité avec unetraduction latine par F. VYNCKE  – J. SCHARPÉ  – J. GOUBERT, Mučenye svetyje Thekla (Passio s. Theclae). Editio princeps e

    Cod., Gand. 408, Gent 1967.

    Version arménienne

    arm Édition et traduction italienne de Valentina CALZOLARI. « Laleggenda bizantina e gli inediti Prodigi di Tecla armeni », à paraître dans V. CALZOLARI,  Apocrypha Armeniaca, I (CorpusChristianorum, Series apocryphorum, 20).

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    LA FIN DE LA VIE DE THÈCLE : TEXTES ADDITIONNELS 17

    Les diverses combinaisons des textes additionnels et leursliens avec le texte des APThe

    Les textes identiés par des chiffres romains ont été distingués àdes ns d’analyse. Le plus souvent cependant, ils ne sont pas transmisde manière isolée dans les manuscrits des APThe, mais sont associésdans des combinaisons diverses. Les exceptions sont rares. C’est le casdu texte VII – la nale romaine – qui gure seul dans les manuscritsdu groupe C. Ainsi, le texte I – la forme ampliée du chap. 43 –, quiest presque toujours combiné avec d’autres textes (II, III, V, VI), ne setrouve à l’état isolé que dans un seul cas, le ms. 50 (Vat. gr. 1631). Ilen va de même du texte VI : il voisine avec d’autres textes additionnelsdans tous les manuscrits qui le transmettent, à l’exception du ms. 3(Dublin, Trin. College 185), qui le rattache directement à la n primi-tive des APThe.

    Dans l’édition qui suit, nous avons cherché à faire apparaître aussiclairement que possible la physionomie propre des manuscrits et lamanière dont les divers textes additionnels s’y trouvent combinés. C’estce souci de clarté qui nous a conduits à répéter l’édition du texte I(la forme ampliée du chap. 43) et à disposer en synopse les débutsdes textes V et VI, ainsi que les titres intermédiaires propres à certainsmanuscrits.

    Texte I + II : n des manuscrits 26 et 51 (BHG 1713e).  Cette naleest inédite. Elle vient enrichir d’un élément supplémentaire le tableaudes trois versions de la n des  Actes de Thècle  dressé par GilbertDagron4. Elle se compose d’abord de la forme ampliée du chap. 43(texte I), avec la mention de l’insuccès de la prédication de Thècle àl’adresse de sa mère Théoclie et de sa visite au tombeau de Daphnéoù elle avait rencontré Paul et Onésiphore. De la forme primitive, elleconserve la phrase « elle s’endormit d’un beau sommeil », alors quetous les autres témoins du texte I omettent cette mention de la mort

    de Thècle. Cette phrase est ensuite complétée par un génitif absolu,indiquant que la dépouille de Thècle s’est enfoncée sous terre « dans sademeure sainte » – le martyrium – où l’on célèbre sa mémoire (texte II).Ce même ajout est aussi conservé à la n de la version slave. Maisdans cette version, curieusement, il est précédé de la forme primitivedu chap. 43, et non pas de la forme ampliée (texte I), à la différencedes mss grecs 26 et 51.

    Textes I + III : n des manuscrits 45, 48 et 49 (BHG 1711 +1715).

    Ce récit du conit de Thècle avec les médecins de Séleucie et de sa dis- parition miraculeuse dans le rocher est connu depuis la n du XVIIe siècle,

    4.  G. DAGRON, Vie et miracles de sainte Thècle, Bruxelles 1978, p. 47-51.

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    grâce à l’édition que Joannes Ernestus Grabe a donnée des  Actes de Paul et Thècle sur la base du manuscrit d’Oxford, Baroccianus 1805. Letexte de cette nale a été reproduit par Lipsius d’après Grabe, sous le

    sigle G, dans l’apparat critique de son édition (p. 269-272) ; il a aussiété reproduit et traduit par Léon Vouaux6. Le même récit se trouve éga-lement transmis dans le texte VI, sous une forme souvent très prochedu texte III. Lequel de ces deux textes a conservé la forme la plusancienne de l’histoire du complot des médecins et de la disparition deThècle dans le rocher ? Nous reviendrons plus loin sur cette question,qui touche de près au problème de la liation entre les diverses ns dela vie de Thècle.

    Pour notre édition, nous avons utilisé, outre le manuscrit d’Oxford(G = 45), deux autres manuscrits de Milan (48 et 49). La collation

    du ms. 45 a fait apparaître quelques erreurs de lecture de Grabe (voirIII,12.35.41.42.54). Les nouveaux témoins de Milan ont permis d’amé-liorer sur plus d’un point le texte édité par Grabe sur la base du seulmanuscrit d’Oxford. Nous leur avons donné la préférence non seule-ment lorsque 45 s’est avéré défectueux (voir III,12.49.66-67), mais aussilorsque la leçon de 48 et 49 nous a semblé s’imposer, notamment parcequ’elle trouve conrmation dans la tradition manuscrite du texte VI(voir par ex. I+III,3.4.5.13.38) ou dans la réécriture du Métaphraste(voir III,12.66-67). Les deux manuscrits de Milan vont presque tou- jours de pair, au point qu’on peut se demander si l’un n’a pas servide modèle direct à l’autre. Si cela devait être le cas, plusieurs lieuxvariants du texte III permettent d’exclure l’hypothèse qui verrait dans49 une copie de 48 (voir III,28.30.56.74.82-83.85).

    Texte I se terminant par une doxologie, non suivi d’un autre

    texte (manuscrit 50) ; suivi du début du texte VI (manuscrits 27

    et 28) ou du début du texte V (manuscrits 29 et 30).   Dans les deuxsections précédentes et dans la suivante, le texte I – ou des élémentsdu texte I – se rattache immédiatement à un autre texte, sans césure et

    sans titre intermédaire. Dans les manuscrits regroupés dans la présentesection au contraire, le texte I n’a pas de suite immédiate : il sert deconclusion aux  Actes de Paul et Thècle  et se termine par une doxolo-gie. Dans le Vat. gr. 1631 (ms. 50), cette doxologie n’est suivie d’aucuntexte additionnel. Il en va autrement dans les quatre autres témoins, quiappartiennent tous au groupe B des manuscrits des APThe : la doxolo-gie est suivie d’un titre introduisant le texte VI, dans l’Ambrosianus D92 sup. et l’Angelicus gr. 108 (mss 27 et 28), ou d’un titre introduisantles textes V+VI, dans le Chigi gr. 31 et le Sinaiticus gr. 526 (mss 29et 30).

    5.  J. E. GRABE, Spicilegium SS. Patrum, ut et haereticorum, seculi postChristum natum I, II et III , Oxford 1698, p. 115-119.

    6.  L. VOUAUX,  Les Actes de Paul , Paris 1913, p. 232-238.

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    LA FIN DE LA VIE DE THÈCLE : TEXTES ADDITIONNELS 19

    La conservation isolée du texte I dans le ms. 50, sans autre récitsur Thècle à la suite, soulève la question suivante : le ms. 50 reète-t-ilun stade ancien de la tradition, antérieur aux diverses combinaisons du

    texte I avec d’autres textes additionnels ? Ou bien le ms. 50 résulte-t-ild’une amputation secondaire, par un copiste qui a préféré laisser decôté le texte additionnel qui suivait et qui était annoncé par un nouveautitre, comme dans les mss 27, 28, 29 et 30 ? La première possibilitésignierait que la forme ampliée du chap. 43 a d’abord vu le jour demanière indépendante, sans lien à l’origine avec les textes additionnelsqui lui font suite dans deux groupes de manuscrits (I + II dans 26.51 ;I + III dans 45.48.49). Cette origine indépendante du texte I nous paraît peu probable et nous sommes enclins à retenir le second terme de l’al-ternative.

    Texte I sans doxologie, suivi du début du texte V : manuscrits 46

    et 47 (BHG 1713 + 1716).  Reconnaître l’enchaînement immédiat destextes I et V dans la forme textuelle représentée par les manuscrits 46(St-Pétersbourg, gr. 213) et 47 (Vat. gr. 1190) n’est pas évident. Dansces témoins en effet, le texte I n’est présent que sous forme de tracesdans la phrase qui précède le début du texte V : la précision selonlaquelle Thècle « a rendu témoignage à sa mère par ces paroles et parbeaucoup d’autres » (καὶ ἕτερα πλείονα), attestée par 46 et 47 ; la moti-vation du départ pour Séleucie par l’incrédulité de Théoclie, attestéedans 47 seulement (ὡς εἶδεν αὐτὴν μὴ πειθομένην, καταλιποῦσα αὐτήν ;« quand elle vit qu’elle ne se laissait pas persuader, elle la quitta »). Cestraces sont cependant sufsantes pour conclure que la forme textuelleconservée dans 46 et 47 remonte à un modèle qui contenait la formeampliée du chap. 43 (texte I).

    Textes IV + V + VI : manuscrits 2.9.18 / 37 (BHG 1718m) ; textesV + VI : manuscrits 1 / 25.29.30 / 46.47 (BHG 1718n) ; texte VI

    seulement : manuscrits 3 / 27.28 (BHG 1716a). Plusieurs raisons nous

    ont incités à regrouper dans un même ensemble l’édition des textes IV,V et VI7.(1)  Les textes IV et V forment une unité. Ils constituent le préambule

    et le corps d’une lettre adressée à l’autorité impériale pour témoignerde l’origine de « la véritable image de la sainte apôtre ». Cette lettre estconservée dans trois contextes différents : dans un groupe de manuscrits

    7. L’ensemble constitué par les textes IV-V-VI a été édité une première fois par Gilbert Dagron et Joseph Paramelle sur la base du manuscrit d’Édimbourg

    225 (ms. 9), dans un appendice de l’ouvrage de G. DAGRON, Vie et miracles, op.cit.  (n. 4), p. 413-421 (voir plus bas note 14). Le texte VI conservé dans l’An-gelicus 108 (ms. 28) vient de faire l’objet d’une édition par François BOVON et Bertrand BOUVIER , « Miracles additionnels de Thècle dans le manuscrit deRome,  Angelicus graecus 108 »,  Apocrypha  24 (2013), p. 91-110.

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    des APThe8 ; dans un ouvrage de Nicéphore I, patriarche de Constan-tinople de 806 à 8159 ; dans un orilège de textes en faveur du cultedes images10. (1) Dans les manuscrits des APThe, elle est adressée aux

    empereurs (θειότατοι ; αὐτοκράτορες) et elle rapporte non seulementles circonstances de la confection et de la transmission de l’image deThècle (première partie), mais aussi la guérison d’un enfant paralytique,la conversion de sa famille et la fondation d’une église de Sainte-Irène(deuxième partie). (2) Chez Nicéphore, elle est présentée comme unelettre de Basile de Séleucie (évêque entre 431 et 468 environ) à l’em- pereur Léon (457-474), et seule la première partie, relative à l’image deThècle, est citée11. (3) Dans le orilège iconodule des manuscrits deVenise (M) et de Paris (P), le passage cité correspond au texte V,12-45et il est introduit par un titre : « De Basile, évêque de Séleucie, extrait

    des Miracles de Thècle, la sainte première martyre » dans M ; « DeBasile, évêque de Séleucie, extrait des Miracles de Thècle, la premièremartyre du Christ, au Bois de Myrtes » dans P.

    L’appartenance des textes IV et V à une même composition estconrmée par l’observation suivante. Dans le préambule à la première personne, l’auteur utilise plusieurs titres protocolaires pour s’adresseraux souverains (« Votre Piété », « Votre Puissance ») ; dans la phrase quiconclut le texte V, il renoue avec ce même style protocolaire (V,84-87) : « Et la plus grande partie de la ville fut illuminée par le ChristJésus notre Seigneur, lui qui a illuminé les yeux de l’esprit de VotrePuissance glorieusement victorieuse » (τῷ φωτίσαντι τοὺς ὀφθαλμοὺςτῆς διανοίας τοῦ καλλινίκου κράτους ὑμῶν). Le fait que cette dernière phrase ne soit conservée que par les manuscrits 2, 9, 18 et 37 n’a riend’étonnant, puisque ces témoins sont aussi les seuls à conserver le texteIV. Les manuscrits qui transmettent le texte V sans le texte IV (n° 1,25, 29, 30, 46, 47) représentent une forme textuelle secondaire, quirésulte de l’élimination du début de la « Lettre aux empereurs » jusqu’àἵνα συντόμως εἴπω, εἰσελθοῦσα ἐν Σελευκείᾳ (IV,1-11) et de la phrasenale avec l’adresse à « Votre Puissance » (V,85-87). Le texte, ainsi

    débarrassé des verbes à la première personne du singulier et des voca-

    8.  Ce groupe comprend les mss 2, 9, 18 et 37.9.  Voir l’édition de J. FEATHERSTONE,  Nicephori Patriarchae Constantinopoli-

    tani Refutatio et Eversio Denitionis Synodalis Anni 815 (CCSG 33), Turnhout –Leuven 1997, p. 198-200 (chap. 113). L’édition se fonde sur deux manuscrits deParis, Coislin. 93 (NicC) et Paris, gr. 1250 (NicP). Un bref résumé de la Lettrede Basile de Séleucie à l’empereur Léon se trouve dans un autre ouvrage dumême Nicéphore,  Adversus Epiphanidem, chap. 26 (éd. J.-B. PITRA, SpicilegiumSolesmense, IV, Paris 1858, p. 370)

    10.  Dans ce orilège, une partie de la lettre (V,12-45) gure aux fol. 14-15du Marcianus gr. 573 (M) et aux fol. 261v-262r  du Parisinus gr. 1115 (P).

    11.  Dans le texte de Nicéphore, il manque quelques lignes du préambule(IV,2-7, de πρωτομάρτυρος ἐν γυναιξὶ à περιέχει) et toute la seconde partie(V,46-87).

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    tifs adressés aux empereurs, ne se présente plus comme une Lettre etcommence par les mots Μετὰ τοὺς ἀγῶνας τοῦ μαρτυρίου τὴν ἀποστο-λὴν ἐμπιστευθεῖσα (V,1-3).

    (2)  Dans les manuscrits, le texte V (précédé ou non du texte IV)n’est jamais transmis seul, mais toujours associé au texte VI . Autre-ment dit, l’histoire de l’image de Thècle et la guérison de l’enfant para-lytique sont toujours suivis de l’histoire du conit avec les médecins etde la guérison de la lle de Proclianos qui y est enchâssée. Ainsi, notre présentation du texte VI à la suite du texte V reète leur associationdans la tradition manuscrite. Elle ne doit cependant pas masquer l’hé-térogénéité de ces deux textes. Dans l’histoire de la guérison de la llede Proclianos – qui fait partie du texte VI –, Thècle catéchise et baptiseelle-même les nouveaux convertis (VI,56-60). Dans l’histoire de la gué-

    rison de l’enfant paralysé – qui appartient au texte V –, elle enseignecertes l’Évangile de Dieu, mais elle fait venir un prêtre de l’Églised’Antioche pour baptiser le père de l’enfant guéri et sa maison (V,73-81). Les deux récits de conversion présentent ainsi des conceptionscontradictoires du rôle de Thècle dans l’administration du baptême12.

    Cette contradiction indique que la combinaison du texte VI avec letexte IV-V ne va pas de soi. À quand remonte-t-elle ? Deux réponsessont possibles. On peut penser qu’elle est postérieure à la compositionde la Lettre sur l’image véritable de Thècle et qu’elle est due à unscribe qui a simplement copié bout à bout deux textes sur les miraclesde Thècle jusque-là indépendants. Mais on peut tout aussi bien l’attri- buer à l’auteur même de la Lettre sur l’image de Thècle, qui aura vouluasseoir l’autorité de sa composition en la faisant suivre d’un texte plusancien et déjà vénérable, la nale longue des  Actes de Paul et Thècle.

    (3)  La transmission séparée du texte VI dans les manuscrits 27 et28 résulte sans doute d’un développement secondaire. Dans 11 des 14manuscrits qui le transmettent, le texte VI gure à la suite du texte V –l’histoire de l’image véritable de Thècle. Il n’y a que trois exceptions :le manuscrit 3 (Dublin, Trin. Coll 185), où le texte VI suit immédiate-

    ment l’avant-dernière phrase du texte primitif (καὶ πολλοὺς φωτίσασατῷ λόγῳ τοῦ θεοῦ ἀνῆλθεν ἐν τῷ ὄρει...) ; les manuscrits 27 et 28(Ambros. D 92 sup et Angelicus 108), où le texte VI est transmis sousun titre propre, qui le sépare nettement du texte précédent, le chapitrenal des APThe sous sa forme ampliée (texte I). Il est possible que lems. 3 reète un état ancien de la tradition, antérieur à l’association dutexte VI avec le texte V. En va-t-il de même des mss 27 et 28 ? Plu-

    12.  La contradiction n’a pas échappé à l’auteur de la version arménienne

    des  Prodiges de Thècle  (traduction de l’ensemble des textes IV-V-VI) : dansl’épisode de la lle de Proclianos, Thècle enseigne les deux femmes nouvelle-ment converties, mais elle cone le soin de les baptiser à un prêtre du voisi-nage ; voir l’édition des  Prodiges de Thècle  arméniens préparée par ValentinaCalzolari (à paraître prochainement dans la Series apocryphorum).

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    sieurs indices nous amènent plutôt à penser que la transmission séparéedu texte VI dans ces deux témoins reète un développement secon-daire, qui a entraîné la rupture du lien qui unissait texte V et texte VI.

    (a) Les autres mss du groupe B (25, 29 et 30) conservent aussi bien laLettre sur l’image de Thècle que l’histoire des médecins (textes V etVI). (b) Le texte VI est introduit par un titre identique dans le ms. 28et dans les mss 25 et 29 (« Miracles dans le Bois de Myrtes » ; Θαύματαἐν τῷ Μυρσειῶνι), et par une formulation très proche dans le ms. 27(« Miracles de sainte Thècle qui eurent lieu dans le Bois de Myrtes » ;Θαύματα τῆς ἁγίας Θέκλας γενόμενα ἐν τῷ Μυρσαιῶνι). (c) Curieu-sement, le toponyme caractéristique de ce titre ne gure pas dans lerécit du texte VI, mais il se trouve deux fois dans la Lettre sur l’imagede Thècle (V,9-10 et V,51-52), et surtout dans le titre des manuscrits

    qui transmettent l’ensemble des textes IV–V–VI, « Miracles [variante :Hauts faits] de la sainte apôtre et première martyre Thècle dans le Boisde Myrtes ». (d) La présence dans les mss 27 et 28 de l’épisode de laguérison de la lle de Proclianos reète plutôt un stade relativement tardif de l’évolution, puisque à l’origine cet épisode ne fait pas partiede l’histoire des médecins (voir plus loin).

    (4)  Les manuscrits qui transmettent l’ensemble des textes IV–V–VI(2, 9, 18 et 37) sont les manuscrits de base de notre édition. Si nousavons choisi d’éditer ensemble les textes IV–V–VI, c’est aussi parceque les quatre manuscrits dans lesquels ils s’enchaînent (2, 9, 18 et37) s’avèrent être ceux qui ont conservé la forme textuelle la plusancienne. C’est pourquoi notre édition est essentiellement fondée sur letémoignage de tout ou partie de ce groupe de manuscrits13. C’est aussi pourquoi notre édition reste très proche de celle de Gilbert Dagronet Joseph Paramelle, qui ont utilisé comme texte de base le ms. 9(Édimbourg 225)14.

    Texte VII : manuscrits 18 / 35.36.37.39.40.41.42 (BHG 1712 +

    1714). La nale « romaine » conclut les APThe dans les manuscrits

    du groupe C (à l’exception de 38), ainsi que dans le ms. 18. Elle estconnue depuis l’édition de Constantin Tischendorf, où elle constitue la

    13.  Sur le classement des manuscrits et l’établissement du texte, voir plus bas p. 23-26.

    14.  Cf. G. DAGRON, Vie et miracles, op. cit. (n. 4), p. 413-421. À côté du ms.d’Édimbourg 225 (E = 9), Dagron et Paramelle ont retenu « quelques variantesintéressantes » des manuscrits d’Ochrida 4 (A = 37) et de Venise, Marcianusgr. 573 (M). Nous nous écartons de leur édition lorsque la leçon qu’ils ont rete -

    nue (sur la base de 9, 37 ou M) s’est avérée isolée dans la tradition manuscrite(voir V,5-6.17.32.58.59 ; VI,24.46.47.53(bis).56) ou lorsqu’un choix différentdu leur nous a semblé s’imposer, soit à partir de notre propre collation (voirIV,titre ; V,41 ; VI,16.49.96), soit sur la base du classement des manuscrits quenous avons établi (voir V,13.27.34.58 ; VI,35.53.74-75.79-80.90-91.92.92-93).

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    (1) Mss 2, 9, 18, 37 : textes IV–V-VI, introduits par un titre. Cette pièce nouvelle prend place après une copie des APThe, qui se conclutdans 2 et 9 par la nale primitive complète, et dans 18 et 37 par la

    nale « romaine ». Cette particularité de 18 et 37 est le signe d’une parenté entre ces ces deux manuscrits, conrmée par une série deleçons qui les distinguent aussi bien de 2 et 9 que des autres témoins 17.Dans ce groupe, 2 occupe aussi une place à part, non seulement parcequ’il remplace le texte VI par la réécriture du Métaphraste dans la der -nière partie de l’histoire du conit avec les médecins, mais aussi parcequ’il présente un certain nombre de variantes qui lui sont propres18.

    (2) Ms. 3 : texte VI, intégré sans interruption dans une copie desAPThe, qui se conclut par la nale primitive, sans la mention de lamort ; le texte VI ne contient pas l’histoire de la guérison de la lle de

    Proclianos.  (3) Mss 46 et 47 : textes V–VI, intégrés sans interruption dans une

    copie des APThe. Les deux témoins, étroitement apparentés, se caracté-risent par de nombreuses leçons propres, manifestement secondaires. Latendance à l’amplication est plus forte dans 47 que dans 46.

    (4) Ms. 1 : textes V–VI, introduits par un titre ; la copie des APThequi précède ces textes se conclut par la nale primitive, sans la mentionde la mort ; le texte VI ne contient pas l’histoire de la guérison de lalle de Proclianos.

    (5) Mss 25, 27, 28, 29, 30, appartenant tous au groupe B des manus-crits des APThe : textes V–VI (25, 29, 30) ou texte VI (27, 28), intro-duits par un titre ; ce titre marque une séparation nette entre les textesadditionnels et la copie des APThe qui précède. Dans ce groupe, 27 et30 ont une étroite parenté, manifestée par les leçons communes qui lesdistinguent de 28 et 29 dans le texte I et de 25, 28, 29 dans le texteVI19. Dans le texte V, les mss du groupe B (25, 29, 30) vont le plussouvent ensemble, à l’exception de quelques leçons communes à 25 et29, qui les distinguent de 3020.

    (6) Mss de Nicéphore de Constantinople (Nic = NicC et NicP) : textes

    IV-V (IV,1-2.7-11 et V,1-45) ; mss du orilège en faveur du culte desimages (M et P) : texte V (V,12-45). Ces témoins n’appartiennent pasà la tradition manuscrite des APThe, mais ils transmettent l’histoire del’image véritable de Thècle et l’attribuent à Basile de Séleucie. Desdeux témoins du orilège iconodule, P est meilleur que M, qui a opéréde larges coupes dans le texte21. Les accords entre Nic et MP (ou Nic et

    17.  Voir notamment IV,2 ; V,8.10.30.46.52 ; VI,16.20.24.35.57.73.77.90.92.18.  Voir IV,titre.10 ; V,13.14-15.39.57.59.68 ; VI,2.8-9.27.36-37.60.

    19.  Voir I,2.3.6.8-9 (p. 47 et 49) ; VI, 5.15.16.20.21.27.48.67.80.82-83.87.90-91.92.95-96.

    20.  Voir V,11.24.26.30.35.37.43.52.57.59.61(bis).63.70.73.80. Voir aussi lesaccords exclusifs entre 25 et 29 dans le texte VI : VI, titre.14.39.100.

    21. Voir les omissions de M en V,14-15.17.20-24.30-32.38-42.

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    P seulement) sur des leçons propres montrent que le texte de Nicéphoreet celui du orilège ont une origine commune22. Il est signicatif quecette branche indépendante de la tradition appuie souvent la leçon

    transmise par les meilleurs témoins (2, 9, 18, 37)23

    .Les manuscrits du groupe B se distinguent des autres témoins pardes leçons secondaires qui reètent le plus souvent un effort d’allé-gement et de clarication du texte. Dans le texte V par exemple, lesantécédents de la rencontre du père de l’enfant guéri avec Thèclesont simpliés : au lieu de « Sa femme (ἡ γαμετὴ αὐτοῦ) lui écrività Antioche et le t revenir avec hâte. Il demanda à voir la sainte et belle vierge, la première martyre et apôtre Thècle ; il la reconnut… »,les témoins du groupe B (25, 29 et 30) ont « La femme de celui-ci(ἡ δὲ τούτου γυνή) lui écrivit, le t revenir avec hâte et le conduisit

    auprès de sainte Thècle. Lorsqu’il la vit, il la reconnut… »24. Dans letexte VI, les leçons propres au groupe B (25, 27, 28, 29 et 30) seconcentrent dans la seconde partie. Il est probable qu’elles sont aussid’origine secondaire25 ; mais quelques-unes d’entre elles, gurant dansle dialogue entre Thècle et ses assaillants, se trouvent aussi dans letexte III, c’est-à-dire dans l’autre version de l’histoire des médecins, cequi pose un problème particulier sur lequel nous reviendrons26.

    Le manuscrit 1 est un témoin important, mais il comporte des omis-sions qui attestent une volonté d’abréger le récit27. Par ailleurs, il existeun lien de parenté entre 1 et les manuscrits du groupe B, comme lemontrent les leçons communes qui les distinguent du reste des témoins,surtout dans le texte V28 ; nous considérons ces leçons communescomme secondaires.

    Les manuscrits 46 et 47, étroitement apparentés, se caractérisent parde nombreuses variantes secondaires29. Leur témoignage est cependant

    22.  Voir V,16.18.23.28.30.31.37-38.39.23. Voir V,4.5-6.8.15.24.33-34.40. Il arrive que Nic et MP s’accordent avec

    1.25.29.30, mais ces accords sont sans doute fortuits (voir V,10.16.19.23-24).24.  Voir V,65-68 ; pour d’autres variantes propres à 25.29.30, voir V,4.5.5-

    6.20.23.32.40.42.50.51-52.54.81-84.85-87 ; pour des omissions de 25.29.30, voirV,4.25.27.41.44.50.51.60-61.62.70.71-72.75.77.79.

    25.  Voir les leçons de 25.27.28.29.30 en VI,25.33-34.58.59.64-65.67.67-68.77.86.92-93.94.95-96.97.104.

    26.  Les leçons de 25.27.28.29.30 qui s’accordent avec le texte III se trouventen VI,79.80(bis).80-81.86.87.

    27.  Voir notamment les omissions de 1 en V,35.39.39-40.42.61.73.74 ; VI,9-14.15-18.20.70-71.73.74-75.76-77.93.98.

    28. Voir les accords entre 1 et 25.29.30 sur des formulations propres en V,8

    (bis).10.13.15.16.17.18.19.23. 24-25.30.62.64.72 et sur des omissions en V,6.8.16.23-24.28.29.31.56.57-58 ; accords entre 1 et 25.27.28.29.30 en VI,8.78.86.

    29.  Voir par exemple V,6-7.12.18.19.35.36.40.60-61.77.80.85-87 ; VI,5.7.11.11-12.13.15.38.50.54.60.64-65.80-81.89.91.94.97.103. Parmi les caractéristiquesde 46.47, on relèvera l’ajout d’un synonyme (V,30.62.72 ; VI,19.28.30.33.46),

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    important, car il conrme souvent la valeur de la leçon transmise parles manuscrits de base (2, 9, 18, 37 ; 3)30.

    On peut illustrer par deux stemmas les observations qui précèdent

    sur les relations entre les manuscrits des textes V et VI.

    l’usage fréquent de τοίνυν (VI,24.26.33.102), de ὅθεν (V,12.49 ; VI,1.69) et dutitre de μάρτυς et de πρωτομάρτυς pour Thècle (V,18.46 ; VI,13.30.91).

    30.  Outre les lieux variants énumérés dans la note 23 (accords entre 1 et25.29.30), voir V,4.20.26.28.33-34.57.65-66 ; VI,14.86.92-93.99.

    Texte V

    Texte VI

     Nic MP 2.9.18.37 46.47 1 B (25.29.30)

    2 9 18 37 25 29 30

    2.9.18.37 3 46.47 1 B (25.27.28.29.30)

    2 9 18 3725 28 29 27 30

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    Le développement des récits sur la n de la vie de Thècle etleurs rapports avec l’évolution du culte de la sainte

    Quand les divers textes additionnels que nous éditons ont-ils vu le jour ? Peut-on les mettre en rapport avec l’histoire du culte de Thècleet des lieux saints de Séleucie ? D’importants éléments de réponse setrouvent déjà dans l’ouvrage de Gilbert Dagron. Dans son introduction,il distingue et analyse trois versions de la n des  Actes de Paul etThècle, en s’appuyant sur l’édition de Lipsius, et il écrit en conclusion :« À ma connaissance, l’hagiographie ne fournit aucun exemple aussi probant de l’évolution jumelée d’une tradition littéraire et de l’organisa-tion architecturale d’un site31. » Cette afrmation garde toute sa validité. Nous allons maintenant reprendre l’étude de Dagron sur la base de ladocumentation passablement plus étendue que nous avons réunie.

     La fin primit ive du récit des APThe

    Dans les pages précédentes, en parlant de la n primitive, nous avonsconsidéré comme acquis le fait que le récit des APThe s’achevait auchap. 43 par la mention de la mort de Thècle, μετὰ καλοῦ ὕπνου ἐκοι- μήθη. Gilbert Dagron a certes identié cette n comme la « version I »,mais il a aussi suggéré que l’histoire de Thècle devait s’arrêter primiti-vement à la n du chap. 4232. Un argument décisif contre cette sugges-tion est fourni par la version copte des  Actes de Paul conservée dans lePapyrus de Heidelberg, dont l’histoire de Thècle fait partie intégrante.

    Le Papyrus est certes dans un état extrêmement lacunaire à l’endroitoù les APThe se terminent et où commence l’épisode suivant, situé àMyre (page [38]). Mais on peut en conclure de manière sûre qu’il necontenait qu’une version très courte du chap. 43. En effet, les derniersmots du chap. 42 se trouvent à la ligne 3 de la page [38] et le titre del’épisode de Myre à la ligne 13 de la même page. Entre les deux, l’es- pace disponible pour le chap. 43 se limite donc à 9 lignes (lignes 4-12).

    La reconstitution des lignes 11-12 proposée par Pierre Cherix, à la suitede Carl Schmidt33, correspond à la conclusion brève du chap. 43 :

    11 [...] beaucoup [de gens] [...]12 [...] [elle s’endormit ] d’un [beau] sommeil [...]

    Cette nale brève est conservée dans la grande majorité des manus-crits grecs du groupe A et dans la totalité des versions anciennes desAPThe. Par la suite, comme nous allons le voir, la mention de la mort(« elle s’endormit d’un beau sommeil ») a été supprimée dans certains

    31.  G. DAGRON, Vie et miracles,  op. cit.  (n. 4), p. 47-54 (citation p. 54).32.  Ibid ., p. 47 : « Il semble bien que le récit ait pu s’arrêter primitivement

    après la doxologie mise dans la bouche de Thècle à la n du chap. 42. »33.  Cf. C. SCHMIDT,  Acta Pauli, p. 52 (apparatus ad textum ) ; p. 19*.

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    manuscrits du groupe A parce que la légende de Thècle se développaitdans un autre sens34.

     La finale des manuscrits 26 et 51 : une addition au texte,reflet du culte à Séleucie

    La nale représentée par les manuscrits 26 et 51 (textes I + II)fait clairement allusion à la célébration de la mémoire de Thècle, le24 septembre, dans la « demeure sainte » où repose sa dépouille mor-telle, qui s’est miraculeusement enfoncée sous terre. L’οἶκος mentionnédans ce passage (traduit par « temple » dans la version slave) doit êtrela basilique du IVe siècle contenant le martyrium de Thècle, telle qu’elleest décrite par Égérie35  et telle qu’elle apparaît aussi dans les récits

    de  Miracles  du Ve

      siècle36

    . On peut supposer que cette conclusion desAPThe a vu le jour à Séleucie, à l’endroit même où eurissait le cultede Thècle. Étant donné qu’elle mentionne expressément la mort dela sainte, il est tentant de situer son origine avant le pseudo-Basile,auteur de l’ouvrage Vie et miracles de sainte Thècle, c’est-à-dire avantle milieu du Ve  siècle ; cet auteur en effet, comme nous allons le voirmaintenant, rejette ouvertement l’afrmation de la mort de Thècle.

     Le témoignage du Pseudo-Basile : Thècle n’es t pas mortemais s’est enfoncée vivante dans la terre

    La Vie de Thècle, transmise sous le nom de Basile de Séleucie, maisen réalité œuvre d’un auteur anonyme du Ve  siècle, apporte un témoi-gnage capital sur le sort nal de Thècle et le développement de son

    culte37.27 Ἐν ταύτῃ τοίνυν τῇ πόλεικαταχθεῖσα καὶ ἀρεσθεῖσα, καὶτὴν γείτονα καὶ πρὸς μεσημβρίανἀνεστηκυῖαν καταλαβοῦσα κορυφήν,ποιεῖται μὲν ἑαυτῆς ἐνδιαίτημα...

    27 Etant donc arrivée dans cette ville[sc. Séleucie] et s’y étant plu, elle[Thècle] gagna la proche colline qui sedresse au sud, et en fait son séjour...

    34.  C’est le cas des manuscrits 1, 3, 4, 12, 15 et 16.35.  « Et comme, de là [de Séleucie] jusqu’à Sainte-Thècle, un endroit qui est

    à quelque distance de la ville sur un plateau, il y avait environ 1500 pas, j’ai préféré poursuivre ma route jusque-là pour y faire l’étape que je devais faire.Là, auprès du sanctuaire, il n’y a rien d’autre que d’innombrables monastèresd’hommes et de femmes (...). Mais pour en revenir à mon sujet, il y a beaucoupde monastères sur la colline et, en son milieu, un très grand mur qui entourel’église où se trouve le martyrium. Ce martyrium est très beau » ( Journal de

    voyage 23,2.4 ; traduction P. MARAVAL, SC   296, 1982, p. 227-229).36.  Voir G. DAGRON, Vie et miracles,  op. cit . (n. 4), p. 71-73.37.  Πράξεις Θέκλας 27-28 (éd. DAGRON, Vie et miracles,  op. cit . (n. 4),

     p. 278,49-52 ; 278, 63-280,22). Notre traduction suit de près celle de G. DAGRON,ibid., p. 279.281.

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    28 Εὐαγγελισαμένη δὲ τὸν σωτήριονλόγον, καὶ πολλοὺς μὲν κατηχήσασακαὶ σφραγισαμένη καὶ στρατολογήσασατῷ Χριστῷ (...)καὶ διὰ τῶν θαυμάτων μάλισταπάντας ἐναγαγοῦσα πρὸς τὴν πίστιν,ἐκοιμήθη μέν, ὡς ὁ πολὺς καὶἀληθέστερος λόγος, οὐδαμῶς, ἔδυ δὲζῶσα καὶ ὑπεισῆλθε τὴν γῆν, οὕτωτῷ Θεῷ δόξαν, διαστῆναί τε αὐτῇ καὶ

     ὑπορραγῆναι τὴν γῆν ἐκείνην, ἐν ᾧπερτόπῳ ἡ θεία καὶ ἱερὰ καὶ λειτουργικὴπέπηγε τράπεζα, ἐν περιστύλῳ καὶἀργυροφεγγεῖ καθιδρυμένη κύκλῳ,

    καὶ παντὸς μὲν πάθους, πάσης δὲἀρρωστίας αὐτόθεν ἀφιεῖσα πηγὰςἰαμάτων, ὥσπερ ἔκ τινος ὑδρορρόηςτῆς παρθενικῆς χάριτος ἐκεῖθενἐπαντλούσης τοῖς αἰτοῦσι καὶ δεομένοιςἰάματα· ὡς εἶναι πάνδημον ἰατρεῖον τὸντόπον, καὶ κοινὸν καθεστάναι τῆς γῆςἁπάσης ἱλαστήριον.Τὸν γοῦν ναὸν αὐτῆς καὶ πόλιν [...]οὐκ ἂν εὕροις χωρὶς ἀστῶν ἢ ξένων

    ποτέ, πάντων πάντοθεν ἐπιρρεόντωνεἰς αὐτήν, τῶν μὲν ἐπὶ τιμῇ καὶ εὐχῇμόνον, καί τι τῶν οἰκείων ἀναθεῖναιαὐτῇ καὶ ἀνιερῶσαι σπουδαζόντων,τῶν δὲ καὶ ἐπὶ θεραπείᾳ καὶ βοηθείᾳτῶν συνεχόντων αὐτοὺς παθῶν καὶἀλγημάτων ἢ καὶ δαιμόνων.

    28 Après qu’elle eut annoncé la parolesalutaire et catéchisé, baptisé et enrôlédans l’armée du Christ beaucoup degens (...)et que, justement par ses miracles, elleeut amené tout le monde à la foi, ellene mourut nullement, comme l’attestela tradition la plus répandue et la plussûre, mais elle s’enfonça vivante et

     pénétra dans la terre, Dieu ayant ainsidécidé que cette terre s’ouvrît et sefendît pour elle au lieu même où l’ona xé la divine et sainte table de lacélébration liturgique, construite aucentre d’un péristyle circulaire, brillant

    d’argent.C’est là qu’elle fait sourdre pour toutesouffrance et toute maladie les sourcesdes remèdes comme d’une eau courantede grâce virginale, de là qu’elle puiseles remèdes pour qui les lui demandeet l’en prie. Si bien que l’endroitest devenu un lieu de cure et un

     propitiatoire commun à la terre entière.On ne saurait en tout cas trouver

     jamais son temple et sa cité [...] sanscitoyens et étrangers, tous, de partout,

    afuant vers elle, les uns seulement pour l’honorer et la prier, et empressésde lui offrir et de lui consacrer quelquechose de leurs biens, les autres pour luidemander ses soins et son aide contreles maux ou les souffrances, ou lesdémons.

    L’auteur de ce texte connaît manifestement la forme la plus anciennedu récit de la mort de Thècle ; il reprend même le verbe typique de

    ce récit (ἐκοιμήθη), mais c’est pour le nier (οὐδαμῶς) : « elle ne mou-rut nullement ». Selon lui, la tradition la plus répandue et la plus sûreafrme que Thècle s’est enfoncée  et a pénétré vivante  dans la terre(ἔδυ δὲ ζῶσα καὶ ὑπεισῆλθε τὴν γῆν), à l’endroit même où se trouvemaintenant la table d’autel de son sanctuaire. Le ἔδυ δὲ ζῶσα de la Viede sainte Thècle  est à rapprocher du καταδύντος θεοπρεπῶς τοῦ τιμίουαὐτῆς λειψάνου de la nale des manuscrits 26 et 51 ; mais dans un casla sainte pénètre vivante  dans la terre, alors que dans l’autre c’est sadépouille mortelle qui s’enfonce sous terre.

     L’omission de la mention de la mort de Thècle , reflet d’unelégende qui se développe

    La position défendue par l’auteur de la Vie de sainte Thècle  a-t-ellelaissé des traces dans la tradition manuscrite des APThe ? L’absence

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    de l’expression « elle s’endormit d’un beau sommeil » nous fournit un premier élément de réponse. Nous avons vu que cette phrase typique dela n primitive du récit est conservée dans les manuscrits des APThe

    appartenant au groupe A, à l’exception de quelques-uns qui l’omettent38

    .La phrase est également présente dans les manuscrits du groupe C (35à 42, sauf 38) qui rapportent la mort de Thècle à Rome. En revanche,elle est absente dans les manuscrits 27 à 30 (groupe B) et dans lesmanuscrits 45-50 (groupe « divers »)39. Parmi ces témoins, le ms. 50est le seul à ne conserver que le texte I et à ne faire aucune mentionde la n de la vie de Thècle. Tous les autres transmettent davantagede textes additionnels et racontent la manière dont Thècle a quitté cemonde : au terme d’une longue existence ascétique et thaumaturgique,elle a échappé à la violence des débauchés envoyés par les médecins de

    Séleucie et elle est miraculeusement entrée dans le rocher de la grotteoù elle vivait. Ce récit, conservé dans le texte III et dans le texte VI,représente une étape importante dans le développement de la légendesur la n de la vie de Thècle.

     Le confli t avec les médecins de Séleucie et la disparit ionmiraculeuse dans le rocher (textes VI et III)

    La comparaison entre les deux versions de cette histoire montre quele texte VI représente un état textuel plus ancien que le texte III, à

    une importante exception près. L’épisode de la guérison de la lle deProclianos (VI,23-65) ne fait pas partie du texte primitif, mais a étéinterpolé dans l’histoire du complot des médecins. Son absence dans letexte III en est un premier indice, conrmé par deux autres. D’une part,l’épisode manque également dans deux importants témoins du texte VI,les mss 1 (Paris, gr. 1506) et 3 (Dublin, Trin. Coll. 185). D’autre part,l’expression « ils éprouvèrent de la jalousie envers la sainte vierge etservante de Dieu » (VI,20-21) est reprise dans la phrase qui marquele retour à l’histoire des médecins (VI,66-68), ce qui correspond à un procédé classique de l’interpolation. La raison de cette interpolation estfacile à comprendre : on aura voulu illustrer par le récit de la guérisonmiraculeuse de Théonilla l’activité thérapeutique de Thècle, cause de laruine des médecins de Séleucie.

    38.  Les manuscrits du groupe A qui ont laissé de côté la mention de la mortde Thècle sont mentionnés plus haut à la note 34.

    39.  On notera que les deux autres témoins du groupe B font ici exception :le ms. 25 conserve, par contamination, la n primitive des APThe ; le ms. 26

    transmet une nale originale, qu’il partage avec le ms. 51. On relèvera aussi lefait remarquable que presque tous les manuscrits qui omettent la mention de lamort sont de provenance italo-grecque ; cette provenance ne fait aucun doute

     pour 27, 28, 29 et pour 47, 48, 49, 50, et elle est également probable pour 30,45 et 46.

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    LA FIN DE LA VIE DE THÈCLE : TEXTES ADDITIONNELS 31

    En parcourant quelques moments de l’histoire qui nous intéresse,nous allons montrer maintenant qu’ils sont conservés sous leur forme première dans le texte VI et qu’ils ont fait l’objet de remaniements

    dans le texte III. Tout commence par un déplacement. De Séleucie,Thècle monte sur le mont Kalameôn ou Rhodion, et elle s’installe dansune grotte où elle passera de nombreuses années (VI,1-4). Les raisonsde ce déplacement sont développées dans le texte III : Thècle a quittéSéleucie par peur de l’idolâtrie de ses habitants ; une nuée lumineusel’a conduite à sa nouvelle demeure, où elle va affronter victorieuse-ment les nombreuses tentations du diable (III,9-16). Les deux versionsse rejoignent ensuite pour dépeindre dans des termes presque identiquesl’attirance que Thècle exerce sur des femmes de bonne famille (VI,4-7 ;III,17-20). Dans la description des guérisons opérées par Thècle, la for -

    mulation plus simple et plus brève du texte III résulte sans doute d’uneréécriture (VI,8-18 ; III,20-27). Un exemple frappant de la tendance dece même texte III à clarier et à développer une expression jugée tropelliptique se trouve dans le discours de délibération des médecins deSéleucie.

    VI,73-75... καὶ δώσωμεν αὐτοῖς χρυσίον ἱκανόν,καὶ ἄλλο δὲ ταξώμεθα αὐτοῖς,καὶ ἀπελθόντες μιαίνωσιν αὐτὴν

    καὶ οὐκέτι ἀκούει αὐτῆς ἡ Ἄρτεμις.

    III, 38-42... καὶ δώσωμεν αὐτοῖς χρυσίον πολὺκαὶ εἴπωμεν αὐτοῖς·Εἰ δυνηθῆτε φθεῖραι καὶ μιᾶναι αὐτήν,

    διδοῦμεν ὑμῖν καὶ ἄλλα χρήματα.Ἔλεγον οὖν πρὸς ἑαυτοὺς οἱ ἰατροί·Ἐὰν ἰσχύσουσιν αὐτὴν μιᾶναι,οὐκ ἀκούουσιν αὐτῆς οἱ θεοὶ οὔτε ἡἌρτεμις ἐπὶ τῶν ἀσθενούντων.

    Le texte III explicite le bref « Promettons-en-leur encore davantage ;qu’ils aillent la souiller » par un discours direct : « Disons-leur : “Si vous pouvez la corrompre et la souiller, nous vous donnerons encore davan-tage d’argent” » ; la délibération des médecins reprend après cette parole

    enchâssée et développe le simple « Artémis cessera de l’écouter » : « Lesmédecins se disaient ainsi entre eux : “S’ils parviennent à la souiller,ni les dieux ni Artémis ne l’écouteront plus à propos des malades.” »

    Dans la suite du récit, on rencontre d’autres amplications du mêmegenre, caractéristiques du texte III, auxquelles il n’est pas nécessaire des’arrêter. Une de ces amplications mérite cependant d’être discutée,car elle est commune au texte III et aux témoins du texte VI apparte-nant au groupe B (mss 25, 27, 28, 29 et 30). Elle se trouve dans unmoment fort du récit, à savoir le dialogue qui s’engage entre Thècle etles hommes dépravés envoyés par les médecins pour la violer.

    VI,78-81

    καὶ λέγει αὐτοῖς· Τί θέλετε, τέκνα ;

    III,47-52 cf. VI, mss 25.27.28.29.30(gr. B)Καὶ λέγει πρὸς αὐτούς· Τί θέλετε,τέκνα ;

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    Οἱ δὲ λέγουσιν αὐτῇ· Τίς ἐστιν Θέκλα ; ̔Η δὲ εἶπεν· Ἐγώ εἰμι, καὶ τί θέλετε ;Ἐκεῖνοι δὲ εἶπαν· Ἠράσθημέν σου.

     ̔Η δὲ εἶπεν· Ἐμοῦ τῆς γραός ;

    Οἱ δὲ εἶπον· Τίς ἐστιν ἐνταῦθα λεγο-μένη Θέκλα ;

     ̔Η δὲ εἶπεν· Τί αὐτὴν θέλετε ; ἐγώ εἰμι,Λέγουσιν αὐτῇ ἐκεῖνοι· Συγκαθευδῆσαιαὐτῇ θέλομεν.Λέγει αὐτοῖς ἡ μακαρία Θέκλα· Ἐγὼταπεινὴ γραῦς εἰμί, δούλη δὲ τοῦκυρίου μου Ἰησοῦ Χριστοῦ· καὶ κἄν τίποτε δρᾶσαι θέλετε ἄτοπον εἰς ἐμέ, οὐδύνασθε.

    Elle leur dit : « Que voulez-vous, mesenfants ? »Ils lui répondirent : « Qui est Thècle ? »

    Elle dit : « C’est moi ; et que voulez-

    vous ? »Ils répondirent : « Nous brûlons de désir

     pour toi. »Elle dit : « Pour moi, la vieillefemme ? »

    Elle leur dit : « Que voulez-vous, mesenfants ? »Ils répondirent : « Qui est ici la dénom-mée Thècle ? »Elle leur dit : « Que lui voulez-vous ?

    C’est moi. »Ils répondirent : « Nous voulons coucheravec elle. »La bienheureuse Thècle leur dit : « Jesuis une pauvre vieille, mais une ser-vante de mon Seigneur Jésus-Christ ; etmême si vous voulez commettre contremoi quelque inconvenance, vous ne le

     pourrez pas. »

    Qu’est-ce qui empêche de considérer la forme courte comme uneabréviation de la forme longue ? Une telle explication impliquerait quel’on donne la préférence, dans l’édition de ce passage du texte VI, auxmanuscrits du groupe B, alors que ceux-ci présentent partout ailleursdes leçons que nous avons écartées comme secondaires40. D’autre part,on ne comprendrait pas les motifs d’une telle abréviation : pourquoiréduire à Ἐμοῦ τῆς γραός la réponse de Thècle se proclamant servantedu Christ et afrmant avec assurance que ses assaillants ne pourront riencontre elle ? Ici aussi, la tendance à étoffer un texte bref nous semblemanifeste41. Mais comment rendre compte alors de l’accord entre des

    témoins appartenant à deux formes textuelles différentes ? Deux expli-cations sont possibles : soit le remaniement qui est à l’origine du texteIII se rattache à une forme du texte VI proche des manuscrits B ; soitles manuscrits du groupe B ont subi ici et là l’inuence d’un exem- plaire du texte III.

    Quand l’histoire du complot des médecins et de la disparition deThècle dans le rocher a-t-elle vu le jour ? L’auteur anonyme de la

    40.  Voir plus haut p. 25.

    41.  Un argument pourrait cependant être avancé en faveur du caractère primitif du texte long : le « vous ne le pourrez pas » qui conclut la réponse deThècle explique mieux pourquoi les agresseurs afrment sitôt après, dans letexte VI aussi bien que dans le texte III, « Il n’est pas possible que nous nefassions pas ce que nous voulons faire ».

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    LA FIN DE LA VIE DE THÈCLE : TEXTES ADDITIONNELS 33

    Vie  de Thècle, qui écrit vers le milieu du Ve  siècle, ne la connaît pas,comme l’a justement relevé Gilbert Dagron42. Mais nous ne sommes pas certains qu’il faille suivre l’historien français quand il établit un

    lien direct entre la fondation par l’empereur Zénon d’une grande basi-lique sur le site de Hagia-Thekla et l’origine de notre légende :

    La basilique construite par Zénon, peu après 476 en conséquence d’unvœu, s’installe au-desus de la grotte désormais aménagée en martyriumet qui va supplanter l’église-martyrium primitive. Quelque temps après,c’est la légende elle-même qui se modie en fonction des données nou-velles du site, et qui intègre la grotte à la vie même de Thècle : elle y avécu, elle y a disparu, on y voit encore son voile pétrié43.

    Dagron reconstitue ce développement en se fondant sur deux passages

    des  Miracles. Le premier parle d’une grotte « située à l’Ouest et enface du temple lui-même, où il fait bon se promener et s’attarder »44. Lesecond évoque un lieu appelé le Bois-de-myrtes (Μυρσινεών), « l’em- placement qui est un peu plus loin devant le temple » (τὸ δὲ μικρὸνἀπωτέρω τοῦ νεὼ προτεμένισμα), où « on dit et on croit que la viergeséjourne le plus souvent »45. Pour Dagron, ces deux passages désignentun seul et même lieu. Il écrit : « le “Bois de myrtes” n’est d’abord, avecsa grotte, qu’un endroit agréable et frais où vont se reposer dèles et pèlerins, à l’écart de l’église »46. Ce site idyllique a été bouleversé aumoment où la basilique fondée par Zénon a été construite au-dessus de

    la grotte : celle-ci a alors été aménagée et est devenue le lieu central duculte de la sainte, à la place d’une église-martyrium plus ancienne, quiselon Dagron devait se situer plus à l’est.

    L’interprétation de Dagron diverge sur un point important de celledes archéologues qui ont étudié le site de Hagia-Thekla proche deSéleucie. Ce site contient les restes de deux églises majeures : la grande basilique à trois nefs, construite au-dessus de la grotte et entourée d’unmur d’enceinte ; l’église dite « à coupole », du Ve  siècle. Pour Dagron,le sanctuaire fondé par Zénon doit être identié avec la basilique de lagrotte, et non pas avec l’église « à coupole », comme en ont jugé lesarchéologues responsables des premières fouilles47  et comme le pensent

    42.  À propos du passage de la Vie  cité plus haut, DAGRON  écrit (Vie etmiracles, op. cit . [n. 4], p. 52) : « Aucune allusion n’est faite ni à une grotte oùThècle aurait vécu, ni à un complot ou tentative de viol, ni à un rocher de ladisparition, ni à une relique d’étoffe ou de pierre. »

    43.  G. DAGRON, Vie et miracles,  op. cit.  (n. 4), p. 54.44.  Miracle 36,13-25 (G. DAGRON, Vie et miracles,  op. cit.  (n. 4), p. 388-

    389), texte cité plus loin p. 19, note 7.45.  Miracle 23, 9-11 (G. DAGRON, Vie et miracles,  op. cit.  (n. 4), p. 348-

    349).46.  G. DAGRON, Vie et miracles,  op. cit.  (n. 4), p. 53.47.  E. HERZFELD  – S. GUYER ,  Meriamlik und Korykos. Zwei christliche

     Ruinenstätten des Rauhen Kilikiens  ( Monumenta Asiae Minoris Antiqua,  II),Manchester 1930, p. 46-74.

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    ceux qui plus récemment ont repris le dossier 48. Les données dispo-nibles ne permettent pas de trancher de manière assurée. Mais il fautrelever que la solution proposée par Dagron se heurte à certaines dif -

    cultés. D’abord, plusieurs témoignages, dont celui d’Égérie, attestentl’existence, dans le dernier quart du IVe siècle, d’une église et d’un mar -tyrium, entourés d’« un très grand mur ». Si on refuse d’identier cetteéglise du IVe  siècle avec la basilique de la grotte et qu’on la situe un peu à l’est de celle-ci, comment expliquer le fait qu’on n’en ait repéré jusqu’ici aucune trace sur le terrain ? Ensuite, les restes de mosaïquesà motifs géométriques trouvés dans la nef centrale de la basilique dela grotte suggèrent une datation de l’édice dans le dernier quart du IVe siècle49. L’identication avec le sanctuaire fondé par Zénon supposeraitque la construction de celui-ci ait entraîné la destruction d’une église

    antérieure, mais les fouilles n’ont rien révélé de tel.

     La Lettre sur l’ image véritable de Thècle et le miracle de la guérison de l’enfant paralytique (textes IV-V)

     Nous avons vu que l’histoire de la véritable image de Thècle nousest transmise par trois voies différentes : 1° dans certains manuscrits desAPThe ; 2° chez Nicéphore de Constantinople ; 3° dans un orilège enfaveur du culte des images50. De ces trois contextes, lequel est le plusancien ? Le orilège peut d’emblée être écarté, car il laisse de côté le

     préambule épistolaire et la transition narrative entre les « combats dumartyre » de Thècle et l’histoire de l’icône véritable (IV,1-V,11). Il nefait aucun doute que cette histoire a été intégrée dès le départ dans lecadre d’une lettre adressée à l’autorité impériale. La question est desavoir si à l’origine l’auteur et le destinataire de la lettre étaient ano-nymes, comme dans le texte additionnel aux APThe, ou si la lettre était présentée comme un écrit de Basile de Séleucie adressé à l’empereurLéon, comme chez Nicéphore.

    48.  F. HILD  – H. HELLENKEMPER   – G. HELLENKEMPER -SALIES, « Komma-genes – Kilikien – Isaurien »,  Reallexikon für byzantinische Kunst , vol. 4, 1984,col. 182-356, spéc. 228-239 et 324-326 ; H. HELLENKEMPER , « Die Kirchenstiftungdes Kaisers Zenon im Wallfahrtsheiligtum der heiligen Thekla bei Seleukeia »,Wallraf-Richartz-Jahrbuch  47 (1986), p. 63-90 ; F. HILD  – H. HELLENKEMPER ,

     Kilikien und Isaurien  (Tabula Imperii Byzantini, 5), Vienne 1990, p. 441-443.La fouille du site de Meriamlilk / Hagia-Thekla par Herzfeld et Guyer a eulieu au printemps 1907 et a dû être interrompue après trois semaines à causedes protestations de la communauté grecque de Séleucie. H. Hellenkemper acertes repris l’étude du site au cours de plusieurs voyages ; mais il souligne,

    en conclusion de son article de 1986, la nécessité de fouilles plus poussées(« Meriamlik muss ausgegraben werden »).

    49.  Cf. G. HELLENKEMPER -SALIES, Reallexikon für byzantinische Kunst , vol. 4,1984, col. 324-326.

    50.  Voir plus haut p. 19-20.

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    LA FIN DE LA VIE DE THÈCLE : TEXTES ADDITIONNELS 35

    Plusieurs indices plaident plutôt en faveur du premier terme de l’al-ternative. D’abord, il est difcile de comprendre pourquoi une lettreattribuée à Basile de Séleucie serait devenue une lettre anonyme. Le

    deuxième indice est le contexte polémique dans lequel Nicéphore rap- porte l’histoire de l’icône véritable de Thècle. Dans les deux ouvragesoù il en parle, le patriarche de Constantinople commence par rejetercomme fausse une citation de Basile de Séleucie mise en avant par lesadversaires des images ; il introduit ensuite la citation de la lettre surl’icône de Thècle pour montrer que le « vrai » Basile était favorable auximages. Puisque les iconoclastes se réclamaient de l’autorité de l’évêquede Séleucie pour appuyer leur position, il est facile d’imaginer que les partisans des images aient pu lui attribuer une lettre, originairementanonyme, rapportant l’histoire d’une icône de Thècle. Enn, une telle

    attribution a sans doute été facilitée par le fait que le double ouvrageanonyme du Ve  siècle, Vie et   Miracles  de sainte Thècle, transmis dansles manuscrits sous le nom de Basile de Séleucie, a dû circuler asseztôt sous ce même patronage.

    Quand la Lettre sur l’icône de Thècle a-t-elle été composée ? Dagronécrit à ce propos : « On peut penser qu’une image de Thècle était véné-rée à Séleucie au plus tôt à la n du Ve  siècle (la Vie  et les  Miracles n’en soufent mot) et que sa légende naît ou est exploitée à l’époqueiconoclaste51. » La teneur du récit incite à en situer l’origine avant laquerelle des images plutôt que pendant cette dernière. Le texte n’a pas pour visée première de prendre la défense de la vénération des icônesen général, mais de démontrer la valeur et l’authenticité d’une image particulière de Thècle, peinte du vivant même de la sainte dans des cir -constances extraordinaires et conservée dèlement à Séleucie. Elle a eu pour commanditaire un prêtre païen, précipité à bas de son cheval parThècle alors qu’il s’approchait d’elle dans une intention licencieuse. Le peintre qui l’a réalisée de manière parfaitement ressemblante n’a jamaisvu la jeune lle décrite par le prêtre, mais a été inspiré par la puissanceémanant de la sainte elle-même.

    L’histoire de la guérison de l’enfant paralytique et de la conversionde sa famille a-t-elle fait corps dès l’origine avec l’histoire de l’imageou bien s’agit-il d’une adjonction secondaire, comme c’est assurémentle cas du miracle de la guérison de la lle de Proclianos dans le texteVI ? Deux indices parlent en faveur de l’unité de composition des deux parties. D’une part, la même adresse protocolaire à l’empereur, « VotrePuissance » (τὸ κράτος ὑμῶν), est utilisée dans le préambule de la lettre(IV,4) et dans la phrase de conclusion (V,86-87). D’autre part, l’affron-tement de Thècle avec les bêtes à Antioche est évoqué exactementdans les mêmes termes au début de l’histoire de l’image (IV,5-6) et

    dans le corps de l’histoire de l’enfant paralytique (V,70-71) : « les bêtes

    51.  G. DAGRON, Vie et miracles,  op. cit.  (n. 4), p. 414.

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    sauvages et les taureaux très violents » (τοὺς ἀγρίους θῆρας καὶ τοὺςταύρους τοὺς πικροτάτους).

    Voyage souterrain, mort et sépulture à Rome (texte VII)Même Rome a revendiqué l’honneur de posséder le tombeau de

    Thècle. Dans l’ancienne capitale, on commença, probablement au VIIe

    siècle, à visiter une catacombe près de Saint-Paul-hors-les-murs, où unemartyre romaine du nom de Thècle était enterrée et vénérée52. La piété populaire en a fait la Thècle de Séleucie qui serait venue rejoindre, parune voie souterraine, son maître Paul à Rome. Le groupe de manuscritsC (mis à part le no 38) et le manuscrit no 18 racontent le transfert mira-culeux de Thècle à Rome :

    Par la providence de Dieu, elle entra vivante dans le rocher et alla sousterre. Elle se rendit à Rome pour voir Paul ; mais elle le trouva mort.Elle resta là peu de temps et s’endormit d’un beau sommeil. Et elle estenterrée à deux ou trois stades environ53 du tombeau de son maître Paul.

    Cette nale romaine représente une étape tardive dans l’évolution dela légende sur Thècle. Elle suppose non seulement une connaissancede l’épisode des médecins et de la disparition de Thècle dans le rocher(texte III ou texte VI), mais aussi de la mention de la mort de Thècletelle qu’elle est formulée dans la nale primitive (Thècle « s’est endor -

    mie d’un beau sommeil »).S’agit-il là d’une tradition occidentale ? À première vue, on pourraitle penser. Cependant, le texte indique que la sainte s’est endormie « levingt-quatre du mois de septembre » , ce qui correspond à la pratiqueliturgique de l’Orient, et non à celle de l’Occident, où Thècle est fêtéele 23 septembre. Cela a amené Léon Vouaux a émettre l’hypothèse quecette tradition était due à des « moines orientaux, qui, installés auprèsd’un prétendu tombeau de Thècle dans le voisinage de celui de Paul,célébraient la fête de la sainte le 24 septembre54 ». Mais la provenancedes manuscrits du groupe C55  suggère plutôt une orig