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Théorie des Di stri but ions T ransfo rmée de F ouri er Convolution Cours abrégé Oli vier RIOUL TELECOM Pari sT ech Dépt. Comelec  

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Théorie desDistributions

Transformée de Fourier

Convolution

Cours abrégé 

Olivier RIOULTELECOMParisTech

Dépt. Comelec

 

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Table des matières

Introduction v  

1 Définition des distributions 1

1.1 Dérivation au sens des fonctions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1

1.2 Dérivation formelle au sens des distributions . . . . . . . . . . . 3

1.3   Complément : les mesures   . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

1.4 Dérivations successives de fonctions . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

1.5 Dérivations successives de distributions . . . . . . . . . . . . . . 10

1.6 L’espace D −∞ des distributions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

1.7   Complément : universalité des distributions  . . . . . . . . . . . . . 13

2 Premières propriétés des distributions 17

2.1 Produit d’une fonction par une distribution . . . . . . . . . . . . 17

2.2 Formules de Leibniz . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 192.3 Changement de variable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20

2.4 Propriétés locales des distributions . . . . . . . . . . . . . . . . . 22

2.5 Distributions impulsives et formules des sauts . . . . . . . . . . . 24

2.6   Complément : le problème de la division   . . . . . . . . . . . . . . . 26

2.7 Distributions à support fini . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27

2.8 Intégrale d’une distribution . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28

3 Croissance et dualité 33

3.1 Distributions O (|x |α) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33

3.2 Distributions à croissance lente . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34

3.3 Distributions tempérées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 363.4 Distributions à décroissance rapide . . . . . . . . . . . . . . . . . 37

3.5 Produit scalaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39

3.6   Complément : dualité de Schwartz   . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41

4 Transformée de Fourier 47

4.1 Transformée de Fourier d’une fonction intégrable . . . . . . . . . 47

4.2 Transformée de Fourier d’une fonction tempérée . . . . . . . . . 50

4.3 Transformée de Fourier d’une distribution tempérée . . . . . . . 52

4.4 Transformée de Fourier inverse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53

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iv    TABLE DES MATIÈRES 

4.5   Complément : fonction caractéristique   . . . . . . . . . . . . . . . . 56

4.6 Translation, modulation, dilatation, symétries . . . . . . . . . . . 574.7 Transformée de Fourier et décroissance rapide . . . . . . . . . . . 59

4.8 Transformée de Fourier d’une distribution à support fini . . . . . 60

4.9   Complément : transformée de Fourier dans L 2 . . . . . . . . . . . 60

4.10 Formule de Parseval . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61

5 Convolution 65

5.1 Convolution de fonctions intégrables . . . . . . . . . . . . . . . . 65

5.2   Complément : convolution de mesures   . . . . . . . . . . . . . . . . 66

5.3 Convolution par une distribution à décroissance rapide . . . . . 67

5.4 Intégrale de convolution et produit scalaire . . . . . . . . . . . . . 70

6 Séries de Fourier 75

6.1 Distributions discrètes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75

6.2 Distributions périodiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76

6.3 Séries de Fourier au sens des distributions . . . . . . . . . . . . . 78

6.4   Complément : séries de Fourier au sens des fonctions  . . . . . . . . 81

6.5 Périodisation et formule de Poisson . . . . . . . . . . . . . . . . . 83

6.6   Complément : convolution périodique   . . . . . . . . . . . . . . . . 85

6.7   Complément : convolution discrète   . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86

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Introduction

Bien qu’il y ait eu de nombreux précurseurs (Heaviside en 1893, Wiener en

1925, Dirac en 1926-27, Hadamard en 1932, Bochner en 1932, Leray en 1934, So-

bolev en 1936, Carleman en 1944), la première étude systématique et complètede la théorie des distributions est due à Laurent Schwartz en 1945, et lui a valu

en 1950 la médaille Fields (le « prix Nobel » des mathématiciens). La notion de

distribution est une généralisation de la notion de fonction qui s’est révélée être

une nécessité pour le progrès de plusieurs théories physiques. La théorie assure

un certain nombre d’opérations indispensables auxquelles les fonctions ne se

prêtent pas toujours. L’exemple le plus connu de distribution est l’impulsion de

Dirac, indispensable aussi bien pour la formulation de la mécanique quantique

qu’en analyse harmonique et en traitement du signal.

La théorie des distributions a apporté les outils mathématiques dont les in-

génieurs avaient désespérément besoin. Elle s’est révélée en particulier être un

moyen exceptionnel pour comprendre le  produit de convolution  et la transfor-mée de Fourier , instruments puissants de calcul en traitement du signal. Il est

d’ailleurs symptomatique qu’un des premiers articles de Schwartz sur les distri-

butions ait été publié dans les Annales des Télécommunications 1.

La richesse supplémentaire qu’apporte la théorie des distributions sur celle

des fonctions ou des mesures provient fondamentalement de ce que les distri-

butions sont destinées à être dérivées . La difficulté initiale (une fonction, même

continue, n’est pas toujours dérivable) est complètement éliminée : considé-

rée comme distribution, toute fonction continue est dérivable ; la dérivabilité

s’étend même à des fonctions discontinues, qui sont dérivables autant de fois

que l’on veut.

L’approche de Schwartz [1, 2] est basée sur la dualité dans les espaces topo-logiques , un concept profond, abstrait, et sans relation apparente avec la phy-

sique. Elle nécessite donc un bagage mathématique assez important en analyse

fonctionnelle moderne, en particulier sur la détermination du type de conver-

gence qui détermine une topologie adéquate dans des espaces de fonctions ré-

gulières (convergence forte) ou dans les espaces duaux de distributions (conver-

gence faible).

1« Généralisation de la notion de fonction et de dérivation ; théoriedes distributions », Annales

des Télécommunications, vol. 3, 1948, pp. 135–140.

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vi   INTRODUCTION 

L’approche de J. Sebastião e Silva2 est à la fois élégante et simple. La théorie

entière se fonde sur un petit nombre d’axiomes intuitifs comme « toute fonctionest une distribution » et « toute distribution est dérivable ». Dans ce modèle, les

distributions sont considérées simplement comme des dérivées de fonctions or-

dinaires, la dérivation étant correctement interprétée au sens général des distri-

butions. De plus, certains résultats difficiles de la théorie de Schwartz (en parti-

culier ceux qui relient une distribution d’un certain type à une fonction dont elle

est dérivée) deviennent triviaux dans l’approche de Silva, car ils sont quasiment

inclus dans les définitions.

On peut résumer en disant que l’on prend au mot la réflexion de Schwartz

dans [2] :

« Les distributions sont un peu pour les fonctions ce que sont les nom-

bres complexes pour les nombres réels ; tout équation algébrique à coefficients réels ou complexes a des racines complexes, toute fonction localement sommable ou toute distribution a des dérivées successives de tous ordres qui sont des distributions . »

Guide de lecture

Ce document présente « tout ce qu’il faut savoir » sur les distributions et

leur utilisation en sciences de l’ingénieur. On insiste en particulier sur leur ap-

plication à l’étude du produit de convolution , de la transformée  et des séries de Fourier .

Comme pré-requis mathématique on suppose connus les propriétés de basedes fonctions d’une variable réelle et les résultats essentiels sur l’intégration de

ces fonctions au sens de Lebesgue. Ces rappels sont données dans le texte sans

preuve. En revanche, contrairement à la plupart des manuels sur le sujet, aucun

théorème sur les distributions n’est admis ou laissé au lecteur :  tous  les résultats

énoncés sur les distributions sont démontrés soigneusement.

Les définitions, notations, propositions, remarques, exemples et exercices

sont numérotées consécutivement, indépendamment de la numérotation des

chapitres et des paragraphes. Dans le texte, on fait référence à un résultat par

son numéro, parfois placé en exposant et entre parenthèses comme ceci(22).

Chaque chapitre se termine par des énoncés d’exercices, qui ne sont pas sou-

vent détaillés par sous-questions ; il s’agit, pour le lecteur, de se convaincre parlui-même de ce qui est énoncé.

2« Sur une construction axiomatique de la théorie des distributions », Révista Fac. Ciencias

Lisboa, 2esérie, A, vol. 4, 1955, pp. 79–186.

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Chapitre 1

Définition des distributions

On considère des fonctions   f  (x ) (ou des distributions) définies sur un cer-

tain intervalle1 I  ⊂  R, à valeurs dans  R  (ou  C). Muni de l’addition   f  (x ) + g (x )et de la multiplication c f  (x ) par un scalaire c  ∈ R ou C, un ensemble donné de

fonctions (ou de distributions) forme souvent un espace (vectoriel)  sur R (ou C).

1.1 Dérivation au sens des fonctions

La dérivation est une opération particulière sur des fonctions que l’on mo-

délise ici par la donnée :

– d’un espace de fonctions E  de référence ;

– d’un sous-espace D =D (E ) des fonctions de E  qui sont « dérivables »;

– d’un opérateurΦ qui à f  ∈ D  associe sa dérivée f   ∈ E  :

Φ :D (E ) −→ E 

 f  −→ f  

Le cadre usuel est celui où :

•   E  =C 0, l’espace des fonctions continues ;•   D (E ) = C 1, l’espace des fonctions continûment dérivables .

On peut aussi considérer le cas plus général :

•   E  = D 0, l’espace des fonctions localement intégrables 2 (aussi noté L 1loc

) ;

•   D (E )=

D 1, l’espace des fonctions absolument continues 3.

1Comme c’est l’usage, on supposera I  ouvert, pour éviter certains effets de bord et exclure le

cas particulier où I  est réduit à un point.2Une fonction f   est localement intégrable  si elle est intégrable (au sens de Lebesgue) sur tout

intervalle fini [a , b ] contenu dans l’intervalle de définition I  (une telle fonction peut être discon-

tinue, par exemple continue « par morceaux »). De façon générale, une propriété est satisfaite

« localement » si elle l’est sur tout sous-intervalle fini J  inclus dans I . Il est d’usage de supposer

alors que J  est aussi fermé , donc du type [a ,b ]. La propriété en question sera alors sastisfaite sur

tout intervalle (plus généralement sur tout ensemble) compact  (c’est-à-dire fermé borné). Pour

résumer : « localement  » est synonyme de « sur tout compact  ».3Une fonction   f   est absolument continue  si pour tout  ε > 0, il existe η > 0 tel que pour tous

intervalles [a i ,b i ] (i  = 1,.. . , n ) disjointsdans I ,n 

i =1|b i −a i | < η implique

n i =1

| f  (b i )− f  (a i )| < ε.

1

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2   CHAPITRE 1. DÉFINITION DES DISTRIBUTIONS 

Dans ces deux cas, on a les formules usuelles suivantes. Toute fonction  f   de C 1

(respectivement D 1

) admet une dérivée f   dans C 0

(resp. D 0

) donnée par4

:

 f  (x ) = limh →0

 f  (x +h )− f  (x )

h   .

Toute fonction  f   de C 0 (resp. D 0) admet une primitive f   dans C 1 (resp. D 1) —

de dérivée égale à f   — donnée par la formule générale5 :

 f  (x ) = c +x 

a  f  (t )d t ,

où c  est une constante arbitraire. Ces formules constituent  le   résultat central

en calcul différentiel et intégral (en anglais : fundamental theorem of calculus ).

Grâce à elles, on a les propriétés habituelles de la dérivation :1.   Φ est un opérateur linéaire  de  D  = D (E ) dans E   : (α f  + βg ) = α f   +βg 

pour toutes constantes α,β ∈R ou C ;

2.   Φ est surjectif   (d’image Im(Φ) = E ) : toute fonction de E  admet une primi-tive  dans D =D (E ) ;

3. Le noyau  de Φ est l’espace C  des fonctions constantes  (ker(Φ) = C ) :  f   = 0

si et seulement si  f  est une fonction constante. Par linéarité, cela revient

à dire que f   = g  si et seulement si f  − g  est constante, autrement dit : la primitive est définie à une constante additive près .

Ces propriétés sont résumés dans la définition abstraite suivante, qui regroupe

tous les ingrédients utiles dans la suite.

Définition 1 [dérivation]:  Etant donné trois espaces de fonctions C  ⊂ D ⊂ E  sur

R (ou C), où C  est l’espace des fonctions constantes, un opérateur Φ : D → E  est

appelé opérateur de dérivation  s’il est linéaire, surjectif et de noyau = C .

Un opérateur de dérivation sera noté dorénavant  D (E )  −→ E . L’intérêt de

choisir le cadre D 1  −→ D 0 plutôt que C 1

  −→ C 0 est que le premier est une exten-

sion du second, qui permet de dériver des fonctions plus générales (la dérivée

de   f  ∈ C 1 coïncide avec celle de   f   considérée dans D 1). On illustre ceci par le

diagramme :

C 1  −−−−→   C 0

∩ ∩

D 1  −−−−→   D 0

L’objectif de la théorie des distributions est d’étendre encore la notion de déri-

vée : on y définit des objets mathématiques plus généraux que les fonctions, qui

permettent de dériver autant de fois qu’on veut , même des fonctions qui ne sont

« pas dérivables ».

4Seulement pour presque tout x  dans le cas où   f  ∈ D 1, la fonction localement intégrable   f  n’étant définie que presque partout.

5L’intégrale est de Riemann si f   ∈C 0, de Lebesgue si f   ∈ D 0.

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1.2. DÉRIVATION FORMELLE AU SENS DES DISTRIBUTIONS    3

1.2 Dérivation formelle au sens des distributions

La notion de distribution généralise celle de fonction un peu de la même

façon que la notion de nombre complexe généralise celle de nombre réel. On

applique un principe fondamental et fructueux en mathématiques qui consiste

à passer outre une impossibilité en définissant formellement l’objet de l’inter-

dit, et en donnant les règles qui généralisent les opérations classiques 6. Ici, on

se heurte à l’impossibilité de dériver les fonctions  f  ∈ E  qui ne sont pas. . . déri-

vables (il faut pour cela que f  ∈D (E )). On va donc définir la dérivée (formelle) f  

d’une fonction f  comme une distribution , puis on justifiera cette approche par

les règles de calcul qui généralisent les règles usuelles pour les fonctions. Bien

entendu, la nouvelle notion de dérivée au sens des distributions doit généraliser

la dérivée usuelle au sens des fonctions (la dérivée au sens des fonctions, si elleexiste, coïncide avec celle au sens des distributions).

On part de l’espace des fonctions  E  de référence muni d’un opérateur de

dérivation(1)Φ :D (E )

  −→ E . La clé va être donnée par la remarque suivante.

Remarque 2 [loi d’isomorphisme]:   D’après la première loi d’isomorphisme, on

a une application linéaire inversible (c’est-à-dire un isomorphisme d’espaces

vectoriels) ImΦ∼= D /kerΦ, c’est à dire :

E  ∼=D (E )/C 

Cet isomorphisme identifie   f  ∈ E  à la classe d’équivalence modulo C  d’une de

ses primitives, c’est à dire à l’une quelconque de ses primitives, définie à une

constante additive près.

Proposition 3 [espace de dérivées formelles]:   Il existe un espace D −1(E ) unique (à un isomorphisme d’espaces près) contenant E et muni d’un opérateur de déri-

vation E   −→D 

−1(E ) qui étend l’opérateur de dérivation initial D (E )  −→ E : 

D (E )  −−−−→   E 

∩ ∩

E   −−−−→   D 

−1(E )

Preuve :   Si cet opérateur de dérivation E  →

D −1(E ) existe, alors(2) on a l’isomor-

phismeD −1(E ) ∼= E /C . Ceci montre l’unicité deD −1(E ) à un isomorphisme près.

Définissons donc D −1(E ) = E /C , l’espace des f  ∈ E  à une constante additive

près. L’application E  → E /C  (réduction modulo C ) est linéaire, surjective et de

noyau = C , et forme donc un opérateur de dérivation E  →D −1(E ).

6L’exemple des nombres est bien connu : on passe de N à Z de façon à pouvoir toujours sous-

traire, un nombre relatif étant défini comme une soustraction a −b , mêmesi a < b  ; onpassede Z

à Q de façon à pouvoir toujours diviser (par un entier non nul), un nombre rationnel étant défini

comme une fraction a /b , même si  a  n’est pas divisible par  b  ; de même, on passe de  Q  à  R  de

façon à pouvoir toujours passer à la limite d’une suite de Cauchy ; de  R  à  C  de façon à pouvoir

toujours déterminer une racine d’une équation algébrique, etc.

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4   CHAPITRE 1. DÉFINITION DES DISTRIBUTIONS 

Puisque(2) E  ∼=D (E )/C , on peut identifier l’espace E  au sous-espace D (E )/C 

de E /C  =D −1

(E ), de sorte que l’on a bien E  ⊂D −1

(E ). La restriction de l’opéra-teur de dérivation E  → D 

−1(E ) = E /C   à D (E ) est bien l’opérateur de dérivation

D (E ) →D (E )/C  où D (E )/C  est identifié à E .  

Cela répond bien à notre objectif :

– le nouvel opérateur de dérivation formelle   f  ∈ E  →  f   ∈ D −1(E ) est sur-

 jectif et permet donc d’identifier les éléments de l’espace de distributions

D −1(E ) aux  dérivées formelles f   de fonctions f  ∈ E  ;

– puisque E  ⊂D −1(E ), toute fonction f  ∈ E  est une distribution particulière.

– la dérivation E  → D −1(E ) au sens des distributions se restreint bien à la

dérivation au sens des fonctions D (E ) → E  pour des fonctions dérivables

deD 

(E ).– la dérivation au sens des distributions étant toujours linéaire, une combi-

naison linéaire de deux distributions  f  , g   dans l’espace D −1(E ) est défi-

nie par α f   +βg  = (α f  +βg )

Exemple 4 [espace C −1]:   Pour E  = C 0, D (E ) = C 1, on définit l’espace des distri-

butions C −1 =D −1(E ) des dérivées formelles de fonctions continues. On a donc

les inclusions C 1 ⊂ C 0 ⊂ C −1 et le diagramme :

C 1  −−−−→   C 0

∩ ∩

C 0   −−−−→  C −1

Exemple 5 [espace D −1]:   Pour E  = D 0, D (E ) = D 1, on définit l’espace des dis-

tributions D −1 = D −1(E ) des dérivées formelles de fonctions localement inté-

grables. On a le diagramme :

D 1  −−−−→   D 0

∩ ∩

D 0  −−−−→   D −1

Une fonction absolument continue est continue, et une fonction continue est

localement intégrable : D 1 ⊂ C 0 ⊂ D 0. Par unicité de C −1 on peut donc identifier

D 0 à un sous-espace de C −1, et par unicité de D −1, l’espace C −1 est lui-même

identifié à un sous-espace de  D −1. En résumé, on a les inclusions C 1 ⊂ D 1 ⊂C 0 ⊂ D 0 ⊂ C −1 ⊂ D −1.

Les distributions seront le plus souvent notées par les lettres r , s , t , etc. Pour-

suivant la convention habituelle pour les fonctions définies sur un intervalle I à valeurs réelles ou complexes, une distribution  s  sera aussi notée  s (x ) en ex-

plicitant la variable x  ∈ I , et on dira que s (x ) est « définie sur I  », à « valeurs »

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1.2. DÉRIVATION FORMELLE AU SENS DES DISTRIBUTIONS    5

dans R ou C. Cependant, s  n’admet pas nécessairement une « valeur »  s (x ) pour

x ∈ I  fixé, et donc, ces expressions de langage n’ont pas le sens usuel. L’exemple-type est la distribution de Dirac (impulsion) qui se définit simplement comme

la dérivée formelle d’un « saut ».

Exemple 6 [impulsion de Dirac]:   La fonction échelon (ou fonction de Heaviside )est la fonction localement intégrable sur I  =R définie par7 :

H (x ) =

1 pour x > 0

0 pour x < 0

On a ici un saut d’amplitude  H (0+) − H (0−) = 1. La fonction continue V (x ) =

0  H (t ) d t 

 =xH (x )

∈D 1 est une primitive de H (x ).

La fonction H (x ) admet en tout point x = 0 une dérivée (au sens usuel) égaleà 0 donc =  0 presque partout ; mais on ne peut pas en déduire que H (x ) est

constante (le critère habituel ne s’applique pas car  H (x ) ∈ D 1). On appelle im-pulsion de Dirac  la dérivée formelle de H (x ) :

δ(x ) = H (x )

Puisque H (x ) est discontinue en 0,  δ(x ) n’est pas  une fonction, c’est une  dis-tribution ∈ D −1. L’impulsion de Dirac jouera précisément un rôle fondamental

pour faire le lien entre dérivée usuelle des fonctions et dérivée au sens des dis-

tributions.

Exemple 7 [valeur principale de   1x ]:   La fonction log |x |  est continue en toutpoint x  = 0 et présente une singularité essentielle en  x  = 0. Cependant, l’inté-

grale

log |t |d t   converge en t  = 0, et donc log |x | est localement intégrable (∈D 0). La fonction continue L (x ) =

x 0   log |t |d t  = x log |x |− x ∈ D 1 (où l’on convient

que L (0) = 0) est une primitive de log |x |.La fonction log |x |  admet en tout point  x  =  0 une dérivée (au sens usuel)

égale à   1x . Cependant   1

x  n’est pas localement intégrable, et on se gardera donc

de dire que c’est la dérivée de log |x | sur  R  (elle ne définit pas  une distribution

sur R). On appelle valeur principale  de   1x   la distribution  dérivée de log |x | :

v.p. 1

x  =(log 

|x 

|)

On la note aussi parfois P.f.  1x  (« pseudo-fonction » ou « partie finie » de   1

x ).

Puisque log |x | est discontinue en x  = 0, v.p.  1x  n’est pas une fonction, mais une

distribution ∈ D −1.

Bien entendu, on peut faire des combinaisons linéaires des deux exemples

précédents. Ainsi αδ(x )+βv.p.  1x , où α et β sont deux constantes, est une distri-

bution (dérivée de αH (x ) +β log |x |).

7Elle est aussi souvent notée Y  (x ). Il est inutile de la définir en  x  = 0, car une fonction locale-

ment intégrable n’est définie que presque partout.

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6   CHAPITRE 1. DÉFINITION DES DISTRIBUTIONS 

1.3 Complément: les mesures

La dérivation fonctionnelle D 1  −→ D 0 peut encore être étendue à une dérivation :

M 1 −→ M 0

 f  −→ d f 

pour laquelle les objets dérivés d f   ne sont plus des fonctions, mais des mesures  :

•   E  = M 0, l’espace des mesures 8 ;

•   D (E ) = M 1, l’espace des fonctions localement à variation bornée 9.

On montre que les fonctions   f  ∈ M 1 sont exactement les fonctions de répartition  de

mesuresµ, définies (à une constante additive près) par la formule10 :

 f  (x ) = c +]a ,x ]

µ(dt ) = c +µ(]a , x ]).

Par le théorème de prolongement des mesures, une fonction   f  ∈ M 1 définit une me-

sure unique  µ telle que µ(]a , b ]) = f  (b ) − f  (a ) pour tout a < b . Cette mesure µ= d f   est

la dérivée  de   f  . Par exemple, la mesure le Lebesgue est  µ = dx  (dérivée de la fonction

 f  (x ) = x ), elle est telle que µ(]a , b ]) = b − a . Grâce à ces propriétés, on vérifie immédia-

tement que l’opérateur f  ∈ M 1 → d f  ∈ M 0 est bien un opérateur de dérivation au sens

de la définition 1.

Remarque 8:  Une mesure µ  définie par une densité g   localement intégrable vérifie la

propriété : d x ( A ) = 0  =⇒   µ( A ) = 0 (tout borélien négligeable pour la mesure de Le-

besgue l’est pour µ).On dit queµ est absolument continue 11. Par le théorème de Radon-Nikodym, toute mesure absolument continue est définie par une densité g (x ) ∈ D 0 qui

est unique p.p. L’espace desmesures absolument continues est donc isomorpheà D 0, et

on peut identifier une mesureabsolument continue à sa densité. Par exemple, la mesure

de Lebesgue dx  est identifiée à la fonction constante = 1.

Grâce à cette identification, on a l’inclusion d’espaces  D 0 ⊂ M 0. Par ailleurs une

fonction absolument continue est toujours localement à variation bornée, elle-même

toujours localement intégrable. On a donc les inclusions d’espaces D 1 ⊂ M 1 ⊂ D 0 ⊂ M 0,

et la dérivation M 1  −→ M 0 étend bien la dérivation D 1

  −→ D 0 (la dérivée  f    de   f  ∈ D 1

8Une mesure  µ  sur  I  est une application qui à tout ensemble borélien  A 

 ⊂I   (en particulier à

tout intervalle) associe sa mesure µ( A ), avec la propriété d’additivité dénombrable : µ(i  A i ) =i  µ( A i ) pour toute famille de boréliens disjoints  A i  de réunion disjointe notée

i  A i .

9Une fonction   f   est localement « à variation bornée  » si pour tout intervalle compact   J , il

existe une constante c  telle que pour tous intervalles [a i ,b i ] (i  = 1,.. . ,n ) disjoints dans J , on aitn i =1

| f  (b i )− f  (a i )| c . Une telle fonction est évidemment localement bornée ; elle est caractéri-

sée par le fait qu’elle est la différence de deux fonctions croissantes (localement bornées).10 Avec notre définition, cette fonction est continue à droite ; on supposera que  f  est seulement

définie presque partout , de sorte qu’il est inutile de préciser la continuité à droite ; en effet, une

fonction de M 1 admet toujours une limite à gauche et à droite en tout point, et n’admet qu’un

nombre au plus dénombrable de discontinuités : elle peut donc toujours être rendue continue à

droite en modifiant un nombre au plus dénombrable de points.11On devrait plutôt dire que sa fonction de répartition est absolument continue (∈ D 1).

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8   CHAPITRE 1. DÉFINITION DES DISTRIBUTIONS 

Bien que E  =  M 0 soit un espace de mesures et non de fonctions, on peut quand

même appliquer la proposition 3 à E  = M 0

etD (E ) = M 1

. On définit ainsi l’espace M −1

=D 

−1(E ) des dérivées formelles de mesures. On a le diagramme :

M 1  −−−−−→   M 0

∩ ∩

M 0  −−−−−→   M −1

Puisque M 1 ⊂ D 0 ⊂ M 0, par unicité de D −1 on peut identifier M 0 à un sous-espace de

D −1, et par unicité de  M −1, l’espace D −1 est lui-même identifié à un sous-espace de

M −1. On a alors les inclusions D 1 ⊂ M 1 ⊂ D 0 ⊂ M 0 ⊂ D −1 ⊂ M −1.

Il en résulte qu’une mesure peut toujours être identifiée à une distribution  de D −1.

Par exemple, la masse de Dirac  δ ∈ M 0 s’identifie à l’impulsion de Dirac  δ ∈ D −1. Enrevanche, v.p.  1

x  ∈ D −1 n’est pas une mesure(32).

1.4 Dérivations successives de fonctions

Si la dérivée   f    de  f   admet elle-même une dérivée, celle-ci est appelée dé-

rivée seconde et notée   f  . On définit donc l’espace  D 2(E ) des fonctions deux 

fois dérivables comme l’image réciproque deD (E ) par l’opérateur de dérivation

D (E )  −→ E . On définit de même, par récurrence sur n , l’espace D n (E ) des fonc-

tions n  fois dérivables, de dérivée n ième  f  (n ) ∈ E . Leur intersection est D ∞(E ),

l’espace des fonctions indéfiniment dérivables.

Exemple 13 [classes C n ]:  Par exemple, si E  = C 0, D (E ) = C 1, alors D 2(E ) = C 2

et plus généralement  D n (E ) = C n , l’espace des fonctions  n  fois continûment

dérivables (dites de classe C n ). Si   f   est n  fois dérivable, il l’est aussi n − 1 fois;

on a donc les inclusions d’espaces C ∞ ⊂ · · ·⊂ C n ⊂ · · ·⊂ C 1 ⊂ C 0. Le diagramme

suivant regroupe les opérateurs de dérivations successives :

C n    −−−−→   C n −1

∩     ∩

C n −1   −−−−→   C n −2

...  .

        .

        ....

C 1  −−−−→   C 0

où la composée C n  → C n −1 →· · ·C 1 → C 0 est l’opérateur de dérivation n ième

 f  → f  (n ). Par construction, chaque opérateur de dérivation étend la précédente.

L’espace D ∞(E ) = C ∞, intersection des C n , est l’espace des fonctions indéfini-

ment dérivables.

Exemple 14 [classes D n ]:  L’échelle de régularité de fonctions de classe C n  est

bien connue, mais mal adaptée à l’intégration au sens de Lebesgue car elle ne

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1.4. DÉRIVATIONS SUCCESSIVES DE FONCTIONS    9

contient pas les fonctions localement intégrables. On peut y remédier en défi-

nissant une nouvelle échelle de classes D n 

. Partant de E  = D 0

et D (E ) = D 1

, onobtient D 2(E ) = D 2 et plus généralement D n (E ) = D n , l’espace des fonctions n fois dérivables dont la dérivée n ième est localement intégrable. On a le même

diagramme que ci-dessus pour les classes D n .

Puisque C 1 ⊂ D 1 ⊂ C 0 ⊂ D 0, on déduit immédiatement (par récurrence) que

C n  ⊂ D n  ⊂ C n −1 pour tout n  1. En particulier, dire qu’une fonction de classe

D ∞(E ) = D ∞ (c’est-à-dire de classe D n  pour tout n ) revient à dire qu’elle est de

classe C ∞. On a donc l’égalité  D ∞ = C ∞. En résumé, on a les inclusions sui-

vantes :

D ∞ = C ∞ ⊂· · ·⊂ C n ⊂ D n ⊂ C n −1 ⊂· · ·⊂ D 1 ⊂ C 0 ⊂ D 0.

Etant donné un espace E  muni d’un opérateur de dérivationD 

(E )   −→ E , tout f  ∈ E  admet une primitive (définie à une constante additive près), notée   f  (−1).

Plus généralement, on note   f  (−n ) une primitive n ième de   f   (dont la dérivée

n ième est   f  ). Les primitives de 0 sont les fonctions constantes, les primitives

secondes de 0 sont les polynômes de degré 1, et ainsi de suite : les primitives

n ièmes de 0 sont exactement les polynômes  p n  de degré < n . Ainsi, tout espace

D n (E ) (donc D ∞(E )) contient le sous espace des polynômes.

Proposition 15 [dérivation n ième]:  L’opérateur composé : 

D n (E ) −→ E 

 f  −→ f  (n )

est linéaire, surjectif et de noyau = P n , l’espace des polynômes de degré < n.

Preuve :   Etant composée d’applications linéaires surjectivesD k (E )  −→D 

k −1(E )pour k  = n ,...,2,1, cet opérateur est également linéaire et surjectif. Son noyau

est P n  car toute primitive n ième de 0 est un polynôme p n  de degré < n .  

On dira alors que c’est un  opérateur de dérivation nième . Cela signifie en

clair que (α f  +βg )(n ) =α f  (n ) +βg (n ) pour toutes constantes α,β ∈R ou C ; tout

 f  ∈ E  admet une primitive n ième   f  (−n ) dans D n (E ) ; cette primitive n ième est

définie à l’addition près d’un polynôme de degré < n .Par exemple(6) V (x ) = x H (x ) est une primitive de  H (x ), et par récurrence,

δ(−

n )

(x ) =  x n −1

(n −1)! H (x ) ∈ D n 

−1

est une primitive n ième deδ(x ), définie à l’additionprès d’un polynôme de degré < n .

Remarque 16:  Considérons deux dérivées   f  (m ) et g (n ), et pour un entier  k  su-

périeur à m  et à n , des primitives F  =  f  (m −k ) et G  = g (n −k ). Alors  f  (m ) = F (k ) et

g (m ) = G (k ) : deux dérivées peuvent toujours s’écrire sous la forme F (k ),G (k ) avec

le même  indice k . On a alors égalité   f  (m ) = g (n ) si et seulement si  F (k ) = G (k ),

c’est à dire F  = G + p k   où p k  est un polynôme de degré < k . En résumé, pour

tout entier k max(m , n ) :

 f  (m ) = g (n ) ⇐⇒   f  (m −k ) = g (n −k ) + p k .

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10   CHAPITRE 1. DÉFINITION DES DISTRIBUTIONS 

1.5 Dérivations successives de distributions

On a déjà défini(3) l’espace D −1(E ) des distributions (dérivées formelles)  f  

de   f  ∈ E . On peut répéter cette construction en l’appliquant à l’espace D −1(E )lui-même, pour définir l’espace D −2(E ) =D −1(D −1(E )) des dérivées formelles s 

où s = f   ∈D −1(E ). Le nouvel opérateur de dérivation D −1(E )

  −→ D −2(E ) étend

encore l’opérateur de dérivation formelle E   −→D 

−1(E ). L’application composée

(surjective) E   −→ D 

−2(E ) associe alors à chaque   f   sa dérivée seconde   formelle

 f   ∈D −2(E ). On définit de même, par récurrence sur n  0, les espaces D −n (E )des dérivées nièmes  formelles f  (n ), où  f  ∈ E . Leur réunion est D −∞(E ), l’espace

de toutes les dérivées formelles successives  f  (n ) pour tout n  0.

 Ainsi, par extensions successives de la dérivation, on obtient des espaces de

distributions emboîtés :

E  ⊂D −1(E ) ⊂D −2(E ) ⊂· · ·⊂D −n (E ) ⊂· · ·⊂D −∞(E ).

On peut résumer ces définitions par le diagramme :

E   −−−−→   D 

−1(E )

∩     ∩

D −1(E )

  −−−−→   D −2(E )

..

.

  .

        .

        .

..

.D 

−(n −2)(E )  −−−−→   D 

−(n −1)(E )

∩     ∩

D −(n −1)(E )

  −−−−→   D −n (E )

où la composée E   −→  D 

−1(E )  −→  D 

−2(E )  −→ ···   −→  D 

−(n −1)(E )  −→  D 

−n (E ) est

l’opérateur de dérivation n ième f  → f  (n ).

Exemple 17 [classes C −n ]:   Pour E  = C 0, on obtient D −n (E ) = C −n , l’espace des

distributions   f  (n ) qui sont des dérivées  n ièmes formelles de fonctions conti-

nues. Leur réunion est D −∞(E ) = C −∞, l’espace de toutes les dérivées succes-sives de fonctions continues.

Exemple 18 [classes D −n ]:   Pour E  = D 0, on obtient D −n (E ) = D −n , l’espace des

distributions qui sont des dérivées n ièmes formelles de fonctions localement in-

tégrables. Leur réunion est D −∞(E ) = D −∞, l’espace de toutes les dérivées suc-

cessives de fonctions localement intégrables. L’échelle d’irrégularité donnée par

des espaces D −n  complète l’échelle de régularité des classes D n .

De proche en proche à partir des inclusions  D 0 ⊂ C −1 ⊂ D −1, on identifie

D −n +1 à un sous-espace de C −n , lui-même identifié à un sous-espace de  D −n 

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1.5. DÉRIVATIONS SUCCESSIVES DE DISTRIBUTIONS    11

pour tout n . En prenant la réunion, il vient C −∞ = D −∞. En résumé, on obtient

l’échelle complète suivante :

C ∞ = D ∞ ⊂· · ·⊂ C n ⊂ D n ⊂· · ·⊂ C 0 ⊂ D 0 ⊂· · ·⊂ C −n ⊂ D −n ⊂· · ·⊂ C −∞ = D −∞.

 A une extrémité de l’échelle, nous avons les fonctions indéfiniment dérivables

de classe C ∞ ; à l’autre extrémité, nous trouverons les distributions générales de

classe D −∞.

Comme pour les fonctions, la dérivée s  d’une distribution sera notée indif-

féremment s (x ),   d d x s (x ) ou   d s 

d x  ; de même, la dérivée n ième s (n ) sera notée s (n )(x )

ou   d n 

d x n  s (x ). Voici quelques exemples de dérivées successives de distributions.

Exemple 19 [dérivées d’une impulsion]:  La distribution δ(x ) (impulsion de Di-rac) admet des dérivées successives δ(x ), δ(x ), etc. Puisque δ(x ) ∈ D −1, δ(n )(x )est de classe D −(n +1). Bien entendu, on peut faire des combinaisons linéaires :

i <n c i δ(i ) est une distribution de classe D −n .

Exemple 20 [pseudo-fonction   1x n ]:  La fonction   1

x 2  (définie pour x = 0) n’est pas

localement intégrable en 0, et ne définit donc pas une distribution surR ; comme

c’est, pour x  = 0, la dérivée de − 1x , et donc la dérivée seconde de − log |x |, on

définit la distribution :

P.f.  1

x 2 = − d 

d x  v.p.

 1

x  = − d 2

d x 2 log |x |

de classe D −2. On l’appelle « pseudo-fonction   1x 2  ». En continuant à dériver, on

obtient les définitions de :

P.f.  1

x n  =(−1)n −1

(n − 1)!· d n −1

d x n −1 v.p.

 1

x  = (−1)n −1

(n − 1)!· d n 

d x n  log |x |

de classe D −n .

Remarque 21:   On note M n  l’espace des fonctions n  fois dérivables dont la déri-

vée n ième est est une mesure (section 1.3). Lorsque  f  ∈ M n  pour tout n  on dira

que f   est de classe M ∞. Par les raisonnements habituels, on a les inclusions sui-

vantes d’espaces : M ∞

=D ∞

⊂ · · · ⊂M n 

⊂D n −1

⊂M n −1

⊂ · · · ⊂M 1

⊂D 0

⊂M 0.

Dans l’autre sens, pour E  = M 0 (espace des mesures), on note M −n  = M −n (E )l’espace des dérivées n ièmes de mesures. On note aussi  M −∞ =D 

−∞(M 0) l’es-

pace de toutes les dérivées successives de mesures. Par les raisonnements ha-

bituels, on a les inclusions D −n  ⊂ M −n  ⊂ D −n −1 pour tout n , d’où il résulte que

M −∞ = D −∞ (espace de toutes les distributions). En résumé, on trouve l’échelle

des classes suivantes :

D ∞= M ∞⊂· · ·⊂ D n ⊂ M n ⊂· · ·⊂ D 0 ⊂ M 0 ⊂· · ·⊂ D −n ⊂ M −n ⊂· · ·⊂ D −∞= M −∞.

Par exemple, δ(n )(x ) est de classe M −n .

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12   CHAPITRE 1. DÉFINITION DES DISTRIBUTIONS 

1.6 L’espace D −∞ des distributions

Nous venons de voir la construction générale de l’espace  D −∞ des dérivées

d’ordre quelconque de fonctions. Dans ce document, nous n’aurons pas besoin

de définir des objets mathématiques plus généraux que cela. Pour montrer les

propriétés des distributions il est souvent égal de considérer l’échelle des classes

C −n  ou D −n . On adoptera de préférence, dans ce document, l’échelle des D −n .

Une distribution quelconque  s  ∈ D −∞  est toujours la dérivée formelle  s  = f  (n ) (d’un certain ordre n ) d’une fonction (localement intégrable)   f  . Deux ou

plusieurs distributions quelconques peuvent donc toujours être vues comme

des distributions dans le même espace D −n  pour n  assez grand.

La dérivée de s  =  f  (n ) ∈ D −n  est s  = f  (n +1) ∈ D −(n +1), et par récurrence, sa

dérivée m ième est s (m )

= f  (m 

+n )

∈ D −(m 

+n )

. On peut résumer les propriétés gé-nérales de la dérivation au sens des distributions par la proposition suivante.

Proposition 22 [dérivée au sens des distributions]: L’application : 

D −∞ −→ D −∞

s −→ s 

est un opérateur de dérivation (1) qui étend l’opérateur de dérivation D 1  −→ D 0 des 

 fonctions. L’application : 

D −∞ −→ D −∞

s −→ s (n )

est un opérateur de dérivation nième (15) .

Preuve :  Les propriétés à démontrer de l’opérateur  s  ∈  D −∞ →  s  ∈  D −∞   dé-

coulent directement de celles de la dérivation D −n   −→ D −n −1, en choisissant n suffisamment grand pour qu’une ou deux distributions quelconques données

soient de même classe D −n .

De même, les propriétés à démontrer de l’opérateur s  ∈ D −∞ → s (n ) ∈ D −∞

découlent directement de celles de l’opérateur s  ∈ D −m  → s (n ) ∈ D −(m +n ), pour

m  assez grand. Mais ces dernières sont une conséquence immédiate de la pro-

position 15 appliquée à E  = D −(m 

+n )

.  

Rappelons que cela signifie que (αs +βt ) =αs  +βt  pour toutes constantes

α,β ∈ R ou C ; toute distribution s  = f  (n ) admet une primitive (à savoir  f  (n −1)) ;

cette primitive est définie à une constante additive près. Plus généralement, on

a la formule (αs +βt )(n ) = αs (n ) +βt (n ) ; toute distribution s  =  f  (m ) admet une

primitive n ième (à savoir  f  (m −n ), qui est une fonction si n m ) ; cette primitive

n ième est définie à l’addition près d’un polynôme de degré < n .

Remarque 23:   Si s = f  (n ) est une distribution, alors pour tout k  n , une primi-

tive (k − n )ième de   f   : F  =  f  (n −k ) est toujours une fonction ∈ D k −n . On a alors

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1.7.   COMPLÉMENT: UNIVERSALITÉ DES DISTRIBUTIONS    13

s = f  (n −k )(k ) = F (k ). On peut donc écrire toute distribution sous la forme  f  (n ) où

n peut être choisi aussi grand que l’on veut , et la fonction primitive  f   sera alorsaussi régulière que l’on désire.

1.7 Complément: universalité des distributions

On va préciser « algébriquement » en quoi la construction des distributions faite ci-

dessus est « unique » et on la comparera à d’autres approches possibles. Pour fixer les

idées, on choisit D 0 comme espace des fonctions de référence.

Définition 24 [espace de distributions]:   On appelle espace de distributions E  un espace

contenant D 0 et muni d’un opérateur de dérivation E   −→ E  qui étend l’opérateur de dé-

rivation des fonctions :

D 1

  −−−−−→   D 0

∩ ∩

E   −−−−−→   E 

Cela revient à dire, en revenant aux définitions, qu’un espace de distributions vérifie les

axiomes de base suivants :

[A1]   Toute fonction est une distribution particulière  : un espace de distributions E  con-

tient D 0 comme sous-espace.

[A2]   On peut toujours dériver au sens desdistributions, et cette dérivation généralise celle 

au sens des fonctions  : l’opérateur E   −→ E  étend la dérivation usuelle D 1

  −→ D 0.

[A3]   Toute distribution admet une primitive, définie à une constante additive près .

Exemple 25:   Par la proposition 22, l’espace D −∞ construit ci-dessus est bien un espacede distributions au sens de la définition 24. Comme la dérivée ou la primitive d’un poly-

nôme est toujours un polynôme, l’espace P  des polynômes admet bien un opérateur de

dérivation P   −→ P  ; de même pour l’espace C ∞. Mais ces deux espaces ne contiennent

pas D 0, ce ne sont donc pas des espaces de distributions.

Exemple 26 [espace des distributions « à la Schwartz »]:   Selon l’approche classique de

Schwartz, une distribution est définie par dualité, comme une forme linéaire continue

sur un espace de fonctions régulières D  (les fonctions « C ∞ à support compact »). L’es-

pace des distributions de Schwartz est notéD . On montrera (section 3.6) queD  vérifie

bien les propriétés [A1]–[A3] requises par la définition 24.

Définition 27 [morphisme d’espaces de distributions]:   On appelle  morphisme   d’es-

paces de distributions E   Φ

−→ F  une application linéaire d’un espace de distributions  E dans un autre F  qui laisse invariante toute fonction f  ∈ D 0 et qui préserve la dérivation :

Φ(s ) =Φ(s ).

Un morphisme E   Φ−→ F  d’espaces de distributions E  et  F  est donc tel que si  s → t  par ce

morphisme, alors s  → t  où s  est la dérivée dans E  et t  est la dérivée dans F . Autrement

dit, ce morphisme rend le diagramme suivant commutatif :

E   Φ−−−−−→   F 

E   Φ−−−−−→   F 

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14   CHAPITRE 1. DÉFINITION DES DISTRIBUTIONS 

Dans le langage de la théorie des catégories, la classe des espaces de distributions, mu-

nie, pour tout couple d’espaces de distributions (E , F ), de l’ensemble de tous les mor-phismes E  → F , forme une catégorie , la catégorie des espaces de distributions.

Proposition 28 [universalité de D −∞]:  Pour tout espace de distributions E, il existe un 

unique morphisme d’espaces de distributions D −∞   Φ−→ E, qui est injectif.

Dans le langage des catégories, on dit que D −∞ est un espace de distributions universel ,solution du « problème universel » qui exprime comment généraliser les fonctions par

dérivation.

Preuve :   Si un tel morphisme  Φ  existe, alors il doit laisser invariante toute fonction :

 f   Φ−→   f   , pour tout   f  ∈ D 0. Il doit, de plus, préserver la dérivation, et on a donc   f   ∈D −∞ Φ−→   f   ∈ E ,   f   ∈ D −∞ Φ−→   f   ∈ E  et ainsi de suite par récurrence :   f  (n ) ∈ D −∞ Φ−→

 f  (n )

∈ E . Comme toute distribution de D −∞ est de la forme  f  (n )

, cela détermine de fa-çon unique  le morphisme Φ.

On peut appliquer la remarque 16 à  E  =  D ∞(E ) : on a   f  (n ) =  g (m ) dans E   si et

seulement si   f  (k −m ) − g (k −m ) =  p k , polynôme de degré <  k  =  max(m , n ) : cette der-

nière égalité est une égalité entre fonctions, qui si elle est satisfaite, l’est pour tout es-

pace E  de distributions. Ceci montre que pour tous fonctions  f  , g  ∈ D 0 et tous entiers

m , n  0, on a  f  (m ) = g (n ) dans D −∞ si et seulement si  f  (n ) = g (m ) dans E  ; l’application

 f  (n ) ∈ D −∞ Φ−→ f  (n ) ∈ E  est donc bien définie et injective.

Elle est aussi linéaire, car toujours d’après la remarque 16, deux éléments d’un es-

pace de distributions peuvent toujours s’écrire sous la forme   f  (k ), g (k ) où k  est choisi

assez grand, et par linéarité de la dérivée :  α f  (k ) +βg (k ) = (α f  +βg )(k ) ∈ D −∞ Φ−→ (α f  +βg )(k ) =α f  (k ) +βg (k ) ∈ E . Enfin, elle laisse bien invariante toute fonction : f  Φ−→ f   et pré-

serve la dérivation : si  f  (n ) Φ−→ f  (n ), alors  f  (n +1) Φ−→ f  (n +1). L’application Φ est donc bien

un morphisme injectif d’espaces de distributions D −∞   Φ−→ E .  

Les conséquences de cette proposition sont remarquables. Tout d’abord, il permet

de montrer l’unicité (à un isomorphisme près) de l’espace des distributions D −∞, si on

impose l’axiome suivant en plus des axiomes [A1]–[A3] :

[A4]   Toute distribution est une dérivée f  (n ) d’un certain ordre d’une fonction f 

qui est bien vérifié, par construction, pour D −∞.

Proposition 29 [unicité de D −∞]:   Tout espace de distributions qui satisfait aux axiomes [A1]–[A4] est isomorphe à D −∞.

Preuve :   Si E   est un espace de distributions vérifiant, en plus des axiomes [A1]-[A3],

l’axiome [A4], alors d’après la preuve de la proposition 28, on a à la fois un morphisme

unique D −∞   Φ−→ E  et un morphisme unique E   Ψ−→ D −∞. Ces deux morphismes sont né-

cessairement inverses l’un de l’autre, on a donc bien un isomorphisme  E  ∼= D −∞ d’es-

paces de distributions (qui est lui-même unique).  

En d’autres termes, un espace de distributions est universel  si et seulement si il vé-

rifie, en plus des axiomes [A1]-[A3], l’axiome [A4]. Ce dernier axiome signifie qu’on ne

cherche pas à définir d’autres distributions que celles dont on a besoin pour pouvoir

dériver autant de fois qu’on veut des fonctions. Au fond, nous avons introduit les dis-

tributions pour cela ; mais nous y avons introduit le minimum d’éléments nouveaux 

puisqu’il n’y a que les dérivées d’ordre fini des fonctions.

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1.7.   COMPLÉMENT: UNIVERSALITÉ DES DISTRIBUTIONS    15

Remarque 30:  Cette dernière remarque ne s’applique  pas  à l’espace  D   des distribu-

tions de Schwartz(26)

, qui n’est pas  universel. En effet, on montrera (section 3.6) qu’ilexiste des distributions de D  – pathologiques et probablement jamais utilisées en pra-

tique – dites d’ordre infini , qui ne sont pas  des dérivées d’ordre fini de fonctions. On

montre, cependant, que la plupart des distributions importantes (à support fini, tem-

pérées, etc.) sont d’ordre fini(voir l’exercice 38 pour la définition précise de l’ordre d’une

distribution).

D’après la proposition 28, appliqué à E  =D , on a un morphisme injectif unique :

D −∞ −−−−−→   D 

qui permet de « plonger » D −∞ dans D , c’est à dire d’identifier D −∞ à un sous-espace

de distributions de D , à savoir celui des distributions d’ordre fini. Ainsi, de ce point de

vue, les deux constructions des distributions (par dérivée formelle et par dualité) sont

équivalentes . La notre est cependant beaucoup plus simple (voir la section 3.6 pour plusd’informations).

Exercices

Exercice 31:   Par un raisonnement analogue au cas de v.p.  1x , on définit :

P.f. H (x )

x   = (H (x )log x )   P.f.

  1

|x | = (sgn(x )log |x |)

(sgn x  est la fonction signe = 1 si x > 0 et = −1 si x < 0).

Exercice 32:  Contrairement à δ(x ), la distribution v.p.  1x 

 ∈D −1 ne peut pas  être iden-

tifiée à une mesure : v.p.  1x  ∈ M 0. En effet, sa primitive log |x |  n’est pas localement àvariation bornée, car elle n’est même pas localement bornée (elle n’a pas de limite à

gauche ou à droite en 0). De même, P.f. H (x )x    et P.f.   1

|x |  ne sont pas des mesures.

Exercice 33:   Soit P n  l’espace des polynômes de degré < n . Comme dans le cas(2) n = 1,

on a un isomorphisme E  D n (E )/P n  qui à  f  ∈ E  associe la classe d’équivalence d’une

de ses primitives n ièmes modulo P n .

En particulier, D −n  ∼= D 0/P n  : une distribution de D −n  peut s’identifier à une fonc-

tion définie à l’addition près d’un polynôme de degré < n .

Exercice 34:  Le sous-espace des distributions qui sont « dérivables » dans D −1(E ) est

D (D −1(E )) = E . De même D 2(D −2(E )) = E , et ainsi de suite. Plus généralement, toutes

les notions de dérivées et de primitives dans les différents espacesD ±n (E ) sont compa-

tibles, par construction même de ces espaces :

D p (D q (E )) =D p +q (E )

pour tous entiers p , q , positifs ou négatifs.

Exercice 35 [composition de dérivées et primitives]:   Si m  et n  sont des entiers positifs

ou négatifs, on a la relation :

s (m +n ) = (s (m ))(n )

pour toute distribution s , les deux membres étant toujours bien définis. L’égalité a lieu

à l’addition près d’un polynôme de degré adéquat dans le cas de primitives..

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16   CHAPITRE 1. DÉFINITION DES DISTRIBUTIONS 

Exercice 36:  Une distribution s  ∈ D −∞ dont toutes les dérivées  s , s ,. .. sont des fonc-

tions localement intégrables (respectivement des mesures, ou des fonctions continues)est en fait une fonction de classe C ∞.

Exercice 37:  On sait que la dérivée usuelle (au sens des fonctions), si elle existe, coïn-

cide avec celle au sens des distributions. Dans l’autre sens, la primitive usuelle d’une

fonction   f   coïncide avec sa primitive au sens des distributions ; car cette dernière est

aussi de la forme F +c  où F  = f  .

Exercice 38 [ordre d’une distribution]:  Une distribution est dite d’ordre n  si elle est de

classe D −n  mais pas  de classe D −n +1.

1°) Une distribution est d’ordre n  si et seulement si elle peut s’écrire   f  (n ) où   f   est

d’ordre 0 (localement intégrable, mais pas absolument continue).

2°) Si s  est d’ordre n , alors s (m ) est d’ordre n +

m .

3°)   H (x ) et log |x | sont d’ordre 0, δ(x ) et v.p.  1x  sont d’ordre 1, δ(n )(x ) est d’ordre n +1 et

P.f.   1x n  est d’ordre n .

4°) L’ordre de s + t  est inférieur ou égal au maximum des ordres de s  et t  ; il est égal à ce

maximum lorsque s  et t  sont d’ordres différents.

5°) La distributionδ est ses dérivées δ(i ) sont linéairement indépendantes  : une combi-

naison linéaire nulle

i  c i δ(i ) = 0 implique c i  = 0 pour tout i . En effet, dans le cas

contraire, la combinaison linéaire nulle serait d’ordre > 0, ce qui est impossible.

Si l’on préfère utiliser l’espace  M 0 des mesures comme espace de référence, une dis-

tribution sera dite d’ordre n  si elle est de classe  M −n  mais pas  de classe M −n +1. Cette

définition est la définition classique de Schwartz. On a alors des propriétés analogues,

mais dans ce cas, δ est d’ordre 0, δ(n ) est d’ordre n , et v.p.  1x  est toujours d’ordre 1.

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Chapitre 2

Premières propriétés des

distributions

2.1 Produit d’une fonction par une distribution

Le produit de deux fonctions ( f g )(x ) =   f  (x )g (x ) est évidemment commu-

tatif :  f g  = g f  , associatif : ( f g )h  = f  (g h ) et distributif : ( f  + g )h  = f g + f h . Le

produit d’une fonction g  ∈  D 0 par une fonction   f  ∈ C 0 (ou simplement loca-

lement bornée) est aussi de classe D 0, car | f g | | f ||g |  est intégrable sur tout

intervalle fini.

Remarque 39 [produit de fonctions D 0]:   Le produit de deux fonctions locale-ment intégrables (de classe D 0) n’est pas toujours une fonction de classe D 0. Par

exemple, f  (x ) =   1 |x |  est localement intégrable en 0 mais  f  2 (x ) = f  (x ) f  (x ) =   1|x |

ne l’est pas. A fortiori , on ne peut pas définir le produit de deux mesures quel-

conques (encore moins le produit de deux distributions quelconques : voir aussi

la remarque 46 ci-dessous).

Pour qu’un produit de deux distributions ait un sens, il faudra que l’un des

facteurs soit d’autant plus régulier (de classe C n  par exemple) que l’autre est ir-

régulier (de classeC −n ). La définition de ce produit sera possible en généralisant

les propriétés de dérivation du produit de fonctions.

Proposition 40 [dérivée de produit de fonctions]:  Si f et g sont de classe D 1 (ou C 1 ), alors le produit f g aussi et on a la formule  ( f g ) = f  g + f g .

Cela vient de la formule classique d’intégration par partiesb 

a   f  (t )g (t ) d t  =[ f  (b )g (b )− f  (a )g (a )]−

b a   f  (t )g (t ) d t . Considérons maintenant le cas d’une dis-

tribution s  = g , dérivée formelle d’une fonction g  ; on veut définir son produit

 f g  par une fonction f  . Pour conserver le développement ( f g ) = f  g + f g  bien

connu, il est nécessaire que :

 f g  = ( f g ) − f  g .

17

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18   CHAPITRE 2. PREMIÈRES PROPRIÉTÉS DES DISTRIBUTIONS 

Cette formule va servir de définition, les termes  f g  et f  g  (produits ordinaires)

étant bien définis pour  f  suffisamment régulier. Pour une distribution  s = g (n )

,la définition se généralise par récurrence sur n .

Proposition 41 [produit d’une distribution par une fonction]:  Il existe une et une seule façon de définir le produit f s d’une distribution s ∈ D −∞ par une fonc-tion f  ∈ C ∞ de telle sorte que : 

[1]   Ce produit coïncide avec le produit ordinaire f s lorsque s est une fonction ; 

[2]  On a toujours l’identité :  ( f s ) = f  s + f s .De plus, ce produit possède les propriétés naturelles suivantes : 

[a]  Si f est constante = c, le produit f s coïncide avec le produit cs dont est muni l’espace des distributions.

[b]   Distributivité à gauche et à droite :  ( f  + g )s = f s + gs et f  (s + t ) = f s + f t ; [c]  Associativité : f  (g s ) = ( f g )s (qu’on note simplement f g s) ; 

On notera indifféremment f s  ou s f  .

Preuve :  On procède par récurrence sur n  pour s  = g (n ) ∈ D −n . Pour n  = 0, le

produit f s  est le produit ordinaire dont les propriétés [a]–[c] sont bien connues.

Supposons la construction faite et les propriétés prouvées à l’ordre n −1 et consi-

dérons s  ∈ D −n . Pour que [2] soit vérifié à l’ordre n  il est nécessaire que   f t  =( f t ) − f  t   lorsque t  ∈ D −n +1. On doit  alors définir le produit f s  par la relation :

 f s = ( f t ) − f  t  où t  est une primitive quelconque de s .Pour que cette définition soit valide il faut qu’elle soit indépendante de la

primitive de s  choisie. Or toute primitive s’écrit  t + c , où c  est une constante, etavec les propriétés à l’ordre n − 1 on a bien ( f  (t + c )) − f  (t + c ) = ( f t + c f  ) − f  t − c f   = ( f t ) − f  t . De plus, cette définition est compatible avec celle établie

à l’étape précédente de la construction, car dans le cas particulier où s ∈ D −n +1,

on a toujours la relation  f s = ( f t ) − f  t .Les propriétés [a]–[c] s’en déduisent facilement à l’ordre n  : car si elles sont

valables pour t , alors si f  = c  est constante, on obtient bien f s = (ct ) −0 = ct  =cs  ; la distributivité à gauche et à droite résultent immédiatement de celle du

produit ordinaire et de la linéarité de la dérivation; enfin, pour l’associativité :

 f  (g s ) = f  (g t ) − f g t  = f g t + f g t  − f g t  = ( f g )t  = ( f g )s .  

On peut généraliser cette construction (exercice 81) pour définir le produit f s  où   f  ∈ C n  et s  ∈ M −n  (ou D −n , ou C −n ). Cela permet de traiter des cas plus

généraux.

Exemple 42 [produit d’une fonction parune impulsion]:   Pour s = δ (impulsion

de Dirac), on a f δ= f H  = ( f H )− f  H , où H  est la fonction échelon. Si f  (0) = 0,

on a   f  (x )H (x ) =x 

0   f  (t )H (t ) d t  ce qui montre que ( f H ) =   f  H , d’où   f δ = 0.

Dans le cas général,  f δ= ( f  − f  (0))δ+ f  (0)δ= f  (0)δ :

 f  (x )δ(x ) = f  (0)δ(x ).

Ceci reste valable lorsque f  est seulement continue car δ(x ) est une mesure(81).

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2.2. FORMULES DE LEIBNIZ    19

2.2 Formules de Leibniz

Pour développer la dérivée n ième du produit f g  de fonctions, on peut pro-

céder par récurrence à partir de ( f g ) = f  g + f g , ou faire le calcul formel sui-

vant : à tout polynôme homogène à deux variables  p (x , y ) = n i =0 a i x i  y n −i  as-

socions P ( f  , g ) =n i =0

a i  f  (i )g (n −i ) où les puissances i èmes deviennent des dé-

rivées  i èmes. Les deux formules ( f  (i )g ( j )) =   f  (i +1)g ( j ) + f  (i )g ( j +1) et  x i +1 y  j  +x i  y  j +1 = (x + y )x i  y  j  montrent que la dérivation correspond formellement à une

multiplication par x + y . En traduisant les formules symboliques (x + y )n x 0 y 0 =n i =0

n i 

x i  y n −i  et x 0 y n = (x + y − x )n =i (−1)i 

n i 

(x + y )n −i x i  y 0, on trouve :

Proposition 43 [formules de Leibniz]:

( f g )(n ) = n i =0

n i  f  (i )g (n −i ).   f g (n ) = n 

i =0

(−1)i n i ( f  (i )g )(n −i ).

Pour s  = g (n ) ∈ D −n , la deuxième formule de Leibniz donne une expression ex-plicite  du produit f s .

Exemple 44 [produit d’une fonction parδ(n )]:  Sachant que f  (x )δ(x ) = f  (0)δ(x )pour  f  ∈ C 0, la formule de Leibniz donne f  (x )δ(x ) = f  (0)δ(x ) − f  (0)δ(x ) pour

 f  ∈ C 1, f  (x )δ(x ) = f  (0)δ(x ) − 2 f  (0)δ(x ) + f  (0)δ(x ) pour f  ∈ C 2 et plus géné-

ralement

 f  (x )δ(n )(x )

=

i =0

(

−1)i 

n i  f 

 (i )(0)δ(n −i )(x )

pour f  ∈ C n . En particulier, x m δ(n ) =i (−1)i n 

(   m !

(m −i )!x m −i δ)(n −i ) où les termes

sont nuls pour i  > m  (car alors la dérivée i ème de x m  est nulle). Les termes sont

également nuls pour i  < m , puisque x δ(x ) = 0. On trouve donc :

x m δ(n )(x ) =

0 si m > n 

(−1)n n ! δ(x ) si m = n 

(−1)m    n !(n −m )!δ

(n −m )(x ) si m < n .

Exemple 45 [simplification en pseudo-fonction]:  La distribution v.p.  1x  est la

dérivée de log |x |, et donc x v.p.

 1

x  = x (log |x |) = (x log |x |) − log |x | = log |x |+ 1 −log |x | = 1 :

x ·v.p. 1

x  = 1.

Plus généralement,  x n P.f.   1x n  =   (−1)n −1

(n −1)! x n (v.p.  1

x )(n −1) où la formule du produit

donne x n (v.p.  1x )

(n −1) = n −1i =0 (−1)i 

n −1i 

(   n !

(n −i )!x n −i v.p.  1

x )(n −1−i ). Par la relation

x v.p.  1x  = 1, on simplifie et on trouve x n P.f.   1

x n  = (−1)n −1n −1i =0 (−1)i 

n i 

= 1 :

x n ·P.f.  1

x n  = 1 (n  1).

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20   CHAPITRE 2. PREMIÈRES PROPRIÉTÉS DES DISTRIBUTIONS 

Remarque 46 [produit impossible de deux distributions]:  L’exemple suivant,

dû à Schwartz, montre qu’on ne peut pas , en général, définir le produit de deux distributions de telle sorte qu’il vérifie des propriétés « raisonnables » : considé-

rons le « produit »

v.p. 1

x  · x ·δ(x ).

S’il était bien défini et associatif, on aurait (v. p. 1x ·x ) ·δ(x ) = v.p.  1

x ·(x ·δ(x )), c’est

à dire 1 ·δ(x ) = (v.p.  1x ) ·0 ; d’où 1 = 0.. .

2.3 Changement de variable

On s’intéresse ici aux changements de variable les plus courants, du type

ax + b  où  a  et  b  sont des constantes réelles avec  a = 0. La fonction ϕ(x ) = ax +b  est définie sur un intervalle   J  à valeurs dans l’intervalle  I  ; si   I  =  a J  + b , le

changement de variable est inversible  et son inverse est ϕ−1(x ) =  x −b a   .

Etant donnée une fonction localement intégrable f  (x ) définie sur I , la fonc-

tion déduite de f  par le changement de variable ϕ(x ) = ax +b , notée f  (ax +b ),

est évidemment localement intégrable sur J . Si f  est dérivable (de classe D 1 sur

I ), on peut écrire  f  (x ) = f  (c ) +x 

c   f  (t ) d t . Par changement de variable, il vient

 f  (ax + b ) =   f  (c ) + a x 

(c −b )/a  f  (au + b )du   de dérivée   d 

d x  f  (ax + b ) =  a f  (ax +b ). Plus généralement, si   f   est de classe  D n , on a la formule   d n 

d x n  f  (ax + b ) =a n  f  (n )(ax + b ). Ceci suggère d’adopter la définition suivante pour généraliser

la notion de changement de variable ax +

b  aux distributions :

Définition 47 [distribution déduite d’un changement de variable]:  Etant don-

née une distribution  s  =   f  (n ) définie sur  I , la distribution déduite de  s  par la

changement de variable ax +b  est la distribution définie sur J  par :

s (ax +b ) = a −n   d n 

d x n  f  (ax +b ).

Cette définition est bien cohérente, c’est à dire qu’elle ne dépend pas du re-

présentant   f  (n ) choisi : si par exemple s  = g (m ) où m  > n , alors g (m −n ) =  f  , et

donc a −m   d m 

d x m  g (ax + b ) = a −n   d n 

d x n  f  (ax + b ). Par ailleurs, cette définition se ré-

duit bien à celle du changement de variable usuel d’une fonction lorsque  s 

∈D 0

(faire n = 0).

Proposition 48 [propriétés du changement de variable]:   Le changement de va-riable ax +b vérifie les propriétés suivantes : 

– dérivation :   d d x s (ax +b ) = as (ax +b ) et plus généralement,   d n 

d x n  s (ax +b ) =a n s (n )(ax +b ) ; 

– linéarité :  (αs +βt )(ax +b ) =αs (ax +b )+βt (ax +b ).– composition : s (a (cx +d ) +b ) = s ((ac )x + (ad +b )). En particulier pour un 

changement de variable inversible : t (x ) = s (ax +b ) ⇐⇒  s (x ) = t ( x −b a    ).

– produit :  ( f s )(ax +b ) = f  (ax +b )s (ax +b ).

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2.3. CHANGEMENT DE VARIABLE    21

Preuve :   On obtient immédiatement ces propriétés à partir des propriétés ana-

logues pour les fonctions. Par exemple, pour le produit, on peut utiliser la for-mule de Leibniz : en posant s a ,b (x ) = s (ax +b ) où s = g (n ) ∈ D −n ,ilvient( f s )a ,b =n 

i =0(−1)i n 

( f  (i )g )(n −i )

a ,b   avec

( f  (i )g )(n −i )

a ,b  =  a i −n a −i ((( f a ,b )

(i )g a ,b )(n −i ),

d’où ( f s )a ,b = a −n  f a ,b (g a ,b )(n ) = f a ,b s a ,b .  

 Voici quelques cas particuliers importants :

Distribution translatée :   Etant donnée une distribution s , la distribution trans-latée par a  est celle déduite de s  par le changement de variableϕ(x ) = x −a .On la note s a (x ) = s (x − a ). Evidemment s 0 = s . Les propriétés de ce chan-

gement de variable particulier sont la dérivation  (s a ) = s a , plus générale-

ment (s a )(n )

=(s (n ))a  ; la linéarité  : (αs 

+βt )a 

=αs a 

+βt a  ; la composition  :

(s a )b = s a +b , en particulier t  = s a  ⇐⇒  s = t −a  ; le produit  : ( f s )a = f a s a .

Distribution retournée  Etant donnée une distribution s , la distribution retour-née est s (−x ), déduite de s (x ) par le changement de variableϕ(x ) = −x .Les

propriétés de ce changement de variable particulier sont la  dérivation  :d 

d x s (−x ) = −s (−x ), plus généralement   d n 

d x n  s (−x ) = (−1)n s (n )(−x ) ; la linéa-rité  : (αs +βt )(−x ) =αs (−x ) +βt (−x ) ; la composition  : s (−(−x )) = s (x ) ; le

produit  : ( f s )(−x ) = f  (−x )s (−x ).

Distribution dilatée/contractée   Etant donnée une distribution s  et un nombre

λ> 0, la distribution s (λx ), déduite de s (x ) par le changement de variable

ϕ(x )=λx  est dite dilatée siλ

<1 ou contractée siλ

>1. Lespropriétés de ce

changement de variable particulier sont la dérivation  :   d d x s (λx ) =λs (λx ),

plus généralement :   d n 

d x n  s (λx ) = λn s (n )(λx ); la linéarité   : (αs +βt )(λx ) =αs (λx ) +βt (λx ) ; la composition  : s (λ(µx )) = s (λµx ), en particulier t (x ) =s (λx ) ⇐⇒  s (x ) = t ( x 

λ) ; le produit  : ( f s )(λx ) = f  (λx )s (λx ).

Distribution restreinte  Etant donnée une distribution  s  définie sur un inter-

valle I  et un sous-intervalle (ouvert) J  ⊂ I , la distribution déduite de s  par

le changement de variable  ϕ : x  ∈ J  → x  ∈ I  est notée s | J , restriction  de  s à  J . En particulier si s  est une fonction   f  , on obtient la définition habi-

tuelle   f | J   : x  ∈ J  →  f  (x ). Dans le cas général, pour s  =  f  (n ) où   f   est une

fonction, sa restriction s’obtient par dérivation à partir de la restriction de

 f   : s | J  = ( f | J )(n )

.Les propriétés de ce changement de variable particulier sont la  dériva-tion  : (s | J )

= s | J , et plus généralement, (s | J )(n ) = s (n )| J  ; la linéarité  : (αs +

βt )| J  =αs | J +βt | J  ; la composition : (s | J )|K  = s |K  pour K  ⊂ J  ⊂ I  ; le produit  :( f s )| J  = f | J  · s | J .

Exemple 49 [impulsion de Dirac au point a ]:   L’impulsion de Dirac au point x =a  est la distribution δa (x ) = δ(x −a ), dérivée de l’échelon translaté H a (x ) = H (x −a ). Au point x = 0, on a retrouve δ(x ) = δ0(x ). Pour f  ∈ C ∞, la relation f  (x )δ(x ) = f  (0)δ(x ), translatée par a , donne f  (x )δa (x ) = f  (a )δa (x ).

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22   CHAPITRE 2. PREMIÈRES PROPRIÉTÉS DES DISTRIBUTIONS 

Exemple 50 [distributions paires, impaires]:  Une distribution s (x ) est paire  si

s (x ) = s (−x ) et impaire  si s (x ) = −s (x ). Puisque  d d x s (−x ) = −s (−x ), la dérivée

change la parité. Ainsi H (x ) − 12 =   1

2 sgn(x ) est impaire, donc sa dérivée  δ(x ) est

paire : δ(−x ) = δ(x ). En dérivant encore,  δ(x ) est impaire, et ainsi de suite. De

même log |x | est paire, donc v.p.  1x  est impaire, P.f.   1

x 2  et paire, et ainsi de suite

en dérivant. Bien entendu, toutes les distributions ne sont pas nécessairement

paires ou impaires (considérer par exemple δ(x ) + v.p.  1x ).

Exemple 51 [distributions homogènes]:   Siλ> 0, on a la relation H (λx ) = H (x ),

d’où en dérivant :  δ(λx ) =   1λδ(x ); on dit que  δ(x ) est homogène de degré −1.

Plus généralement pour tout  λ = 0 on a δ(λx ) =   1|λ|δ(x ). En dérivant la relation

log |λx | = log |λ| + log |x |, on trouve v.p.   1λx  =   1

λ v.p.  1x , donc v.p.  1

x  est aussi ho-

mogène de degré−

1.

2.4 Propriétés locales des distributions

Pour faciliter l’étude locale des distributions, on adopte la notation suivante :

Notation 52 [égalité locale de distributions]:  On dit que deux distributions s , t sont égales sur l’intervalle  ouvert J , et on note :

s (x ) = t (x ) pour x ∈ J 

lorsque les restrictions coïncident : s | J  = t | J .

Le résultat suivant montre qu’une distribution est uniquement déterminée

par sa donnée au voisinage de chaque point de l’intervalle de définition I .

Proposition 53 [principe de localisation]:   Deux distributions égales sur une fa-mille (finie ou infinie) I i  d’intervalles ouverts sont égales sur la réunion I  =i  I i .

Preuve :   Par différence on se ramène à montrer que si s |I i  = 0 pour tout i  alors

s  =  0 sur la réunion   I  = i  I i . Posons s  =   f  (n ) où   f  ∈ D 0. La condition  s |I i  =

0 signifie que   f  (x ) = p i ,n (x ), polynôme de degré < n  pour tout  x  ∈ I i . Si deux 

intervalles I i  et  I  j  se recouvrent, alors p i ,n (x ) = p  j ,n (x ) pour tout x ∈ I i ∩I  j . Cette

intersection étant de longueur non nulle, elle contient une infinité de points qui

sont racines du polynôme p i ,n 

−p  j ,n  ; on a donc identiquement p i ,n 

 =p  j ,n . En

prenant une suite d’intervalles   I i   recouvrant  I  on trouve ainsi que  p i ,n  =  p n ,

polynôme de degré < n , est indépendant de i . D’où f  = p n  et  s = f  (n ) = p (n )n   = 0

sur tout I .  

Remarque 54:   On a supposé explicitement que les intervalles I i  sont ouverts de

sorteque si I i  et I  j  se recouvrent, alors leur intersection I i ∩I  j  est un intervalle de

longueur > 0. Le résultat subsiste pour des intervalles I i  quelconques qu’à cette

condition. Par exemple, la fonction échelon  H  est constante p.p. pour x  0 et

pour x  0, et donc δ|[0,+∞[ = 0 et δ|]−∞,0] = 0 ; mais on ne peut pas en déduire

que δ= 0, puisque l’intersection ]−∞, 0]∩[0,+∞[= {0} se réduit à un seul point.

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2.4. PROPRIÉTÉS LOCALES DES DISTRIBUTIONS    23

On a la généralisation importante suivante de la proposition 53, qui montre

que l’on peut « recoller » des « morceaux de distributions »  s i  pour former unedistribution s .

Proposition 55 [recollement des morceaux]:  Considérons une famille (finie ou infinie) I i  d’intervalles ouverts dont la réunion est un intervalle I  = i  I i , et une  famille s i  ∈ D −n (I i ) de distributions définies sur I i  et « compatibles », dans le sens où s i  et s  j  sont égales sur l’intersection I i ∩ I  j  dès que I i  et I  j  se recouvrent. Alors il  existe une distribution « recollée » s ∈ D −n (I ) unique définie sur I , qui est égale à s i  sur chaque I i .

Preuve :   Puisque s i  ∈ D −n (I i ) pour tout i , on peut écrire s i  = f  (n )i    où f i  est loca-

lement intégrable sur I i . Par hypothèse, sur chaque intersection non vide I i 

∩I  j ,

on a  f  (n )i    = f  (n ) j    ; autrement dit :  f i  − f  j   est un polynôme de degré < n . On peuttrouver une suite de polynômes p i ,n  de degré < n  tels que   f i  + p i ,n  =  f  j  + p  j ,n 

chaque fois que I i   et I  j   se recouvrent. Il suffit alors de définir s  = f  (n ) où   f   est

la fonction égale à   f i  + p i ,n  sur I i , pour tout i  ; la distribution s  vérifie bien les

propriétés demandées. Elle est unique par le principe de localisation(53).  

Remarque 56:  L’hypothèse que s i  ∈ D −n (I i ) pour tout i  est superflue si les  s i sont en nombre fini, car un tel indice n  (assez grand) existe toujours dans ce

cas. Par contre, cette hypothèse est essentielle si les s i  sont en nombre infini ; en

effet, si elle n’est pas satisfaite, la distribution recollée s n’existe pas car il faudrait

qu’elle soit dérivée n ième d’une fonction pour n  aussi grand qu’on veut1.

Exemple 57 [distribution discrète]:  Etant donné un ensemble  discret   {x i } de

points distincts x i  ∈R (en nombre fini sur tout intervalle fini), on peut recouvrir

R=i  I i  par des intervalles I i  contenant x i  (et aucun autre x  j ) pour tout i . Si on

pose que s i  ∈ D −1(I i ), est une impulsion s i  = c i δx i   en x  = x i  (où les c i  ∈ R ou C

sont des constantes), la distribution recollée est notée :

s (x ) =

i c i δ(x − x i ).

C’est une combinaison linéaire (finie ou infinie) d’impulsions, de classe D −1. On

peut écrire s = f   où  f  est une fonction constante par morceaux avec des sauts

d’amplitude f  (x +i   )

− f  (x −

i   )

=c i  en x 

=x i .

En général, parler de s (x ) pour x  donné n’a pas de sens. Mais si s (x ) est une

fonction continue dans un voisinage de x , on peut définir la valeur s (x ) d’une

distribution en x  ; cette valeur est unique grâce au principe de localisation.

Définition 58 [valeurs d’une distribution]:  Si une distribution s  est égale à une

fonction continue f  sur un intervalle J  (c’est à dire s | J  = f | J ), alors on dit que la

distribution s (x ) admet une valeur  égale à f  (x ) , pour tout x ∈ J .

1En revanche, dans la théorie classique de Schwartz (section 3.6), on obtient toujours une dis-

tribution recollée, qui peut être d’ordre infini.

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24   CHAPITRE 2. PREMIÈRES PROPRIÉTÉS DES DISTRIBUTIONS 

Exemple 59:  Puisque la fonction échelon H (x ) est constante pour x > 0 et pour

x < 0, sa dérivée δ(x ) est nulle sur chacun des deux intervalles ] −∞, 0[, ]0,+∞[.On peut donc écrire :

δ(x ) = 0 pour x = 0.

 Ainsi δ(x ) admet la valeur 0 pour tout x = 0 ; mais elle n’admet aucune valeur en

x = 0. En dérivant la restriction de δ sur chacun des deux intervalles, on obtient

immédiatement que δ(n )(x ) = 0 pour x = 0, n  0.

Exemple 60:  Puisque la dérivée (usuelle) de log |x | est =   1x   pour x = 0 :

v.p. 1

x  = 1

x   pour x = 0.

 Ainsi v. p.  1x  admet la valeur   1

x  pour tout x = 0 ; mais elle n’admet aucune valeur

en x = 0. En dérivant encore pour x > 0etpour x < 0, on obtient P.f.   1x n  =   1

x n  pour

x = 0,n > 0.

2.5 Distributions impulsives et formules des sauts

Définition 61 [distribution impulsive]:   Une distribution  ∆  est dite  impulsive ou ponctuelle  en x = a  si son support est réduit au point {a } :

∆(x ) = 0 pour tout x = a 

 Autrement dit, la restriction de  ∆  aux deux intervalles ] − ∞, a [ et ]a ,+∞[ est

nulle. Les distributions impulsives en un point donné forment (avec la distribu-

tion nulle) un espace de distributions (sur R ou C), stable par multiplication par

une fonction C ∞.

Exemple 62:  La distribution de Dirac  δ(x ), ainsi que chacune de ses dérivées

δ(n )(x ), sont nulles(59) pour x = 0 et donc impulsives en x = 0. Il en est de même

de toute combinaison linéaire finie (non nulle) de δ et de ses dérivées :

∆n = c n −1δ+ c n −2δ +· · ·+ c 0δ

(n −1).

En fait, les combinaisons linéaires de dérivées distributions de Dirac en unpoint sont les seules distributions impulsives :

Proposition 63 [caractérisation des distributions impulsives]:   Une distribu-tion ∆ est impulsive en x = a si et seulement si elle s’écrit sous la forme : 

∆(x ) = c 0δ(x − a ) + c 1δ(x − a ) +· · ·+ c n −1δ

(n −1)(x − a )

Preuve :   Par translation on se ramène au cas où a  = 0. Si une distribution ∆ = f  (n ) est impulsive en 0, on a   f  (n ) = 0 pour  x  >  0 et pour  x  <  0, et donc   f  (x )est polynomiale de degré < n  à la fois pour  x  > 0 et pour x  < 0. Puisque   f   est

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26   CHAPITRE 2. PREMIÈRES PROPRIÉTÉS DES DISTRIBUTIONS 

Dans les dérivations ultérieures (d’ordre n ), les sauts produisent des distri-

butions impulsives (de degré < n ) :

Proposition 66 [formule des sauts dérivés]:   Sous les mêmes hypothèses que la proposition 65, on suppose en outre que f  (x ) est de classe D n  sauf en les x i  ∈ R,où f et ses n −1 premières dérivées présentent des  sauts d’amplitudes finies f  (k )

i    = f  (k )(x +i   ) − f  (k )(x −i   ). La dérivée nième de f  (x ) (au sens des distributions) est : 

 f  (n )(x ) = { f  (n )(x )} +

 f  (n −1)

i    δx i (x )+ f  (n −2)i    δ

x i (x ) +· · ·+ f i δ(n −1)x i    (x )

Preuve :   Comme dans la preuve de la proposition précédente, il suffit de consi-

dérer un seul saut (disons en x = 0). D’après la formule des sauts, f   = { f  }+ f  (1)0   δ.

En dérivant cette relation on obtient (toujours par la formule des sauts)   f  

 ={ f  } + f  (2)0   δ+ f  (1)0   δ, et ainsi de suite par récurrence.  

2.6 Complément: le problème de la division

Le problème de la division  par une fonction  f  (x ) ∈ C ∞ consiste à déterminer, pour

une distribution t (x ) donnée, les solutions  s (x ) de l’équation   f  (x )s (x ) = t (x ). Si   f  (x )ne s’annule pas sur  R, alors on peut multiplier par   1

 f  (x ) ∈ C ∞, et on trouve la solution

unique s (x ) =   1 f  (x ) t (x ). Lorsque   f  (x ) s’annule, le problème de la division devient plus

difficile. On examine ici quelques cas particuliers les plus importants :

Proposition 67 [résolution de l’équation x n s (x ) = 0]:

xs (x ) = 0 ⇐⇒  s (x ) = c δ(x )   (c constante) et plus généralement, les solutions de l’équation x n s (x ) = 0 (où n  > 0 ) sont les distribu-tions impulsives s (x ) = c 0δ(x ) +c 1δ(x )+· · ·+c n −1δ

(n −1)(x ) de degré < n.

Preuve :   Une solution vérifie nécessairement la relation x s (x ) = 0 pour x  = 0. En divi-

sant par x  = 0, il en résulte que  s (x ) = 0 pour tout  x  = 0 ; s (x ) est donc une distribu-

tion impulsive du type

i  c i δ(i )(x ). En reportant dans l’équation x n s (x ) = 0 et en tenant

compte de l’expression vue(44) de x n δ(i )(x ), on trouve une combinaison linéaire nulle

de δ(n ),δ(n +1),. . . (linéairement indépendantes(64)) dont les coefficients sont nécessaire-

ment nuls. Il en résulte que c n = c n +1 = · · ·= 0, d’où la solution générale énoncée.  

Remarque 68 [division avec zéro unique]:   Si f  (x ) est C ∞ avec un unique zéro simple

en x = 0, alors on toujours :  f  (x )s (x ) = 0 ⇐⇒   s (x ) = c δ(x ) (c  constante). En effet, on se

ramène à l’équation xs (x ) = 0 en divisant par   f  (x )x    , qui est toujours C ∞ (même en x = 0).Le cas d’un zéro de f   en x = a  se déduit immédiatement par translation : on a alors

 f  (x )s (x ) = 0 ⇐⇒  s (x ) = c δ(x − a ) (c  constante).

Plus généralement, si f  (x ) est C ∞ avec un unique zéro multiple en  x  = 0 de multi-

plicité n , alors f  (x )s (x ) = 0 si et seulement si x n s (x ) = 0.

Proposition 69 [résolution de l’équation x n s (x ) = 1]:

xs (x ) = 1 ⇐⇒  s (x ) = v.p. 1

x  + c δ(x )   (c constante) 

et plus généralement, les solutions de l’équation x n s (x ) = 1 (où n  > 0 ) sont de la forme s (x ) = P.f.   1

x n  + c 0δ(x )+ c 1δ(x ) +· · ·+c n −1δ(n −1)(x ).

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2.7. DISTRIBUTIONS À SUPPORT FINI    27

Preuve :  On sait que P.f.   1x n  est une solution particulière de l’équation x n s (x ) = 1. Par

différence, la solution générale est de la forme P.f.  1

x n  +r (x ) où r (x ) est la solution géné-rale de l’équation x n r (x ) = 0.  

2.7 Distributions à support fini

Définition 70 [distribution à support fini]:   Une distribution s  est dite à support  fini 2 (dans un intervalle fini [a ,b ]) si :

s (x ) = 0 pour x ∈ [a ,b ]

 Autrement dit, les restrictions de s  à ] −∞, a [ et à ]b ,+∞[ sont nulles.

Exemple 71:  Une distribution impulsive est évidemment à support fini (fairea = b ). Il résulte immédiatement de la formule ( f s )| J  = f | J · s | J  que le produit f s est à support fini  dès que f   ou s  l’est.

L’ensemble des distributions à support fini forme un espace de distributions

(sur R ou C), stable par multiplication par une fonction C ∞. On le note souvent

E  dans la littérature.

Remarque 72:  La formule (s |I ) = s |I  montre que si s  est à support fini, toutes

ses dérivées s (n ) le sont aussi. Par contre, l’exemple de  δ(x ) montre qu’une dis-

tribution peut être à support fini sans qu’aucune de ses primitives  δ(−n )(x ) =x n −1

(n −1)!H (x ) + p n (x ) ne le soit.

Proposition 73 [caractérisation des distributions à support fini]:  Une distri-bution s (x ) est à support fini dans  [a ,b ] si et seulement si elle s’écrit sous la forme 

s (x ) = f  (n )(x ) +∆n (x )

où f  (x ) est une fonction intégrable à support fini dans  [a ,b ] et où ∆n (x ) est une distribution impulsive (de degré  < n) en x  = c, le point c étant choisi librement dans  [a ,b ].

Preuve :   Si une distribution s  = g (n ) est à support fini dans [a ,b ], elle s’annule

pour x  < a  et pour x  > b , donc g (x ) est une fonction polynomiale de degré < n à la fois pour  x  <  a   et pour  x  >  b . Puisque  g (x ) est définie à l’addition près

d’un polynôme de degré <  n , on peut supposer que  g (x ) =  0 pour  x  <  a   etg (x ) = p n (x ), polynôme de degré < n , pour x  > b . Pour c  ∈ [a , b ] quelconque,

posons h (x ) = p n (x −c )H (x −c ). On sait(63) que ∆n = h (n ) est impulsive au point

c , de degré < n . Par ailleurs, la fonction   f  (x ) = g (x ) − h (x ) s’annule en dehors

de l’intervalle [a ,b ] et est intégrable dans cet intervalle. On a donc bien la repré-

sentation voulue s = g (n ) = f  (n ) +∆n  ; réciproquement, une distribution de cette

forme est bien à support fini dans [a ,b ].  

2Le support d’une distribution à support fini dans [ a ,b ] est, par définition du support(89),

fermé et inclus dans [a ,b ]. Ce support est donc à la fois fermé et borné, c’est à dire  compact .Par conséquent, distribution « à support fini » et « à support compact » sont synonymes.

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28   CHAPITRE 2. PREMIÈRES PROPRIÉTÉS DES DISTRIBUTIONS 

Dans cette preuve on peut choisir n  suffisamment grand pour que g (x ) soit

aussi régulière qu’on veut. En prenant c  = a  ou  b  on obtient une fonction   f  (x )aussi régulière qu’on veut dans [a , b ].

Remarque 74:  La représentation 73 nous permettra de prouver facilement de

nombreux résultats concernant ces distributions à support fini. Supposons par

exemple qu’une propriété linéaire soit vraie pour toute fonction (régulière) à

support fini. Si on montre alors qu’elle est stable par dérivation (vraie pour s  si

elle est vraie pour s ) et par ailleurs vraie pour l’impulsion δ, alors elle sera vraie

pour toutes dérivées δ(n ) ou  f  (n ) et donc par linéarité pour toute distribution à

support fini.

2.8 Intégrale d’une distribution

L’intégrale de Lebesgue d’une fonction  f  ∈ D 0 à support fini dans [a ,b ] est f  (x )d x  =

b a   f  (x )d x . On sait que pour une primitive quelconque de   f  , on

a

 f  (x )d x  =   f  (−1)(b ) − f  (−1)(a ) (indépendant du choix de la primitive). On a

même  f  (−1)(x ) = f  (−1)(b ) pour tout x  b  et  f  (−1)(x ) = f  (−1)(a ) pour tout x  a .Notons f  (−1)(+) et  f  (−1)(−) ces deux quantités (valeurs de f  (−1)(x ) pour x  assez

grand ou assez petit, respectivement). On obtient alors la formule :

 f  (x )d x  = f  (−1)(+)− f  (−1)(−). Il est facile de généraliser aux distributions :

Définition 75 [intégrale d’une distribution]:   Etant donnée une distribution  à support fini s (x ), son intégrale est définie par :

s (x ) d x = s (−1)(+)− s (−1)(−)

où s (−1)(+) et  s (−1)(−) sont les valeurs d’une primitive quelconque de s (x ) pour

x  assez grand et x  assez petit, respectivement.

Cette définition est cohérente (elle ne dépend pas du choix de la primitive), car

si s  est à support fini dans [a ,b ], on a s |]b ,+∞[ = 0 et  s |]−∞,a [ = 0, donc toute pri-

mitive s (−1) est telle que s (−1)|]b ,+∞[ et  s (−1)|]b ,+∞[ sont des constantes (respecti-

vement s (−1)(+) et  s (−1)(−)), et puisque la primitive est elle-même définie à une

constante additive c  près, la différence s (−1)(+)−s (−1)(−) ne dépend pas du choix 

de la primitive. On retrouve bien sûr l’intégrale usuelle si  s (x ) est une fonction.Exemple 76 [intégrale d’une impulsion]:   H (x ) vaut1 pour x > 0et0pour x < 0,

donc   δ(x )d x = 1

(en accord avec la formule δ(R) =

d H (x ) = 1 pour la mesure δ= d H ). Puisque

δ(x ) vaut 0 pour x = 0 : δ(x ) d x = 0

et, de même,δ(n )(x ) d x = 0 pour tout n > 0.

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2.8. INTÉGRALE D’UNE DISTRIBUTION    29

Proposition 77 [linéarité de l’intégrale]:  Si s et t sont des distributions à sup-

port fini, alors  αs +βt aussi pour toutes constantes  α,β et αs (x ) +βt (x ) d x  =α

s (x )d x +β

t (x ) d x.

Preuve :   La distribution αs +βt  est à support fini dans un intervalle fini conte-

nant les deux supports de  s   et t . Si s (−1) et t (−1) sont des primitives de s   et t ,alors αs (−1) +βt (−1) est une primitive de  αs +βt , d’où (αs (−1)(+) +βt (−1)(+)) −(αs (−1)(−) +βt (−1)(−)) =α(s (−1)(+) − s (−1)(−)) +β(t (−1)(+) − t (−1)(−)).  

Proposition 78 [changement de variable  a x + b ]:   Si s (x )  est à support fini et a = 0, alors 

s (ax +b ) d x =   1

|a |

s (x ) d x.

Preuve :   Une primitive de   t (x ) =  s (ax + b ) est   t (−1)(x ) =   1a s (−1)(ax + b ), avec

t (−1)(

±)

 =  1

s (−1)(

±) si  a 

 > 0 et   t (−1)(

±)

 =  1

s (−1)(

∓) si  a 

 < 0, d’où t (x )d x 

 =s (−1)(+)−s (−1)(−)|a |   dans tous les cas.  

En particulier, la translatée s a (x ) = s (x −a ), retournée s (−x ) et dilatée/contractée

|λ|s (λx ), ont toutes même intégrale que s (x ). Par exemple, on aδ(x − a ) d x  =

δ(−x )d x = 1 etδ(λx ) d x =   1

|λ| .

Proposition 79 [intégration par parties]:  Si s est une distribution et f une fonc-tion C ∞ telles que f s  et f  s sont toutes deux à support fini : 

 f  (x )s (x ) d x = [ f s (+)− f s (−)]−

 f  (x )s (x )d x .

La formule se simplifie :  f  (x )s (x ) d x 

 = − f  (x )s (x ) dx si f ou s est à support 

 fini.Noter que dans ce dernier cas, on trouve la formule générale

 f  (x )s (n )(x )d x = (−1)n 

 f  (n )(x )s (x )d x 

au bout de n  intégrations par parties successives.

Preuve :   Notons t  =  f s  ; ce produit est bien défini et on a la formule  t  = f  s + f s . Les distributions  f  s  et  f s   sont à support fini, donc  t  aussi. L’intégrale de

t  = f  s + f s  est donc bien définie et par linéarité de cette intégrale :

t (x )d x =t (+) − t (−) =

 f  (x )s (x ) d x +

 f  (x )s (x ) d x . Si  f   ou s  est à support fini, alors  f s 

et f  

s  sont à support fini et la formule d’intégration par parties reste valable. De

plus, f s  est aussi à support fini et donc  f s (+) = f s (−) = 0.  

Exemple 80:   Puisque(42)  f  (x )δ(x ) = f  (0)δ(x ), on a, par linéarité de l’intégrale : f  (x )δ(x )d x = f  (0)

(Par translation par a  on obtient

 f  (x )δ(x − a )d x  =  f  (a ).) Par intégration par

parties successives on en déduit que : f  (x )δ(n )(x ) d x = (−1)n  f  (n )(0).

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30   CHAPITRE 2. PREMIÈRES PROPRIÉTÉS DES DISTRIBUTIONS 

Exercices

Exercice 81: D’après la formule d’intégration par parties généralisée pour les intégrales

de Lebesgue-Stieltjes :b 

a   f  (t ) dg (t ) = [ f  (b −)g (b −) − f  (a +)g (a +)] −b 

a   f g (t )d f  (t ), on a

la formule générale ( f g ) =  f  g  + f g   pour tout   f  , g  ∈ M 1. On peut alors reprendre la

définition du cours ; il existe une et une seule façon de définir le produit :

 f s    ( f  ∈ C n , s ∈ M −n , n  0),

(en particulier valable pour s ∈ D −n  ou C −n ) de telle sorte que ce produit coïncide avec

le produit ordinaire f s  lorsque n = 0, etque l’on ait toujours larelation : ( f s ) = f  s + f s 

pour f  ∈ C n , s ∈ M −n +1, n  1. On a, de plus a les propriétés suivantes : f s  est de classe

M −n  (respectivement D −n , C −n ) pour   f  ∈ C n  et s  ∈ M −n  (respectivement D −n , C −n ) ;

distributivité à gauche et à droite ; associativité.

Exercice 82:  On note P.f.   1|x |   la dérivée de sgn(x )log |x |. Alors x P.f.   1

|x | =  (|x | log |x |) −sgn(x )log |x | = sgn(x ). De même, on trouve x P.f. H (x )

x    = x (H (x )log x ) = H (x ).

Exercice 83 [formules de Leibniz]:   On a,de même que pour les fonctions,les formules:

( f s )(n ) =n 

i =0

n i 

 f  (i )s (n −i ).   f s (n ) =

n i =0

(−1)i n i 

( f  (i )s )(n −i ).

pour une distribution s   quelconque et   f  ∈ C ∞. En notant s [n ] =   s (n )

n !  , ces formules se

simplifient : ( f s )[n ] =i + j =n  f  [i ]s [ j ] et f s [n ] =i + j =n (−1)i ( f  [i ]s )[ j ].

Exercice 84:   L’ordre(38) de f s  est toujours au plus égal à celui de  s .

Exercice 85 [parties paire et impaire d’une distribution]:   Toute distribution s  se dé-

compose sous la forme s (x ) = s 0(x ) + s 1(x ) où s 0(x ) est paire, s 1(x ) est impaire, toutes

deux uniquement déterminées par s (x ). Par exemple : P.f.   1|x |  et v.p.  1

x  sont les parties

paire et impaire de 2 P.f.  H (x )x    .

Exercice 86 [changement de variable (cas général)]:   On appelle changement de va-

riable ϕ  une fonction C ∞ strictement monotone  d’un intervalle  J   vers un intervalle I ,qui à t  ∈ J  associe x  = ϕ(t ) ∈ I . Essayer de généraliser l’approche du cours pour défi-

nir la distribution notée  s ◦ϕ ou  s (ϕ), déduite d’une distribution s  définie sur I  par le

changement de variable ϕ.

Exercice 87:  Retrouver que δ

(n )

(x ) = 0 et P.f.

  1

x n  =  1

x n   pour x  = 0, en multipliant les re-lations connues x n δ(n −1)(x ) = 0 et x n P.f.   1

x n  = 1 par   1x n   qui est C ∞   dans chacun des

intervalles ]−∞,0[ et ]0,+∞[.

Exercice 88 [extension d’une distribution]:   Etant donnée une distribution t  définie sur

 J , on dit qu’une distribution s  définie sur I  ⊃ J  est une extension  de t  si sa restriction à J est s | J  = t . Supposons ici que 0 ∈ J  et  I  =R :

1°) L’impulsionδ(x ), de même que chaque dérivée δ(n )(x ),est une extension de la fonc-

tion nulle. La distribution v.p.  1x  est une extension de la fonction   1

x .

2°) Une extension s  (si elle existe) n’est pas unique. Il y en a une infinité d’autres (s +δ,

s +δ+δ, etc).

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2.8. INTÉGRALE D’UNE DISTRIBUTION    31

3°) Il n’y a pas d’extension s (x ) à R de la fonction e 1/x  ∈ D 0(]0,+∞[), car toutes les pri-

mitives successives de e 1/x 

sont non intégrables en x = 0.Exercice 89 [support d’une distribution]:   Etant donnée une distribution s  définie sur

I , on considère l’ensemble de tous les intervalles ouverts   J   sur lesquels  s   s’annule :

s | J  = 0. Par principe de localisation(53), s  s’annule sur la réunion O  de ces intervalles.

On appelle support  de  s  le complémentaire S  = I  \ O . La réunion O  étant le plus grand

ouvert sur lequel s  s’annule, le support S  est donc le plus petit ensemble  fermé  tel que

s | J  = 0 pour tout intervalle J  en dehors de S  (inclus dans I  \ S ).

Retrouver la définition habituelle du support pour une fonction de D 0 ou de C 0.

Par exemple, le support de la fonction  x  est R  tout entier (0 en fait partie). Le support

d’une fonction ne peut être réduit à un point, car si f  (x ) = 0 pour tout x = x 0, alors f  = 0

p.p., donc   f   est la fonction nulle et son support est vide. Par contre, le support de la

distribution δ est réduit à {0}.

Si  f   et s  sont de supports disjoints , alors   f s  s’annule dans tout intervalle et donc f s = 0. Plus généralement, le support de f s  est contenu dans l’intersection des supports

de   f   et s . Si  f  ∈ C ∞  est tel que  f  et toutes ses dérivées s’annulent sur le support de  s ,alors f s = 0. Le produit x δ ne vérifie aucune de ces deux conditions.

Exercice 90 [produit par une distribution impulsive]:  On considère une distribution

impulsive∆(x ) en x = a  et une fonction f  (x ) de classe C ∞ telle que  f  (a ) = 0. L’exemple

x δ(x ) = −δ(x ) montre qu’on a pas forcément  f  (x )∆(x ) = 0.

1°) Trouver l’expression générale de la distribution  f  (x )∆(x ) grâce aux formules don-

nées dans l’exemple 44 ; vérifier directement que cette distribution est impulsive.

2°) Avec cette expression, on trouve que   f  (x )∆(x ) = 0 pour tout  ∆  de degré < n  si et

seulement si f  (x ) et toutes ses dérivées d’ordre < n  s’annulent en a .

Exercice 91:   Calculer les dérivées successives de H (x )sin x .

Exercice 92:   δ(x −λ) est (à un facteur constant près) l’unique vecteur propre de l’opé-

rateur de multiplication par x  associé à la valeur propre λ.

Exercice 93:   Résoudre xs (x ) = v.p.  1x  et plus généralement x n s (x ) = P.f.   1

x m  .

Exercice 94 [distributions homogènes à support fini]:  Les seules distributions homo-

gènes (s (λx ) =λαs (x ) pour toutλ> 0) à support fini sont impulsives et donc de la forme

s = c δ(n ). En effet, pour λ> 0, s (λx ) est à support fini dans l’intervalle [ a λ , b 

λ ] ; en faisant

λ→ ∞ on obtient bien que s (x ) est nécessairement une distribution impulsive en x = 0.

Exercice 95:  Définir une généralisation de l’intégrale sur [a , b ] pour une distribution à

support quelconque dont la primitive est égale à une fonction dans un voisinage de  a 

et de b . Montrer ainsi que

b a  v.p.  1

x  d x = log | b a |.

Exercice 96 [changement de variable d’intégration (cas général)]:  Pour un change-

ment de variable(86) ϕ ∈ C ∞ de R dans R, s (ϕ(t )) est à support fini si s (x ) l’est, et :s (x ) dx =

s (ϕ(t )) · |ϕ(t )|dt 

En effet, siϕ est croissante, le membre de droite est l’intégrale de (s (ϕ)) et vaut s (ϕ(+))−s (ϕ(−)) = s (+)− s (−), d’où

s (ϕ(t )) ·ϕ(t ) dt  =

s (x ) dx . Si ϕ est décroissante, s (ϕ(+))−

s (ϕ(−)) = s (−)− s (+), et donc

s (ϕ(t )) ·ϕ(t ) dt  =−

s (x ) dx .

Exercice 97:  Retrouver que

 f  (x )δ(n )(x ) dx = (−1)n  f  (n )(0) avec l’expression qui donne

le produit(44)  f δ(n ) =i (−1)i n 

 f  (i )(0)δ(n −i ).

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32   CHAPITRE 2. PREMIÈRES PROPRIÉTÉS DES DISTRIBUTIONS 

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34   CHAPITRE 3. CROISSANCE ET DUALITÉ 

 Avec cette définition, toute combinaison linéaire de distributions = O (|x |α)

est toujours une distribution = O (|x |α

). Ainsi les distributions O (|x |α

), en parti-culier les distributions bornées à l’infini, forment bien un espace  de distribu-

tions, stable par dérivation. L’espace des distributions bornées (à l’infini) est

parfois noté B dans la littérature.

Exemple 99 [distributions bornées]:  Toute fonction bornée au sens usuel est

évidemment une distribution bornée à l’infini. L’impulsion de Dirac  δ = H   est

bornée à l’infini car la fonction échelon l’est ; on en déduit que les dérivées δ(n ),

et plus généralement toute distribution impulsive , sont bornées à l’infini. En-

core plus généralement, toute distribution à support fini  est bornée à l’infini,

car de la forme(73)  f  (n ) +∆ où  f   est une fonction continue à support fini (donc

bornée) et où ∆ est impulsive.

Proposition 100 [propriétés des distributions O (|x |α)]:   Si s (x ) = O (|x |α) alors : – (dérivation :) s (x ) = O (|x |α) ; – (croissance :) s (x ) = O (|x |β) pour tout βα.– (produit par un polynôme p de degré k) p (x )s (x ) = O (|x |α+k ) ; – (produit par une puissance de |x | :) |x |βs (x ) = O (|x |α+β) où β ∈R.

En particulier, on a, comme pour les fonctions, la caractérisation s (x ) = O (|x |α)

si et seulement si |x |−αs (x ) = O (1).

Preuve :   La première propriété est immédiate par définition, la deuxième dé-

coule immédiatement de la propriété correspondante pour les fonctions. Pour

les deux dernières, on a affaire à un produit de la forme   f β(x )s (x ) où1  f  (n )β

  =O (|x |β−n ) pour tout  n   0; posons  s  = k  c k  f 

 (n k )k    où   f k (x ) = O (|x |α). Le pro-

duit  f β(x ) f  (n k )k    (x ) est donné par la formule de Leibniz

i (−1)i 

n k i 

 f  (i )β

  f k (n k −i )

où   f  (i )β

  (x ) f k (x ) = O (|x |β−i +α) = O (|x |α+β). Il en résulte bien, par linéarité, que

l’on a f β(x )s (x ) = O (|x |α+β).  

Remarque 101:   Pour une fonction   f  (x ), la relation   f  (x ) = O (|x |α) au sens des

distributions n’a pas forcément lieu au sens des fonctions. Par exemple 2i xe i x 2 =d 

d x e i x 2 n’est pas une fonction bornée à l’infini, alors que c’est une distribution

bornée à l’infini. Par contre, on verra(107) que tout polynôme non constant p (x )

n’est effectivement pas borné au sens des distributions.

3.2 Distributions à croissance lente

Une fonction  f  (x ) est dite à croissance lente  (à l’infini) s’il existe α ( 0 suf-

fit) tel que   f  (x ) = O (|x |α). Sa dérivée peut ne pas être à croissance lente : un

exemple est sin e x  de dérivée e x cose x . Par contre, on a le résultat suivant pour

les primitives :

1On vérifie immédiatement par récurrence que   d n 

d x n  |x |α = O (|x |α−n ) pour tout α ∈R et n  0.

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3.2. DISTRIBUTIONS À CROISSANCE LENTE    35

Proposition 102 [croissance à l’infini et primitives]:   Si f  (x ) = O (|x |α), α > −1,

alors toute primitive f  (−

1)

(x ) est telle que f  (−

1)

(x ) = O (|x |α

+1

), d’où par récur-rence, f  (−n )(x ) = O (|x |α+n ).

Cela résulte immédiatement d’une majoration de l’intégrale c +x 

0   f  (t )d t qui définit une primitive de   f  . Ce résultat suggère de définir une fonction   f  ∈D n  à croissance lente comme une fonction qui est à croissance lente ainsi que

toutes ses dérivées d’ordren . Lorsquen → ∞ on obtient la définition suivante.

Définition 103 [fonction C ∞  à croissance lente (espace  O M )]:  On dit qu’une

fonction f   est « C ∞ à croissance lente  » si elle est indéfiniment dérivable, à crois-

sance lente ainsi que toutes ses dérivées. Ces fonctions forment un espace (et

même une algèbre) parfois noté O M dans la littérature.

Exemple 104:  Tout polynôme est C ∞ à croissance lente, ainsi que les fonctions

sin x , e i x , e i x 2 , log(x 2 + 1), tanh x  et |x |α = ( 

1+ x 2)α. Les fonctions e x  et sin e x 

sont C ∞ mais pas C ∞ à croissance lente.

La généralisation aux distributions de la notion de fonction à croissance

lente est immédiate :

Définition 105 [distribution à croissance lente]:  Une distribution s (x ) est dite

à croissance lente  s’il existe α tel que s (x ) = O (|x |α).

On a la caractérisation simple suivante :

Proposition 106:  Une distribution s (x ) est à croissance lente si et seulement si elle s’écrit s = f  (n ), n  0 où f est une fonction à croissante lente.

Preuve :  Une dérivée n ième d’une fonction = O (|x |α) est évidemment une dis-

tribution = O (|x |α) à croissance lente. Réciproquement, si s (x ) est une distribu-

tion à croissante lente, elle s’écrit comme une combinaison linéaire

k  c k  f  (n k )k 

de dérivées de fonctions à croissance lente. Par la proposition 102, toutes les

primitives des  f k  sont à croissante lente, et on peut donc écrire  s = f  (n ) pour n assez grand où f  =k  c k  f 

 (n k −n )k    est à croissance lente.  

Remarque 107:   Par le même argument, on obtient la généralisation suivante de

la proposition 102 : si s (x ) = O (|x |α) où α> −1, alors on peut écrire, pour n  assez

grand, s = f  (n ) où la fonction s (−n )(x ) = f  (x ) = O (|x |α+n ) (au sens des fonctions).

En particulier, une distribution bornée s  s’écrit s = f  (n ), où  f  (x ) = O (|x |n ) au

sens des fonctions. Ceci montre, en particulier, qu’un polynôme p (x ) n’est borné (au sens des distributions) que si c’est une fonction constante  : en effet, s’il était

de degré m > 0 on aurait p (−n )(x ) = O (|x |n +m ) = O (|x |n ) au sens des fonctions.

Exemple 108 [distributions à croissance lente]:  Tout polynôme  p (x ), et plus

généralement toute fonction à croissance lente, est une distribution à croissance

lente. Toute distribution àsupportfini est à croissance lente, car elle peut s’écrire

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36   CHAPITRE 3. CROISSANCE ET DUALITÉ 

sous la forme  f  (n ) où f  (x ) est polynomiale de degré < n  en dehors du support,

donc , donc à croissance lente. (On a vu qu’elle est même bornée à l’infini(99)

.)En particulier, toute distribution impulsive , comme  δ(x ) et ses dérivées, est à

croissance lente. La distribution v.p.  1x  = (log |x |) est à croissance lente car log |x |

l’est ; même résultat pour P.f.   1x n .

La fonction e x  n’est pas  une distribution à croissance lente, car aucune de

ses primitives (= e x ) ne peut être à croissance lente.

3.3 Distributions tempérées

Nous allons voir que les distributions à croissance lente s’identifient aux dis-

tributions dites tempérées .

Une fonction (localement intégrable) f  est dite tempérée  s’il existe un expo-

sant α( 0) telle que |x |−α f  (x ) soit intégrable (∈ L 1). Il revient au même d’écrire

que |x |−k  f  (x ) est intégrable pour un entier k  assez grand :   f  (x )

(1+x 2)k d x  < ∞ ou

de dire que  f  (x ) s’écrit  f  (x ) = p (x )g (x ) où  p (x ) est un polynôme et où g (x ) est

intégrable. Ainsi toute fonction tempérée s’obtient à partir d’une fonction ∈ L 1 par multiplication par un polynôme .

Toute fonction intégrable (comme   11+x 2 , e −x 2 , e −|x |) est évidemment tempé-

rée. Les fonctions non intégrables   1 1+x 2

  ou   sin x x    sont tempérées. Toute fonction 

à croissance lente est tempérée ,carsi f  (x ) = O (|x |α), alors  f  (x )|x |α+2  est intégrable. Par

contre, une fonction tempérée peut ne pas être à croissance lente : un exemple

(pathologique) est donné par  f  (x ) = e n 

pour |x − n | e −2n 

(∀n > 0) et  f  (x ) = 0ailleurs (fonction intégrable mais à croissance exponentielle).

Si   f  (x ) est tempérée, sa dérivée peut ne pas l’être : ainsi sin e x  est bornée,

donc tempérée ; mais sa dérivée e x cose x  n’est pas tempérée, car e t  cose t 

(1+t 2)α d t  =∞

0cos x 

(1+log 2 x )αd x  diverge à l’infini pour tout α > 0. Par contre, grâce à la majora-

tion évidente |x |−α| f  (−1)(x )|x 

0 |x |−α| f  (t )|d t x 

0 |t |−α| f  (t )|d t , on a le résul-

tat suivant pour les primitives :

Proposition 109 [primitives tempérées]:  Si f est tempérée, toute primitive f  (−1)

est à croissance lente (donc tempérée).

Remarque 110:   Ceci suggère de définir les fonctions f   « C ∞ tempérées » comme

celles pour lesquelles   f   et toutes ses dérivées soient tempérées. Mais ces déri-vées seront alors toutes des primitives de fonctions tempérées, donc à crois-

sance lente. Ainsi fonction « C ∞ tempérée » et « C ∞ à croissance lente » sont sy-nonymes  (espace O M).

Définition 111 [distribution tempérée (espaceS  )]:   Une distribution s  est dite

tempérée  si on peut écrire s = f  (n ) où n  0 et  f  est une fonction tempérée.

Une fonction à croissance lente étant tempérée, une distribution à croissance

lente est nécessairement tempérée. Réciproquement si s = f  (n ) où f  est tempé-

rée, alors toute primitive F   de   f  est à croissance lente, et s  = F (n +1). Ainsi dire

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3.4. DISTRIBUTIONS À DÉCROISSANCE RAPIDE    37

que s  est tempérée revient à dire que s  est à croissance lente : distribution « tem-

pérée » et « à croissance lente » sont synonymes .Ces distributions forment un espace noté S    dans la littérature. D’après la

définition, si s ∈S  , alors toute dérivée ou toute primitive de s  est aussi dansS  .De plus, cet espace est stable par multiplication par une fonction  C ∞  à crois-

sance lente :

Proposition 112:  Si s est une distribution tempérée et f est C ∞ à croissance lente,alors f s est une distribution tempérée : s ∈S  , f  ∈ O M  =⇒   f s ∈S  .

Preuve :   Posons s = g (n ) où g  est une fonction à croissance lente ; toute fonction

produit  f  (i )g  est à croissance lente donc tempérée, il en résulte que le produit

 f s  =

  f g (n ), donné par la formule de Leibniz n 

i =0

(−

1)i n 

i ( f  (i )g )(n −i ), est bien

une distribution tempérée.  

Remarque 113:  Ainsi, toute distribution qui provient d’une fonction intégrable

(ou bornée, ou tempérée, ou à croissance lente)   f  par opérations répétées de

multiplication par un polynôme et de dérivation est une distribution tempé-

rée. Réciproquement, par la définition, une distribution tempérée est une dé-

rivée n ième d’une fonction tempérée g  qui peut s’écrire sous la forme  g (x ) =(1 + x 2)k  f  (x ) où   f  (x ) est intégrable (L 1). Ainsi toute distribution tempérée s’ob-tient à partir d’une fonction f  ∈ L 1 par multiplication par un polynôme et par dérivations successives.

Dans cette représentation on peut d’ailleurs prendre n  assez grand pour que

 f   soit aussi régulière que l’on veut ; on peut également prendre k  assez grand

pour que f  soit à décroissance O (   1|x |m ) à l’infini aussi rapide que l’on veut. Si on

combine ces deux choix (n  et  k  assez grands), d’après la formule de dérivation

du produit(43)  f  (x ) =   g (x )(1+x 2)k  , on peut imposer que   f  et un nombre arbitraire-

ment grand < n  de ses dérivées successives soient toutes à décroissance à l’infini

aussi rapide qu’on veut :  f  (i )(x ) = O (   1|x |m ) pour m  arbitrairement grand.

Remarque 114:  La représentation s = g (n ), g (x ) = (1+ x 2)k  f  (x ) nous permettra

de prouver facilement de nombreux résultats concernant ces distributions tem-

pérées. Supposons par exemple qu’une propriété linéaire soit vraie pour toute

fonction intégrable   f  (x ) (suffisamment régulière et décroissant suffisamment

vite à l’infini). Si on montre alors que cette propriété est  stable par dérivation et multiplication par x  (vraie pour s (x ) et pour x s (x ) si elle est vraie pour s (x ))

alors elle sera vraie par linéarité pour toute fonction  p (x ) f  (x ) où p (x ) est un

polynôme, et donc par dérivation pour toute distribution tempérée.

3.4 Distributions à décroissance rapide

Une fonction   f  (x ) est dite à décroissance rapide  (à l’infini) si   f  (x ) = O (   1|x |α )

pour tout  α( 0). Cela revient à dire que |x |α f  (x ) est bornée pour tout  α  ou

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38   CHAPITRE 3. CROISSANCE ET DUALITÉ 

que p (x ) f  (x ) est bornée pour tout polynôme p (x ). Les fonctions à décroissance

exponentielle comme e −x 2

ou e −|x | sont à décroissance rapide.

La dérivée d’une fonction à décroissance rapide peut ne pas l’être : ainsi

e −x 2 sine x 2 est à décroissance rapide ; mais sa dérivée 2x (cose x 2 −e −x 2 sin e x 2 ) ne

l’est visiblement pas. Si  f  est une fonction à décroissance rapide, il est possible

qu’aucune de ses primitives ne le soient : ainsi toute primitive g  d’une fonction

gaussienne e −x 2 est telle que g (+∞) − g (−∞) =R e −x 2 d x  > 0 et donc ne peut

être à décroissance rapide.

Par analogie avec les fonctions C ∞ tempérées (à croissance lente ainsi que

toutes leurs dérivées), on peut définir les fonctions C ∞ à décroissance rapide :

Définition 115 [fonction C ∞ à décroissance rapide (espaceS  )]:  Une fonction

 f  est dite « C ∞

 à décroissance rapide  » si elle est indéfiniment dérivable, à dé-

croissance rapide ainsi que toutes ses dérivées   f  (m ) (∀m  >  0). Ces fonctions

forment un espace (et même une algèbre) noté S    (espace de Schwartz ).

Exemple 116:  Toute fonction gaussienne e −(ax )2

est C ∞  à décroissance rapide,

ainsi que tout produit p (x )e −(ax )2

par un polynôme p (x ). La fonction   1cosh x   l’est

aussi. Toute fonction C ∞  à support fini est  C ∞   à décroissance rapide. Toute

fonction C ∞ à décroissance rapide est a fortiori C ∞ à croissance lente. D’après

la formule de Leibniz(43), le produit d’une fonction C ∞  à croissance lente par

une fonction C ∞ à décroissance rapide est encore C ∞ à décroissance rapide.

La définition d’une fonction à décroissance rapide se généralise immédiate-

ment aux distributions :

Définition 117 [distribution à décroissance rapide (espaceO C )]:   Une distribu-

tion s (x ) est à décroissance rapide  (à l’infini) si s (x ) = O (   1|x |α ) pour tout α.

Comme pour les fonctions, cela revient à dire(100) que |x |αs (x ) est bornée pour

tout α, ou encore que p (x )s (x ) est bornée pour tout polynôme  p (x ). Une distri-

bution à décroissance rapide est évidemment tempérée (à croissance lente) et

même bornée à l’infini (faire α= 0).

Les distributions à décroissance rapide forment un espace, parfois noté O C dans la littérature. D’après la définition, si  s  ∈ O C , alors toute dérivée est aussi

dans O C , ainsi que tout produit p (x )s (x ) par un polynôme ; en effet, si p (x ) est

de degré k , on a(100) p (x )s (x ) = O (|x |k −α) pour α aussi grand que l’on veut.

Exemple 118:  Toute fonction à décroissance rapide  f  est évidemment une dis-

tribution à décroissance rapide. C’est le cas de e −|x |, e −x 2 ,   1cosh x   et leurs produits

par des polynômes.

Toute distribution s (x ) à support fini  est à décroissance rapide, car |x |αs (x )estaussi à supportfini pour toutα, donc bornée à l’infini(99). En particulier toute

distribution impulsive , comme δ(x ) et ses dérivées. Par contre, v.p.  1x  n’est pas  à

décroissance rapide, car x 2 v.p.  1x  = x  n’est pas bornée(107). DemêmeP.f.   1

x n  n’est

pas à décroissance rapide.

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3.5. PRODUIT SCALAIRE    39

Remarque 119 [représentation de Schwartz]:   D’après la définition des distri-

butions O (|x |α

), dire que s (x ) est à décroissance rapide revient à dire que pourtout  α > 0, s (x ) peut s’écrire comme une combinaison linéaire de dérivées de

fonctions = O (   1|x |α ) :

s (x ) =

i c i  f 

 (n i )i    où f i (x ) = O (   1

|x |α ).

Dans cette représentation, on peut choisir les f i (x ) aussirégulières qu’on veut . En

effet |x |αs (x ) est bornée, c’est à dire combinaison linéaire de dérivées de fonc-

tion bornées ; en considérant les primitives n ièmes de ces fonctions, on obtient,

d’après la proposition 102, que |x |αs (x ) est une combinaison linéaire de déri-

vées de fonctions O (|x |n ) de classe D n . D’après la preuve de la proposition 100,

il en résulte que s (x ) est combinaison linéaire de dérivées de fonction O (|x |n −α)

de classe D n , pour α aussi grand qu’on veut.

3.5 Produit scalaire

Comme pour le produit multiplicatif   f s , on définit ici le produit scalaire

(s | f  ) d’une distribution s  contre une fonction f  ∈ C ∞. Il y a deuxfaçons de défi-

nir le produit scalaire : soit directement comme une intégrale de la distribution

 f s , sous réserve qu’elle soit à support fini ; soit sous une contrainte de compor-

tement à l’infini adéquat de  f   et s . Pour le premier cas ( f s  à support fini) on se

limite au cas où f ou s  est à support fini :

Définition 120 [produit scalaire à support fini]:   Le produit scalaire  d’une dis-

tribution s  contre une fonction   f  ∈ C ∞, telles que   f   ou s  est à support fini est

l’intégrale :

(s | f  ) =

s (x ) f  (x )d x .

On note indifféremment (s  | f  ) ou ( f  | s ), et s’il est nécessaire de préciser la va-

riable on noteras (x ) | f  (x )

. Voir ci-dessous(127) pour des exemples de fonctions

C ∞ à support fini.

Remarque 121:  Une autre définition courante du produit scalaire est :

⟨s | f ⟩ =

s (x ) f  ∗(x )d x = (s | f  ∗)

où   f  ∗  est le complexe conjugué de   f  . Le premier produit scalaire (s  |  f  ) (noté

ici avec des parenthèses) est aussi appelé produit intérieur (inner product   en

anglais) ou produit de dualité ; le deuxième ⟨s  | f ⟩ (noté ici avec des crochets)

généralise la définition du produit scalaire hermitien pour des fonctions à va-

leurs complexes. On se limite ici aux propriétés de (s  | f  ), celles de ⟨s  | f ⟩ s’en

déduisant immédiatement.

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40   CHAPITRE 3. CROISSANCE ET DUALITÉ 

Les propriétés de l’intégrale (linéarité(77), intégration par parties(79), etc.) se

traduisent immédiatement sur les produits scalaires :–   bilinéarité  : (αs +βt  | f  ) =α(s | f  ) +β(t  | f  )et (s |α f  +βg ) =α(s | f  ) +β(s |

g ).

–   dérivation  : (s  | f  ) = −(s  | f  ) et plus généralement (par intégrations par

parties successives) (s (n ) | f  ) = (−1)n (s | f  (n )).

–  changement de variable ax + b   : (s (ax + b ) |  f  (x )) =   1|a | (s (x ) |  f  ( x −b 

a    )). En

particulier pour la translation s a (x ) = s (x − a ), on a (s a  | f  ) = (s | f −a ).

–  produit par une fonction g  ∈C ∞ quelconque : (g s | f  ) = (s | f g ).

Exemple 122:   D’après l’exemple 80, on a (δ |   f  ) =   f  (0) et plus généralement

(δ(n ) | f  ) = (−1)n  f  (n )(0).

On peut aussi définir un produit scalaire (s  | f  ) sans  contrainte de support,

pour lequel les propriétés ci-dessus restent valables. Il faut, pour cela, un com-portement à l’infini  adéquat de s  et  f   :

Proposition 123 [produit scalaire tempéré]:   Il existe une et une seule façon de définir le produit scalaire  (s | f  ) d’une distribution  tempérée (à croissance lente) s contre une fonction C ∞ à décroissance rapide f de telle sorte que : 

[1]  le produit scalaire  (s  | f  ) est le produit scalaire usuel 

s (x ) f  (x ) dx lorsque s est une fonction tempérée ; 

[2]   on ait toujours la relation de dérivation (s  | f  ) = −(s | f  ), d’où par récurrence sur n, la relation  (s (n ) | f  ) = (−1)n (s | f  (n )).

On pourra toujours écrire (formellement) (s  | f  ) =

s (x ) f  (x ) d x  bien que cette

intégrale ne soit pas toujours définie.

Preuve :   Posons s  = g (n ) où g  est une fonction tempérée. Pour que le produit

scalaire soit défini il est nécessaire que l’on ait la relation ( s  |  f  ) = (g (n ) |  f  ) =(−1)n (g  | f  (n )) pour toute fonction C ∞  à décroissance rapide  f  , où (g  | f  (n )) est

l’intégrale usuelle

g (x ) f  (n )(x ) d x  (qui converge bien puisque f  (n ) est à décrois-

sance rapide). On doit donc définir (s  |   f  ) par cette relation (et on aura bien

l’identité (s  | f  ) = (g (n 

+1)

| f  ) = (−1)n 

+1

(g  | f  (n 

+1)

) = −(g (n )

| f  ) = −(s | f  )).Il reste à montrer que cette définition est  cohérente , c’est-à-dire indépen-

dante du représentant g (n ) choisi tel que g  soit tempérée. Or d’une part,  g   est

définie à l’addition près d’un polynôme p n  de degré < n  ; mais par intégration

par parties usuelle, on a (les termes tout intégrés étant nuls) :

p n (x ) f  (n )(x )d x =(−1)n 

p (n )

n   (x ) f  (x ) d x  = 0 car p (n )n    = 0. D’autre part, en choisissant n  est mini-

mal pour que s (−n ) = g  soit tempérée, pour tout autre représentant s  = h (m ) où

m  n , h  = g (n −m ) est tempérée et (−1)m (h  |  f  (m )) = (−1)n (g  |  f  (n )) par m − n intégrations par parties usuelles. Ceci montre bien la cohérence de la défini-

tion.  

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3.6.   COMPLÉMENT: DUALITÉ DE SCHWARTZ    41

Il est immédiat de vérifier que ce nouveau produit scalaire vérifie bien les

mêmes propriétés que l’ancien concernant la bilinéarité et le changement de va-riable ax +b  (cela se déduit des propriétés correspondantes du produit scalaire

usuel de fonctions). De plus, on a bien la relation (hs  | f  ) = (s  | f h ) pour toute

fonction C ∞   à croissance lente h . En effet, avec les hypothèses de la proposi-

tion ci-dessus, f h  est C ∞ à décroissance rapide et par Leibniz, (hs | f  ) = (hg (n ) | f  ) = i (−1)i 

n i 

(h (i )g )(n −i ) |   f 

=  (−1)n 

i n 

(h (i )g  |   f  (n −i )) = (−1)n 

i n 

(g  |

h (i ) f  (n −i )) = (−1)n (g  | (h f  )(n )) = (g (n ) | h f  ) = (s | h f  ).

Remarque 124:  En fait, ces deux définitions du produit scalaire coïncident  bien

lorsqu’elles s’appliquent toutes les deux. En effet, il y a alors deux possibilités.

La première est que s = g (n ) est tempérée et f   est C ∞ à support fini ; dans ce cas

on a bien  f  (x )s (x ) d x  =

(−

1)n  f  (n )(x )g (x ) d x  =

(s  |

 f  ) selon les deux défini-

tions. La deuxième possibilité est que s  est à support fini et f   est C ∞ à décrois-

sance rapide ; d’après la représentation(73) s = g (n ) +∆, il suffit pour conclure de

traiter le cas où  s  = ∆ est impulsive ou même (par linéarité) lorsque  s  =  δ(n ) ;

or(122) δ(n )(x ) f  (x )d x  =  (−1)n  f  (n )(0) =  (−1)n +1

∞0   f  (n +1)(x ) d x  =  (−1)n +1(H  |

 f  (n +1)) = (δ(n ) | f  ) selon les deux définitions.

Exemple 125:  Calculons le produit scalaire

P.f.   1|x | · e −πx 2 d x  de la distribution

tempérée P.f.   1|x | =  (sgn x log |x |)  contre la fonction  C ∞   à décroissance rapide

e −πx 2 (fonction gaussienne). Par intégration par parties, ce produit scalaire vaut

sgn x log |x |(−2πx )e −πx 2 d x  = 4π

0   x log xe −πx 2 d x  =

0   log( t π

)e −t d t  où on

a fait le changement de variable t  =

πx 2. Sachant que ∞0

  log(t )e −

t dt  =Γ

(1)

=−γ où Γ(x ) est la fonction Gamma etγ est la constante d’Euler, on trouve immé-

diatement :   P.f.

  1

|x | · e −πx 2 d x = −γ− log π.

Remarque 126 [produit scalaire impossible]:   On vient de définir le produit sca-

laire (s | f  ) lorsque s  est une distribution à croissance lente  (s ∈S  ) et  f   est une

fonction C ∞   à décroissance rapide   ( f  ∈  S  ). On pourrait penser définir aussi

le produit scalaire (s  |   f  ) lorsque  s  est une distribution à décroissance rapide (s ∈O C) et f  est une fonction C ∞ à croissance lente  ( f  ∈ O M). Malheureusement,

c’est impossible , car d’après l’exercice 142, la fonction e i x 2 (ou e −i x 2 ) est à la fois

une fonction C ∞ à croissance lente et une distribution à décroissance rapide, etl’intégrale

e i x 2 e −i x 2 d x =d x = +∞ diverge.

3.6 Complément: dualité de Schwartz

L’espace des fonctions C ∞ à support fini est souvent noté D dans la littérature. Ces

fonctions jouent un rôle important dans la théorie de Schwartz des distributions. Pour

simplifier on choisit R comme corps de base, le cas de C se traitant de la même façon.

Exemple 127 [fonction de D ]:  ] La fonction g (x ) = e −1/x  pour x > 0 et nulle pour x  0

est C ∞ (ses dérivées s’annulent toutes en 0). La fonction suivante est donc C ∞ à support 

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42   CHAPITRE 3. CROISSANCE ET DUALITÉ 

 fini  :   f  (x ) = g (1 + x )g (1 − x ) = e −  1

1−x 2 pour |x | < 1, et nulle ailleurs. Par translation et

dilatation/contraction on peut construire une fonction  f  ∈ D  positive à support inclusdans tout intervalle donné à l’avance.

Pour un intervalle donné [a , b ] quelconque et ε > 0 suffisamment petit, on vérifie

facilement que la fonction ϕ(x ) =b 

a   f  (x − t ) dt , où f  (x ) ∈D est positive à support dans

[−ε,ε], est une fonction de D  nulle en dehors de [a − ε, b +ε] et constante =

 f  (x ) dx dans [a +ε,b −ε].

Pour une distributionquelconque s ∈ D −∞ donnée, l’application qui à f  ∈ D associe

le produit scalaire :

(s | f  ) =

s (x ) f  (x ) dx ∈R

vérifie la relation de linéarité (s  | α f  + βg ) = α(s  |   f  ) +β(s  | g ). C’est donc une  forme linéaire , dite forme linéaire associée à s . Ecrivons s = g (n ) avec g  ∈ D 0 ; puisque (s | f  ) =(−1)

n (g  | f 

 (n )), on peut majorer :

|(s | f  )| =g (x ) f  (n )(x ) dx 

c   max x ∈[a ,b ]

| f  (n )(x )|

où le support de f  est contenu dans [a ,b ] et où c =b 

a  |g (x )|dx . Il en résulte que si une

suite de fonctions f k  ∈D , toutes à supports dans [a , b ], est telle que  f  (n )k    tend uniformé-

ment vers 0 pour tout n  (on dit pour abréger que  f k  → 0 dans D ), alors (s | f k ) tend vers

0. Par linéarité, si   f k  → f   dans D  (au sens où  f k − f  → 0 dans D ) alors (s  | f k ) → (s  | f  ).

On exprime ceci en disant que la forme linéaire  f  → (s | f  ) est continue  sur D .

Dans l’approche classique de Schwartz, la donnée d’une telle forme linéaire conti-

nue définit  une distribution :

Définition 128 [distribution de Schwartz]:  On appelle distribution (de Schwartz) une

forme linéaire continue surD . Cesformes linéairescontinues sont deséléments du dual topologique de D , notéD .

 Ainsi, s ∈D  est une forme linéaire continue :

s  :D −→R

 f  −→ s ( f  )

où s ( f  ) est aussi noté (s | f  ) (comme un produit scalaire). Clairement, D  est un espace

vectoriel, l’espace des distributions de Schwartz . On va vérifier que  D   est bien un es-

pace de distributions au sens de la section 1.7, c’est à dire vérifie les axiomes [A1]–[A3]

énoncés dans cette section.

Proposition 129:  Toute fonction g  ∈ D 0 s’identifie à la distribution de Schwartz g  ∈ D 

qui à f  ∈ D associe  (g  | f  ) =g (x ) f  (x ) dx.Par suite, D 0 est identifié à un sous-espace deD , et D  vérifie donc l’axiome [A1].

Preuve :   Comme tout produit scalaire (s  | f  ) d’une distribution s  contre des fonctions

deD , (g  | f  ) définit une forme linéaire continue surD , c’est à dire une distribution ∈D .Il faut montrer que celle-ci détermine  g  ∈ D 0 de façon unique. Par différence, il suffit

de montrer que si

g (x ) f  (x ) dx = 0 pour tout f  ∈ D , alors g  = 0 p.p. (dans D 0). Pour un

intervalle [a , b ] donné, choisissons(127)  f ε ∈D nulle endehorsde [a −ε, b +ε] et constante

= 1dans[a +ε, b −ε], de sorteque f ε converge uniformément vers la fonction indicatrice

1[a ,b ](x ) de l’intervalle quand ε → 0. Il vient

g (x ) f ε(x ) dx  →b 

a  g (x ) dx  = 0 pour tout

intervalle [a , b ], et donc g  = 0 p.p.  

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3.6.   COMPLÉMENT: DUALITÉ DE SCHWARTZ    43

Dans la théorie de Schwartz, certaines propriétés (vues ci-dessus) du produit sca-

laire (s | f  ) servent de définitions. Ainsi :

Définition 130 [dérivée au sens de Schwartz]:   La dérivée s  ∈D   de  s  ∈ D   est définie

par la relation (s  | f  ) = −(s | f  ) pour tout f  ∈D .

Ce s  définit bien une forme linéaire continue surD , donc une distribution ∈D  ; en

effet, si f k  → 0 dansD , alors clairement f  k  → 0 dansD , e t (s  | f k ) = −(s | f  k ) → 0. Puisque

pour g  ∈ D 1, on a (g  | f  ) = −(g  | f  ) pour tout  f  ∈ D  (formule usuelle d’intégration par

parties), la dérivée au sens des distributions (de  D ) généralise bien celle au sens des

fonctions, et D   vérifie donc l’axiome [A2]. Finalement, le résultat suivant montre qu’il

vérifie aussi l’axiome [A3] :

Proposition 131:   Toute distribution t  ∈D  admet une primitive s ∈D  (telle que s  = t),

unique à une constante additive près.

Preuve :   Si une telle primitive s  existe, on doit avoir (s  | F ) = −(t  | F ) pour tout F  ∈ D .Or, on doit définir (s | f  ) pour tout  f  ∈ D , et une telle fonction  f   n’admet pas nécessai-

rement de primitive F  ∈D ; ce n’est le cas que si la primitive F (x ) =x −∞ f  (t )d t   s’annule

pour x  assez grand, c’est-à-dire si l’intégrale  I  =

 f  (x ) dx  =  (1 |  f  ) est nulle. Posons

 f 0 ∈ D  d’intégrale

 f 0(x ) dx  = 1 ; on a alors, dans le cas général, (s  | f  ) = (s  | f 0I ) + (s  | f  − f 0I ) = (c  | f  ) + (s | F ) = (c  | f  ) − (t  | F ), où c  = (s | f 0) est une constante et où F  est la

primitive de f  − f 0I  dans D , qui par construction existe car  f  − f 0I  est d’intégrale nulle.

Ceci montre bien que  s   n’est définie qu’à une constante additive près c . Définissons

alors s  ∈D   par la formule qu’on vient d’établir : (s  | f  ) = (c  | f  ) − (t  | F ). Pour   f  = F   ilvient I  = 0, (c | f  ) = cI  = 0, donc (s | F ) = −(t  | F ) pour tout F  ∈D , d’où s  = t .  

Proposition 132:   L’espace des distributions D −∞ s’identifie au sous-espace de D  des dis-tributions de Schwartz d’ordre fini (dérivées d’ordre fini de fonctions) 

Preuve :  D’après les résultats de la section 1.7, il résulte des axiomes [A1]–[A3] véri-

fiés par D   que l’on peut identifier toute distribution de s  ∈ D −∞  à une distribution de

Schwartz, aussi notée  s  ∈ D . Plus précisément,  s  =   f  (n ) dans D −n  si et seulement si

s = f  (n ) dansD .  

Comme conséquence de ce résultat, la donnée du produit scalaire ( s | f  ) pour tout

 f  ∈D détermine complètement la distribution s ∈ D −∞.

Exemple 133 [impulsion de Dirac]: La forme linéaire :

δ :D −→R

 f  −→ f  (0)

est clairement continue sur D , et définit donc une distribution  δ ∈ D . Puisque   f  (0) =−∞

0   f  (t ) dt  =−(H  | f  ), il vient δ= H , et δ ∈D  s’identifie donc à l’impulsion de Dirac

δ ∈ D −1.

On vérifie de même que la forme linéaire continue  f  → (−1)n  f  (n )(0) est la dérivée

n ième de la distribution δ ∈D , qui s’identifie donc à δ(n ) ∈ D −n .

Dans le cas deD , on obtient aussi d’autres distributions, dites d’ordre infini , qui ne

sont pas des dérivées d’ordre fini de fonctions.

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3.6.   COMPLÉMENT: DUALITÉ DE SCHWARTZ    45

Il en résulte que si une suite de fonctions  f k  ∈S   est telle que x m  f  (n )k    (x ) tend uniformé-

ment vers 0 sur R pour tout n  et tout m  0 (on dit pour abréger que f k  → 0 dans S  ),alors (s | f k ) tend vers 0. Ainsi, la forme linéaire  f  → (s | f  ) est continue  sur S  .

Une distribution de Schwartz tempérée  est définie  comme une forme linéaire conti-

nue surS  . Leur ensemble est le dual topologique deS  , notéS   ⊂D . On montre (dans

la théorie de Schwartz) que tout  s  ∈ S    est d’ordre fini ; il en résulte que l’espace des

distributions tempérées dans D −∞ s’identifie complètement à S  .

On montre de même que notre espace des distributions de D −∞ bornées   (respecti-

vement à décroissance rapide ) s’identifie complètement à l’espaceB des distributions

bornées (respectivement l’espaceO C des distributions à décroissance rapide) défini par

Schwartz [1]. Observer que les trois cas où l’on a défini le produit scalaire (s | f  ) corres-

pondent aux trois dualités classiques : D −D , E −E , et S   −S  . En revanche, confor-

mément à la remarque 126, il n’y a pas de dualité entre O M et O C.

Les propriétés des distributions sont souvent plus compliquées à établir avec uneapproche par dualité. Déjà au départ, définir une distribution suppose la donnée d’une

forme linéaire en  f  dont il faut vérifier qu’elle est continue  pour la bonne topologie. A 

ce propos citons Schwartz [2] : «  On peut démontrer mathématiquement (avec l’axiome du choix) l’existence de fonctionnelles linéaires discontinues sur D ; mais on ne peut pas en citer explicitement une seule, et il y a peu de chances qu’on en rencontre jamais dans la pratique. » Ensuite, les propriétés ci-dessus du produit scalaire (s | f  ) servent de défini-tions  dans l’approche par dualité de Schwartz : (s  | f  ) = −(s | f  ) pour définir la dérivée

d’une distribution ; (s + t  | f  ) = (s | f  ) + (t  | f  ) pour la somme ; (g s | f  ) = (s | g f  ) pour le

produit par g  ∈ C ∞ ; (s a  | f  ) = (s | f −a ) pour la translation, etc. De ce fait, la plupart des

calculs sur les distributions de Schwartz nécessitent de revenir aux formes linéaires, ce

qui rend certains calculs pénibles. Voici un exemple.

Exemple 137 [valeur principale de Cauchy]:  Déterminons la forme linéaire associée àv.p.  1

x . Puisque f  ∈ D  il en est de même de g (x ) =   f  (x )− f  (0)

x    et on peut écrire f  (x )v.p.  1x  =

g (x )x v.p.  1x  + f  (0)v.p.  1

x  = g (x ) + f  (0)v.p.  1x . Une primitive est de la forme  g (−1)(x ) +

 f  (0)log |x |. Pour a  assez grand on a donc :

(v.p.  1x  | f  ) =

−a  f  (x )v.p.

 1

x  d x =

−a g (x )d x + f  (0)log | a 

a | =a 

−a 

 f  (x ) − f  (0)

x   dx .

On peut écrire cette dernière intégrale comme la limite quand ε→ 0+ de :ε<|x |<a 

 f  (x ) − f  (0)

x   dx =

ε<|x |<a 

 f  (x )

x   d x 

où la simplification est due au fait que la fonction   1x  est impaire et intégrable sur  ε <

|x 

| <a . Puisque f   est à support fini dans [

−a , a ] on a finalement :

(v.p. 1x  | f  ) =   lim

ε→0+

|x |>ε

 f  (x )

x   dx 

qu’on note aussi

−   f  (x )

x    dx  ou v.p.

 f  (x )x   dx 

et qu’on appelle valeur principale de Cau-

chy  de l’intégrale divergente  f  (x )

x    dx .Dans l’approche classique de Schwartz, on définit v.p.  1

x   par cette relation, après

avoir montré que cette forme linéaire est continue. Puis on utilise le critère (s  |  f  ) =−(s  |  f  ) pour montrer par force manipulation de valeurs principales d’intégrales que

c’est la dérivée de log |x |. Tout cela prend des pages [2]. Dans ce document, c’est cette

dernière propriété v.p.  1x  = log |x | qui a servi de définition.

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46   CHAPITRE 3. CROISSANCE ET DUALITÉ 

Exercices

Exercice 138:   Définir de façon analogue au cours la relation s (x ) = o (|x |α), et établir les

principales propriétés.

Exercice 139:  Si une fonction est une distribution à croissance lente, elle n’est pas for-

cément une fonction  à croissance lente (exemple :  e x cose x  de primitive bornée); de

même, si une fonction est une distribution à décroissance rapide, elle n’est pas forcé-

ment une fonction  à décroissance rapide (exemple : la dérivée de e −x 2 sine x 2 ).

Exercice 140 [représentation de Schwartz]:   En développant s (x ) =   d n 

dx n  (1+x 2)k  f  (x ) on

obtient la représentation générale de toute distribution tempérée (à croissance lente)

comme une somme finie  du type s (x ) =i , j  c i , j x i  f  ( j )(x ) où  f  est continue bornée (ou

arbitrairement régulière avec un nombre arbitrairement grand de ses dérivées décrois-

sant arbitrairement vite en  1

|x |m  à l’infini).

Exercice 141:  Contrairement à ce qui se passe pour la croissance lente, une distribu-

tion à décroissance rapide n’est pas forcément la dérivée n ième d’une distribution à

décroissance rapide. Un exemple est  δ(x ), dont aucune primitive n’est à décroissance

rapide.

Exercice 142:  La fonction e i x 2 est une fonction bornée, C ∞ tempérée, qui ne tend pas

vers 0 à l’infini. Et pourtant, e i x 2 est une distribution   à décroissance rapide. En effet

toute combinaison linéaire de dérivées de e i x 2 est une distribution bornée, et s’écrit

sous la forme

k  c k   d k 

dx k  e i x 2 =k  c k H k (x )e i x 2 = O (1) où H k (x ) est un polynôme (d’Her-

mite) de degré k . En choisissant, pour chaque  n  0, les c k  tels que

k  c k H k (x ) = (1 +

x 2)n , il en résulte que (1

+x 2)n e i x 2

=O (1) pour tout n  0 et donc e i x 2

=O (   1

|x |α ) pour

tout α.

Exercice 143:   Si s  està décroissance rapide, son produit f s  par une fonction C ∞ à crois-

sance lente n’est pas toujours une distribution à décroissance rapide. Par exemple(142)

e i x 2 e −i x 2 = 1 n’est pas à décroissance rapide.

Par contre, f s  sera à décroissance rapide si f  (x ) est une fonction « C ∞ à croissance

limitée » : f  (i )(x ) = O (|x |α), pour tout i , où α est constante.

Exercice 144 [partie finie de Hadamard]:   La forme linéaire associé à P. f. H (x )x    est, par

un raisonnement analogue à l’exemple 137,

(P.f. H (x )x    | f  ) =   lim

ε

→0+

ε

 f  (x )

x   dx + f  (0)log ε

De même pour P.f.   1x 2

  :

(P.f.   1x 2

 | f  ) =   limε→0+

|x |>ε

 f  (x )

x 2  dx −2

 f  (0)

ε  .

Ce genre de définition est connue sous le nom de partie finie de Hadamard  (d’une inté-

grale divergente en x = 0).

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Chapitre 4

Transformée de Fourier

Pour l’étude de la transformée de Fourier (en abrégé TF), on considère des

fonctions ou distributions définies sur  R. On notera de préférence  t  ∈ R la va-

riable des fonctions (paramètre de « temps »), etν∈R celle de leurs transformées

de Fourier (paramètre de « fréquence »). La notation adoptée pour la transfor-

mée de Fourier suit la convention habituelle en traitement du signal :

S (ν) =

s (t )e −2i πνt d t 

C’est aussi la notation utilisée par Schwartz [1, 2].

4.1 Transformée de Fourier d’une fonction intégrable

Le cadre L 1 (des fonctions intégrables surR) est le cadre naturel pour définir

la TF d’une fonction :

Définition 145 [TF dans L 1]:   La transformée de Fourier  de  f  (t ) ∈ L 1 est la fonc-

tion F (ν) définie par1 :

F (ν) =

 f  (t )e −2i πνt d t .

Noter que l’intégrale converge absolument. Comme conséquence immédiate du

théorème de convergence dominée de Lebesgue, cette transformée de FourierF (ν) est une fonction continue ; elle est aussi bornée  (par la norme L 1 de   f  ) et

elle tend même vers 0 à l’infini (propriété de Riemann-Lebesgue ).

La TF est évidemment une opération  linéaire   : la TF de  α f  (t ) +βg (t ) est

αF (ν)+βG (ν). Le calcul explicite de l’intégrale de Fourier (quand il est possible !)

est plus ou moins aisé selon les cas. Voici quelques exemples instructifs :

Exemple 146 [TF d’une porte]:  Une fonction porte est la fonction indicatrice

d’un intervalle. Prenons l’exemple d’une porte de largeur T , centrée autour de

1Par convention, le signe intégral seul implique une intégration sur tout R.

47

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48   CHAPITRE 4. TRANSFORMÉE DE FOURIER 

0, est normalisée de sorte que son intégrale sur R vaille 1 :

π(t ) = 1

T    pour |t | <  T 2

0 ailleurs.

Le calcul direct de l’intégrale de Fourier donne :

Π(ν) = 1

T /2

−T /2e −2i πνt d t  = e i πνT  −e −i πνT 

2i πνT   = sinπνT 

πνT 

qu’on appelle sinus cardinal , noté sinc(νT ) ; noter que ce résultat n’est pas inté-

grable (∈ L 1).

Exemple 147 [TF d’une exponentielle]:  Une fonction exponentielle est du type

ce at  défini pour t  > 0 ; ici a  doit être choisi négatif pour que cette fonction soit

L 1. Prenons f  (t ) = e −t  pour t  > 0,et = 0 pour t  < 0. Autrement dit f  (t ) = H (t )e −t ,

d’intégrale

 f  (t ) d t  = 1. On trouve immédiatement :

F (ν) =∞

0e −(1+2i πν)t d t  = 1

1+ 2i πν.

Exemple 148 [TF d’une gaussienne]:   On appelle fonction gaussienne une fonc-

tion du type ce −(at )2

. Prenons g (t ) = e −πt 2 d’intégrale = 1. Alors :

G (ν) =

e −πt 2 e −2i πνt d t  = e −πν2

e −π(t +i ν)2

d t 

Si ν ∈ i R était imaginaire pur on trouverait G (ν) = e −πν2 e −πt 2 d t  = e −πν

2

. Mais

les deux membres sont des fonctions analytiques entières de la variable com-

plexe ν∈C, qui coïncident pourν∈ i R et donc par prolongement analytique sur

tout C. En particulier pour ν∈R :

G (ν) = e −πν2

.

La fonction e −πt 2 est égale à sa TF. Plus généralement, par changement de va-

riable dans l’intégrale pour une gaussienne quelconque :

ce −(at )2

e −2i πνt d t 

 = c 

 π

a   e −πνa 

2

La transformée de Fourier d’une gaussienne est une gaussienne .

Rappelons que la formule d’inversion de Fourier permet de retrouver f  (t ) à par-

tir de sa transformée de Fourier F (ν) :

Proposition 149 [Formule d’inversion de Fourier (casL 1)]:   Si f  (t ) est une fonc-tion intégrable, de transformée de Fourier F (ν) intégrable, alors : 

 f  (t ) =

F (ν)e 2i πνt d ν.

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4.1. TRANSFORMÉE DE FOURIER D’UNE FONCTION INTÉGRABLE    49

Noter que dans ce cas, à la fois  f   et F  sont continues et bornées. Nous verrons

que la transformée de Fourier est toujours inversible, même dans des cas beau-coup plus généraux. Lorsque  f  (t ) et  F (ν) se correspondent par transformée de

Fourier, on notera :

 f  (t )  T.F.→← F (ν).

Exemple 150:  On peut vérifier directement la formule d’inversion de Fourier

pour une fonction gaussienne quelconque (qui est bien  L 1, continue et bor-

née) : on a(148) 

ce −(at )2

e −2i πνt d t  =   c  π

a   e −πνa 

2

. Par conséquent, en modifiant

les notations, on trouve c 

 π

a   e −πνa 

2

e 2i πνt d ν= ce −(at )2

. (On introduit d’ailleurs

la gaussienne dans la démonstration classique de la formule d’inversion.)

Exemple 151 [TF d’une cauchienne]:  On appelle fonction de Cauchy, ou cau-chienne (aussi appelée fonction de Lorentz ou lorentzienne) une fonction de la

forme   c a +t 2   où a  > 0. Le calcul direct de l’intégrale de Fourier de cette fonction

est possible (mais pénible) par la méthode des résidus ; le résultat est une lapla-

cienne   12

e −|ν|. Mais le calcul de la TF inverse de la laplacienne est immédiat :12

e −|ν|e 2i πνt d ν= 1

2

0

−∞e (2i πt +1)νd ν+ 1

2

0e (2i πt −1)νd ν

= 1

2

  1

1+ 2i πt  + 1

1− 2i πt 

= 1

1 + 4π2t 2

Comme les cauchienne et laplacienne sont toutes deux intégrables, on peut ap-

pliquer la formule d’inversion, ce qui fournit sans douleur le résultat :  e −2i πνt 

1 + 4π2t 2 d t  = 1

2e −|ν|.

Puisque les distributions sont des dérivées de fonctions, l’extension de la

transformée de Fourier aux distributions sera possible grâce à ses propriétés de

dérivation :

Proposition 152 [dérivée de la TF]:   Si f  (t ) et t f  (t ) sont L 1, alors F (ν) est conti-nûment dérivable et : 

−2i πt f  (t )  T.F.→ F (ν).

Cela revient à dire qu’on peut dériver par rapport à  ν  sous l’intégrale de Fou-

rier : F (ν) =

−2i πt f  (t )e −2i πνt d t . La preuve repose sur le théorème de Fubini

appliqué à la primitive de la fonction définie par cette dernière intégrale. No-

ter que l’hypothèse «  f  (t ) et t f  (t ) sont L 1 » revient à dire que |t | f  (t ) est L 1, où

|t | = 

1 + t 2.

Remarque 153 [la décroissance implique la régularité en TF]:  Par une récur-

rence immédiate, si |t |n  f  (t ) est L 1 alors t k  f  (t ) est intégrable pour  k  =  0 à n ,

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50   CHAPITRE 4. TRANSFORMÉE DE FOURIER 

donc F (ν) est de classe C n  et la dérivée k ième F (k )(ν) est la TF de (−2i πt )k  f  (t )

pour k  = 1 à n . En particulier f  (t ) = O (  1

|t |n +1+ε ) à l’infini (où ε> 0), alors |t |n 

 f  (t )est L 1 et donc F (ν) est n  fois continûment dérivable (de classe C n ), bornée ainsi

que ses n dérivées successives (elles tendent même vers zéro à l’infini par la pro-

priété de Riemann-Lebesgue). Les fonctions porte, laplacienne et gaussienne

vérifient cette condition pour tout n . On en déduit en particulier que le sinus

cardinal, ainsi que la cauchienne, sont de classe C ∞  (et toutes leurs dérivées

tendent vers zéro à l’infini).

Proposition 154 [TF de la dérivée]:  Si f et f   sont toutes deux L 1, alors : 

 f  (t )  T.F.→ 2i πνF (ν).

Cela provient d’une simple intégration par parties : 2i πνF (ν) = f  (t )e −2i πνt 

d t .

Remarque 155 [la régularité implique la décroissance en TF]:  Par récurrence,

si   f   (de classe D n ) et ses n  premières dérivées sont  L 1, alors la TF de   f  (n )(t )est (2i πν)n F (ν). Comme   f  (n ) est L 1, sa TF est continue et bornée, donc  F (ν)

décroît en O (   1|ν|n ) à l’infini. Les fonctions gaussienne et sinus cardinal sont deux 

exemples qui satisfont à cette condition pour tout  n . Par contre, la laplacienne

n’est pas de classe D 2, alors que sa TF (cauchienne) décroît en O (   1|ν|2 ) à l’infini.

On vient de voir que la décroissance (respectivement la régularité) implique

la régularité (respectivement la décroissance) en transformée de Fourier. Dans

le cas où on a à la fois régularité et décroissance pour un ordre infini, on obtient

immédiatement :

Proposition 156:  la transformée de Fourier d’une fonction C ∞ à décroissance ra-pide est aussi une fonction C ∞ à décroissance rapide : f  (t ) ∈S   ⇐⇒  F (ν) ∈S  .L’exemple-type est la fonction gaussienne e −πt 2 , égale à sa transformée de Fou-

rier.

4.2 Transformée de Fourier d’une fonction tempérée

On va progressivement étendre la définition de la transformée de Fourier à

des fonctions et distributions plus générales que les fonctions intégrables. L’ex-

tension à des fonctions tempérées (de la forme  p (t )g (t ), où p (t ) est un poly-

nôme et g (t ) est intégrable) sera possible grâce à la propriété de dérivation de la

TF : −2i πt f  (t )  T.F.→ F (ν). La TF sera alors une dérivée d’une fonction, c’est-à-dire

une distribution.

Proposition 157 [TF d’une fonction tempérée]:  Il existe une et une seule façon de définir la transformée de Fourier (distribution) F (ν) d’une fonction tempérée  f  (t ) de telle sorte que cette TF est une opération linéaire qui coïncide avec la TF usuelle lorsque f  (t ) ∈ L 1, et vérifie la propriété  −2i πt f  (t )

  T.F.→ F (ν)  pour toute  fonction tempérée f .

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4.2. TRANSFORMÉE DE FOURIER D’UNE FONCTION TEMPÉRÉE    51

Par récurrence, la TF de (−2i πt )n  f  (t ) sera F (n )(ν). On pourra toujours écrire

(formellement)  F (ν) =  f  (t )e −2i πνt 

d t  bien que l’intégrale diverge en général.En fait, la TF d’une fonction tempérée f  (t ) sera définie par la formule :

F (ν) = (1−   d 2

d ν2 )k 

  f  (t )e −2i πνt 

(1+ 4π2t 2)k  d t 

où l’entier k  est tel que (1 + t 2)−k  f  (t ) soit L 1 ; ici l’intégrale de Fourier est prise

au sens usuel (de Lebesgue), et la dérivation   d d ν  est au sens des distributions.

Preuve :  Pour que la propriété concernant F (ν) soit vérifiée au sens des distri-

butions il est nécessaire que F (ν) =  d 2F d ν2 (ν) soit la TF de (−2i π)2 f  (t ) = 4π2 f  (t ),

et donc par linéarité que (1 −  d 2

d ν2 )F (ν) soit la TF de (1 + 4π2t 2) f  (t ). Par récur-rence, (1−   d 2

d ν2 )k F (ν) doitêtre la TF de (1+4π2t 2)k  f  (t ). En appliquant ce résultat

à la fonction intégrable g (t ) =   f  (t )(1+4π2t 2)k   on obtient que la formule intégrale ci-

dessus donne nécessairement la TF de la fonction (1 + 4π2t 2)k    f  (t )(1+4π2t 2)k  =  f  (t ),

c’est à dire F (ν).

On définit donc F (ν) au sens des distributions par cette formule. Pour que

cette définition soit cohérente il faut qu’elle soit indépendante du choix de  k entier tel que (1 + 4π2t 2)−k  f  (t ) soit intégrable. Or si k 0 désigne le plus petit en-

tier vérifiant cette condition, pour k  k 0, la fonction g k (t ) = (1 + 4π2t 2)−k  f  (t )est telle que (1 + 4π2t 2)k −k 0 g k (t ) est intégrable. Sa TF G k (ν) est donc de classe

C k −

k 0et (1 −

  d 2

d ν2 )k −

k 0

G k (ν) = G k 0 (ν) (dérivée au sens des fonctions) est la TF deg k 0 (t ). On a donc bien F (ν) = (1 −   d 2

d ν2 )k 0G k 0 (ν) = (1 −   d 2

d ν2 )k G k (ν), ce qui montre

la cohérence de la définition.

 Avec cette définition, on vérifie facilement que la TF reste linéaire (l’opé-

rateur (1 −   d 2

d ν2 )k  est linéaire), et coïncide avec la définition usuelle pour des

fonctions intégrables (faire k  = 0). Il reste à vérifier que F (ν) est toujours la TF

de −2i π f  (t ). Cela est vrai pour  g k (t ) pour k  assez grand de sorte que  dG k 

d ν  (ν)

est la TF de −2i πt g k (t ). En appliquant l’opérateur (1 −   d 2

d ν2 )k  on obtient bien

que (1 −   d 2

d ν2 )k  dG k d ν  (ν) =   d 

d ν (1 −   d 2

d ν2 )k G k (ν) =   dF d ν (ν) est (par définition) la TF de

−2i πt (1+4π2t 2)k g k (t ) = −2i πt f  (t ).  

Exemple 158 [TF d’une fonction constante]:  Par la définition ci-dessus, la TF

de la fonction constante = 1 est :

(1−   d 2

d ν2 )

  e −2i πνt 

1 + 4π2t 2d t  = (1−   d 2

d ν2 ) 12

e −|ν|

où on a reconnu la TF d’une cauchienne(151). On doit calculer la dérivée seconde

au sens des distributions ; pour cela on applique la formule des sauts (66). La fonc-

tion   12

e −|ν| est égale à sa dérivée seconde pour ν= 0 ; en ν= 0 elle admet un saut

d’amplitude 0 et sa dérivée = − 12 sgn(ν)e −|ν|  admet un saut d’amplitude = −1.

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52   CHAPITRE 4. TRANSFORMÉE DE FOURIER 

On obtient donc (1 −   d 2

d ν2 ) 12

e −|ν| =   12

e −|ν| − 12

e −|ν| +δ(ν) = δ(ν). Ainsi la transfor-

mée de Fourier de la fonction 1 est l’impulsion de Dirac δ(ν), ce qu’on peut écrireformellement :  

e −2i πνt d t  =δ(ν).

Exemple 159 [TF d’un polynôme]:  Puisque laTF de1 est δ(ν),celle de (−2i πt )n 

est la dérivée n ième δ(n )(ν). Ainsi :t n e −2i πνt d t  = (   i 

2π)n δ(n )(ν)

De même, la TF d’un polynôme (combinaison linéaire de t n ) est une combinai-

son linéaire de δ(n )(ν). Autrement dit : La transformée de Fourier d’un polynôme 

est une distribution impulsive  (de même degré).

Pour étendre la définition de la TF aux distributions, on a besoin de la se-

conde propriété de dérivation  f  (t )  T.F.→ 2i πνF (ν).

Proposition 160 [TF de la dérivée (cas tempéré)]:   Si f et f    sont toutes deux tempérées, alors f  (t )

  T.F.→ 2i πνF (ν).

Preuve :   Choisissons n  > 1 assez grand pour que  g (t ) = (1 + t 2)−n  f  (t ) et (1 +t 2)−n  f  (t ) soient tous deux  L 1. Puisqu’alors g (t ) ∈ L 1, la propriété à prouver est

vraie(154) pour g (t ). Or, si la propriété est vraie pour une fonction  g (t ) tempé-

rée de dérivée tempérée, alors elle est vraie pour h (t )= −

2i πt g (t ) (elle-même

tempérée et de dérivée tempérée). En effet, h (t ) = −2i πg (t ) − 2i πt g (t ) a pour

TF : −2i πG (ν)+   d d ν (2i πνG (ν)) = 2i πνH (ν). Par récurrence, la propriété est donc

vraie pour t n g (t ) pour tout n , et donc par linéarité pour  f  (t ) = (1+ t 2)n g (t ).  

4.3 Transformée de Fourier d’une distribution tempérée

Pour étendre encore la notation de transformée de Fourier aux distributions,

on utilise la propriété de dérivation f  (t )  T.F.→ 2i πνF (ν) qui permet de définir la TF

pour toute dérivée (d’ordre quelconque) d’une fonction tempérée, c’est-à-dire

pour toute distribution tempérée .

Proposition 161 [TF d’une distribution tempérée]:   Il existe une et une seule fa-çon de définir la transformée de Fourier S (ν) d’une distribution tempérée s (t ) de telle sorte qu’elle coïncide avec la TF déjà définie lorsque s (t ) est une fonction tem-pérée et vérifie la propriété s (t )

  T.F.→ 2i πνS (ν) pour toute distribution tempérée s.

Par récurrence, la TF de s (n )(t ) sera (2i πν)n S (ν). On écrira (formellement) S (ν) =s (t )e −2i πνt d t .

Preuve :   Posons s = f  (n ) où f  est une fonction tempérée. Pour que la propriété

de dérivation soit satisfaite, il est nécessaire que S (ν) = (2i πν)n F (ν) où F (ν) est

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4.4. TRANSFORMÉE DE FOURIER INVERSE    53

la TF de  f   au sens des fonctions tempérées. On définit donc S (ν) par cette for-

mule. Pour que cette définition soit cohérente, il faut qu’elle soit indépendantedu choix du représentant   f  (n ) choisi où   f  est une fonction tempérée. Or si s  = f  (n ) = g (m ) où g  est une fonction tempérée de transformée de Fourier G (ν), avec

disons m > n , alors f  = g (m −n ) + p n  où  p n  est un polynôme de degré < n  dont la

TF est une distribution impulsive(159)∆n (ν) de degré < n . Comme g (m −n ) = f  −

p n  est une fonction tempérée, sa TF est(160) (2i πν)m −n G (ν), et on a donc F (ν) =(2i πν)m −n G (ν)+∆n (ν) d’où (2i πν)n F (ν) = (2i πν)m G (ν)+ (2i πν)n 

∆n (ν). Le pro-

duit (2i πν)n ∆n (ν) disparaît(67), et il ne reste que (2i πν)n F (ν) = (2i πν)m G (ν), ce

qui montre la cohérence de la définition.

La nouvelle TF coïncide bien avec celle déjà définie lorsque s (t ) est une fonc-

tion tempérée (faire n = 0), et la distribution 2i πνS (ν) = (2i πν)n +1F (ν) est bien

la TF de ( f  )(n ) = s .  

La proposition suivante résume les propriétés essentielles de la transformée

de Fourier au sens des distributions.

Proposition 162:  La transformation de Fourier est une opération linéaire dans l’espace des distributions tempérées (s (t ) ∈S   =⇒ S (ν) ∈S   ) qui vérifie toujours les propriétés suivantes : 

−2i πt s (t )  T.F.→ S (ν)

s (t )  T.F.

→2i πνS (ν)

Preuve :  La TF d’une distribution tempérée provient, d’après les définitions,

d’une fonction continue bornée (TF d’une fonction intégrable) par des opéra-

tions de dérivation et de multiplication par un polynôme, c’est donc une distri-

bution tempérée. La TF est bien linéaire, car si r  = f  (n ) et s = g (n ) avec le même

indice n  suffisamment grand pour que f   et g  soient toutes deux tempérées, alors

la TF de αr  +βs  = (α f  + βg )(n ) est (2i πν)n (αF (ν) +βG (ν)) = αR (ν) +βS (ν). La

propriété −2i πt s (t )  T.F.→ S (ν) est vraie pour les fonctions tempérées ; dans le cas

général s  =  f  (n ) où   f  est une fonction tempérée, S (ν) = 2i πn (2i πν)n −1F (ν) +(2i πν)n F (ν) est bien la TF de 2i πn f  (n −1)(t ) + (−2i πt f  (t ))(n ) = −2i πt f  (n )(t ) =

−2i πt s (t ), où on a utilisé la formule de Leibniz. Enfin, la deuxième propriété

s (t )   T.F.→ 2i πνS (ν) a été prouvée à la proposition précédente.  

4.4 Transformée de Fourier inverse

La formule d’inversion de Fourier(149) pour une fonction  f  (t ) ∈ L 1 de trans-

formée de Fourier F (ν) ∈ L 1 s’écrit :   f  (t ) =

F (ν)e 2i πνt d ν. La seule différence

avec la TF directe est le signe dans l’exponentielle imaginaire. Cela suggère de

définir la transformée de Fourier conjuguée  d’une distribution tempérée quel-

conque S (ν) comme la retournée (en −t ) de sa transformée de Fourier, qui est

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54   CHAPITRE 4. TRANSFORMÉE DE FOURIER 

encore une distribution tempérée s (t ) ; soit formellement s (t ) =

S (ν)e 2i πνt d ν.

On notera alors :s (t )

T.F.∗← S (ν)

La formule d’inversion de Fourier pour les distributions tempérées affirme que

si s (t )  T.F.→ S (ν), alors s (t )

T.F.∗← S (ν) (on notera alors simplement s (t )  T.F.→← S (ν)).

Proposition 163 [Formule générale d’inversion de Fourier]: Pour toute distri-bution tempérée s (t ) de transformée de Fourier S (ν), s (t ) est la transformée de Fourier conjuguée de S (ν). Formellement : 

s (t )

=S (ν)e 2i πνt d ν.

Preuve :  D’après la remarque 113, toute distribution tempérée  s (t ) s’obtient,

par opérations répétées de dérivation et de mulitplication par  t , à partir d’une

fonction f  (t ) arbitrairement régulière avec un nombre arbitrairement grand de

ses dérivées décroissant arbitrairement vite en   1|t |m  à l’infini). Or, d’après les re-

marques 153 et 155, sa transformée de Fourier F (ν) vérifiera les mêmes proprié-

tés (aussi régulière et décroissante à l’infini qu’on veut). En particulier,   f  (t ) et

F (ν) sont L 1, et la propriété à démontrer est donc(149) vraie pour f  .Pour conclure, il suffit(114) de montrer que si la proposition est vraie pour

s (t ) alors elle est vraie pour s (t ) et pour t s (t ). Or si s (t )  T.F.→ S (ν), alors :

−2i πt s (t )  T.F.→ S (ν)   s (t )

  T.F.→ 2i πνS (ν),

et comme la TF conjuguée a les mêmes propriétés que la TF au signe de i  près :

si s (t )T.F.∗← S (ν), alors :

s (t )T.F.∗← 2i πνS (ν)   − 2i πt s (t )

T.F.∗← S (ν).

 Ainsi, la TF conjuguée vérifie précisément les propriétés inverses de la TF directe

concernant la dérivation et la multiplication par t . La formule générale d’inver-

sion de Fourier est donc démontrée.  

Cette proposition est fondamentale : elle signifie que la transformée de Fou-

rier est un automorphisme de l’espace des distributions tempérées  (application

linéaire inversible de cet espace dans lui-même). En particulier, la TF est  in- jective , c’est à dire que S (ν) est caractéristique  de  s (t ) : la seule distribution de

TF nulle est la fonction nulle, et plus généralement, deux fonctions ou distribu-

tions différentes ne peuvent avoir la même TF. On pourra ainsi trouver la TF de

nombreuses fonctions et distributions en les exprimant comme transformées de

Fourier inverses (suivant la même méthode que dans l’exemple 151), ou en re-

marquant (ce qui revient au fond au même) quesi s (t )  T.F.→← S (ν) alors S (t )

  T.F.→← s (−ν).

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4.4. TRANSFORMÉE DE FOURIER INVERSE    55

Remarque 164:   Pour « expliquer » cette formule d’inversion de Fourier, on peut

faire le calcul suivant :S (ν)e 2i πνt d ν=

s (τ)e −2i πν(τ−t )d τd ν   par définition de S (ν)

=

s (τ)

e −2i πν(τ−t )d νd τ   par permutation des intégrales

=

s (τ)δ(τ− t )d τ   car la TF de 1 est δ

= s (t )δ(τ− t )d τ   car s δt  = s (t )δt 

= s (t ). car l’intégrale de δ vaut 1.

Evidemment, presque toutes les étapes de ce calcul sont fausses (tout au moins,il est difficile de les rendre vraies en développant un formalisme adéquat).

Exemple 165 [TF d’une impulsion]:  On a déjà montré(158) que δ(ν) est la TF de

la constante 1 :

1  T.F.→← δ(ν)

On en déduit que :

δ(t )  T.F.→← 1

sans qu’il soit nécessaire de calculer directement la TF deδ(t ) (exercice 184). On

en déduit les correspondances :

t n   T.F.→← (   i 2π

)n δ(n )(ν)   δ(n )(t )  T.F.→← (2i πν)n 

et par linéarité : la TF (directe ou inverse) d’un polynôme est une distribution

impulsive de même degré.

Exemple 166 [TF d’un sinus cardinal]:   On sait(146) que la transformée de Fou-

rier d’une porte de largeur T  est un sinus cardinal. On en déduit la transformée

de Fourier du sinus cardinal :

sinc   t T 

T.F.→←Π(ν)

où  Π(ν) est une porte en fréquence de largeur 1/T   :  Π(ν) = T   pour |ν| <   12T   et

nulle ailleurs. (Voir l’exercice 186 pour un calcul direct).

Exemple 167 [TF impossible d’une distribution non tempérée]:  Dans ce do-

cument, la TF d’une distribution tempérée a été définie en se ramenant au cas

d’une fonction intégrable, grâce aux propriétés de dérivation et de multiplica-

tion par un polynôme. Cette méthode ne permet donc pas de définir la TF d’une

distribution non tempérée  comme e t .

En fait, on peut vérifier qu’il est impossible  de définir la TF de e t  comme

une distribution avec les propriétés raisonnables qu’on attend d’une TF : car si

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56   CHAPITRE 4. TRANSFORMÉE DE FOURIER 

cette transformée de Fourier E (ν) était définie, et vérifiait la propriété de TF de

la dérivée, on aurait la relation E (ν) = 2i πνE (ν) puisque e t 

est égale à sa dérivée.En prenant la différence et en multipliant par   1

1−2i πν ∈ C ∞(R) il viendrait E (ν) =0, d’où (la TF étant toujours caractéristique de la fonction) :  e t  = 0 pour tout

t  ∈R !

Dorénavant, si on ne précise rien, la TF sera entendue au sens des distribu-

tions tempérées. On ne cherchera pas à généraliser davantage (il faudrait pour

cela généraliser d’abord la notion de distribution).

4.5 Complément: fonction caractéristique

Etant donnée une mesure de probabilité  p  = d f  associée à une variable aléatoireX   (de fonction de répartition   f  (x )), on définit en théorie de l’intégration l’intégrale

(de Lebesgue-Stieltjes) d’une fonction (mesurable)ϕ par rapport à cette mesure, notée

Eϕ(X )

=ϕ(x )d f  (x ) (espérance). Cette intégrale est finie lorsque ϕ est p -intégrable2

(c’est toujours le cas si ϕ est continue et bornée). En particulier, la probabilité d’un en-

semble (borélien) A  est p ( A ) =

 A d f  (x ), l’intégrale de la fonction caractéristique de  A .Si X  est une v. a. absolument continue, p  s’identifie à une densité Lebesgue-intégrable p (x ), dont la transformée de Fourier est l’intégrale

e −2i πνx p (x ) dx =

e −2i πνx d f  (x ) =

E(e −2i πνX ). Plus généralement, pour tout v. a.  X , la mesure p  est une distribution tem-pérée , car sa primitive  f  est bornée à l’infini. Nous allons montrer que sa transformée

de Fourier s’identifie à la fonction P X (ν) = E(e −2i πνX ), que l’on appelle fonction caracté-ristique  de X . Ainsi, la fonction caractéristique (si utile en théorie des probabilités) n’est

autre qu’une transformée de Fourier au sens des distributions.

Proposition 168 [ TF d’une mesure de probabilité]:  La transformée de Fourier d’une mesure de probabilité p est donnée par la formule P (ν) = E(e −2i πνX ).

Preuve :   Notons f  la fonction de répartition (primitive) de  p = d f  . Par définition, on a

P (ν) = 2i πνF (ν) = 2i πν(1 −   d 2

d ν2 )G (ν), où G (ν) est l’intégrale de Fourier (au sens usuel)

de g (x ) =   f  (x )1+4π2x 2

 ∈ L 1. Or E(e −2i πνX ) =

e −2i πνx d f  (x ) = (1−   d 2

d ν2 )   e −2i πνx 

1+4π2x 2d f  (x ) = −(1−

d 2

d ν2 )   d 

d x 

  e −2i πνx 

1+4π2x 2

 f  (x ) dx   où on a utilisé l’équivalent de la proposition 152 pour les

fonctions p -intégrables, suivi d’une intégration par parties. Après dérivation sous l’inté-

grale, il vient E(e −2i πνX ) = (1−   d 2

d ν2 )2i πνG (ν)+4i πG (ν) = 2i πν(1−   d 2

d ν2 )G (ν) = P (ν).  

Il en résulte que P (ν) est une fonction continue et bornée :

|P (ν)

| P (0)

=E(1)

=1.

La formule d’inversion de Fourier pour les distributions tempérées montre que la fonc-tioncaractéristique est effectivement « caractéristique » de la distribution de probabilité

définissant la variable aléatoire X   (théorème de Lévy ).

Exemple 169:  Naturellement, pour une variable aléatoire absolument continue, on se

ramène au cas d’une TF d’une densité intégrable ∈ L 1. Par exemple, si  X  est une va-

riable aléatoire gaussienne centrée de variance σ2, sa fonction caractéristique est la TF

de p (x ) =   1

σ 

2πe −

  x 2

2σ2 , c’est à dire(148) P (ν) = e −2π2σ2ν2; si X  est une variable aléatoire de

2Dans les manuels, l’intégrale de ϕ  par rapport à p  est souvent notéeϕdp  ou

ϕ(x )d p (x ),

mais cette notation est source de confusion : la mesure est  p = d f  et non d p .

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58   CHAPITRE 4. TRANSFORMÉE DE FOURIER 

c’est-à-dire que retourner  en temps équivaut à retourner  en fréquence. En parti-

culier, la distribution s (t ) est paire (50)

(respectivement impaire ) si et seulementsi sa TF l’est.

Exemple 172 [ondes pures et raies spectrales]:   On a

δt 0 (t )  T.F.→← e −2i πνt 0 e 2i πν0 t   T.F.→← δν0

(ν)

Une impulsion de Dirac en fréquence est appelée  raie spectrale  en traitement

du signal. C’est la transformée de Fourier d’une onde pure e 2i πν0t  oscillant à la

fréquence ν0.

Exemple 173 [TF de H (t ) et de v.p.  1t ]:   Ecrions H (t ) =   1

2+ 1

2 sgn t  où sgn t  est la

fonction « signe ». Puisque s (t ) = sgn(t ) est la seule fonction impaire de dérivée

= 2δ(t ), sa transformée de Fourier est la seule distribution impaire de l’équation2i πνS (ν) = 2, c’est à dire(69) S (ν) = v.p.   1

i πν . On obtient donc :

sgn(t )  T.F.→← v.p.   1

i πν   H (t )  T.F.→← 1

2δ(ν) + v.p.   12i πν

Par transformée de Fourier inverse de S (ν) on en déduit :

v.p. 1t 

T.F.→← − i πsgnν

En général, la transformée de Fourier S (ν) est à « valeurs » complexes, même

si s (t ) est une distribution (tempérée) à « valeurs » réelles. Si l’espace des dis-

tributions est défini comme un espace sur C, on note s ∗ = f  ∗(n ) la distribution 

conjuguée  de s = f 

 (n )

, où  f  ∗ est la conjuguée de  f  . On a évidemment toutes lesbonnes propriétés : (αr +βs )∗ =α∗r ∗ +β∗s ∗, ( f s )∗ = f  ∗s ∗, etc.

Proposition 174 [TF de la conjuguée]:   Si s (t )  T.F.→← S (ν) alors : 

s ∗(t )  T.F.→← S ∗(−ν)   s ∗(−t )

  T.F.→← S ∗(ν)

La distribution s ∗(−t ) s’appelle parfois la  paraconjuguée   de  s (t ). Ainsi, la TF

échange conjuguée et paraconjuguée.

Preuve :  Par retournement il suffit de prouver la première formule. C’est im-

médiat si s (t ) est une fonction intégrable :

s ∗(t )e −2i πνt d t  =

s (t )e 2i πνt d t 

∗ =

S ∗(

−ν). Il suffit, pour conclure(114), de montrer que si c’est vrai pour  s (t ) alors

c’est aussi vrai pour s (t ) (et donc pour −2i πt s (t ) en raisonnant en transformée

de Fourier conjuguée). Or si on remplace s (t ) par s (t ), alors (s )∗(t ) = (s ∗)(t ) a

pour transformée de Fourier 2i πνS ∗(−ν) = (−2i πνS (−ν))∗, ce qui revient bien à

remplacer S (ν) par 2i πνS (ν). Les vérifications sont donc achevées.  

En particulier, la distribution s  est réelle  (s ∗(t ) = s (t )) si et seulement si sa

transformée de Fourier est à symétrie hermitienne  (S (ν) = S ∗(−ν)). De même, s est imaginaire  (s ∗(t ) = −s (t )) si et seulement si sa transformée de Fourier est à

antisymétrie hermitienne  (S (ν) = S ∗(−ν)). En combinant avec les propriétés de

partié on trouve les correspondances suivantes :

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4.7. TRANSFORMÉE DE FOURIER ET DÉCROISSANCE RAPIDE    59

s (t )   S (ν)

paire réelle paire réellepaire imaginaire paire imaginaire

impaire réelle impaire imaginaire

impaire imaginaire impaire réelle

4.7 Transformée de Fourier d’une distribution à décrois-

sance rapide

On a vu, dans le cas des fonctions, que la décroissance (respectivement la

régularité) implique la régularité (respectivement la décroissance) en transfor-

mée de Fourier. En particulier(156), la transformée de Fourier d’une fonction C ∞

à décroissance rapide est aussi une fonction C ∞ à décroissance rapide. La carac-

térisation suivante généralise ce résultat : les distributions à décroissance rapide

(espaceO C ) et les fonctions C ∞ à croissance lente (espaceO M ) se correspondent

en transformée de Fourier :

Proposition 175 [TF d’une distribution à décroissance rapide]:  Une distribu-tion tempérée s (t ) est à décroissance rapide si et seulement si sa transformée de Fourier S (ν) est une fonction C ∞ à croissance lente.

Il revient au même de dire (considérer la TF conjuguée) qu’une distribution à

décroissance rapide est la TF d’une fonction C ∞ à croissance lente.

Preuve :  Si la distribution  s (t ) est à décroissance rapide, d’après la représen-tation de Schwartz(119), on peut écrire  s  =

i , j  f  ( j )i    , somme finie de dérivées

de fonctions   f i   intégrables. Sa TF est S (ν) = i , j (2i πν) j F i (ν), où les F i (ν) sont

continues et bornées, et donc S (ν) est une fonction continue à croissance lente.

Puisque (−2i πt )n s (t ) est aussi à décroissance rapide pour tout  n ,  S (n )(ν) est

aussi une fonction continue à croissance lente pour tout n , et S (ν) est donc C ∞

à croissance lente.

Réciproquement, si  S (ν) est une fonction C ∞  à croissance lente, on peut

écrire S (ν) = (1 − 4π2ν2)k F (ν) où k  est choisi assez grand pour que F (ν) soit in-

tégrable. Sa TF inverse s (t ) = (1−   d 2

d t 2 )k  f  (t ) est une somme de dérivées de  f  , qui

est bornée. La distribution s (t ) est donc bornée. Puisque S (n )(ν) est aussi C ∞  à

croissance lente pour tout n , (−2i πt )n s (t ) est une distribution bornée pour toutn  0, et donc s (t ) est à décroissance rapide.  

Exemple 176:  Une fonction f  à décroissance rapide admet une transformée de

Fourier F (ν) qui est C ∞ tempérée ; en fait, d’après la remarque 153, F (ν) est in-

définiment dérivable, bornée ainsi que toutes ses dérivées. Par exemple, la TF

de e −|t | est une cauchienne qui vérifie cette condition.

On retrouve(118) que les fonctions ou distributions v. p. 1t  , H (t ), et tout poly-

nôme ne sont pas des distributions à décroissance rapide, car leurs transformées

de Fourier ne sont pas des fonctions.

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60   CHAPITRE 4. TRANSFORMÉE DE FOURIER 

4.8 Transformée de Fourier d’une distribution à support

fini

Pour une distribution s (t ) à support fini, l’écriture

s (t )e −2i πνt d t  peut si-

gnifier deux choses : 1o c’est l’écriture formelle de la transformée de Fourier

S (ν) ; 2o c’est aussi l’intégrale (au sens des distributions(75)) de s (t )e −2i πνt , qui

est une distribution à support fini – ou, si l’on préfère, c’est le produit scalaire

⟨s (t ) | e 2i πνt ⟩. Ces deux interprétations signifient bien la même chose :

Proposition 177[intégrale de Fourier d’une distribution à support fini]:   Si s (t )est une distribution à support fini, alors sa transformée de Fourier S (ν) ∈ C ∞ est donnée par l’intégrale au sens des distributions : 

S (ν) = s (t )e −2i πνt d t  = ⟨s (t ) | e 2i πνt ⟩.

Preuve :   L’identification est évidemment vraie lorsque s  est une fonction à sup-

port fini, et aussi lorsque  s  =  δ, car(80) δ(t )e −2i πνt d t  =  1 est bien la TF(165)

de δ(t ). Pour conclure, il suffit(74) de montrer que l’identification est vraie pour

s   si elle est vraie pour  s . Or, par intégration par parties(79) :

s (t )e −2i πνt d t  =−(−2i πν)

s (t )e −2i πνt d t  = (2i πν)S (ν), qui est bien la TF de s (t ).  

Exemple 178 [TF et intégrale]:  Une conséquence immédiate de ce résultat est

que l’intégrale de s (t ) (distribution à support fini) est toujours égale à la valeur

en ν= 0 de sa transformée de Fourier :

s (t ) d t  = S (0).

On retrouve ainsi queδ(t ) d t  = 1 et

δ(n )(t )d t  = 0 pour n > 0.

Remarque 179:   Une distribution à support fini  étant à décroissance rapide(118),

sa transformée de Fourier S (ν) est C ∞  tempérée (voir l’exercice 190 pour une

preuve directe). On peut même établir une caractérisation : une distribution s (t )est à support fini dans [−a , a ] si et seulement si sa TF  S (ν) se prolonge pour

ν ∈ C en une fonction analytique entière de type exponentiel 2πa  (théorème de Paley-Wiener-Schwartz ).

On peut, plus généralement, définir une transformée de Fourier pour des

valeurs complexes de ν, appelée transformée de Fourier-Laplace ; pour une dis-tribution causale (de support inclus dans [0, +∞[), S (ν) est analytique dans le

demi-plan complexe Imν < 0. Il est d’usage de poser  p  = 2i πν en considérant

la transformée de Laplace  comme une fonction de  p  analytique pour Re p  > 0.

Nous ne détaillons pas davantage la théorie de la transformation de Laplace ici.

4.9 Complément: transformée de Fourier dans L 2

Une fonction (mesurable)   f  (t ) est dite de carré intégrable  siR | f  (t )|2 dt  est finie.

L’espace de ces fonctions est noté  L 2(R) ou simplement  L 2, c’est un espace vectoriel

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4.10. FORMULE DE PARSEVAL    61

normé complet pour la norme   f 2 = | f  (t )|2 dt   (quantité d’« énergie »), et même

un espace hilbertien pour le produit scalaire ⟨ f  | g ⟩ =  f  (t )g ∗(t ) dt , avec l’inégalité deSchwarz3 |⟨ f  | g ⟩|  f 2g 2.

Une fonction   f  ∈ L 2 est localement intégrable , car pour tout intervalle fini [a ,b ],

par l’inégalité de Schwarz :b 

a  | f  (t )|dt  

b − a ·  f 2. De plus, cette fonction est tem-

pérée , car en posant |t | = 

1 + t 2, toujours grâce à l’inégalité de Schwarz : | f  (t )|

|t |   d t  

 f 2

   d t |t |2 < ∞ de sorte que

  f  (t )|t |   ∈ L 1.

La transformée de Fourier d’une fonction f  ∈ L 2 est définie classiquement comme

la limite dans  L 2 des intégrales tronquées : F k (ν) =k −k  f  (t )e −2i πνt dt   quand k  → ∞.

Cette limite est une fonction F (ν) ∈ L 2 telle que F k −F 2 → 0. Nous allons montrer que

la TF dans L 2 est bien un cas particulier de la TF au sens des distributions tempérées.

On a d’abord le résultat suivant, analogue à la proposition 152 mais dans le cadre L 2 :

Proposition 180 [dérivée de la TF dans L 2]:   Si f  (t ) et t f  (t ) sont L 2, alors la transformée de Fourier F (ν) (dans L 2 ) de f  (t ) est de classe D 1 et la transformée de Fourier (dans L 2 ) de −2i πt f  (t ) est la dérivée F (ν).

Preuve :  Dire que f  (t ) et t f  (t ) sont L 2 revient à dire que |t | f  (t ) est L 2, et donc f  (t ) ∈ L 1

et F (ν) ∈ C 0. Posons g (t ) = −2i πt f  (t ) ; sa transformée de Fourier (dans L 2) G (ν) est la

limite (dans L 2) de  G k (ν) =k −k  g (t )e −2i πνt dt . Une primitive de G k (ν) est

ωa  G k (ν) d ν.

D’une part, quand k → ∞, cette primitive converge (simplement) versω

a  G (ν) d ν pour

toutω car par l’inégalité de Schwarz, la différence estbornéepar |ω− a |·G −G k 2 → 0.

D’autre part, par Fubini,ω

a  G k (ν) d ν =k −k  f  (t )

ωa  (−2i πt )e −2i πνt d νd t  = F k (ω) − F k (a )

qui tend vers F (ω)−F (a ) car la différence F (ω)−F k (ω) est bornée par|t |>k | f  (t )|dt  → 0

(convergence dominée). Finalement ωa  G (ν) d ν = F (ω) − F (a ), ce qui montre bien que

F (ν) ∈ D 1 et que G (ν) = F (ν).  

Proposition 181:  La transformée de Fourier de f  ∈ L 2 (au sens des distributions tempé-rées) coïncide avec sa transformée de Fourier au sens L 2.

En particulier, une distribution tempérée est une fonction L 2 si et seulement si sa trans-

formée de Fourier est L 2.

Preuve :   Si f  ∈ L 2, alors g (x ) =   f  (t )1+4π2t 2

 ∈ L 1, et la TF F (ν) au sens des distributions est

définie par F (ν) = (1 −   d 2

d ν2 )G (ν), où G (ν) est l’intégrale de Fourier (au sens usuel) de

g (t ). Mais en appliquant la proposition précédente à g (t ) puis à t g (t ), la TF dans L 2 de

(1+ 4π2t 2)g (t ) = f  (t ) est (1−   d 2

d ν2 )G (ν) = F (ν).  

4.10 Formule de Parseval

Si  f  (t ) est intégrable  de transformée de Fourier F (ν) et si g (t ) est de trans-

formée de Fourier G (ν) intégrable , alors on a la formule de Parseval  : f  (t )g ∗(t )d t  =

F (ν)G ∗(ν)d ν.

3Karl Hermann Amandus Schwarz, mathématicien allemand de la fin du 19 e siècle, à ne pas

confondre avec Laurent Schwartz.

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62   CHAPITRE 4. TRANSFORMÉE DE FOURIER 

où les deux intégrales (au sens usuel de Lebesgue) sont finies. Il suffit en effet

d’appliquer Fubini à l’intégrale double  f  (t )G ∗(ν)e −2i πνt 

d t d ν. En particulier,si   f  = g   est intégrable de transformée de Fourier intégrable , on a la formule de Plancherel  :  

| f  (t )|2 d t  =

|F (ν)|2d ν

qui montre que à la fois  f  (t ) et sa TF sont non seulement L 1, mais aussi L 2. Plus

généralement, on sait les formules de Parseval-Plancherel sont valables pour des

fonctions L 2 ; la transformée de Fourier est une isométrie :  f 2 = F 2, ce qu’on

interprète en disant que la transformée de Fourier conserve l’énergie   : l’énergie

en temps

| f  (t )|2 d t  est égal à l’énergie en fréquence

|F (ν)|2d ν. De plus, la

formule de Parseval peut s’écrire : ⟨ f  | g ⟩ = ⟨F  | G ⟩ où ⟨· | ·⟩ désigne le produit

scalaire hermitien dans L 2

. Autrement dit, la transformée de Fourier conserve le produit scalaire . On peut facilement établir la formule de Parseval pour un pro-

duit scalaire au sens des distributions :

Proposition 182 [formule de Parseval]:   Si s (t ) est une distribution tempérée de transformée de Fourier S (ν) (également tempérée), alors pour toute fonction C ∞

à décroissance rapide f  (t ) de transformée de Fourier F (ν) (également C ∞ à dé-croissance rapide), on a : 

s (t ) f  ∗(t )d t  =

S (ν)F ∗(ν)d ν.

Rappelons

(121)

qu’ici ⟨s | f ⟩ = (s | f  ∗), qui est le produitscalaire« tempéré » définià la proposition 123.

Preuve :   La formule se réduit à la formule de Parseval classique lorsque s (t ) est

une fonction intégrable. Pour conclure, il suffit(114) de montrer que si la formule

est vraie pour s (t ), elle l’est pour t s (t ) et pour s (t ). Il suffit en fait de vérifier la

formule pour s (t ), car en raisonnant en transformée de Fourier conjugué elle

sera vérifiée pour −2i πt s (t ). Or si ⟨s  |   f ⟩ = ⟨S  | F ⟩, alors ⟨s  |   f ⟩ = −⟨s  |   f  ⟩ =−⟨S (ν) | (−2i πν)F (ν)⟩ = ⟨2i πνS (ν) | F (ν)⟩, ce qui montre la propriété pour s (t )(de transformée de Fourier 2i πνS (ν)). Les vérifications sont donc achevées.  

Remarque 183 [variante de la formule de Parseval]:  On peut aussi écrire la

formule de Parseval sous la forme : (S  |   f  ) = (s  | F ), c’est à dire formellementS (x ) f  (x ) d x  =

s (x )F (x )d x  Il suffit en effet de remplacer, dans la formule de

Parseval initiale, F (ν) par  f  ∗(t ), dont la TF inverse (conjuguée) est F ∗(ν). Dans

l’approche par dualité de Schwartz (section 3.6), c’est cette identité qui sert de

définition  de la transformée de Fourier.

Exercices

Exercice 184 [TF d’une impulsion]:   Puisque −2i πt δ(t ) = 0 a pour TF la fonction nulle,

la TF de l’impulsionδ(t ) estde dérivée nulle, donc estconstante = c . Mais cette méthode

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4.10. FORMULE DE PARSEVAL    63

ne permet pas de déterminer la constante c . Une façon de déterminer la constante c  est

d’appliquer la formule de Parseval pour un produit scalaire contre la gaussienne e −πx 2

.On trouve alors immédiatement c = 1.

On peut calculer plus directement la transformée de Fourier  ∆(ν) de l’impulsion

δ(t ),grâceà la formule des sauts (65) appliquée à une fonction présentant un saut isolé et

dont on connaît la TF. Prenons la fonction H (t )e −t  de transformée de Fourier(147)   11+2i πν .

Puisque   d d t  H (t )e −t  = δ(t )−H (t )e −t  ilvient, par TF:   2i πν

1+2i πν =∆(ν)−   11+2i πν  d’où∆(ν) = 1.

Exercice 185 [TF de v.p. 1t  ]:  On peut déterminer la TF de v (t ) = v.p. 1

t   en remarquant

que v (t ) est la seule solution impaire de l’équation(69) t v (t ) = 1 : sa TF est donc la seule

solution impaire de l’équation V (ν) = −2i πδ(ν), c’est à dire V (ν) = −i πsgnν.

Exercice 186 [TF du sinus cardinal]: On peut faire un calcul direct de la TF du sinus

cardinal(166) : Puisque sinc t  =

t sinc t v.p. 1t  =

(e i πt 

−e −i πt )v.p.   1

2i πt  , sa TF est   12 sgn(ν

+1/2)−sgn(ν− 1/2), c’est une porte de largeur 1.

Exercice 187[ TF de la pseudo-fonction1/t n ]:   Par dérivation à partir de la formule don-

nant la TF de v.p. 1t   :

P.f.   1t 2

T.F.→← −2π2|ν| |t | T.F.→← −   12π2 P.f.

  1

ν2

et plus généralement, pour tout entier n  1 :

P.f.   1t n 

T.F.→← (−i )n 2n −1πn    νn −1

(n −1)!sgnν.

Exercice 188:   Prendre la partie réelle de s (t ) revient à symétriser la transformée de Fou-rier. Par exemple,

cos2πν0t   T.F.→← 1

2 (δν0 (ν)+δ−ν0 (ν)).

Exercice 189:   Calculer la TF de e i πt 2 et retrouver(142) que cette fonction est à la fois une

fonction C ∞ à croissance lente et une distribution à décroissance rapide.

Exercice 190:  On peut prouver directement que la TF d’une distribution à support fini

est C ∞  tempérée : D’après la proposition 73, toute distribution  s  à support fini est de

la forme s  =   f  (n ) +∆, où   f  est une fonction intégrable à support fini et où  ∆  est une

distribution impulsive. La TF de ∆ est un polynôme(165), qui est C ∞ tempérée. D’après

la remarque 153, la transformée de Fourier F (ν) de   f   est C ∞, bornée, ainsi que toutes

ses dérivées, et donc (2i πν)n F (ν), TF de f  (n ), est bien C ∞ tempérée.

Exercice 191 [espaces de Sobolev  H α]:  On note H α l’espace des distributions tempé-

rées s (t ) telles qu’en transformée de Fourier, |ν|αS (ν) ∈ L 2 (où |ν| = 

1 +ν2). Evidem-

ment H 0 = L 2, et les espaces H α sont emboîtés : H α ⊂ H β si α β. Plus α  est grand,

plus les distributions de H α sont « régulières » et inversement. Noter que les espaces de

Sobolev ne contiennent pas certaines distributions tempérées comme l’échelon H (t )dont la TF n’est pas une fonction.

Siα>   12

, S (ν) est intégrable par l’inégalité de Schwarz, donc les distributions de H α

sont des fonctions continues (tendant vers 0 à l’infini). Plus généralement si α> m + 12

où m  est un entier 0, les distributions de H α sont des fonctions C m  (tendant vers 0 à

l’infini ainsi que leurs dérivées d’ordre m ). Grâce aux propriétés de dérivation de la

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64   CHAPITRE 4. TRANSFORMÉE DE FOURIER 

TF et de la fonction |ν|α, on trouve facilement que pour m  0 entier, H m  est l’espace

des fonctions dont toutes les dérivées d’ordre m  sont L 2

. Une fonction f  ∈ H ∞, c’està dire H α pour toutα, est une fonction C ∞ (qui tend vers 0 à l’infini ainsi que toutes ses

dérivées) dont toutes les dérivées sont L 2. L’espace  H ∞ est parfois nommé D L 2  dans la

littérature.

Siα<   12 , |ν|α est L 2 et donc δ(t ) et v.p.  1

t  ∈ H α. Ce n’est plus un espace de fonctions.

Pour m  0 entier, on trouve facilement que  H −m  est l’espace des distributions (tem-

pérées) qui sont combinaisons linéaires finies de dérivées d’ordrem  de fonctions L 2.

Une distribution tempérée s ∈ H −∞, c’està dire H α pour au moins unα, est une combi-

naison linéaire finie de dérivées de fonctions L 2. Toute fonction C ∞ à croissance lente

S (ν) vérifie la condition |ν|αS (ν) ∈ L 2 pour α < 0 suffisamment grand ; H −∞  contient

donc toutes les distributions à décroissance rapide. L’espace H −∞  est parfois nommé

D L 2

 dans la littérature.

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Chapitre 5

Convolution

Pour l’étude du produit de convolution :

r ∗ s (x ) =

r (t )s (x − t )d t  =

r (x − t )s (t ) d t ,

on considère des fonctions et distributions définies sur R. Comme pour le pro-

duit scalaire, la définition du produit de convolution suppose une contrainte

soit sur les supports (supports convolutifs), soit sur le comportement à l’infini

des facteurs. Dans le premier cas, on définit le produit de convolution de dis-

tributions à partir de celui de fonctions grâce aux propriétés de dérivation de

ce produit (voir [4]). Ce chapitre traite du deuxième cas, où il est plus rapide de

définir le produit de convolution au moyen de la transformée de Fourier.

5.1 Convolution de fonctions intégrables

Le produit de convolution  de deux fonctions intégrables  f  , g  ∈ L 1 :

 f  ∗ g (x ) =R

 f  (t )g (x − t ) d t 

est bien défini et lui-même une fonction intégrable (cela provient du théorème

de Fubini appliqué à l’intégrale double du produit  f  (t )g (u )). L’intégrale de f  ∗ g est d’ailleurs égale au produit des intégrales de   f   et de g . Toujours par Fubini,

on prouve facilement la propriété fondamentale suivante : si  f  , g  ∈

L 1 ont pour

TF respectives F (ν) et G (ν) (fonctions continues bornées), alors le produit de

convolution   f  ∗ g  ∈  L 1 a pour transformée de Fourier le produit multiplicatif 

F (ν)G (ν) :

 f  ∗ g (t )  T.F.→← F (ν)G (ν)

 Ainsi, La transformée de Fourier transforme produit de convolution en produit simple . Cette propriété permet d’étudier les propriétés du produit de convo-

lution en « passant en fréquence » de sorte à obtenir un produit simple dont

l’étude est plus. . . simple. Le retour au produit de convolution est assuré par la

formule d’inversion de Fourier.

65

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66   CHAPITRE 5. CONVOLUTION 

Exemple 192 [TF d’un triangle]:   Calculons la TF du « triangle »

Λ(t ) =1− |t |

T    pour |t | < T 

0 ailleurs.

Plutôt que de faire le calcul direct par l’intégrale de Fourier, on remarque que

Λ =Π∗Π où Π(t ) est la fonction « porte » =   1T   pour |x | <   T 

2   et = 0 ailleurs, dont

la TF est le sinus cardinal(146) sinc(νT ). On en déduit que la TF du triangle est le

carré du sinus cardinal :

Λ(t )  T.F.→← sinc2(νT )

Exemple 193 [convolution de gaussiennes]:  Calculons le produit de convolu-

tion de deux gaussiennes (

∈L 1) :  f  (x )

=  1a e −π(t /a )2

et g (x )

=  1b e −π(t /b )2

où a  et  b 

sont positifs. Un calcul direct par l’intégrale de convolution est possible, mais ilest plus rapide de passer par la transformée de Fourier(148) : On a F (ν) = e −π(a ν)2

et G (ν) = e −π(b ν)2

, d’où F (ν)G (ν) = e −π(a 2+b 2)ν2

, et donc :  f  ∗ g (t ) =   1c e −π(t /c )2

c = 

a 2 +b 2 : le produit de convolution de gaussiennes est une gaussienne.

Exemple 194 [convolution de cauchiennes]:  Calculons le produit de convolu-

tion de deux cauchiennes (∈ L 1) :   f  (t ) =   1π

a t 2+a 2   et g (t ) =   1

πb 

t 2+b 2   où a  et b  sont

positifs. Un calcul direct par l’intégrale de convolution est possible (par décom-

position en éléments simples ou par la méthode des résidus), mais il est long et

difficile. Il est beaucoup plus facile de passer par la transformée de Fourier (151) :

On a F (ν) = e −2πa |ν|   et G (ν) = e −2πb |ν|, d’où F (ν)G (ν) = e −2π(a +b )|ν|, et donc :

 f  ∗ g (t ) =  1π

c t 2+c 2  où c = a +b . Le produit de convolution de cauchiennes est une

cauchienne.

Le passage en fréquence (par transformée de Fourier) nous permet d’obtenir

facilement les propriétés du produit de convolution dans L 1. Par exemple, on a

les propriétés suivantes :

– commutativité : f  ∗ g  = g ∗ f   ;

– associativité : ( f  ∗ g ) ∗h = f  ∗ (g ∗h ) ;

– distributivité : ( f  + g )∗ h = f  ∗ h + g ∗h  ;Cela se déduit immédiatement des propriétés correspondantes en TF : FG = GF ,(FG )H  = F (GH ), (F +G )H  = FG +F H .

5.2 Complément: convolution de mesures

On se limite pour simplifier aux mesures de probabilité du type  p  = d f  , où   f   est

la fonction de répartition. Une telle mesure est associée à une variable aléatoire X . Si

X   et Y   sont deux variables aléatoires indépendantes   de distributions de probabilités

respectives p  = d f   et q  = d g , celle du couple aléatoire (X , Y  ) est le produit (tensoriel)

des mesures de probabilités p (x )q ( y ) = d f  (x ) dg ( y ), et par conséquent, la mesure de

probabilité de la somme X  +Y  est définie par :

P  r ob {X  +Y  ∈ A } =

x + y ∈ A d f  (x ) dg ( y ) = p ∗ q ( A )

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5.3. CONVOLUTION PAR UNE DISTRIBUTION À DÉCROISSANCE RAPIDE   67

pour tout borélien  A . Cette mesure p ∗ q  est le produit de convolution p ∗ q  des deux 

mesures de probabilité p = d f   et q = dg . En résumé : le produit de convolution p ∗q est la mesure de probabilité de la somme X +Y de deux variables aléatoires indépendantes X et Y de mesures de probabilité respectives p et q. Ceci explique l’importance du produit

de convolution de mesures bornées en théorie des probabilités.

Rappelons (section 4.5) que si la variable aléatoire  X  suit la mesure de probabi-

lité p , la transformée de Fourier P (ν) est la fonction caractéristique  E e −2i πνX . Comme

dans le cas L 1, on a la caractérisation suivante en transformée de Fourier : le produit de

convolution p ∗q  de deux distributions de probabilité p , q  est la transformée de Fourier

inverse du produit P (ν)Q (ν) des transformées de Fourier de p  et q  :

p ∗ q (x )  T.F.→← P (ν)Q (ν)

En effet, il s’agit du calcul suivant sur les fonctions caractéristiques :

E(e −2i πν(X +Y  )) = E(e −2i πνX e −2i πνY ) = E(e −2i πνX )E(e −2i πνY ) = P (ν)Q (ν).

Exemple 195 [convolution par une mesure de Dirac]: Le produit de convolution p ∗δ,

où p = d f  est une mesure de probabilité quelconque et δ= d H  est la mesure de Dirac,

se détermine directement par la formule p ∗δ( A ) =

x + y ∈ A dF (x )d H ( y ) =

x ∈ A dF (x ) =p ( A ) ou par transformée de Fourier :  P (ν) · 1 = P (ν). On trouve donc p ∗δ = p . Dans le

langage des variables aléatoires, cette relation signifie simplement que X  +0 = X .

Pour des v. a. X , Y absolument continues , on retrouve la caractérisation par trans-

formée de Fourier du produit de convolution des densités intégrables (L 1).

Exemple 196 [v.a. gaussiennes indépendantes]:  Deux variables aléatoires  X , Y   gaus-

siennes, indépendantes, centrées, d’écarts-type respectifs σ > 0 et  τ > 0 ont pour den-

sités de probabilité p (x )

=  1

σ 

2πe 

−   x 2

2σ2 et q (x )

=  1

τ 

2πe 

−  x 2

2τ2 . La densité de probabilité de

X  + Y  est le produit de convolution(193) p ∗ q (x ) =   1

ρ 

2πe 

−   x 2

2ρ2 où  ρ = σ2 +τ2. Ainsi,

la somme de variables aléatoires indépendantes gaussiennes centrées est encore une

variable gaussienne centrée, de variance égale à la somme des variances.

Exemple 197 [v.a. cauchiennes indépendantes]:  Deux variables aléatoires de Cauchy 

X , Y   indépendantes on pour densités de probabilité p (x ) =   1π

a x 2+a 2

 et q (x ) =   1π

b x 2+b 2

, où

a , b > 0. La densité de probabilité de X  +Y  est donc(194) p ∗ q (x ) =   1π

c x 2+c 2

  où c = a +b .La somme de variables aléatoires indépendantes de Cauchy est encore une variable de

Cauchy.

De même que dans le cas des fonctions intégrables, on montre facilement (par

transformée de Fourier) les propriétés habituelles pour le produit de convolution de

mesures de probabilité. En particulier, le produit de convolution p ∗ q  de distributionsde probabilités est commutatif : p ∗ q  = q ∗ p  et associatif : (p ∗ q ) ∗ r  = p ∗ (q ∗ r ). En

termes de variables aléatoires (indépendantes) cela signifie simplement que  X  + Y  =Y  + X  et (X  +Y  ) + Z  = X  +(Y  + Z ).

5.3 Convolution par une distribution à décroissance ra-

pide

On va généraliser le produit de convolution à des distributions tempérées,

sans restriction de supports, de sorte que, comme dans le cas  L 1, la transfor-

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5.3. CONVOLUTION PAR UNE DISTRIBUTION À DÉCROISSANCE RAPIDE   69

– commutativité : r  ∗ s = s ∗ r ; c’est-à-dire formellement : 

r (x − t )s (t ) d t  =

r (t )s (x − t ) d t.– associativité : si au moins deux facteurs sur les trois sont à décroissance ra-

pide :  (r ∗ s )∗ t  = r ∗ (s ∗ t ) ; – distributivité :  (r + s ) ∗ t  = r ∗ t + s ∗ t ; 

Preuve :   Il suffit de vérifier les propriétés correspondantes en transformée de

Fourier (qui sont évidentes) : RS = SR  ; (RS )T  = R (ST ) si deux des trois facteurs

sont C ∞ tempérés ; (R +S )T  = RT  +ST .  

La propriété d’associativité permet de définir le produit de convolution s 1 ∗ s 2 ∗· · ·∗ s k  d’une nombre quelconque de distributions tempérées, qui sont toutes à

décroissance rapide, sauf éventuellement une.

Proposition 201 [unité du produit de convolution]:  L’impulsion de Dirac  δ est l’élément unité du produit de convolution : s ∗δ= s pour tout s ∈S  .

Formellement : s (x ) =

s (t )δ(x − t )d t  =

s (x − t )δ(t ) d t .

Preuve :   En transformée de Fourier, 1 ·S (ν) = S (ν).  

Cet élément unité δ  est nécessairement unique, car si e  en était une autre,

on aurait e  = e ∗δ = δ. Il est donc remarquable que le produit de convolution

n’admette d’élément unité qu’au sens des distributions  (ou des mesures, et non

au sens des fonctions). En particulierδ∗δ= δ, ce qui s’écrit formellementδ(x ) =

δ(t )δ(x − t ) d t  bien que le produit δ(t )δ(x − t ) n’ait aucun sens (en particulierpour t  = 0).

Proposition 202 [translation]:  Translater par a revient à convoluer par δa (x ) =δ(x − a ) : on a s ∗δa  = s a  pour tout s ∈S  . Translater un produit de convolution revient à translater l’un des facteurs :  (r ∗ s )a = r a ∗ s = r ∗ s a .

Preuve :  En transformée de Fourier : (e −2i πνa )S (ν) = e −2i πνa S (ν) et on a l’asso-

ciativité du produit e −2i πνa R (ν)S (ν).  

Proposition 203 [dérivation]:  Dériver revient à convoluer par δ : on a s ∗δ = s 

pour tout s  ∈ S  . Dériver un produit de convolution revient à dériver l’un des 

 facteurs :  (r ∗ s ) = r  ∗ s = r ∗ s .Preuve :   En transformée de Fourier : (2i πν) · S (ν) = 2i πνS (ν) et on a l’associati-

vité du produit (2i πν)R (ν)S (ν).  

Par récurrence,  δ(n ) ∗ s  = s (n ) ; cela revient à dériver formellement sous l’inté-

grale à partir de la formule s (x ) =

s (t )δ(x − t ) d t   : s (n )(x ) =

s (t )δ(n )(x − t ) d t .De plus, toujours par récurrence, si l’une des distributions tempérées r , s  est à

décroissance rapide : (r ∗ s )(n ) = r (p ) ∗ s (q ) où p + q = n .Dans l’autre sens, si s  est une distribution à décroissance rapide, s ∗H  (où H 

est la fonction échelon) est une primitive  de s , car (s ∗ H ) = s ∗ H  = s ∗δ= s .

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70   CHAPITRE 5. CONVOLUTION 

Remarque 204 [convolution non associative]:  Le produit de convolution :

1∗δ ∗ H 

est bien défini (δ  étant à décroissance rapide, les produits 1 ∗δ  et  δ ∗ H   sont

bien définis) mais il n’est pas  associatif :

(1∗δ) ∗ H  = 0 ∗ H  = 0

1∗ (δ ∗ H ) = 1 ∗δ= δ.

L’explication est que seule δ est à décroissance rapide, les deux autres facteurs

ne le sont pas. Noter que cet exemple correspond exactement, en transformée

de Fourier, à l’exemple 46 pour le produit.

Proposition 205 [multiplication par la variable]:   Si l’une des distributions tem-pérées r (t ), s (t ) est à décroissance rapide, alors : t (r ∗ s ) = (tr ) ∗ s + r ∗ (t s ).

Preuve :   En transformée de Fourier (RS ) = R S +RS .  

Proposition 206 [régularisation par convolution]:  Si f est une fonction C ∞ à décroissance rapide et s une distribution tempérée quelconque, alors f  ∗ s est une  fonction C ∞.

La fonction f  est appelée régularisante  et  f  ∗ s régularisée  de s  par  f  . La dérivée

n ième de f  ∗ s  s’obtient par la relation ( f  ∗ s )(n ) = f  (n ) ∗ s ∈ C ∞.

Preuve :   Le résultat est immédiat lorsque s  est une fonction intégrable, car f  (n )

étant intégrable pour tout n , ( f  ∗s )(n ) = f  (n )∗s  l’est aussi, donc f  ∗s  est de classe

D n  pour tout n , c’est à dire C ∞. Il suffit, pour conclure, de montrer que si la

proposition est vraie pour  s (t ), alors elle est vraie pour  s (t ) et pour t s (t ). Mais

c’est immédiat, car  f  ∗ s  = f   ∗ s  et  f  ∗ (t s ) = t ( f  ∗ s ) − (t f  ) ∗ s , où  f  (t ) et  t f  (t )sont C ∞ à décroissance rapide.  

5.4 Intégrale de convolution et produit scalaire

Lorsque   f  ∈ S    est C ∞  à décroissance rapide et  s  ∈S    est une distribution

tempérée quelconque, l’écriture formelle f  (t )s (x −

t ) d t  = f  (x 

−t )s (t ) d t  peut

désigner deux choses : 1o c’est le produit de convolution (régularisé) f  ∗s ∈ C ∞ ;

2o c’est le produit scalaire « tempéré »(123) (s̃ x  |   f  ) = (s  |   ˜ f x ) où  s̃ (t ) = s (−t ) et

s x (t ) = s (t − x ) désigne les retournée et translatée de s (t ). Ces deux interpréta-

tions signifient bien la même chose :

Proposition 207 [convolution et produit scalaire]:   Si s est une distribution tem-pérée, alors pour toute fonction C ∞ à décroissance rapide f , le produit de convo-lution f  ∗ s est donné par l’un des deux produits scalaires : 

 f  ∗ s (x ) = (s |   ˜ f x ) = (s̃ x  | f  ) (∀x ∈R)

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5.4. INTÉGRALE DE CONVOLUTION ET PRODUIT SCALAIRE    71

Preuve :  Par changement de variable, les deux produits scalaires sont égaux.

Considérons par exemple le premier, qui s’écrit s (t ) f  (x − t )d t . Le résultat estimmédiat si  s  est une fonction intégrable, les produits scalaires se ramenant

alors à des intégrales de convolution (cadre  L 1). Il suffit, pour conclure(114), de

montrer que si la relation à prouver est vraie pour s (t ), alors elle est vraie pour

s (t ) et pour t s (t ). Pour la dérivée, on a d’une part f  ∗ s  = f   ∗ s  et d’autre part,

pour le produit scalaire :

s (t ) f  (x − t )d t  = −

s (t )  d d t  f  (x − t ) d t  =

s (t ) f  (x −

t )d t  où  f   ∈S  . Pour la multiplication par x , on a d’une part f  ∗ (xs ) = x ( f  ∗ s )−(x f  ) ∗ s  et d’autre part, pour le produit scalaire :

t s (t ) f  (x − t ) d t  =

s (t )(x −

(x − t )) f  (x − t ) d t  = x 

s (t ) f  (x − t ) d t −

s (t )g (x − t ) d t  où g (t ) = t f  (t ) ∈S  . Les

vérifications sont donc achevées.  

Lorsque   f  ∈ C ∞  et  s  est une distribution à support fini , l’écriture formelle : f  (t )s (x − t ) d t  =

 f  (x − t )s (t ) d t  peut désigner soit le produit de convolution

(régularisé)   f  ∗ s  ∈ C ∞, soit une intégrale. En effet, les produits   f  (t )s (x − t ) et

 f  (x − t )s (t ), pour x  fixé, sont bien définis en tant que distributions et sont à sup-

ports finis, et les deux intégrales ont un sens comme intégrales de distributions

à support fini(75) ; ce sont d’ailleurs, avec les mêmes notations que ci-dessus,

des produits scalaires à support fini(120) (s̃ x  | f  ) = (s |   ˜ f x ). Effectivement, les deux 

interprétations signifient bien la même chose :

Proposition 208 [intégrale de convolution au sens des distributions]:   Si f  ∈C ∞ et s est distribution à support fini, alors le produit de convolution f  ∗ s est 

donné par l’une des deux intégrales suivantes : 

 f  ∗ s (x ) =

 f  (t )s (x − t ) d t  =

 f  (x − t )s (t ) d t    (∀x ∈R)

Par récurrence, toutes les dérivées seront de la même façon des intégrales au

sens des distributions :   d n 

d x n  f  ∗s (x ) =

 f  (p )(t )s (q )(x −t ) d t  =

 f  (p )(x −t )s (q )(t )d t où p + q = n .

Preuve :   Les deux intégrales sont égales par changement de variable (78) u  =x − t . Considérons par exemple la deuxième. L’identification à prouver est évi-

demment vraie lorsque s  est une fonction à support fini, et aussi lorsque s = δ,

car(80)  f  (x − t )δ(t ) d t  =  f  (x ) =  f  ∗ δ(x ). Pour conclure, il suffit(74) de montrerque l’identification est vraie pour s  si elle est vraie pour s . Or, par intégration par

parties(79) :

 f  (x − t )s (t )d t  =

 f  (x − t )s (t )d t  où l’intégrale de droite est une

convolution au sens ordinaire. On a donc bien l’identification

 f  (x −t )s (t )d t  = f   ∗ s (x ) = f  ∗ s (x ).  

Exemple 209 [convolution par une constante]:  Le produit de convolution s ∗1

d’une distribution s  avec la fonction constante = 1 est bien défini lorsque s  est

à support fini et on a s ∗ 1 = (s | 1) =

s (t ) d t . C’est donc une fonction constante

égale à l’intégrale (au sens des distributions) de s .

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72   CHAPITRE 5. CONVOLUTION 

Exemple 210 [convolution par un polynôme]:   Le produit de convolution s ∗p n 

d’une distribution s  avec un polynôme p n (x ) dedegré< n  est bien défini lorsques  est à support fini et c’est aussi un polynôme de degré < n , puisque (s ∗p n )

(n ) =s ∗ p (n )

n   = s ∗ 0 = 0. On le voit aussi par transformée de Fourier : le produit d’une

fonction C ∞ par une distribution impulsive reste impulsive.

La proposition 208 permet d’expliciter les coefficients de ce polynôme : écri-

vons p n (x − t ) =n −1i =0

x i 

i ! p (i )n   (−t ) (formule de Taylor pour les polynômes). Alors

par linéarité de l’intégrale :

s ∗ p n (x ) =

p n (x − t )s (t )d t  =n −1i =0

x i 

i !

p (i )

n   (−t )s (t ) d t 

Exercices

Exercice 211:   En utilisant le résultat de l’exercice 189, montrer que le produit de convo-

lution e i πt 2 ∗ e i πt 2 est bien défini et égal à   1+i 2   e i πt 2/2.

Exercice 212:  On retrouve par associativité que dériver un produit de convolution re-

vient à dériver l’un de ses facteurs : (r ∗s ) = (r ∗s )∗δ = r ∗(s ∗δ) = r ∗s . Raisonnement

analogue pour la translation.

Exercice 213:   D’après la représentation 73, le produit de convolution de deux distribu-

tions à support fini est aussi une distribution à support fini. Plus précisément, si  r   est

à support dans [a , b ] et s  dans [c , d ], alors r  ∗ s  est à support dans [a + c , b + d ]. Muni

du produit de convolution, l’espace des distributions à support fini devient une algèbrecommutative (élément unité δ).

Exercice 214 [intégralité du produit de convolution]:  Le produit de convolution n’est

pas intègre  : si r ∗ s = 0, on a pas forcément r  = 0 ou s = 0. Par exemple : 1 ∗δ = 0.

En revanche, le produit de convolution est intègre dans l’algèbre des distributions à

support fini (exercice 213). En effet, les TF de r  et  s  sont des fonctions qui se prolongent

analytiquement en des fonctions entières sur C, et il en résulte que le produit S (ν)T (ν)

ne peut être identiquement nul que si l’un des deux facteurs l’est.

Exercice 215 [équation différentielle]:  Résoudre dans l’espace des distributions tem-

pérées l’équation différentielle linéaire

c 0s +c 1s  +· · ·+c n s (n )

= r 

revient à trouver l’inverse convolutif ∆−1 de la distribution impulsive de degré n  : ∆ =c 0δ+ c 1δ +· · ·+c n δ

(n ). La solution générale est alors s =∆−1 ∗ r .

Exercice 216 [convolution de distributions impulsives et à support fini]:  On a  δa ∗δb  = δa +b  et δ

(n )a   ∗δ(m )

b    = δ(m +n )a +b    . Par distributivité (à droite et à gauche), le produit de

convolution d’une distribution impulsive en x  = a   par une distribution impulsive en

x = b  est une distribution impulsive en x = a +b  :

(

i c i δ

(i )a   ) ∗ (

 j 

c  j δ( j )b   ) =

i , j 

c i c  j δ(i + j )a +b 

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5.4. INTÉGRALE DE CONVOLUTION ET PRODUIT SCALAIRE    73

Il est possible que le produit r ∗s  soit une distribution impulsive sans que r  et s   le soient.

Par exemple, H ∗δ = δ. En revanche, si r  et s  sont deux distributions à support fini tellesque r ∗ s  est impulsive , alors par l’exercice 213, les deux distributions r  et s  doivent être

impulsives , et r ∗ s  est de la forme ci-dessus.

En particulier, si r   et s   sont deux distributions à support fini  telles que r  ∗ s  = δ,

alors, par indépendance(64) des dérivées de δ, r   et s  doivent être de la forme r  = c 0δ et

s = c 0δ où c 0c 0 = 1. Les seules distributions inversibles dans l’algèbre de convolution des distributions à support fini sont les distributions de Dirac, de la forme c δ. Autrement dit,

l’inverse convolutif d’une distribution à support fini s  ne peut être elle-même à support

fini, à moins que s = c δ.

Exercice 217:  Donner les propriétés du produit de convolution r ∗s  (d’une distribution

tempérée par une distribution à décroissance rapide) pour la dilatation/contraction et

pour les symétries (retournement et symétrie hermitienne).

Exercice 218 [produit de convolution dans les cas désespérés]:   Dans certains cas par-ticuliers, on peut définir  un produit de convolution r  ∗ s  (par transformée de Fourier)

qui ne rentre dans aucun des cadres étudiés dans ce document. Par exemple, la rela-

tion (−i πsgnν)2 = −π2 nous permet de définir v.p.  1t  ∗ v.p. 1

t  = −π2δ(t ). En dérivant

v.p. 1t  ∗ P.f.   1

t 2 = π2δ(t ), P.f.   1

t 2 ∗P.f.   1

t 2 = −π2δ(t ), etc.

Par contre, certains produits de convolution sont totalement désespérés comme

1 ∗ 1 ou 1 ∗ H . Par exemple, si on arrivait à définir 1 ∗ H  avec les propriétés habituelles,

on aurait 1 ∗ H  = 1 ∗ H  c’est à dire 1 = 0.

Exercice 219:  Une fonction f  ∈ C ∞ n’a jamais d’inverse convolutif (c’est à dire une dis-

tribution s  telle que f  ∗ s = δ), car sinon δ serait C ∞.

Exercice 220:  Sous les conditions de la proposition 206,  f  ∗ s  n’est pas nécessairement

C ∞ à décroissance rapide. Par exemple e −t 2

∗ H (t ) est une primitive d’une gaussienne,qui n’est jamais à décroissance rapide.

Exercice 221:   Sous les conditions de la proposition 207, par la formule de Parseval(182)

il vient que  f  ∗ s (x ) est égal au produit scalaire

S (ν)F (ν)e 2πνt d ν. Par ailleurs la TF de

ce produit de convolution est F (ν)S (ν). Le calcul formel suivant est donc justifié :S (ν)F (ν)e 2i π(ν−ν)t d ν dt  = S (ν)F (ν).

Exercice 222:  Définir le produit de convolution  r  ∗ s  de deux distributions de  H −∞

(exercice 191) comme la TF inverse du produit R (ν)S (ν). Puisque r  et  s  sont des combi-

naisons linéaires finies de dérivées de fonctions  L 2, r  ∗ s  est une combinaison linéaire

finie de dérivées de fonctions bornées, c’est donc une distribution bornée.

Exercice 223 [transformée de Hilbert]:  Pour toute distribution à décroissance rapide(à valeurs réelles) s (t ) de TF S (ν), on note z (t ) son signal analytique , défini par sa TF :

Z (ν) = 2H (ν)S (ν).

Montrer que z (t ) = s (t ) + i s H (t ), où s H (t ) est une distribution à valeurs réelles, appelée

transformée de Hilbert  de s (t ) et donnée par la formule :

s H (t ) = v.p.  1

πt  ∗ s (t ).

 Ainsi δH (t ) = v.p.   1πt  ,  δ

H (t ) = −P.f.   1

πt 2  et si π(t ) est la fonction porte = 1 pour |t | < 1

(nulle ailleurs), alors πH (t ) =   1π log 

1+t 1−t 

.

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74   CHAPITRE 5. CONVOLUTION 

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Chapitre 6

Séries de Fourier

On applique ici la transformée de Fourier aux distributions discrètes  et aux 

distributions périodiques . La transformée de Fourier d’une distribution discrète

(tempérée) est une distribution périodique, et réciproquement. Cela permet de

développer toute distribution périodique en série de Fourier . Dans tout ce cha-

pitre, on se donne un nombre T  > 0 appelée période .

6.1 Distributions discrètes

Définition 224 [distribution discrète]:  Une distribution s  est dite T -discrète  si

elle s’écrit sous la forme(57) :

s (t ) = n ∈Z

s n δ(t −nT )

On la note aussi

n  s n δnT . C’est la dérivée d’une fonction en escalier, constante

par morceaux sur chaque intervalle ]nT , (n + 1)T [ et présentant des sauts  d’am-

plitudes s n  aux points t  = nT , n  entier. Une distribution discrète est de classe

D −1, bien définie pour un choix quelconque de la suite {s n } ∈R ou C, et unique-

ment déterminée par cette suite :

n r n δnT  =

n  s n δnT   implique r n  = s n   pour

tout n .

Exemple 225 [peigne de Dirac et échantillonnage]:  Le peigne de Dirac est la

distribution discrète : δ(t ) = n ∈Z

δ(t −nT )

correspondant à la suite constante s n = 1. C’est la dérivée de la fonction en esca-

lier t T  (partie entière de t /T ). Les « dents » δnT  du peigne sont régulièrement

espacées à la période T  et sont de même « amplitude » = 1.

Si   f  ∈ C ∞  (ou simplement continue), le produit   f  (t )δ(t ) vaut   f  (t )δnT (t ) = f  (nT )δnT   sur tout intervalle ](n − 1)T , (n + 1)T [, n ∈ Z. Par le principe de recol-

lement des morceaux  f  (t )δ(t ) est une distribution discrète, et on a la formule :

 f  (t )

n ∈Zδ(t −nT ) =

n ∈Z

 f  (nT )δ(t −nT )

75

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76   CHAPITRE 6. SÉRIES DE FOURIER 

Cette opération de multiplication par

 δ(t ) correspond, en traitement du signal,

à une opération d’échantillonnage ; T  est alors appelée « période d’échantillon-nage ».

Le peigne de Dirac est une distribution tempérée, comme le montre la pro-

position suivante :

Proposition 226 [distribution discrète tempérée]:  Une distribution T-discrète n  s n δ(t − nT ) est   tempérée (à croissance lente) si et seulement si la suite  {s n }

l’est, c’est-à-dire |s n | = O (|n |α) quand |n | → ∞ pour un exposant α> 0.

Preuve :   Il suffit de montrer le résultat pour  t  >  0, c’est-à-dire lorsque  s (t ) =

n >

0 s n δnT (t ), le cas   t  <

 0 étant similaire. Une primitive de  s (t ) est la fonc-

tion  f  (t ) =n >0 s n H (t − nT ) qui est bornée par0<nT t |s n | pour tout t  > 0. Si

|s n | = O (n α) on a alors | f  (t )|t /T n =0   O (n α) = O (t α+1), et s (t ) est bien tempérée.

Réciproquement, si s (t ) est tempérée, écrivons s  = g (m ) où g (t ) = O (t α) quand

t  →∞. On peut prendre comme primitive m ième g (t ) =n >0 s n H (−m )(t −nT ) =n >0 s n 

 (t −nT )m −1

(m −1)!  H (t  −nT ). On a donc, dans chaque intervalle ]nT , (n + 1)T [ :

|n i =1

s i (n +1 − i )m −1| = O (n α), d’où en déduit facilement, par récurrence sur n ,que |s n | = O (n α−m ).  

6.2 Distributions périodiques

Définition 227 [distribution périodique]:   Une distribution s  est T -périodique si elle est égale à sa translatée par T   :

s (t ) = s (t −T ).

On dit aussi qu’elle admet la période T . On a alors, par récurrence, s (t ) = s (t −kT ) pour tout entier k . Par dérivation, s (t ) = s (t −T ), et donc toutes les dérivées

successives d’une distribution périodique sont aussi périodiques. Si f  (t ) est une

fonction de classe C ∞ périodique, alors le produit f  (t )s (t ) est aussi périodique :

 f  (t −T )s (t −T ) = f  (t )s (t ).

Exemple 228:   Une fonction (localement intégrable) f  (t ) est périodique si f  (t ) = f  (t −T ) pour presque tout t . La fonction e 2i πnt /T , où n  est entier, est un exemple-

type de fonction périodique (de classe  C ∞). Toute combinaison linéaire finien  s n e 2i πnt /T  (ou infinie si la série converge dans un espace de fonctions) est

aussi périodique. Le peigne de Dirac  δ(t ) =n δ(t −nT ) est aussi périodique.

Si s (t ) est périodique, ses primitives ne le sont pas forcément. Puisque s (t )−s (t  −T ) = 0 on a  s (−1)(t ) − s (−1)(t  − T ) = c , où c  est une constante qui ne dé-

pend pas  du choix de la primitive, puisque cette dernière n’est définie qu’à une

constante additive près qui s’élimine dans cette expression.

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6.2. DISTRIBUTIONS PÉRIODIQUES    77

Définition 229 [intégrale et moyenne sur une période]:   L’intégrale sur la pé-

riode T  d’une distribution T -périodique s  est définie par :(T )

s (t ) d t  = s (−1)(t ) − s (−1)(t −T )

(constante indépendante de la primitive choisie). Sa  moyenne sur la période T est définie par :

S 0 = 1

(T )

s (t ) d t 

Exemple 230 [intégrale d’une fonction périodique]:   Si  f  est une fonction (lo-

calement intégrable) périodique, alors

(T ) f  (t ) d t  = f  (−1)(t )− f  (−1)(t −T ) est l’in-

tégrale de Lebesgue usuelle sur un intervalle de longueur  T  (elle ne dépend pas

de l’intervalle de longueur T  choisi).

Exemple 231 [moyenne du peigne de Dirac]:   Le peigne de Dirac δ(t ) =n δ(t −nT ) a pour intégrale

(T )δ(t )d t  = 1 (amplitude commune des sauts de sa primi-

tive), et donc pour moyenne   1T  .

On montre facilement les propriétés habituelles de l’intégrale :

Proposition 232 [propriétés de l’intégrale sur une période]:  L’intégrale sur la période T d’une distribution T-périodique a les propriétés suivantes : 

– linéarité : 

(T ) r (t )d t +

(T ) s (t )d t  =

(T )(r (t ) + s (t ))d t ; 

– anti-dérivation : (T )s (t )d t 

 =0 si s (t ) est périodique; 

– intégration par parties : (T ) f  (t )s (t ) d t  =−(T ) f  (t )s (t )dt où f estC ∞ pé-

riodique. Par récurrence,

(T ) f  (t )s (m )(t )d t  = (−1)m 

(T ) f  (m )(t )s (t ) dt pour 

m  0 ; – changement de variable : 

(T ) s (at +b ) d t  =   1

|a |

(|a |T ) s (t ) dt pour a = 0.

Preuve :   L’intégrale sur T  est linéaire car une primitive de  r + s  est r (−1) + s (−1) ;

la relation

(T ) s (t )d t  = s (t ) − s (t − T ) = 0 signifie précisément que s  est pério-

dique ; la formule d’intégration par parties s’en déduit en intégrant la relation

( f s ) = f  s + f s . Enfin, la primitive de s (at +b ) est   1a s (−1)(at + b ) et   1

a s (−1)(at +b ) −   1

a s (−1)(a (t − T ) + b ) est de la forme   1|a | s (−1)(u ) −   1

|a | s (−1)(u − |a |T ) en distin-

guant les cas a >

0 ou a <

0.  

Remarque 233 [distributions périodiques de moyenne nulle]:   Si s (t ) est pério-

dique de moyenne S 0, on la centre  (rend de moyenne nulle) en soustrayant S 0 :

on obtient s c (t ) = s (t )−S 0 qui est à la fois périodique et de moyenne nulle. Mais

alors s c (−1)(t ) − s c (−1)(t − T ) = s c 0 = 0 pour toute primitive, autrement dit : toute 

primitive d’une distribution périodique de moyenne nulle est périodique .Parmi ces primitives (définie à une constante additive près), une seule est

elle-même de moyenne nulle (par choix approprié de la constante). Ses primi-

tives sont donc périodiques, et ainsi de suite :  Tout distribution périodique de moyenne nulle admet une unique primitive mième périodique de moyenne nulle .

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78   CHAPITRE 6. SÉRIES DE FOURIER 

Cette dernière remarque nous permet de caractériser complètement les dis-

tributions périodiques :

Proposition 234 [caractérisation des distribution périodiques]:  Une distribu-tion s est T -périodique (de moyenne S 0 ) si et seulement si on peut écrire : 

s = S 0 + f  (m )

où f est une fonction (localement intégrable) T -périodique de moyenne nulle.Cette représentation est unique pour chaque m fixé assez grand.

En particulier, toute distribution périodique est bornée (98) et donc tempérée.

Preuve :   Toute distribution de cette forme est évidemment périodique. D’après

la remarque 233,  s − S 0  admet une primitive  m ième périodique de moyennenulle qui est unique. Pour m  assez grand, c’est une fonction   f  , et on obtient

la représentation voulue  s  =  S 0 + f  (m ). On peut toujours choisir  m   suffisam-

ment grand pour que   f   soit continue ; étant aussi périodique, elle est bornée,

et s = S 0 + f  (m ) est donc une distribution bornée.  

6.3 Séries de Fourier au sens des distributions

Les distributions périodiques et discrètes se correspondent par transformée

de Fourier :

Proposition 235 [TF de distributions périodiques/discrètes]:  La transformée de Fourier d’une distribution T -périodique est une distribution   1

T  -discrète tem-pérée, et vice versa : la transformée de Fourier d’une distribution T-discrète tem-pérée est une distribution   1

T  -périodique.

Preuve :   Si s (t ) est T -périodique, elle est tempérée et admet donc une trans-

formée de Fourier S (ν). Puisque s (t ) = s (t − T ) on doit avoir S (ν) = e −2i πνT S (ν).

Posonsϕ(ν) = 1−e −2i πνT  ∈ C ∞. Dans chaque intervalle ](n −1)T , (n + 1)T [, on a

ϕ(ν)S (ν) = 0 où ϕ(ν) a un zéro simple unique en ν=  n T  . Ce problème de division

se résout immédiatement(68) : il vient S (ν) = S n δ(ν− n T  ) dans ](n −1)T , (n +1)T [,

où S n  est une constante. Par recollement des morceaux  S (ν)

=n S n δ(ν

−n T  ).

Réciproquement, si s (t ) =n  s n δ(t −nT )est T -discrète tempérée, elle admetune transformée de Fourier S (ν). Puisque e 2i πt /T s (t ) = n  s n e 2i πnT /T δnT (t ) =s (t ), il vient S (ν) = S (ν−   1

T  ), et donc S (ν) est   1T  -périodique.  

Pour une distribution périodique s (t ), les coefficients S n  des raies spectrales

dans la transformée de Fourier S (ν) =n S n δ(ν−  n T  ) s’appellent les coefficients 

de Fourier . Ils sont uniquement déterminés par s (t ) ; réciproquement, par trans-

formée de Fourier inverse, la suite des coefficients de Fourier détermine  s (t ) de

manière unique. Il y a une formule explicite permettant de calculer S n  à partir

de s (t ) :

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6.3. SÉRIES DE FOURIER AU SENS DES DISTRIBUTIONS    79

Proposition 236 [coefficients de Fourier]:  Pour une distribution T-périodique 

s (t ) donnée, ses coefficients de Fourier S n  sont déterminés par la formule inté-grale : 

S n =1

(T )

s (t )e −2i πnt /T  d t .

En particulier, S 0 est la moyenne (229) de s (t ).

Preuve :   Il suffit de montrer que le coefficient S 0  s’identifie bien à la moyenne1T 

(T ) s (t )d t , car la formule générale s’en déduit en considérant la distribution

périodique e −2i πnt /T s (t ) de transformée de Fourier S (ν+n /T ) =k  S k δ(ν+(n −k )/T ). Par la représentation générale 234, on peut écrire  s  = M + f  (m ) où M  est

la moyenne de  s (t ), et où   f   est T -périodique ; la TF F (ν) est donc   1T  -discrète,

disons F (ν) = n c n δ(ν− n T  ). Il vient :  S (ν) = M δ(ν) + (2i πν)

F (ν) = M δ(ν) +n (2i πn )m δ(ν− n 

T  ). Le terme enδ(ν) dans la somme disparaît, et par identifica-

tion on a bien S 0 = M .  

La proposition suivante est l’équivalent d’une formule d’inversion de Fourier.

Proposition 237 [série de Fourier]:  Etant donnée une suite (réelle ou complexe) {S n } à croissance lente : S n  = O (|n |α), il existe une distribution T -périodique s (t )unique dont les coefficients de Fourier sont les S n .

Cette distribution est la TF inverse de

n S n δ(ν− n T  ), qu’on appelle série de Fou-

rier  associée à la suite {S n }. On la note formellement :

s (t ) = n ∈Z

S n e 2i πnt /T .

Preuve :   Un distribution T -périodique  s (t ) admet une TF   1T   -discrète tempé-

rée, de la forme

n c n δ(ν−  n T  ) où les c n  sont les coefficients de Fourier de s (t ) :

c n  =   1T 

(T ) s (t )e −2i πnt /T  d t  qui forment une suite à croissance lente(226). Si s (t )

est telle que c n  = S n , c’est nécessairement la transformée de Fourier inverse den c n δ(ν− n 

T  ) =n S n δ(ν− n T  ).  

Remarque 238:  La notation

n S n e 2i πnt /T  est justifiée par le fait qu’on a effec-

tivement s (t ) =n S n e 2i πnt /T  lorsque cette somme est finie (c’est à dire lorsque

les S n = 0 sauf un nombre fini d’entre eux). Mais en règle générale, cette écritureest formelle, tout comme l’écriture s (t ) =S (ν)e 2i πνt d ν l’est pour l’intégrale de

Fourier1.

En écrivant s (t ) =n S n e 2i πnt /T , on dit que l’on a développé s (t ) en série de

Fourier. La proposition 236 montre que toute distribution T -périodique s (t ) est

développable en série de Fourier, car c’est la TF inverse d’une distribution tem-

pérée de la formeS (ν) =n S n δ(ν− n T  ),où lasuitedes S n =   1

(T ) s (t )e −2i πnt /T  d t 

1Il est possible, néanmoins, de montrer qu’il s’agit d’une série convergente pour une notion de

convergence bien définie (« au sens des distributions »).

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80   CHAPITRE 6. SÉRIES DE FOURIER 

est nécessairement à croissance lente(226), car S (ν) l’est. Si, en revanche, on se

donne une suite {S n } qui n’est pas  à croissance lente, alors la série de Fourierassociée s (t ) n’existe pas  car

n S n δ(ν−  n 

T  ) n’est pas tempérée et n’admet donc

pas de TF inverse.

Pour simplifier les écritures on notera :

s (t )  S.F.→← S n 

lorsque s (t ) est une distribution périodique de coefficients de Fourier  S n . Les

séries de Fourier vérifient des propriétés similaires à celles de la transformée de

Fourier de distributions tempérées :

Proposition 239 [propriétés des séries de Fourier]:   Les séries de Fourier de dis-tributions périodiques vérifient les propriétés suivantes : 

– linéarité : si r (t )   S.F.→← R n  et s (t )   S.F.→← S n , alors αr (t )+βs (t )   S.F.→←αR n +βS n , où α,β

sont des constantes.– dérivation : si s (t )

  S.F.→← S n , alors s (t )  S.F.→← 2i πn 

T    S n .

– anti-dérivation : si s (t )  S.F.→← S n  et s (t ) est de moyenne nulle (S 0 = 0 ), de pri-

mitive s (−1)(t ) de moyenne nulle, s (−1)(t )  S.F.→← T 

2i πn S n .

– translation et modulation : si s (t )  S.F.→← S n , alors s (t − t 0)

  S.F.→← e −2i πnt 0/T S n  et 

e 2i πn 0t /T s (t )  S.F.→← S n −n 0 .

– symétries : si s (t )  S.F.→←

S n , alors s (−t )  S.F.→←

S −n  et s ∗(t )  S.F.→←

S ∗−n .

Preuve :   Ces propriétés sont immédiates à partir des propriétés analogues sur la

transformée de Fourier S (ν) =n S n δ n T 

(ν) : La linéarité provient de la linéarité

de la TF; la TF de  s (t ) est 2i πνS (ν) = n S n 2i πνδ n T 

(ν) = n S n 2i π n T δ n 

T (ν) ; la

propriété d’anti-dérivation s’en déduit en identifiant les coefficients de Fourier

de s (−1)(t ) périodique de dérivée = s (t ).

Pour le reste : la TF de s (t − t 0) est e −2i πνt 0 S (ν) =n S n e −2i π n T  t 0δ n 

T (ν) et la TF

de e 2i πn 0 t /T s (t ) est S (ν− n 0T   ) =n S n δ n +n 0

T (ν) =n S n −n 0δ n 

T (ν) ; l a T F d e s (−t ) est

S (−ν) =n S n δ−n T 

(ν) =n S −n δ n T 

(ν) e t l a T F d e s ∗(t ) est S ∗(−ν) =n S ∗n δ−n T 

(ν) =n S ∗−n δ n 

T (ν).  

Remarque 240 [TF à temps discret]:   Bien entendu, on définit de la même façon

la série de Fourier en fréquence comme la transformée de Fourier d’une distri-

bution discrète s (t ) =n  s n δ(t −nT ), que l’on note :

S (ν) =n 

s n e −2i πνnT 

les coefficients s n  étant les coefficients de Fourier de S (ν). En traitement du si-

gnal, cette série de Fourier s’appelle transformée de Fourier à temps-discret  de la

suite {s n }. Par la proposition 236, les coefficients  s n  sont donnés par la formule :

s n = T 

(  1T  )

S (ν)e 2i πνnT  d ν.

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6.4.   COMPLÉMENT: SÉRIES DE FOURIER AU SENS DES FONCTIONS    81

En traitement du signal, cette formule s’interprète comme une  formule d’inver-

sion de Fourier , car elle permet de retrouver s n  à partir de sa TF à temps discretS (ν) =n  s n e −2i πνnT .

On peut résumer par les formules suivantes :

s (t ) =

n ∈ZS n e 2i πnt /T    T.F.→←  S (ν) =

S n δ(ν− n T  ) où S n =

1

(T )

s (t )e −2i πnt /T  dt 

s (t ) =n 

s n δ(t −nT )  T.F.→←  S (ν) =

s n e −2i πνnT  où s n = T 

(  1T  )

S (ν)e 2i πνnT  d ν.

6.4 Complément: séries de Fourier au sens des fonctions

La série de Fourier au sens des distributions se réduit à une simple série de Fourier

au sens des fonctions sous certaines conditions. Le cas le plus simple est celui de la

convergence absolue de la série.

Proposition 241 [série de Fourier absolument convergente]:  Si la suite  {S n } est som-mable (on écrit S n ∈ 1 ) : 

n ∈Z|S n | < ∞,

alors la série de Fourier associée (au sens distributions) est une série au sens usuel, abso-lument convergente, dont la somme est une fonction continue : 

s (t )

= n ∈ZS n e 2i πnt /T .

Preuve :   Puisque {S n } est sommable, la série

n ∈ZS n e 2i πnt /T  converge absolument et

uniformément sur R. Elle définit donc une fonction continue périodique   f  (t ) (qui est

une distribution périodique particulière). Ses coefficients de Fourier sont donnés par

la formule   1T 

(T ) f  (t )e −2i πnt /T  dt  =k ∈ZS k 

  1T 

(T ) e 2i π(k −n )t /T dt  = S n , et  f  (t ) s’identifie

donc bien(237) à la somme s (t ) de la série de Fourier au sens des distributions2.  

Remarque 242:  En particulier, si une fonction   f  ∈ C 2 est périodique de période  T ,sa dérivée seconde est continue et périodique, de coefficients de Fourier  c n   bornés

puisque |c n | =   1T 

(T ) f 

 (t )e −2i πnt /T  dt    1

(T ) | f  (t )|dt . Les coefficients de Fourier

de   f   s’écrivent c n  = (   T 2i πn )

2c n   pour n  = 0 et donc c n  = O (   1n 2

) forment une suite som-

mable. On a donc un développement en série de Fourier absolument et uniformément convergent pour tout fonction C 2 périodique .

Plus généralement, le théorème de Dirichlet (1828) garantit une convergence ponc-

tuelle de la série de Fourier vers   s (t +)+s (t −)2

  sous certaines conditions de régularité par

morceaux. En revanche, pour une fonction (localement intégrable) périodique, on a pas

de résultat général de convergence ponctuelle de la série Fourier au sens des fonctions  :on peut construire un exemple (Kolmogorov, 1922) où la série de Fourier diverge pour

chaque valeur de t .

2En particulier, si S n  ∈1 alors S n  estune suite à croissance lente ; c’est par ailleurs évident car

S n  → 0 quand n → ∞, c’est-à-dire S n  =o (1).

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82   CHAPITRE 6. SÉRIES DE FOURIER 

On peut affaiblir la notion de convergence au sens des fonctions pour obtenir des

résultats plus généraux, par exemple pour des fonctions continues périodiques avecune convergence en moyenne de Césaro(Fejér, 1900).Le résultat classique estcelui de la

convergence en moyenne quadratique (au sens L 2) qu’on présente maintenant comme

une application de la théorie des espaces hilbertiens (Plancherel, 1910).

Tout d’abord, quelques rappels : Une fonction périodique de période T  est dite L 2-périodique  si

(T ) | f  (t )|2 d t  est finie. L’espace de ces fonctions périodiques est noté iciL 2 pour le distinguer de  L 2(R). Dire que   f  ∈ L 2 revient à dire que   f  ∈ L 2(I ) pour tout

intervalle fini I . On a donc, comme pour L 2(R), toutes les propriétés d’espace hilbertien

pour la norme et le produit scalaire définis par  f 2 = 

1T 

(T ) | f  (t )|2 dt   et ⟨ f   | g ⟩ =

1T 

(T ) f  (t )g ∗(t ) dt . En particulierL 2 est complet, et on a l’inégalité de Schwarz |⟨ f  | g ⟩|

 f 2g 2. Les coefficients de Fourier c n  de   f  ∈

L 2 sont donnés par le produit scalaire :

c n  = ⟨

 f  (t )|

e 2i πnt 

⟩. On dit que la suite c n  est de carré sommable (et on écrit  c n 

 ∈2) sin |c n |2 < ∞. L’espace 2 est lui-même hilbertien pour la norme et le produit scalaire

définis par : c 2 = 

n |c n |2 et ⟨c  | d ⟩ =n c n d ∗n , avec l’inégalité de Cauchy  |⟨c  | d ⟩|c 2d 2. Le résultat fondamental est le suivant :

Proposition 243 [séries de Fourier dans L 2]:  Les fonctions périodiques e 2i πnt   forment une base orthonormée de  L 2. Par conséquent, la série de Fourier f  (t ) = n c n e 2i πnt /T 

converge dans L 2 (en moyenne quadratique sur une période) : 

1

(T )

 f  (t )−l n =−k c n e 2i πnt /T 

2 dt  → 0   quand k , l  →∞

De plus, pour f  (t ), g (t ) ∈

L 2 de coefficients de Fourier c n , d n  ∈ 2 on a les  formules de

Bessel-Parseval  :  f 

2 = c 2

 et ⟨ f  |

g ⟩ = ⟨

c |

d ⟩, c’est-à-dire en clair : 

1

(T )

| f  (t )|2 dt  =n 

|c n |2 et   1

(T )

 f  (t )g ∗(t ) dt  =n 

c n d ∗n .

En résumé, on a un isomorphisme isométrique L 2 ∼= 2.

Une fonction de L 2 est localement intégrable, car

(T ) | f  (t )|dt  

T  · f 2 par l’in-

égalité de Schwarz. On peut donc la voir comme une distribution. Etant périodique,

c’est une distribution bornée, donc tempérée.

Proposition 244:   La série de Fourier (au sens des distributions) associée à une suite S n ∈2 coïncide avec la série de Fourier au sens 

L 2.

Une distribution périodique est L 2 si et seulement si ses coefficients de Fourier sont 2.

Preuve :   Si S n  ∈ 2, notons f  (t ) ∈L 2 la somme de la série de Fourier associée (au sensL 2). Alors S n  = ⟨ f  (t ) | e 2i πnt ⟩ =   1T 

(T ) f  (t )e −2i πnt /T dt   sont les coefficients de Fourier

de la distribution périodique   f  (t ), qui s’identifie donc(237) à la somme s (t ) de la série

de Fourier au sens des distributions3. Réciproquement, si s (t ) ∈L 2, ses coefficients de

Fourier sont données par S n  =   1T 

(T ) f  (t )e −2i πnt /T d t  = ⟨ f  (t ) | e 2i πnt ⟩, et donc S n  ∈ 2

par Bessel-Parseval.  

3En particulier, si S n  ∈  2 alors S n  est à croissance lente, ce qui est par ailleurs une consé-

quence immédiate de l’inégalité de Cauchy :

n =0S n n  

 n |S n |2

 n =0

1n 2

 < +∞, d’où S n  =o (|n |).

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6.5. PÉRIODISATION ET FORMULE DE POISSON    83

6.5 Périodisation et formule de Poisson

On a vu que le peigne de Dirac δ(t ) = n ∈Zδ(t − nT ) est à la fois une dis-

tribution discrète et périodique (pour la même période  T ). C’est d’ailleurs la

seule distribution (à une constante multiplicative près) qui ait cette propriété,

car si une distribution discrète s (t ) =n  s n δ(t −nT ) est périodique : s (t ) = s (t −T ), en identifiant on obtient  s n  =  s n −1  pour tout n  entier, c’est à dire  s n  =  s 0est constante. Cette remarque donne immédiatement le résultat important sui-

vant :

Proposition 245 [TF d’un peignede Dirac]:   La transformée de Fourier du peigne de Dirac est un peigne de Dirac : 

n ∈Z

δ(t −nT )   T.F.→← 1T 

n ∈Zδ(ν− n T  )

Cela revient à dire que les coefficients de Fourier de δ(t ) sont tous égaux à   1T  ,

c’est-à-dire que l’on a le développement suivant en série de Fourier :n ∈Z

δ(t −nT ) =   1T 

e 2i πnt /T .

Preuve :  La transformée de Fourier de δ(t ) =n ∈Zδ(t −nT ), qui est T -discrète

et  T -périodique, doit être une distribution   1T  -périodique et   1

T   -discrète. C’est

donc un peigne de Dirac de la forme c n 

∈Zδ(ν

− n T  ). La constante c  doit être

égale à la moyenne S n = S 0 de δ(t ) sur une période T , c’est à dire(231) c =   1T  .  

Rappelons(225) que multiplier une fonction continue s (t ) par un peigne de

Dirac revient à l’« échantillonner » :  s (t )

n ∈Zδ(t − nT ) =n ∈Z s (nT )δ(t − nT ).

Puisque δ(t ) est une distribution tempérée, on peut aussi définir son produit de convolution  par une distribution à décroissance rapide :

Définition 246 [périodisée d’une distribution]:   La  périodisée  (de période  T )d’une distribution à décroissance rapide s (t ) est définie par :

s (t ) = s (t ) ∗

∈Z

δ(t −nT ).

On écrit formellement : s (t ) =

n ∈Zs (t −nT ).

En particulier le peigne de Dirac δ(t ) =n ∈Zδ(t −nT ) est bien la périodisée de

l’impulsion de Dirac δ(t ).

La notation s (t ) =n ∈Z s (t −nT ) est justifiée par le fait qu’on aurait effecti-

vement s (t ) ∗n ∈Zδ(t −nT ) =n ∈Z s (t −nT ) si la somme sur n  était finie (voir

aussi l’exercice 271). Dans le cas général d’une distribution à décroissance ra-

pide on a la caractérisation suivante.

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84   CHAPITRE 6. SÉRIES DE FOURIER 

Proposition 247 [formule de Poisson]:   La périodisée 

 s (t ) de s (t ) (distribution 

à décroissance rapide) est une distribution périodique donnée par le développe-ment en série de Fourier : 

n ∈Zs (t −nT ) =   1

n ∈Z

S ( n T  )e 2i πnt /T .

Noter que la suite des coefficients de Fourier   1T  S ( n 

T  ) est bien à croissance lente,

car S (ν) est C ∞ à croissance lente.

Preuve :   Le produit de convolution s ∗ δ est défini(198) comme la transformée de

Fourier inverse du produit S (ν) 1T 

n ∈Zδ(ν−  n 

T  ) =   1T 

n ∈ZS ( n 

T  )δ(ν−  n T  ) (échan-

tillonnage de S (ν) qui est une fonction C ∞). Le résultat suit par définition des

séries de Fourier.  

Remarque 248:  Cette formule s’interprète en disant que périodiser en temps

« revient » à échantillonner en fréquence. En considérant la TF conjuguée on a

aussi, pour toute fonction C ∞ à croissance lente s (t ) :

1T 

S (ν− n T  ) =

s (nT )e −2i πνnT 

qui s’interprète en disant qu’échantillonner en temps revient à périodiser en fré-

quence. Plus précisément, la TF à temps discret(240) des échantillons s (nT ) de

s (t ) est égale à la périodisée (de période

  1

T  ) de sa transformée de Fourier S (ν).

On peut aussi définir le produit scalaire  (tempéré(123)) du peigne de Dirac

contre toute fonction C ∞ à décroissance rapide f  , noté (δ | f  ). Ilvaut −(

n  H nT  | f  ) = −n 

∞nT  f 

 (t ) d t  =n  f  (nT ), d’où la formule : f  (t )

n δ(t −nT ) d t  =

 f  (nT )

Une application de la formule de Parseval(182) nous donne immédiatement la

formule sommatoire de Poisson (1827).

Proposition 249 [formule sommatoire de Poisson]:   Si f  (t ) est C ∞  à décrois-sance rapide, de transformée de Fourier F (ν) (également C ∞ à décroissance ra-pide), alors 

n ∈Z f  (n ) =

n ∈Z

F (n ).

Plus généralement pour tout T  > 0,

n  f  (nT ) =n   1T  F ( n 

T  ).

Preuve :   Par Parseval(182) appliqué au peigne de Dirac et à   f  ∗, on a

n δ(t −nT ) | f  (t )

=   1

n δ(ν− n 

T  ) | F (ν), d’où la formule.  

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6.6.   COMPLÉMENT: CONVOLUTION PÉRIODIQUE    85

Remarque 250:   En appliquant la formule sommatoire de Poisson aux fonctions

x → f  (t − x ) et x → f  (x )e −2i πνx 

on retrouve les formules déjà vues :n ∈Z

 f  (t −nT ) =   1T 

n ∈Z

F ( n T  )e 2i πnt /T  et

 f  (nT )e −2i πνnT  =   1T 

F (ν− n 

T  ),

le lien entre produit de convolution et produit scalaire pour une fonction C ∞ à

décroissance rapide f  étant donné par la proposition 207.

6.6 Complément: convolution périodique

Une fonction (localement intégrable)   f   est périodique  (admet une période  T ) si

 f  (x )=

 f  (x −

T ) pour presque tout x . Le produit de convolution périodique  (ou cyclique,

circulaire) de deux fonctions localement intégrables f   et g  périodiques est défini par :

 f  g (x ) = 1

(T )

 f  (x − t )g (t ) dt 

où l’intégrale porte sur une période (intervalle de longueur T ). Puisque la fonction t  → f  (x − t )g (t ) définie presque partout est périodique, la définition est évidemment indé-

pendante de l’intervalle d’intégration I  choisi de longueur T  ; le produit de convolution

 f g  est lui-même localement intégrable et périodique . On peut facilement déterminer

ses coefficients de Fourier (par un calcul direct de l’intégrale de Fourier) : Si f  (t )  S.F.→← F n  et

g (t ) S.F.→← G n  alors : f  g (t )

  S.F.→← F n G n . Cette propriété nous permet de généraliser la notion

de produit de convolution périodique aux distributions :

Définition 251 [convolution périodique de deux distributions]:  Le produit de convo-lution périodique  (ou cyclique, circulaire) de deux distributions  r   et s  périodiques (de

coefficients de Fourier respectifs R n  et S n ) est défini par :

r  s (t )  S.F.→← R n S n 

Ce produit de convolution est toujours bien défini car les produits  R n S n  forment tou-

 jours une suite à croissance lente comme R n   et S n . On écrit formellement : r  s (x ) =1T 

(T ) r (x − t )s (t ) dt .

Cette définition par série de Fourier nous permet de montrer facilement les pro-

priétés importantes :

Proposition 252 [propriétés de la convolution périodique]:  Le produit de convolution périodique r  s vérifie les propriétés suivantes : 

– commutativité : r  s = s  r ; – associativité :  (r  s ) t  = s  (r  t ) ; – distributivité :  (r + s ) t  = r  t + s  t ; – élément unité (peigne de Dirac) :  δ s = s ; 

– dérivation :  δs = s  et (r s ) = r s = r s  ; d’où par récurrence, δ(n )s = s (n )

et  (r  s )(n ) = r (p ) s (q ) où p + q = n ; – translation circulaire : δa  s = s a  et  (r  s )a = r a  s = r  s a  ; – moyenne S 0 = 1 s.

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86   CHAPITRE 6. SÉRIES DE FOURIER 

Preuve :   Il suffit de vérifier les propriétés correspondantes sur les coefficients de Fou-

rier (qui sont évidentes) : commutativité, associativité, distributivité du produit mul-tiplicatif; élément unité 1 ; associativité du produit par   2i πn 

T    ou par e −2i πna /T  ;  S 0 =S n δn 0.  

Par commutativité, on peut écrire formellement que r ∗s (x ) =   1T 

(T ) r (x −t )s (t )d t  =

1T 

(T ) r (t )s (x − t ) dt . Mais cette notation suggère que r  ∗ s (x ) est la moyenne(229) de la

distribution r (x − t )s (t ) ou r (t )s (x − t ), bien définie lorsque r  ou s  est une fonction C ∞.

Effectivement :

Proposition 253 [convolution périodique et intégrale]:  Si s est une distribution pério-dique quelconque, alors pour toute fonction C ∞ périodique f , le produit de convolution  f   s est donné par une des moyennes (intégrales sur la période au sens des distributions 

périodiques) : 

 f  ∗ s (x ) = 1

(T )

 f  (x − t )s (t ) dt  = 1

(T )

 f  (t )s (x − t ) dt .

Noter que f   s  est une fonction C ∞ par l’exercice 274.

Preuve :  Les deux intégrales sont égales par le changement de variable (232) u  =  x −t . Considérons par exemple la deuxième. Le résultat est la propriété   f   1 = F 0   déjà

vue(252) lorsque s  est une fonction constante. Grâce à la représentation(234) s = S 0+g (m ),

il suffit, par linéarité, de montrer le résultat pour s  = g (m ) où g  est une fonction pério-

dique. Or f  ∗g (m )(x ) = f  (m ) ∗g (x ) =   1T 

(T ) f 

 (m )(t )g (x −t )d t   vaut, par m  intégrations par

parties(232) successives,   1T (T ) f  (t )g (m )(x 

−t ) dt 

 =  1T (T ) f  (t )s (x 

−t ) dt .  

6.7 Complément: convolution discrète

Le produit de convolution r ∗ s  de deux distributions discrètes, de la forme : r (t ) =n ∈Z r n δ(t −nT  et s (t ) =n ∈Z s n δ(t −nT ),se définit comme dans lecas général : ou bien

on impose une contrainte de supports convolutifs, ou bien on définit la convolution par

transformée de Fourier lorsqu’un des deux facteurs est une distribution à décroissance

rapide et l’autre une distribution tempérée. On se limite ici à la deuxième méthode.

On sait qu’une distribution discrète s =n  s n δnT   est tempérée  (c’est à dire à crois-

sance lente) si et seulement si(226) la suite  s n  est à croissance lente. On a un résultat

analogue pour les distributions discrètes à décroissance rapide :

Proposition 254 [distribution discrète à décroissance rapide]:  Une distribution dis-crète 

n  s n δnT  est  à décroissance rapide si et seulement si la suite  {s n } l’est, c’est -à -dire : 

|s n | = O (   1|n |α )   quand |n | → ∞ pour tout exposant α> 0.

Preuve :   Dire que s =n  s n δnT  està décroissance rapide revient à dire(175) que sa trans-

formée de Fourier S (ν) est une fonction C ∞  à croissance lente. Puisque S (ν) est pério-

dique et que toute fonction périodique est à croissance lente, cela revient encore à dire

que S (ν) est C ∞ périodique. D’après l’exercice 266, il revient au même de dire que s n  est

une suite à décroissance rapide.  

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6.7.  COMPLÉMENT: CONVOLUTION DISCRÈTE    87

Proposition 255 [convolution discrète]:  Le produit de convolution de deux distribu-

tions discrètes tempérées r  = n r n δnT  et s  =n  s n δnT  dont l’une est à décroissance ra-pide est une distribution discrète tempérée, de la forme r ∗ s =n (r ∗ s )n δnT  où 

(r ∗ s )n =m 

r m s n −m =m 

r n −m s m 

La suite (r ∗ s )n  est encore appelé produit de convolution discrète  des suites r n  et  s n . Ici

(r ∗ s )n  est toujours bien définie : les deux séries

m r m s n −m  et

m r n −m s m  convergent

absolument grâce aux hypothèses faites sur r   et s , qui reviennent à dire que l’une des

deux suites s n  et r n  est à croissance lente et l’autre est à décroissance rapide.

Preuve :   Supposons par exemple que r  soit à décroissance rapide. Le produit de convo-

lution r  ∗ s  est, par définition(198), la TF inverse du produit multiplicatif  R (ν)S (ν) de la

distribution périodique S (ν) par la fonction  C ∞  périodique R (ν). Ce produit est une

distribution périodique, donc r  ∗ s  est bien une distribution discrète de la forme  r  ∗s  =

n (r  ∗ s )n δnT  où les coefficients (r  ∗ s )n   sont donnés par la formule : (r  ∗ s )n  =T 

(  1T  )

S (ν)R (ν)e 2i πνnT d ν.

Si S (ν) est une fonction, l’intégrale ci-dessus est une intégrale ordinaire. La suite

r n  étant à décroissance rapide, la série  R (ν) = n r n e −2i πνnT  converge absolument et

uniformément sur R. D’où : (r ∗ s )n =

m r m T 

(  1T  )

S (ν)e 2i πν(n −m )T d ν=m r m s n −m .

D’après la caractérisation de la proposition 234, il reste, pour conclure, à montrer

que si la relation (r  ∗ s )n  =

m r m s n −m  est vraie pour S (ν), alors elle est vraie en rem-

plaçant S (ν) par S (ν), c’est à dire s n  par s n = T 

(  1T  )

S (ν)e 2i πνnT d ν= −2i πnT s n . Or, par

intégration par parties(232), on trouve facilement : (r ∗s )n = T 

(  1T  )

S (ν)R (ν)e 2i πνnT d ν=−T 

(  1

T  )S (ν)R (ν)e 2i πνnT d ν−(2i πnT )T 

(  1

T  )S (ν)R (ν)e 2i πνnT d ν= −(s ∗r )n −2i πnT (r ∗

s )n  où r n  = −2i πnT r n  sont les coefficients de Fourier de  R (ν) ∈ C ∞, qui forment tou- jours une suite à décroissance rapide. Finalement (s ∗ r )n  = m r m s n −m  et (r  ∗ s )n  =−m r m s n −m −2i πnT 

m r m s n −m =

m r m (2i π(m −n )T )s n −m =

m r m s n −m .  

Exercices

Exercice 256:   Si s (t ) =n  s n δ(t −nT ) est une distribution T -discrète, une primitive est

s (−1)(t ) =n i =1

s i  pour t  ∈]nT , (n + 1)T [, n  0 et  s (−1)(t ) = −0i =n +1

s i   pour t  ∈]nT , (n +1)T [, n  < 0. Cela revient à écrire s (−1)(t ) = ∞

n =1 s n H (t − nT ) −0n =−∞ s n H (nT  − t ) où

H (t ) est la fonction échelon.

Exercice 257:   Les distributions discrètes forment un  espace  de distributions, qui est

stable par multiplication par une fonction continue, et isomorphe à l’espace des suites(réelles ou complexes) {s n }.

Exercice 258:   Une suite {s n } est à croissance lente si et seulement si elle est « tempérée »

au sens où la série

n =0|s n ||n |α  converge pour un exposant α> 0.

Exercice 259:  La distribution v.p.cot t  =   d d t  log |sin t | est impaire et π-périodique ; elle

vérifie la relation sin t v.p.cot t  = cos t ,

Exercice 260:  L’ensemble des distributions périodiques forme un espace  de distribu-

tions, stable par dérivation. La dérivation au sens des distributions est un automor-

phisme de l’espace des distributions périodiques de moyenne nulle.

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88   CHAPITRE 6. SÉRIES DE FOURIER 

Exercice 261 [groupe des périodes]:  Considérant que les périodes peuvent être à va-

leurs négatives (T  est une période si et seulement si −T  l’est) :Si s (t ) est périodique et admet à la fois la période  T  et T , alors elle admet aussi les

périodes T  ±T . L’ensemble des périodes admises par s  forme donc un groupe, appelé

groupe des périodes G . Si ce groupe est réduit à {0}, s (t ) n’est pas périodique. S’il existe

une plus petite période T 0 > 0, le groupe des périodes est discret : G  = T 0Z. On dit que

T 0 est la période fondamentale  de s (t ) : les autres périodes en sont des multiples.

Si s (t ) n’admet pas de période fondamentale, alorsG  est dense  dans R. Pour chaque

période T  ∈ G  on une représentation s  = s 0 + f  (m ) ∈ C −m , où  f  =  f T  est continue et T -périodique. Deux fonctions f T   et f T   (où T ,T  ∈G ) diffèrent d’un polynôme de degré

m , quidoit être bornésurR, donc constant. Ainsi f  (t ) admet toute période ∈G . Comme

ce groupe est dense, tout nombre réel T  ∈R est limite d’une suite de périodes T k  ∈G , et

comme f  est continue, on a  f  (t ) = f  (t − T k ) → f  (t − T ) pour tout T  ∈ R ; f  (t ) est donc

constante , ainsi que la distribution s (t ) (son groupe de périodes est G 

 =R tout entier).

En résumé, si s (t ) est périodique et non constante, elle admet toujours une période

fondamentale T 0 > 0.

Exercice 262:   Si s (t ) est périodique de période fondamentale T 0, sa moyenne est indé-

pendante de la période considérée T  = nT 0, car s (−1)(t ) − s (−1)(t − nT 0) = n (s (−1)(t ) −s (−1)(t −T 0)).

Exercice 263:  Re-démontrer les propriétés des séries de Fourier (proposition 239) en

utilisant la proposition 236 et les propriétés de l’intégrale sur une période(232). Etablir

aussi les propriétés correspondantes pour la TF à temps-discret.

Exercice 264:   L’espace des distributions périodiques est isomorphe à celui des suites à

croissance lente (utiliser les séries de Fourier).

Exercice 265:   Si S n  est une suite à croissance lente de coefficients de Fourier d’une dis-tribution s , on peut trouver un indice k  assez grand pour que

 S n 

n k  = O (   1n 2

) quand |n | → ∞.

La distribution périodique dont les coefficients de Fourier sont  c n  =  (   T 2i πn )

k S n   pour

n  = 0 et  c 0 = 0 est alors une fonction continue de moyenne nulle, et on a s  = S 0 + f  (k ).

On retrouve la représentation déjà vue(234) des distributions périodiques.

Exercice 266 [caractérisation des fonctions C ∞ périodiques]:  Une distribution pério-

dique est une fonction C ∞ si et seulement si ses coefficients de Fourier S n  forment une

suite à décroissance rapide  : S n = O (   1|n |k  ) pour tout k .

Exercice 267:   Si c n ∈ 1, non seulement la série de Fourier converge absolument et uni-

formément, mais elle converge aussi dans

L 2, car c n ∈ 1 implique c n → 0 pour |n | → ∞

et c n  ∈

2

. L’exemple c n  =  1

 |n |  pour n  = 0 montre que la réciproque est fausse. En gé-néral, une série de Fourier convergente dans L 2 ne converge pas uniformément. On

montre néanmoins (Carleson, 1966) qu’elle converge presque partout.

Exercice 268 [espace de Sobolev  H 1]:  On note H 1 l’espace de distributions dont la dé-

rivée estL 2. Si f  ∈ H 1, c’est la primitive d’une fonction localement intégrable, donc c’est

une fonction continue : H 1 ⊂ C 0. Elle est caractérisée sur ses coefficients de Fourier par

la condition

n n 2|c n |2 < ∞.

Par l’inégalité de Cauchy appliqué à   1|n |  et |nc n | pour n = 0, il en résulte que

n |c n |

est finie, et donc la série de Fourier d’une fonction H 1 converge absolument et unifor-

mément sur R. Ce résultat généralise le cas déjà vu(241) d’une fonction C 2.

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6.7.  COMPLÉMENT: CONVOLUTION DISCRÈTE    89

Exercice 269 [inégalité de Poincaré-Wirtinger]:   L’inégalité

n =0 |c n |2

n =0 |nc n |2 se

traduit, par la formule de Bessel-Parseval, sous la forme  f 2  

  T 2π f  2   (inégalité de 

Poincaré-Wirtinger ) valable pour toute fonction f  ∈ H 1 de moyenne nulle.

Exercice 270:  Montrer que

n ∈Zδ(k )(t −nT ) =   (2i π)k 

T k +1

n n k e 2i πnt /T .

Exercice 271 [périodisée d’une distribution à support fini]:   Si s (t ) est une distribu-

tion à support fini, on a, dans tout intervalle fini  I   : s (t ) = n ∈Z s (t − nT ), qui est une

somme finie pour tout t  ∈ I . (Par le principe de localisation(53) cela détermine complè-

tement s (t ).) Il suffit en effet(74) de montrer le résultat pour δ(t ) (qui est clair) et pour

une fonction   f  (t ) intégrable à support fini. Or   f  (t ) ∗n ∈Zδ(t − nT ) est la dérivée de

 f  (t )∗n ∈ZH (t −nT )) =n t −nT −∞   f  (u ) du  qui est la somme finie

n  f  (t −nT ) dans tout

intervalle fini.

Exercice 272:   La formule sommatoire de Poisson s’étend à des fonctions f   intégrablesde TF intégrable. En effet, dans la formule de Poisson de la proposition 247, les deux 

séries convergent absolument (cf. exemple 241).

Exercice 273:   L’espace des distributions périodiques est une algèbre pour le produit de

convolution. Ce produit n’est pas intègre :  r  s  = 0 n’implique pas r  = 0 ou s  = 0. Par

exemple, il y a une infinité (non dénombrable !) de solutions de l’équation s  s = δ.

Exercice 274:   Si  f   est C ∞  périodique, alors d’après l’exercice 266, le produit   f   s  est

aussi C ∞ pour toute distribution périodique s .

Exercice 275:  La preuve de la proposition 255 montre que la transformée de Fourier à

temps discret(240) du produit de convolution discrète (r ∗ s )n  (une des deux suites étant

à décroissance rapide) est le produit multiplicatif  R (ν)S (ν) des deux transformées deFourier à temps discret.

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Bibliographie

[1] Laurent Schwartz, Théorie des Distributions , Institut de Mathématiques de

l’Université de Strasbourg, Collection Activités Scientifiques et Industrielles,

1950 et 1951, Hermann, Paris, 1966.[2] Laurent Schwartz, Méthodes Mathématiques pour les Sciences Physiques ,

Collection Enseignement des Sciences, Hermann, Paris, 1961, dernière édi-

tion 1998.

[3] Charles Goulaouic et Yves Meyer, Analyse Fonctionnelle et Calcul Différen-tiel , Ecole Polytechnique, Département de Mathématiques, 1984.

[4] Jaime Campos Ferreira,   Introduction to the Theory of Distributions , [Ap-

proche de Sebastião e Silva], Pitman Monographs and Surveys in Pure and

 Applied Mathematics 87, Addison Wesley Longman, 1997.

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