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Pistes de réflexion pour une Séquence en Français Seconde professionnelle en français Collège Français (Quatrième Troisième) : « Le Diable en France » de Lion Feuchtwanger Histoire et histoires : un personnage dans la tourmente Nombreuses possibilités pour l’objet d’étude n°2 intitulé « Parcours de personnage » en seconde professionnelle Trois idées forces guident la réflexion pédagogique de cette séquence en français : (textes officiels) 1) Les héros littéraires d’hier sont-ils des héros d’aujourd’hui ? 2) Les valeurs du personnage sont-elles celles d’un auteur, d’une époque ? 3) L’évolution du personnage aide-t-elle le lecteur à se construire ? =>A partir de là, plusieurs pistes peuvent être explorées Sommaire des séances : Séance 1 : Entrée du personnage dans la tourmente -caractéristiques du personnage -Parallèle avec la chronologie Séance 2 : Les valeurs du personnage, de l’auteur « Son regard sur la France » Séance 3 : les outils de la caractérisation- Etude de la langue La description du camp Séance 4 : Les valeurs du personnage, de l’auteur « Ses résistances » Séance 5 : Histoire des Arts Parallèle entre le texte et une œuvre (Ernst, Bellmer….) Séance 6 : Portrait physique, moral d’un personnage Le capitaine Gorruchon/ Perrochon Séance 6: Les temps pour raconter /Etude de la langue Départ du train Séance 7 : Atelier cinéma Autour de la première demi-heure « Les Milles ; le train de la liberté » Sébastien Grall

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Pistes de réflexion pour une Séquence en FrançaisSeconde professionnelle en français

Collège Français (Quatrième Troisième):

« Le Diable en France » de Lion FeuchtwangerHistoire et histoires : un personnage dans la tourmente

Nombreuses possibilités pour l’objet d’étude n°2 intitulé « Parcours de personnage » en seconde professionnelleTrois idées forces guident la réflexion pédagogique de cette séquence en français : (textes officiels)

1) Les héros littéraires d’hier sont-ils des héros d’aujourd’hui ?2) Les valeurs du personnage sont-elles celles d’un auteur, d’une époque   ? 3) L’évolution du personnage aide-t-elle le lecteur à se construire ?

=>A partir de là, plusieurs pistes peuvent être explorées

Sommaire des séances   :

Séance 1 : Entrée du personnage dans la tourmente-caractéristiques du personnage-Parallèle avec la chronologie

Séance 2   : Les valeurs du personnage, de l’auteur« Son regard sur la France »

Séance 3   : les outils de la caractérisation- Etude de la langueLa description du camp

Séance 4   : Les valeurs du personnage, de l’auteur« Ses résistances »

Séance 5   : Histoire des ArtsParallèle entre le texte et une œuvre (Ernst, Bellmer….)

Séance 6   : Portrait physique, moral d’un personnageLe capitaine Gorruchon/ Perrochon

Séance 6: Les temps pour raconter /Etude de la langueDépart du train

Séance 7 : Atelier cinémaAutour de la première demi-heure « Les Milles ; le train de la liberté »Sébastien Grall

Cette séquence peut très facilement être exploitée en quatrième ou en troisième.

Nombreuses possibilités aussi d’atelier d’écriture, (du type Emmanuel Loi) à partir de mots de concepts rencontrés dans le cadre du volet réflexif

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Parcours de personnage   : « Le Diable en France » de Lion Feuchtwanger

Histoire et histoires : un personnage dans la tourmente

Le document Titre : Le Diable en France.Auteur : Lion FeuchtwangerDate de publication : 2010Editions : Belfond:

Pour le comprendre  Il faut aussi tenir compte d’un témoignage très important sur la vie du camp, celui de Lion Feuchtwanger, auteur allemand né à Munich en 1885, qui s’est fait un nom dans le monde des lettres dès les années 1920 avec des romans historiques comme « Le juif Süss ». Opposant nazi déchu de sa nationalité par Hitler, il s’installe en France à Sanary-sur-mer en 1933. Victime de l’article 19 de la commission d’armistice, il est interné aux Milles, période qu’il retrace dans son unique roman autobiographique, « Le Diable en France »

Pour le mettre en perspective.

-* Découvrir le camp en tant que lieu de détention, d’internement à travers un récit autobiographique d’un acteur de cet épisode historique.-*Montrer les différents « dispositifs de résistance » mis en place par l’auteur : vie culturelle, épisode du train de la liberté….-*Le climat relationnel existant entre les internés, entre les internés et l’administration de la première époque du camp.-* Les droits et les restrictions des internés, leurs conditions de détention, leurs possibilités de communiquer avec l’extérieur….-* Montrer toutes les ambigüités ressenties par l’auteur qui s’est réfugié en France avant la guerre et qui se retrouvent enfermés par le gouvernement de la IIIème République et celui de Vichy.

Pour une utilisation en classe.

Propositions d’exploitation/ capacités compétences visées.

Croisements et compléments

Lecture et analyse du document :

L’étude du document « Le diable en France » pourra se faire à travers plusieurs séances de français, (voir fiches jointes) spécifiquement pour les classes de collège et de lycée professionnel :

Fiche 1 (ci jointe) : L’entrée du personnage dans la « tourmente ».

Documents construits de référence (« officiels »)-* Législation française (décret d’internement des étrangers, loi Daladier)., -* Télégramme du ministère de l’intérieur affiché en mairie le 3 septembre 1939 concernant « la concentration des étrangers originaires de l’Empire allemand »-* Extrait de la Constitution de la IIIème République-* Carte des camps de France

Travaux d’historiens :-Zones d’ombre d’André Fontaine ; chapitre « l’hygiène au camp »- Le camp d’étrangers des Milles 1939-1943, André Fontaine Edisud, 1989 (documents photos + Dessins de Franz Meyer et Lipmann Wulf)-« La France des camps » documentaire de Denis Peschanski-* Autres documents bruts :

- Œuvres d’art : Etude pour la puce, (1940) de Wols.- Obsession des briques, Bellmer… qui témoignent des conditions de détention-*Film : « Les Milles : le train de la liberté » Sébastien Grall

Fiche 1 : L’entrée du personnage dans « la tourmente »Introduction   :

Lecture du texte

Annonce de l'internement à la radio (p.18-19)

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« Tout a commencé un soir de la mi-mai (…) J'étais seul, allongé sur le canapé et j'écoutais les informations à la radio. Les choses n'allait pas bien, tant en Belgique qu'aux Pays-Bas. (…) C'est alors que brusquement, on annonça que tous les ressortissants allemands ainsi que tous les apatrides nés en Allemagne et âgés de dix-sept ans à soixante cinq ans, hommes et femmes, domiciliés à Paris, devaient se présenter le jour même à tel et tel endroit pour être internés.(…) Je m'ordonnais : « pas de panique, réfléchis calmement ». Je me disais que ces mesures resteraient très vraisemblablement circonscrites à la ville de Paris et qu'elles n'allaient certainement pas être étendues au Sud qui n'était pas menacé par la guerre. Mais en même temps, j'avais la conviction intime que ces considérations bien raisonnables n'étaient que balivernes.(...) La situation était plutôt déprimante. Depuis neuf mois déjà, je me trouvais pris dans cette souricière qu'était la France, sans pouvoir obtenir d'autorisation de sortie du territoire. Et maintenant, j'allais devoir goûter encore une fois au camp d'internement. »

L'attente et le retour sur le passé (p.24-25)

« En ce temps-là pourtant, en ces jours d'expectative, j'avais l'impression d'être comme mes chats. A chaque fois qu'une voiture gravissait la colline, à chaque fois que quelqu'un arrivait, je me disais : les voilà, ils viennent te chercher.Ma secrétaire ne pouvait s'empêcher de gémir : « Ah, pourquoi n'êtes-vous pas parti en Amérique quand il était encore temps! » (…) Il est vrai que depuis le début de la guerre je n'étais plus libre de quitter le pays ; le gouvernement français me l'avait interdit. Mais je l'avais vu venir de loin, la guerre. En février 1938, juste après l'annexion de l'Autriche, j'avais sérieusement envisagé d'aller m'établir dans un pays qui offrait davantage de sécurité que la France (…) Quelles étaient donc les raisons qui m'avaient retenu en France ? (…) Depuis 1933, je déclarais ouvertement qu'Hitler était synonyme de guerre et qu'il serait impossible de se débarrasser des Nazis sans entrer en guerre. (...)Avais-je le droit de m'enfuir, de me mettre à l'abri? Non, je devais rester. Je croyais sérieusement que je pouvais aider. Après tout, j'avais eu des millions de lecteurs en Allemagne. (…) Je pensais que c'était justement pendant une guerre que je pourrais être utile aux ennemis d'Hitler. Ma curiosité naturelle d'écrivain me retenais aussi.(...) je ne voulais pas que mon roman « Exil » fût interrompu par un déménagement inopportun.Bien sûr, dès le début de la guerre, je compris quelle erreur de calcul j'avais faite. Non seulement les Français ne voulaient pas entendre parler de la collaboration avec nous, les antifascistes allemands (…) ils nous firent interner une première fois. Grâce aux protestations des Anglais, je fus libéré quelques jours plus tard et le gouvernement français me présenta alors ses excuses. (…) Toutefois, on refusa de m'accorder le visa de sortie du territoire que j'avais demandé ».

+ Deux portraits photographiques de Lion Feuchtwanger Couverture du diable en France (Pourquoi les Barbelés, les policiers…)

+ Lion Feuchtwanger interné au camp des Milles

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Cette photo aurait amorcé « le processus de libération par Eleonore Roosevelt à Washington par Président américain et la mise en place du « Presidential Emergency Advisory Commitee », structure qui permettra à LF et d’autres intellectuels de s’échapper.

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Fiche 1 : L’entrée du personnage dans « la tourmente »Introduction   :

Lecture du texte

Introduction   (suite):

Objectifs   : *Caractériser le personnage. Qui est-il ?*Pourquoi se retrouve-t-il dans ce qu’il appelle la « tourmente » ?* Caractériser cette tourmente ». (faire le point sur le contexte historique)

- Qui est le narrateur de ces extraits ? Rappel sur les caractéristiques du roman autobiographique.- Recherche du vocabulaire inconnu : Exemple de mots clés, ressortissants, apatrides, internement, souricière, expectative, antifasciste, visa, amertume, jérémiades…- Emettre collectivement des hypothèses de lecture : Qui ? Quand ? Où ? Pourquoi ? (éventuellement les noter au tableau) - Montrer que le travail de recherche qui suit permettra de valider ces hypothèses.

Analyse du groupement de textes

I- Reconstituer le contexte historique

1) Relever les indicateurs spatio-temporels du premier extrait Mi- mai, Belgique, Pays-Bas, Paris, Sud, neuf mois déjà…..

2) A partir de la phrase «   Les choses n’allaient pas bien, tant en Belgique qu’aux Pays-Bas   » et après une rapide recherche historique (voir chronologie) indiquez la période évoquée et ses événements majeurs .

Invasion de la Belgique et de la Hollande par l’armée allemande, avant l’invasion de la France au cours du mois de mai 1940

3) Après relecture de ce premier extrait et avec les définitions des mots apatrides, ressortissants   en déduire ce qu’est un camp d’internement

Camp où l’on enferme certain étrangers (allemands, autrichiens…) présents sur le territoire français au moment de l’invasion de la France par l’Allemagne nazie

(Très certainement nécessité d’inscrire, de compléter cette première partie sur une chronologie à construire avec les élèves et à mettre en parallèle avec une chronologie sur le début du conflit)

II- Qui est Lion Feuchtwanger ?

Tableau à compléter (justifiez en citant le texte), + recherche B2i

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Nationalité

Age

Profession

Lieu de résidence

Principaux traits de caractère

Opinions politiques+(ses liens avec La France)

Expression écrite, orale   :

Dans un paragraphe structuré d’une trentaine de lignes, vous expliquerez qui est Lion Feuchtwanger et pourquoi il se retrouve interné au camp des Milles ?

(Complément à donner aux élèves   en fin de séance)   :

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Lion FEUCHTWANGER. Romancier allemand d'origine juive (1884-1958). Lion Feuchtwanger était un pacifiste, un antimilitariste et un résistant antinazi convaincu. Son roman Le Juif Süss, paru en 1925, connut un grand succès,

avant d'être adapté à l'écran en 1940 par les nazis,  pour en faire une oeuvre de propagande antisémite.

En janvier 1933, il était aux États-Unis lorsque les SA mirent à sac sa maison à Berlin, confisquèrent ses biens, le privèrent de sa nationalité, de son titre de docteur, et interdirent ses livres. Il s'exila alors en France, et trouva refuge à Sanary-sur-mer, dans le Var, où il fonda avec Brecht et Bredel le journal "Das

Wort", la plus importante publication antifasciste des écrivains émigrés allemands. En 1936, il publia Le Faux Néron, roman historique où l'on comprend

à demi-mot qu'il parle du nazisme. Il fut interné au camp des Milles en mai 1940, mais assez rapidement libéré, il

parvint à gagner les Etats-Unis où il s'installa définitivement. Le Diable en France, que Lion Feuchtwanger a écrit dès son arrivée aux États-Unis et qui parut pour la première fois en 1942, est le seul document autobiographique

que l'auteur ait publié.

Fiche 2 : Les valeurs du personnage : « Son regard sur la France »Introduction   :

Coupure de Presse

« Les nouvelles littéraires, 25 novembre 1937 : La Côte d’Azur, lieu de rencontre des écrivains européens »Feuchtwanger Memorial Library

Une avec Lion feuchtwanger en photo (cf Volet historique, secteur la Provence, terre de transit et d’immigration, zone de refuge.

A partir des années trente, les réfugiés d’Europe Centrale sont de plus en plus nombreux à fuir le nazisme avec parmi eux les grandes figures intellectuelles et artistiques. La Côte d’Azur leur apporte un cadre de vie privilégié

Oralement :

1) Pourquoi selon vous, l’auteur vit-il en France   ? Depuis quand   ? Expliquez.

Auteur qui est venu en France en exil, pour y trouver refuge, très certainement depuis le début des années trente et l’arrivée de Hitler au pouvoir dans son pays d’origine, l’Allemagne… C’est un intellectuel, antinazi, qui veut échapper au camp de concentration

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en Allemagne. Sanary sur Mer, dans le Sud de la France, sera un lieu de refuge pour de nombreux artistes, intellectuels… austro-allemands qui s’opposent à Hitler.

Faire émerger l’idée de communauté d’écrivain, d’artistes, d’intellectuels Austro-allemands qui ont fui le nazisme et se sont réfugiés en France, notamment à Sanary-sur-mer

Objectifs de la séance de montrer qu’avec son entrée en guerre, la France devient pour Lion Feuchtwanger un piège « Le diable en France » et non plus une terre d’accueil où il fait bon vivre « Heureux comme dieu en France »

Lecture du texte :

I- « Heureux comme Dieu en France »

1) Quelles impressions se dégagent de ce texte   ? Justifiez. Quel regard porte Lion Feuchtwanger sur la France en général et la Provence en particulier

Se dégage une impression de bonheur et de sérénité. Lion Feuchtwanger a un regard « amoureux sur la France, il admire la beauté des paysages méditerranéens et affirment qu’il se sent chez lui

2) Reconstituez les champs lexicaux du bonheur, de la Méditerranée (Monde méditerranéen)

Bonheur :

Méditerranée (Monde méditerranéen) :

3) Qu’est-ce qui vient rompre ce bonheur   ? Expliquez . Que ressent l’auteur à ce moment là   ?

II- Les ressentiments de l’auteur vis-à-vis de la France

1) Indiquez précisément les mesures prises contre l’auteur par le gouvernement français. Compléter le tableau   (justifiez en citant le texte):

Mesures administratives(recherche sur la notion d’internement : qui ? Où ? depuis quand ?)

Restrictions matérielles

Liberté de circulation

2) Pourquoi l’auteur évoque-t-il alors la devise de la République française   : «   Liberté, Egalité, Fraternité   »   ?

Faire immerger l’idée d’injustice, de changement rapide par rapport à ce qu’il vivait, comment il était perçu, avant l’annonce de la guerre.

3) En reprenant le vocabulaire de la fin du texte, vous exprimerez clairement les sentiments que ressent l’auteur vis-à-vis de la France à ce moment là.

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Utiliser les termes « indifférence mêlée d’amertume », « jérémiades », « autre idée des choses », « problèmes concrets »…

Expression écrite, orale:

A la manière de Lion Feuchtwanger, montrez à quel point vous êtes attaché à un endroit de votre choix.Seriez-vous prêt à quitter cet endroit ? Dans quelles circonstances ? Expliquez.

Fiche 2 : Les valeurs du personnage : le regard sur la France

-*Attachement à la maison de Sanary et à sa région.« Pendant les sept années que j’ai passées sur les côtes du midi de la France, j’ai profité, tous les sens en éveil, de la beauté des paysages et de l’insouciance qui caractérise la vie au bord de la méditerranée. Par exemple, quand il m’ arrivait de rentrer de Paris par le train de nuit et que je revoyais au petit matin les côtes bleutées, les pins et les oliviers qui escaladaient les coteaux, quand je sentais à nouveau autour de moi la douceur de vivre méditerranéenne, je poussais un profond soupir de soulagement et me réjouissais d’avoir choisi de vivre sous ces ceux-là. Et lorsque je montais au sommet de la petite colline, vers a maison blanche et ensoleillée, que je retrouvais mon jardin et sa pais profonde, mon grand bureau si clair qui donnait sur la mer, quand je revoyais les contours fantasques de ses côtes et de ses îles ainsi que l’immensité infinie qui s’étendait derrière, quand je retrouvais mes chers livres, alors toutes les fibres de mon être me disaient : c’est ici que tu es chez toi, cet univers est le tien. De même, lorsqu’il m’arrivait d’avoir bien travaillé pendant la journée et que je me promenais dans la nuit tombante dans le silence de mon de jardin que seuls le ressac de la mer et parfois un petit cri d’oiseau venaient troubler, je me sentais en accord avec mon univers et pénétré de bonheur. »Mais du jour où je dus m’attendre à être interné une deuxième fois, le paysage perdit soudain pour moi ses couleurs, et ma vie sa saveur. Certes, rien encore n’était décidé, mais au fond de moi je savais bien que tout était terminé, et l’attente douloureuse de ce qui allait venir anéantissait en moi le désir de jouir de ce que je possédais encore. »

- L’ordre d’internement aux Milles a été confirmé

« Nous étions quatre qui devions partir le lendemain pour les Milles : le peintre R., puis mon voisin et son fils, qui venait juste d'avoir dix-sept ans et qui allait y laisser sa peau, puis moi, et enfin l'écrivain K., un Allemand qui avait combattu en Espagne aux côtés des Républicains.(...) Nous nous étions tous fait une autre idée des choses au moment de notre arrivée en France. Les mots « Liberté, Egalité, Fraternité » s'inscrivaient en grosses lettres au fronton de la mairie, on nous avait acclamés lorsque nous étions arrivés (…) les journaux avaient publié en notre honneur des articles de bienvenue (…) j'avais même été reçu par le Président de la République. Et maintenant, on nous internait. Nous l'acceptions avec une sorte d'indifférence mêlée d'amertume (…) Nous ne perdions pas en jérémiades, nous discutions de problèmes concrets tels que le meilleur moyen de se rendre aux Milles, combien d'argent nous devrions emporter... (…) Comme tous les papiers administratifs français, les formulaires étaient compliqués à remplir. (lien avec la bureaucratie) (…) Le lendemain, nous nous rendîmes au camp en taxi.

-*Annonce à la mairie de Sanary de l'internement des étrangers. Le Départ (p.29 à 32)

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« Je ne regretterais rien. Et lorsque la confirmation tant attendue arriva enfin, je ne regretterais pas non plus de devoir effectivement retourner au camp.Ce fut notre femme de ménage, Léontine, qui m'apporta la nouvelle. (…) cette fois, le communiqué avait été affiché à la mairie (…) j'allais me retrouver une fois encore dans le camp des Milles. L'avis concernait tous les apatrides nés en Allemagne et n'ayant pas atteint cinquante-six ans révolus au premier janvier.(...) Cette nouvelle ne me glaça pas trop les veines, d'autant plus que je l'avais attendue, d'autant plus que j'allais avoir cinquante-six ans très prochainement, je ne pouvais pas échapper quand même à l'internement. (…) Il me restait quarante-huit heures pour me faire mes préparatifs.(...) Le plus important, c'était des couvertures pour la nuit, puis un pliant, car il n'y avait rien pour s'asseoir. Pour les vêtements et le linge, le mieux était de prendre ce qu'on possédait de plus solide, car tout s'élime très rapidement. (…) le laisser-passer nécessaire à mon trajet jusqu'au camp. En effet, nous n'avions pas le droit, nous les non-Français, de quitter notre domicile sans être muni d'un sauf-conduit spécial.(...) même pour aller en camp d'internement ».

*Fiche 3 : Le camp des Milles : un lieu ordinaire pour une histoire « extraordinaire »

Etude de la langue/ Les outils de la caractérisation (description)

Le petit bourg nommé les Milles est très laid, mais les environs sont agréables et charmants ; des terres vallonnées, du bleu et du vert, de petits ruisseaux, de vieilles fermes, des oliviers, des vignes, beaucoup de prés couverts d’une herbe si rare dans la région, un grand aqueduc aux arches téméraires et que l’on voyait de loin. C’est au beau milieu de ce magnifique paysage que se dressait, dans sa laideur indescriptible, notre tuilerie.

Le bâtiment principal était immense et peu élevé, entouré de cours blanches et désertes. Quelques petits bâtiments annexes servaient de bureau, de poste de garde, d’infirmerie, de cuisines et de remise. L’ensemble était entouré sur deux côtés par un mur de briques et sur les deux autres par un talus, la sécurité de l’ensemble était renforcée par une débauche de fils de fers barbelé surveillés par des sentinelles. Les détenus avaient l’habitude de suspendre leur linge aux barbelés de la cour arrière, et ce linge bigarré flottait donc au vent tandis que les sentinelles déambulaient nonchalamment de l’autre côté, et l’on était pris d’un sentiment étrange quand, depuis cet endroit, on jetait un coup d’œil sur le paysage vallonné et charmant, sur ce vert tendre qui semblait si proche et pourtant si inaccessible.

Si l’on se tournait vers l’un des grands portails pour regarder à l’intérieur du bâtiment principal, on ne voyait rien d’autre qu’un immense trou noir. Chaque fois que l’on pénétrait dans ce bâtiment, il fallait tout d’abord habituer ses yeux à la pénombre qui y régnait. C’est surtout au rez-de- chaussée que l’on ne cessait de trébucher : des couloirs obscurs qui longeaient les niches prévues pour les fours ne laissaient que peu de place pour se faufiler entre les paillasses des détenus. Le tout faisait un peu l’effet de catacombe, et c’est d’ailleurs le nom que nous donnions à l’endroit.

Un petit escalier en bois, assez rudimentaire et qui n’avait pas l’air très solide, menait au premier étage. Là, les salles étaient vastes, certes, mais les fenêtres avaient été condamnées par des panneaux de bois, et les ouvertures plus petites, qui n’avaient pas été condamnées, étaient recouvertes de peinture bleu foncé, afin qu’aucune lumière ne filtrât à l’extérieur-tout cela à cause des alertes aériennes. Ce premier étage était donc lui aussi plongé en permanence dans la pénombre, et il n’était pas envisageable d’y lire. Le soir, il était éclairé par quelques ampoules de faible puissance qui soulignaient en fait d’avantage l’obscurité quelles ne la supprimaient.

Comme les cours étaient exposées la plus grande partie de la journée à la lumière crue du soleil, l’intérieur du bâtiment n’en paraissait pas que d’autant plus sombre. En outre, il était rempli de poussière de brique. Cette poussière qui s’accumulait partout et que tout le monde piétinait rendait le sol très inégal ; des masses de briques ébréchées et qui tombaient littéralement en poussière encombraient le chemin, et partout, partout, partout, la poussière était présente.

Lion Feuchtwanger, Le diable en France, Belfond, 2010, p.36-37

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*Fiche 3 : Le camp des Milles : un lieu ordinaire pour une histoire « extraordinaire »

Etude de la langue/ Les outils de la caractérisation (description)

La tuilerie en 1940

La tuilerie aujourd’hui

A retenir   :

Les outils de la description donnent les caractéristiques précises de la personne, du lieu, de l’objet que l’on décrit. Ces principaux outils sont les suivants :

- Les adjectifs qualificatifs , attributs ou épithètes qui caractérisent le nom

- Les adverbes renforcent le sens d’un mot en caractérisant une manière d’être ou d’agir (adverbes en « –ment surtout »)

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- Les compléments du nom apportent une précision au nom, et sont introduits par « de »

- Les propositions subordonnées relatives , introduites par un pronom relatif (qui, que quoi, dont, où), donnent une qualité, une particularité au mot-antécédent qu’elles complètent

- La comparaison , introduite le plus souvent par « comme », permet également d’enrichir la description.

Lecture, observation   : Les outils pour caractériser

Après avoir lu le texte, remplissez les cases vides du tableau ci-dessous

Outils de caractérisation exemples

Adjectifs épithètes (en trouver au moins sept)

Adjectifs attributs (en trouver au moins sept)

…de briques… (ligne 8)

(en trouver cinq autres)

Propositions relatives (en trouver au moins quatre)

…déambulaient nonchalamment…

(en trouver quatre autres)

Exercice, le choix des mots   :

Replacez les mots de la liste suivante dans le texte :

Immédiatement-familier-vaste-contre laquelle je me cognais sans cesse-heureux-intime-sombre premier-immédiat- bas- de bois-moindre (deux fois)-qui jonchait le sol

Et pourtant, bien que ce …………………… étage ne fût rien d’autre qu’un………………. trou noir, je fus……………………… de me retrouver là, car c’était là que j’avais habité lors de ma première détention, je connaissais le moindre coffrage ………………………qui condamnait les fenêtres, la ………………….latte, la ………………brique. Il est étrange de constater à quelle vitesse l’homme est capable de créer un lien avec son environnement……………………..; il semble vouloir partager………………………..avec les objets inanimés qu’il approche quelque chose qui touche à son être le plus…………………., de sorte qu’il prend possession de l’objet et que, dès lors, celui-ci lui appartient et devient une partie de lui-même ; comme j’avais déjà séjourné là par le passé, cette salle………………, au plafond………………., avec sa poussière et sa saleté et la paille……………………, avait perdu pour moi ce qu’elle pouvait avoir d’horrible et de repoussant ; j’avais instauré un lien avec ces choses ; telle poutre ………………………………………..était mon ennemie, alors que tel recoin assez vaste m’était presque devenu…………………….

Lion Feuchtwanger, Le diable en France, Belfond, 2010, p.3

Ecriture

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La description du bâtiment des Milles suit un ordre, des étapes. Lesquelles ? Relevez des indices dans le texte qui indiquent ces étapes. A la manière de Lion Feuchtwanger, décrivez les images proposées en utilisant au moins huit adjectifs, une comparaison, deux propositions relatives quatre adverbes, et trois compléments du nom.Vous emploierez le pronom personnel « je » avec l’œil de celui qui découvre pour la première l’environnement proche de ce lieu, le lieu lui même et son intérieur. Respectez la structure proposée. Soulignez les outils de la caractérisation proposés.

OU

OuA la manière de Lion Feuchtwanger, décrivez votre établissement scolaire, votre maison, un bâtiment qui vous cher… en utilisant au moins huit adjectifs, une comparaison, deux propositions relatives quatre adverbes, et trois compléments du nom.

La ville de est très…………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………

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…………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………..

C’est au beau milieu de…………………………………………………………………………………………………………………………..que se trouve………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………..…………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………..

Le bâtiment principal est…………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………….…………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………..

Chaque fois que je pénètre dans ce bâtiment…………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………..…………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………..

L’intérieur du bâtiment en parait d’autant plus ………………………………………………………………………………………………………………………

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Fiche 4 : Les valeurs du personnage : résister

-*Lion Feuchtwanger est interné maintenant depuis plusieurs semaines. Les conditions d’internement sont de plus en plus précaires et son état d’esprit se dégrade (p.90-91)« Je faisais tout ce que je pouvais pour être sur de trouver le sommeil la nuit suivante. Pendant la journée, je marchais beaucoup et je m’asseyais aussi peu que possible. Malgré cela, je devais souvent me contenter de trois à quatre heures de sommeil, et même quand je passais une bonne nuit, je n’arrivais jamais à dormir plus de cinq ou six heures. Le reste du temps, j’étais éveillé, allongé sur ma paillasse, entouré de gens qui geignaient ou ronflaient, et le caractère pitoyable et indigne de ma situation me remplissait dune rage impuissante ; je n’arrivais pas à me raisonner ; je me disais : en ce moment même, au moment où tu es là allongé sur ta paillasse, il ya des gens, un peu partout dans le monde, qui lisent tes livres sur la barbarie nazie, et dont le cœur se remplit de colère devant cette barbarie, alors que toi, tu es interné ici pitoyablement et dans des conditions indignes, et l’on te soupçonne d’être un complice des barbares. La colère que m’inspirait l’absurdité de cet état de choses, le caractère borné des autorités françaises me révoltaient au plus profond de moi-même. Aucun argument, par exemple l’idée que je n’avais pas affaire à des individus mais à un système, ne parvenait à m’apaiser.J’essayais de penser à autre chose. je m’astreignais à des exercices que je considérais comme des jeux : je m’efforçais par exemple de traduire des vers latins, grecs ou hébreux en allemand et m’employais à des activités que certaines générations antérieures appelaient des « jeux de l’esprit et de l’entendement ». Je cherchais à savoir par exemple à quel moment j’avais fait telle ou telle chose pour la dernière fois? J’avais cinquante six ans, et dès avant ma détention, il m’était arrivé de me demander : et si c’était la dernière fois que tu faisais telle ou telle chose ? Quand je lisais un livre que j’aimais, il m’arrivait de me demander : serait-ce la dernière fois que tu lis ces pages ? Et il en allait de même avec les tableaux que je voyais, les costumes que je me décidais un beau jour à mettre de nouveau, les morceaux de musique que j’écoutais, les gens que je rencontrais. Au fond, tous les jours on prend congé de quelque chose sans le savoir ;A cette époque, au cours des nuits d’insomnie, passées dans la paille et la poussière des Milles, je me demandais : quand as-tu pris ton dernier bain de mer ? Quand as-tu passé la nuit pour la dernière fois avec telle ou telle femme ? Quand as-tu lu Shakespeare pour la dernière fois ?»

- A l’extérieur du camp, dans le nord de la France, la « campagne de France » fait rage et la menace est de plus en plus pressante (p.119-120)

« Tout le midi de la France bruissait de rumeurs, cédait à la panique. Les Français parviendraient-ils à tenir la Loire ? Verdun était-elle tombée ?Une chose était sûre : le camp des Milles ne nous offrait plus la moindre sécurité ; les nazis avaient balayé la résistance de l’armée française et bientôt, très bientôt, ils auraient atteint la vallée du Rhône, bientôt ils seraient tout près de nous. Le seul salut, désormais, si tant est qu’il y en eut un, c’était le sud-ouest, c’étaient les Pyrénées. Les chances de pouvoir se sortir de ce piège semblaient de plus en plus minces : nous nous donnions encore vingt pour cent d’espoir, quinze pour cent peut-être.Il nous fallait absolument réagir. Nous ne pouvions pas rester là à ne rien faire et à attendre que les nazis investissent le camp. Les Français étaient peut-être de bonne volonté, mais nous craignions l’indolence et l’incompétence des autorités, leur affreuse désinvolture, leur tendance au laisser-aller. Nous en avions fait bien des fois l’expérience, et nous connaissions la bureaucratie française. Les autorités dont nous dépendions directement n’oseraient pas entreprendre quoi que ce soit de leur propre initiative ; elles se contenteraient d’attendre les ordres de leur hiérarchie, laquelle ferait exactement la même chose, et au bout du compte, nous verrions arriver les nazis sans que les Français

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aient pris la moindre décision. Si nous ne nous aidions pas nous-mêmes, personne ne viendrait à notre secours.

Etant donné les entrées et les sorties constantes de nouveaux contingents de détenus, vu es changements perpétuels des équipes de garde, il ne régnait pratiquement plus aucune discipline à l’intérieur du camp. Nous faisions strictement ce que bon nous semblait. Normalement, il était interdit de séjourner dans la partie de la cour sur laquelle donnait le bureau du commandant.Mais c’est précisément à cet endroit que nous nous rassemblions désormais par centaines pour montrer au commandant notre inquiétude et notre indignation. Nous gesticulions, nous débattions, nous vociférions. Les sentinelles tentaient mollement de nous faire reculer, mais nous n’en tenions aucun compte.Nous décidâmes de nous adresser au commandant et de lui faire de sérieux reproches. Il y avait parmi nous toute une série d’hommes politiques et d’avocats autrefois célèbres. Les juristes, qui étaient toujours des formalistes, espéraient obtenir des résultats en prouvant que ce qui nous arrivait était illégal. Ils s’emportaient en expliquant que les traités internationaux nous garantissaient le droit d’être éloignés des zones dangereuses, que nous étions sous la protection de la Croix-Rouge, et que sais-je encore. On reparlait beaucoup de la fameuse conférence d’Evian et des accords bilatéraux qui y avaient été conclus au sujet des personnes déplacées dont le statut de réfugié politique avait été connuCertains décidèrent donc de s’asseoir sur des tas de briques pour rédiger avec entrain et détermination des pétitions ; d’autres constituaient des comités et amélioraient les textes et les décisions des premiers. Une délégation devait se présenter au commandant afin de lui transmettre nos revendications. Et même à un moment où il s’agissait de sauver notre peau, il y en avait toujours certains qui trouvaient le moyen de faire les importants. Ils critiquaient la composition de la délégation et le contenu des revendications qu’elle devait soumettre au commandant. Les Sarrois, les Autrichiens, les Tchèques avaient un statut officiel de réfugié politique, de même que les expatriés mariés avec des françaises ainsi que ceux qui étaient en possession d’un visa américain ; tous ces gens voulaient être représentés au sein de la délégation. Qui devait représenter qui et que devait-on demander au juste ?Finalement, on se mit d’accord. Il fallait exiger que les autorités militaires éloignent le plus rapidement possible de la zone où avançaient les troupes hitlériennes ceux d’entre nous qui étaient menacés. La délégation devait comprendre dix membres. On insista pour que j’en prenne la tête, car mon nom était le seul qui dise quelque chose au commandant du camp. Il ne me semblait pas que je sois le plus apte pour cette tâche, mais il m’était difficile de me soustraire à la demande des autresTandis que tous les prisonniers se rassemblaient bruyamment dans la cour, sous les fenêtres du commandant, les délégués demandèrent à être reçus. Le commandant répondit qu’il ne voulait rencontrer que moi.J’entrai dans la petite antichambre. Il y avait là des officiers du camp, huit au total. Ils étaient assis. On n’avait pas prévu de siège pour moi. Je restai donc debout au milieu de cette pièce sans âme, plutôt mal à l’aise au milieu de ces huit officiers silencieux. « Que désirez-vous ? » me demanda le commandantCette situation ne me plaisait pas du tout. Je ne trouvais pas très juste que les officiers français qui détenaient le pouvoir et soient au nombre de huit face à moi qui étais tout seul. Dehors, mes camarades - ils étaient deux à trois milles – attendaient ce qui allait se passer et ils avaient mis en moi tous les espoirs».

Fiche 2 : Les valeurs du personnage : « résister »

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Introduction   :

Lion Feuchtwanger est maintenant interné depuis plusieurs semaines. La vie au camp des Milles est de plus en plus difficile. Il est vital maintenant pour de lui de résister : au nom de quoi ? De qui ? Pour quoi ? Avec qui ? Comment ?

Cet épisode douloureux de sa vie va révéler certaines valeurs morales d’un personnage pis malgré lui dans la tourmente de l’histoire.

Lecture du groupement de texte

I- Les « résistances » du personnage

1) Quel est l’état d’esprit du personnage et pourquoi ? Expliquez et justifiez.

2) A quoi Lion Feuchtwanger doit il résister au quotidien ? Expliquez.

II- Lion Feuchtwanger porte-parole

1) Quelles sont les peurs des personnages ?

2) De quelle menace s’agit-il ? (Dans le cadre d’une recherche au CDI, retrouvez la date approximative des jours de la rédaction du deuxième texte. Les éléèves devront replacer ce texte dans son contexte historique plus général).

3) Quel est le but des revendications des internés ?

4) Reconstituez le champ lexical de « revendication »

5) Quels sont leurs arguments ? comment les internés s’organisent-ils pour être entendu ?

6) Quelle situation particulière joue en la faveur des internés ?

Expression

Personnellement, que faites-vous pour lutter contre l’ennui ou la peur ? (au choix) A développer en une quinzaine de lignes