Sources sources définitives mémoire · Cornificio in senatu factam (is fuit princeps, ne tu forte...

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1 Appendice APPENDICE........................................................................................................................................... 1 A) LES SOURCES LITTERAIRES ANCIENNES ............................................................................. 2 SUR BONA DEA : ................................................................................................................................... 2 SUR CERES : ........................................................................................................................................ 31 SUR BACCHUS : ................................................................................................................................... 65 B) LES SOURCES EPIGRAPHIQUES ............................................................................................. 93 L'INSCRIPTION DE TIRIOLO.................................................................................................................. 93 C) ILLUSTRATIONS .......................................................................................................................... 99 D) BIBLIOGRAPHIE ........................................................................................................................ 102

Transcript of Sources sources définitives mémoire · Cornificio in senatu factam (is fuit princeps, ne tu forte...

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    Appendice

    APPENDICE...........................................................................................................................................1

    A) LES SOURCES LITTERAIRES ANCIENNES.............................................................................2 SUR BONA DEA : ...................................................................................................................................2 SUR CERES : ........................................................................................................................................31 SUR BACCHUS : ...................................................................................................................................65

    B) LES SOURCES EPIGRAPHIQUES .............................................................................................93 L'INSCRIPTION DE TIRIOLO..................................................................................................................93

    C) ILLUSTRATIONS ..........................................................................................................................99

    D) BIBLIOGRAPHIE........................................................................................................................102

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    A) Les sources littraires anciennes

    Sur Bona Dea : REPUBLIQUE CICERON : Ad Atticum Traduction personnelle Ad Atticum, I, 12, 3 P. Clodium, Appi f., credo te audisse cum veste muliebri deprehensum domi C. Caesaris, cum pro populo fieret, eumque per manus servulae servatum et eductum; rem esse insigni infamia. Quod te moleste ferre certo scio.

    Je crois que tu as entendu que P.Clodius, fils d'Appius, a t pris vetu comme une femme dans la maison de Csar, lorsque l'on faisait le sacrifice pour le peuple, et qu'il se prserva et se sauva grce une jeune servante; et que cette chose fit un scandale extraordinaire. Je sais de manire certaine que tu en es contrari.

    Ad Atticum , I, 13, 3 Scr. Romae vi Kal. Febr. an. 61 Credo enim te audisse, cum apud Caesarem pro populo fieret, venisse eo muliebri vestitu virum, idque sacrificium cum virgines instaurrassent, mentionem a Q. Cornificio in senatu factam (is fuit princeps, ne tu forte aliquem nostrum putes); postea rem ex senatus consulto ad virgines atque ad pontifices relatam idque ab iis

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    nefas esse decretum; diende ex senatus consulto consules rogationem promulgasse; uxori Caesarem nuntium re misisse. In hac causa Piso amicitia P. Clodi ductus operam dat, ut ea rogatio, quam ipse fert et fert ex senatus consulto et de religione, antiquetur. Messalla vehementer adhuc agit severe. Boni viri precibus Clodi removentur a causa, operae comparantur, nosmet ipsi, qui Lycurgei a principio fuissemus, cotidie demitigamur, instat et urget Cato. Quid multa ? Vereor, ne haec neglecta a bonis, defensa ab improbis magnorum rei publicae malorum causa sit. Rome, 25 janvier 61

    Je crois que tu as entendu que, quand le sacrifice pour le peuple tait offert chez Csar, un homme vint l bas dans des habits de femmes; qu'aprs que les vestales aient clbr de nouveau la crmonie, la chose fut mentionne au Snat par Q. Cornificius ( il fuit le premier , au point que tu puisses le penser par hasard l'un des ntres),; aprs quoi par un dcrt du Snat, la chose a t rapporte aux vierges vestales et au collge des pontifes, qui dcidrent que cela tait un sacrilge. Alors, par un dcrt du Snat, les consuls promulgurent une proposition de loi; Csar divora d'avec sa femme. Dans ces circonstances, Pison par amiti pour P. Clodius, conduisit son action pour que cette proposition de loi soit rejete, cette loi que lui mme porte et porte d'une consultation du Snat et au sujet de la religion. Messala l'a attaqu jusque l avec vhmence et duret. Les citoyens respectables sont carts de cette cause au profit de Clodius, et des corps d'hommes arms sont organiss, nous mme, qui tions un temps des Lycurgues, nous nous abaissons quotidiennement, Caton persiste et pousse l'action. A quoi bon? je crains que cela par par la ngligence des gens respectables, par la dfense insuffisante de la masse, cette situation puisse causer du mal la Rpublique.

    Ad Atticum , I, 14,1-2 Traduction : L.-A. Constans, Belles Lettres, 1950 Prima contio Pompei qualis fuisset, scripsi ad te antea, non iucunda miseris, inanis improbis, beatis non grata, bonis non gravis; itaque frigebat. Tum Pisonis consulis impulsu levissimus tribunus pl. Fufius in contionem producit Pompeium. Res agebatur in circo Flaminio, et erat in eo ipso loco illo die nundinarum panegyris. Quaesivit ex eo, placeretne ei iudices a praetore legi, quo consilio idem praetor uteretur. Id autem erat de Clodiana religione ab senatu constitutum. Tum Pompeius mal aristokratikos locutus est senatusque auctoritatem sibi omnibus in rebus maximam videri semperque visam esse respondit et id multis verbis. Postea Messalla consul in senatu de Pompeio quaesivit, quid de religione et de promulgata rogatione sentiret. Locutus ita est in senatu, ut omnia illius ordinis consulta genikos laudaret, mihique, ut adsedit, dixit se putare satis ab se etiam "de istis rebus" esse responsum. La premire harangue de Pompe au peuple, je t'ai dj mand ce qu'elle fut : les pauvres ne l'ont pas aime, les mauvais citoyens l'ont trouve vide, elle n'a pas plu aux riches, elle a paru sans porte aux bons citoyens : aussi l'accueil tait-il frais. Puis, pouss par le consul Pison, Fufius, un tribun de la plbe qui n'a pas le moindre srieux, produit Pompe devant le peuple. Cela se passait au Circus Flaminius, et prcisment il s'y tenait, ce jour-l, les grandes assises du march de la semaine. Il lui demanda s'il approuvait que les juges qui devaient composer le jury du prteur fussent choisis par ledit prteur. C'est la rgle que le Snat avait tablie au sujet du sacrilge de Clodius. Alors Pompe parla en aristocrate fieff : il rpondit -et avec de longs dveloppements- qu'en toute matire, l'autorit du snat lui paraissait, et lui avait toujours paru du plus haut prix. Aprs cela, ce fut au tour du consul Messala qui demanda Pompe, dans le Snat, ce qu'il pensait du sacrilge et de la proposition qui avait t affiche. Pompe, dans sa rponse, joua en termes gnraux toutes les dcisions manant du

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    snat, et quand il se fut assis sa place prs de moi, il me dit qu'il estimait en avoir assez dit sur "ces histoires". Ad Atticum , I, 16, 10 Traduction personnelle Surgit pulchellus puer, obicit mihi me ad Baias fuisse. Falsum, sed tamen quid hoc? "Simile est," inquam, "quasi in operto dicas fuisse."

    Le joli enfant se lve et m'accuse d'avoir t Baes. Faux, mais cependant je rponds : "Comment? Cela est similaire une chose, comme si tu disais que j'tais aux mystres.

    Ad Atticum , II, 1, 5 'ex Sicilia septimo die Romam; ante tribus horis Roma Interamnam. Noctu introisti; idem ante. non est itum obviam; ne tum quidem quom iri maxime debuit.'

    De Sicile Rome en sept jours; avant de Rome Interamna en trois heures. J'arrivai de nuit; comme avant. Personne ne te rencontra; ni cette autre fois o il aurait fallu grandement que ce soit le cas.

    Ad Atticum , II, 4, 2 Clodius ergo, ut ais, ad Tigranem! velim +Sirpiae+ condicione; sed facile patior. accommodatius enim nobis est ad liberam legationem tempus illud, cum et Quintus noster iam, ut speramus, in otio consederit et iste sacerdos bonae deae cuius modi futurus sit scierimus

    Donc, comme tu le dis, Clodius va Tigrane. Je devrais tre heureux d'y aller moi-mme dans les mmes conditions, mais je le souffre aisment.Ce sera un temps plus accomodant pour nous de voyager avec agrment, quand notre frre Quintus, comme nous l'esprons, se sera tabli dans le loisir, et nous savons que ce prtre de Bona Dea prvoit cette manire.

    Ad Atticum, II, 7, 3 hercule verum ut loquamur, subcontumeliose tractatur noster Publius, primum qui, cum domi Caesaris quondam unus vir fuerit, nunc ne in viginti quidem esse potuerit;

    Par Hercule, en vrit que nous le disions, notre Publius est trait un peu ignominieusement, premirement parce que bien qu'il ait t le seul homme dans la maison de Csar, maintenant il n'a pas russi devenir l'un des Vingt;

    Ad Atticum, V, 21,14 Cum scies Romae intercalatum sit necne, velim ad me scribas certum quo die mysteria futura sint.

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    Ds que tu sauras si il y a ou non une intercalation Rome, s'il te plait cris moi en quel jour exact sont les mystres.

    Ad Atticum , VI, 1,26 faciesque me in quem diem Romana incidant mysteria certiorem et quo modo hiemaris. et dis moi en quel jour les mystres Romains tombent et comment tu as pass l'hiver. Ad Atticum, XV, 25 et tu etiam scire quo die Olympia cum mysteria scilicet. Vt tu scires , casus consilium nostri itineris iudicabit. dubitemus igitur. est enim hiberna navigatio odiosa, eoque ex te quaesieram mysteriorum diem.

    j'aimerais aussi savoir de toi quels jours sont les Jeux Olympiques et les mystres. Comme tu le sais, la dcision du voyage reposera sur le hasard. Nous nous demandons donc. Car un voyage en hiver est dsagrable, et c'est pour cela que je t'ai demand la date des mystres.

    De Domo Sua Traduction : P. Wuilleumier, Belles Lettres, 1952 De Domo Sua , XIII, 35 perturbatis sacris aprs avoir troubl les cultes De Domo Sua , XXIX, 77 Quamquam ubi tu te popularem, nisi cum pro populo fecisti, potes dicere?

    D'ailleurs, quand peux tu dire que tu t'es souci du peuple, sauf en sacrifiant pour lui? De Domo Sua , XXXIX, 104 - XL 105 Publiusne Clodius, qui ex pontificis maximi domo religionem eripuit, is in meam intulit? Huncin uos, qui estis antistites caerimoniarum et sacrorum, auctorem habetis et magistrum publicae religionis? O di immortales! - uos enim haec audire cupio - P- Clodius uestra sacra curat, uestrum numen horret, res omnis humanas religione uestra contineri putat? Hic non inludit auctoritati horum omnium qui adsunt summorum uirorum, non uestra, pontifices, grauitate abutitur? Ex isto ore religionis uerbum excidere aut elabi potest? quam tu eodem ore, accusando senatum quod seuere de religione decerneret, impurissime taeterrimeque uiolasti.

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    [40] XL. (105) Adpicite, adspicite, pontifices, hominem religiosum et, si uobis uidetur, quod est bonorum pontificum, monete eum modum quendam esse religionis: nimium esse superstitiosum non oportere. Quid tibi necesse fuit anili superstitione, homo fanatice, sacrificium quod alienae domi fieret inuisere? quae autem te tanta mentis imbecillitas tenuit ut non putares deos satis posse placari nisi etiam muliebribus religionibus te implicuisses? Quem umquam audisti maiorum tuorum, qui et sacra priuata coluerunt et publicis sacerdotiis praefuerunt, cum sacrificium Bonae Deae fieret interfuisse? neminem, ne illum quidem qui caecus est factus. Ex quo intellegitur multa in uita falso homines opinari, cum ille, qui nihil uiderat sciens quod nefas esset, lumina amisit, istius, qui non solum aspectu sed etiam incesto flagitio et stupro caerimonias polluit, poena omnis oculorum ad caecitatem mentis est conuersa. Ce mme Plublius Clodius qui a profan la maison du grand pontife a-t-il sanctifi la mienne? est-ce lui que vous prenez, vous qui prsidez aux crmonies et aiux sacrifices, comme garant et comme matre de la religion publique? O dieux immortems -car je dsire que vous m'entendiez- P. Clodius veille votre culte, tremble devant votre puissance et croit toutes les affaires humaines soumises vos lois! Ne se joue-t-il pas de l'autorit de tous les hommes minents qui sont prsents ici? n'abus-t-il pas, pontifes, de votre dignit? Peut-il sortir ou glisser de sa bouche une parole touchant la religion, qu'il a de cette mme bouche honteusement et affreusement viole, en reprochant au snat la rigueur de ses dcisions en matire religieuse? Regardez, pontifes, cet homme religieux, et si vous le jugez bon, en pontifes honntes, avertissez le que la religion a une juste mesure et qu'un excs de superstition ne convient pas. Quel besoin avais tu, fanatique, d'ailler avec une superstition de vieille bigote assister un sacrifice dans une maison trangre? comment as tu t assez simple d'esprit pour croire que les dieux ne pourraient tre suffisamment apaiss sans aller jusqu' t'immiscer dans des dvotions de femme? As tu jamais entendu dire qu'un de tes anctres, qui ont pratiqu des cultes privs et exerc des sacredoces publics, ait assist aux mystres de la Bonne Desse? Aucun, pas mme celui qui devint aveugle. D'o l'on peut conclure qu'il y a dans la vie beaucoup de croyances errones, si celui-l, sans avoir rien vu volontairement qui ft dfendu, perdit les yeux, tandis que celui-ci, aprs avoir profan des crmonies non seulement par ses regards, maus encore par un adultre infme et abominable, n'a subi comme chtiment pour ses yeux qu'un aveuglement d'esprit.

    De Domo Sua , XLII, 110 110. At quae dea est? Bonam esse oportet, quoniam quidem est abs te dedicata.

    Mais de quelle desse s'agit-il? C e doit tre une bonne desse puisque c'est toi qui a fait la ddicace.

    De Domo Sua , LIII, 136 137 Quid? cum Licinia, uirgo Vestalis summo loco nata, sanctissimo sacerdotio praedita, T- Flaminio Q- Metello consulibus aram et aediculam et puluinar sub Saxo dedicasset, nonne eam rem ex auctoritate senatus ad hoc conlegium Sex- Iulius praetor rettulit? cum P- Scaeuola pontifex maximus pro conlegio respondit, Quod in loco publico Licinia, Gai filia, iniussu populi dedicasset, sacrum non uiderier. Quam quidem rem quanta {tractauerit} seueritate quantaque diligentia senatus, ex ipso senatus consulto facile cognoscetis.

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    (137) Videtisne praetori urbano negotium datum ut curaret ne id sacrum esset, et ut, si quae essent incisae aut inscriptae litterae, tollerentur? O tempora, o mores! Tum censorem, hominem sanctissimum, simulacrum Concordiae dedicare pontifices in templo inaugurato prohibuerunt, post autem senatus in loco augusto consecratam iam aram tollendam ex auctoritate pontificum censuit neque ullum est passus ex ea dedicatione litterarum exstare monumentum: Et quand la Vestale Licinia, de la plus haute naissance, revtu du plus pur sacerdoce, eut consacr, sous le consulat de T. Flamininus et de Q. Metellus, un autel, une chapelle et un lit sacr au pied du Rocher, le prteur Sex Iulius n'a-t-il pas, sur l'avis du Snat, consult ce collge sur la question? et alors le grand pontife P. scaevola rpondit pour le collge " que la ddicace faite en un lieu public par Licinia, fille de Caius, sans l'ordre du peupke, ne paraissait pas avoir un caractre sacr." Le srieux et le soin avec lesquels le snat a trait cette affaire vous apparatront aisment la lecture du snatus-consulte lui-mme (Lecture du snatus-consulte).

    Voyez vous commele prteur urbain reut mission de supprimer le caractre sacr de la ddicace et d'effacer toutes les lettres qui avaient pu y tre graves ou inscrites? O temps! moeurs! Alors un censeurs irrprochable fut empch par les pontifes de ddier une image de la Concorde dans une enceinte consacre par les augures, puis, sur l'avis des pontifes, le snat fit enlever un autel dj consacr dans un lieu saint, et ne souffrit pas qu'il restt la moindre lettre en souvenir de cette ddicace ;

    De Haruspicum Responsis Traduction : P. Wuilleumier et A.-M. Tupet, Belles Lettres, 1966 De Haruspicum Responsis , III,4 In Clodium uero non est hodie meum maius odium quam illo die fuit cum illum ambustum religiosissimis ignibus cognoui muliebri ornatu ex incesto stupro atque ex domo pontificis maximi emissum Mais l'gart de Clodius, ma heine n'est pas plus forte aujourd'hui qu'elle ne le fut le jour o j'ai appris que, tout brl par les feux le splus sacrs, il avait t sous des vtements de femme, au sortir d'un ignoble scandale, chass de la maison du grand pontife. De Haruspicum Responsis , V, 8 - 9 [5] V. De religionibus sacris et caerimoniis est contionatus, patres conscripti, Clodius: Publius, inquam, Clodius sacra et religiones neglegi uiolari pollui questus est! Non mirum si hoc uobis ridiculum uidetur: etiam sua contio risit hominem, quo modo ipse gloriari solet, ducentis confixum senati consultis, quae sunt omnia contra illum pro religionibus facta, hominemque eum qui puluinaribus Bonae deae stuprum intulerit, eaque sacra quae uiri oculis ne imprudentis quidem aspici fas est non solum aspectu uirili sed flagitio stuproque uiolarit, in contione de religionibus neglectis conqueri. (9) Itaque nunc proxima contio eius exspectatur de pudicitia. Quid enim interest utrum ab altaribus religiosissimis fugatus de sacris et religionibus conqueratur, an ex sororum cubiculo egressus pudorem pudicitiamque defendat?

    C'est sur les cultes, les rites et les crmonies que porte, pres conscrits, le discours de Clodius! P. Clodius, dis-je, s'est plaint que les rites et les cultes soient ngligs, viols, profans: Rien d'tonnant que cela vous paraisse risible : sa propre assemble a ri de voir un

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    individu, frapp, comme il a coutume de s'en vanter lui-mme, par des centaines de snatus-consultes, qui ont tous t pris contre lui pour la dfense des cultes, un individu qui a os porter la luxure sur les lits de la Bonne Desse et troubler des crmonies qu'un homme n'a pas le droit de regarder, ft-ce par inadvertance, en les violant non seulement de ses regards d'homme mais par la dbauche et la luxure, se plaindre ensuite dans une assemble du peuple que les cultes aient t viols. On attend donc de lui maintenant un prochain discours sur la chastet : quelle diffrence y a-t-il, en effet, entre un homme qui, chass des autels les plus sacrs, gmit sur le sort des rites et des cultes, et celui qui, sortant de la chambre de ses soeurs, dfend la pudeur et la chastet?

    De Haruspicum Responsis , VI, 12 (12) Quae tanta religio est qua non in nostris dubitationibus atque in maximis superstitionibus unius P- Seruili aut M- Luculli responso ac uerbo liberemur? De sacris publicis, de ludis maximis, de deorum penatium Vestaeque matris caerimoniis, de illo ipso sacrificio quod fit pro salute populi Romani, quod post Romam conditam huius unius casti tutoris religionum scelere uiolatum est, quod tres pontifices statuissent, id semper populo Romano, semper senatui, semper ipsis dis immortalibus satis sanctum, satis augustum, satis religiosum esse uisum est. Existe-t-il un scrupule religieux dont nous ne puissions tre librs dans nos doutes et nos inquitudes les plus vives par la rponse et la parole du seul P. Servilius ou du seul M. Lucullus? Quand il s'agit des crmonies publiques, des grands jeux, du culte rendu aux dieux pnates et l'auguste Vesta, de ce sacrifice mme offert pour le salut du peuple romain, qui, depuis la fondation de Rome, n'a t profan que par le crime de ce chaste protecteur de la religion, la dcision de trois pontifes a toujours paru au peuple romain ainsi qu'au Snat et mme aux dieux immortels assez sacre, assez auguste, assez contraignante.

    De Haruspicum Responsis , XVII, 37 - XVIII, 38 (37) Et uideo in haruspicum responsum haec esse subiuncta: Sacrificia uetusta occultaque minus diligenter facta pollutaque. Haruspices haec loquuntur an patrii penatesque di? Multi enim sunt, credo, in quos huius malefici suspicio cadat. Quis praeter hunc unum? Obscure dicitur quae sacra polluta sint? Quid planius, quid religiosius, quid grauius dici potest? uetusta occultaque. Nego ulla uerba Lentulum, grauem oratorem ac disertum, saepius, cum te accusaret, usurpasse quam haec quae nunc ex Etruscis libris in te conuersa atque interpretata dicuntur. Etenim quod sacrificium tam uetustum est quam hoc quod a regibus aequale huius urbis accepimus? quod autem tam occultum quam id quod non solum curiosos oculos excludit sed etiam errantis, quo non modo improbitas sed ne imprudentia quidem possit intrare? quod quidem sacrificium nemo ante P- Clodium omni memoria uiolauit, nemo umquam adiit, nemo neglexit, nemo uir aspicere non horruit, quod fit per uirgines Vestalis, fit pro populo Romano, fit in ea domo quae est in imperio, fit incredibili caerimonia, fit ei deae cuius ne nomen quidem uiros scire fas est, quam iste idcirco Bonam dicit quod in tanto sibi scelere ignouerit. [18] XVIII. Non ignouit, mihi crede, non: nisi forte tibi esse ignotum putas, quod te iudices emiserunt excussum et exhaustum, suo iudicio absolutum, omnium condemnatum, aut quod oculos, ut opinio illius religionis est, non perdidisti. (38) Quis enim ante te sacra illa uir sciens uiderat, ut quisquam poenam quae sequeretur id

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    scelus scire posset? An tibi luminis obesset caecitas plus quam libidinis? Ne id quidem sentis, coniuentis illos oculos abaui tui magis optandos fuisse quam hos flagrantis sororis? Tibi uero, si diligenter attendes, intelleges hominum poenas deesse adhuc, non deorum. Homines te in re foedissima defenderunt, homines turpissimum nocentissimumque laudarunt, homines prope confitentem iudicio liberauerunt, hominibus iniuria tui stupri inlata in ipsos dolori non fuit, homines tibi arma alii in me, alii post in illum inuictum ciuem dederunt, hominum beneficia prorsus concedo tibi iam maiora non esse quaerenda: Et je vois que la rponse des haruspices porte ensuite : "Que des crmonies antiques et secrtes ont t clbres avec trop peu de soin et profanes." Sont-ce les haruspices qui parlent ainsi ou les dieux ancestraux et les dieux pnates? Car il y a beaucoup d'hommes j'imagine, sur qui puisse tomber le soupon de cette impit! qui d'autre que lui seul? Dit-on obscurment quelles crmonies ont t profanes? peut-on parler plus clairement, plus scrupuleusement, plus srieusement? "Antiques et secrtes" ; nuls mots, je l'affirme, n'ont t utiliss plus souvent par Lentulus, un orateur de poids et de talent, quand il t'accusait, que ces propres termes, qui maintenant, sont exraits de livres trusques peut tre tourns et interprts contre toi. En effet, quelle crmonie est aussi "antique" que celle-ci, qui, contemporaine de notre ville, nous a t lgue par les rois? laquelle est aussi "secrte" que celle qui exclut les regards non seulement curieux mais mme distraits, dont l'accs est ferm non seulement l'impudence mais encore l'imprudence? crmonie en vrit que nul avant P. Clodius n'a en aucun temps viole, que nul n'a jamais abirde, que nul n'a traite la lgre, qu'aucun homme n'a eu l'audace de regarder, qui est clbre par les vierges de Vesta, qui est clbre pour le peuple romain, qui est clbre dans la maison du magistrat revtu du pouvoir suprme, qui est clbre en l'honneur d'une desse dont les hommes n'ont mme pas le droit de connatre le nom, celle que cet individu appelle Bonne parce qu'elle lui aurait pardonn un tel crime. [18] XVIII. Elle n'a pas pardonn, crois-moi, oh! non. A moins que tu ne te croies pardonn parce que les juges t'ont relch, dpuill et mis sec, absous par leur jugement, mais condamn par celui de tous, ou parce que, selon la croyance inhrente ce culte, tu n'as pas perdu l vue. Or, quel homme avait vu dlibrment avant toi ces crmonies sacres, en sorte qu'on pt connatre le chtiment attach ce crime? D'ailleurs, la privation de la lumire te nuirait-elle plus que l'aveuglement de la passion? ne sens tu pas toi-mme que les yeux ferms de ton illustre anctre eussent t plus dsirables pour toi que les regards ardents de ta soeur? D'ailleurs, si tu y rflchis attentivement, tu comprendras que, si le chtiment des hommes fait encore dfaut, il n'en est pas de mme pour celui des dieux. Les hommes t'ont dfendu dans la cause la plus ignominieuse, les hommes t'ont lou, plein de honte et de culpabilit ; les hommes t'ont acquitt quand tu avouais presque, les n'ont pas ressenti l'affront que leur avait port eux-mmes ton dshonneur, les hommes t'ont donn des armes les uns contre moi, d'autres ensuite contre un citoyen invincible ; aux hommes, j'en conviens volontier, tu ne saurais demander dornavant de plus grands bienfaits.

    De Haruspicum Responsis, XXI, 44 P- Clodius a crocota, a mitra, a muliebribus soleis purpureisque fasceolis, a strophio, a psalterio, a flagitio, a stupro est factus repente popularis. Nisi eum mulieres exornatum ita deprendissent, nisi ex eo loco quo eum adire fas non fuerat ancillarum beneficio emissus esset, populari homine populus Romanus, res publica ciue tali careret. P. Clodius a quitt une robe de safran, un turban, des sandales de femmes, des bandelettes de pourpre, un soutien-gorge, une harpe, la turpitude, le scandale pour devenir soudain ami du peuple. S'il n'avait pas t surpris par des femmes dans cet appareil, si la bienveillance de servantes ne lui avait pas facilit l'vasion d'un lieu o il n'avait pas le droit d'entrer, le peuple romain serait priv d'un ami du peuple, la rpublique d'un tel citoyen.

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    De Haruspicum Responsis, XXVII, 57 Iste parentum nomen, sacra, memoriam, gentem Fonteiano nomine obruit; deorum ignis, solia, mensas, abditos ac penetralis focos, occulta et maribus non inuisa solum, sed etiam inaudita sacra inexpiabili scelere peruertit, Cet individu (Clodius) a touff sous le nom de Fontius, le nom, les cultes, le souvenir et la famille de ses parents ; il a boulevers par un crime inexpiable les feux, les siges et les tables des dieux, les foyers cachs et intimes, les crmonies secrtes et inaccessibles aux yeux et aux oreilles des hommes. In L. Calpurnium Pisonem Oratio Traduction franaise: P. Grimal, Belles Lettres, 1966 In L. Calpurnium Pisonem Oratio, XXXVI, 89 Quid quod tu totiens diffidens ac desperans rebus tuis in sordibus, lamentis luctuque iacuisti, quod populari illi sacerdoti sescentos ad bestias amicos sociosque misisti, Et que de toi-mme, inquiet, dsesprant de ton sort, tu sois rest si souvent dans la crasse, les lamentations et le deuil, que tu aies envoy au populaire prtre que tu sais quantit d'amis et d'allis du peuple romain pour tre exposs aux btes In L. Calpurnium Pisonem Oratio, XXXIX, 95 At contra bis Catilina absolutus est, emissus etiam ille auctor tuus prouinciae, cum stuprum Bonae deae puluinaribus intulisset. Quis fuit in tanta ciuitate qui illum incesto liberatum, non eos qui ita iudicarant pari scelere obstrictos arbitraretur? Au contraire, Catilina fut deux fois acquitt, on a absous, mme, celui qui tu dois ta province, bien qu'il eut souill de sa dbauche les lits sacrs de la Bonne Desse ; qui s'est-il trouv, dans la foule immense de nos citoyens, pour considrer qu'il tait purifi de son sacrilge et non que ceux qui avaient port un tel jugement s'taient rendus coupables d'un crime gal? Epistulae ad Familiares ad Lentulum Traduction : L.-A. Constans, Belles Lettres, 1960 Epistulae ad Familiares ad Lentulum, I, 9,15 [15] sed attende, quaeso, quae sint consecuta. primum illa furia muliebrium religionum, qui non pluris fecerat bonam deam quam tris sorores, impunitatem est illorum sententiis adsecutus, qui, cum tr. pl. poenas a seditioso civi per bonos viros iudicio persequi vellet, exemplum praeclarissimum in posterum vindicandae seditionis de re publica sustulerunt, idemque postea non meum monumentum (non enim illae manubiae meae, sed operis locatio mea fuerat), monumentum vero senatus

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    hostili nomine et cruentis inustum litteris esse passi sunt. Mais prte attention, je te prie, ce qui arriva par la suite. D'abord ce fou furieux, qui avait profan de sa prsence les mystres rservs aux femmes et n'avait pas plus respect la Bonne Desse que ses trois soeurs, obtint l'impunit grce aux votes de ces snateurs qui, tandis qu'un tribun de la plbe faisait appel aux gens de bien pour lui permettre de faire punir en justice un sditieux, privrent la rpublique d'une vengeance qui eut t pour l'avenir, contre les fauteurs de trouble, le plus clatant des exemples ; aprs cela, grce la tolrance des mmes personnages, un monument qui n'tait pas le mien (car il n'avait pas t lev avec l'argent d'un butin fait par moi, j'avais seulement pass les marchs pour sa construction), mais qui tait celui du snat, subit l'outrage d'une inscription o se lisait, en lettres dgoulinantes de sang, le nom d'un ennemi public. Pro Milone Traduction: A. Boulanger, Belles Lettres, 1961 Pro Milone, XXVII, 72-73 sed eum -- auderet enim dicere, cum patriam periculo suo liberasset -- cuius nefandum adulterium in puluinaribus sanctissimis nobilissimae feminae comprehenderunt; 73. eum cuius supplicio senatus sollemnis religiones expiandas saepe censuit J'ai tu un homme que des femmes de haute noblesse ont surpris en flagrant dlit d'adultre sacrilge sur les lits de parade du culte le plus saint ; un homme dont le chtiment aurait d, de l'avis rpt du Snat, expier la profanation des crmonies solennelles Pro Milone, XXXI, 86 86. Nisi forte hoc etiam casu factum esse dicemus, ut ante ipsum sacrarium Bonae deae, quod est in fundo T- Sergi Galli, in primis honesti et ornati adulescentis, ante ipsam, inquam, Bonam deam, eum proelium commisisset, primum illud uolnus acciperet, quo taeterrimam mortem obiret; ut non absolutus iudicio illo nefario uideretur, sed ad hanc insignem poenam reseruatus. A moins d'attribuer encore au hasard ce faut que c'est devant le sanctuaire mme de la Bonne Desse situ dans le domaine de T. Sertius Gallus, jeune homme particulirement honorable et distingu, sous les yeux mmes, dis-je, de la Bonne Desse que s'est engag le combat etr qu'il a reu la premire blessure dont il devait prir d'une mort ignoble. De Legibus Libri Charles APPUHN, Cicron, De la Rpublique - Des lois. Paris, Classiques Garnier, 1954. De Legibus Libri , II, 9, 21 Nocturna mulierum sacrificia ne sunto, praeter olla quae pro populo rite fiant; neue quem initianto, nisi, ut assolet Cereri, graeco sacro.

    Il n'y aura point de crmonies sacres de nuit pour les femmes, sauf celles qui se font

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    solennellement pour le peuple. Paradoxa stoicorum ad M. Brutum, IV, 2, 32 Traduction : J. Molager, Belles Lettres, 1971 [32] Sed quid ego communes leges profero, quibus omnibus es exul? Familiarissimus tuus de te privilegium tulit, ut, si in opertum Bonae Deae accessisses, exulares. At te id fecisse etiam gloriari soles. Quo modo igitur tot legibus eiectus in exilium nomen exulis non perhorrescis? 'Romae sum', inquit. Et quidem in operto fuisti. Non igitur, ubi quisque erit, eius loci ius tenebit, si ibi eum legibus esse non oportebit. Mais pourquoi ne mettre en avant que des lois communes qui toutes font de toi un exil? Ton meilleur ami a port ton sujet une loi particulire stipulant que, si tu t'tais rendu aux mystres de la Bonne Desse, tu serais exil ; or, de l'avoir fait, tu te vantes mme d'ordinaire. Comment donc, banni par tant de lois, le seul nom de banni ne te fait-il pas frissonner par tout le corps? "Je suis Rome" est ta rponse. Il y a mieux, tu tais aux Mystres! L donc o quelqu'un sera, il ne bnficiera pas du droit de ce lieu, si les lois lui interdisent d'y tre! EMPIRE ET PAGANISME DU BAS-D'EMPIRE TIBULLE Traduction: M. RAT, Tibulle. Oeuvres, Paris, Garnier, 1931. Elegia, I, 6, 21-24 Exibit quam saepe, time, seu uisere dicet Sacra Bonae maribus non adeunda Deae. At mihi si credas, illam sequar unus ad aras; Tunc mihi non oculis sit timuisse meis.

    Crains ses nombreuses sorties, assurt-elle se rendre aux mystres de la Bonne-Desse, dont l'accs est interdit aux hommes. Si tu m'en crois, je la suivrai seul au pied des autels: alors je n'aurai point redouter que mes yeux me trompent.

    Elegia, III, 5 ,7-8 Non ego temptauit nulli temeranda uirorum audax laudandae sacra docere deae,

    Je n'ai point eu l'audace d'essayer de rvler les mystres d'une desse vnrable, ces mystres que ne doivent tre profans par aucun homme.

    PROPERCE

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    IV, 9, 21-70 Traduction: D. Paganelli, Belles Lettres, 1970 dixerat, et sicco torquet sitis ora palato, terraque non ullas feta ministrat aquas. sed procul inclusas audit ridere puellas, lucus ubi umbroso fecerat orbe nemus, 25 femineae loca clausa deae fontesque piandos impune et nullis sacra retecta uiris. deuia puniceae uelabant limina uittae, putris odorato luxerat igne casa, populus et longis ornabat frondibus aedem, 30 multaque cantantis umbra tegebat auis. huc ruit in siccam congesta puluere barbam, et iacit ante fores uerba minora deo: "uos precor, o luci sacro quae luditis antro, pandite defessis hospita fana uiris. 35 fontis egens erro circaque sonantia lymphis; et caua succepto flumine palma sat est. audistisne aliquem, tergo qui sustulit orbem? ille ego sum: Alciden terra recepta uocat. quis facta Herculeae non audit fortia clauae 40 et numquam ad uastas irrita tela feras, atque uni Stygias homini luxisse tenebras? {accipit: haec fesso uix mihi terra patet.} quodsi Iunoni sacrum faceretis amarae, non clausisset aquas ipsa nouerca suas. 45 sin aliquem uultusque meus saetaeque leonis terrent et Libyco sole perusta coma, idem ego Sidonia feci seruilia palla officia et Lydo pensa diurna colo, mollis et hirsutum cepit mihi fascia pectus, 50 et manibus duris apta puella fui." talibus Alcides; at talibus alma sacerdos puniceo canas stamine uincta comas: "parce oculis, hospes, lucoque abscede uerendo; cede agedum et tuta limina linque fuga. 55 interdicta uiris metuenda lege piatur quae se summota uindicat ara casa. magno Tiresias aspexit Pallada uates, fortia dum posita Gorgone membra lauat. di tibi dent alios fontis: haec lympha puellis 60 auia secreti limitis unda fluit." sic anus: ille umeris postis concussit opacos,

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    nec tulit iratam ianua clausa sitim. at postquam exhausto iam flumine uicerat aestum, ponit uix siccis tristia iura labris: 65 "angulus hic mundi nunc me mea fata trahentem accipit: haec fesso uix mihi terra patet. Maxima quae gregibus deuota est Ara repertis, ara per has" inquit "maxima facta manus, haec nullis umquam pateat ueneranda puellis, 70 Herculis aeternum nec sit inulta sitis." Il dit et la soif le torture et son palais est sec et la terre fconde est sans eau. mais, au loin, dans une enceinte, il entend rire des jeunes filles : c'est une clairire couronne de bois ombreux et consacre la Bonne Desse, avec une fontaine sacre et des mystres que nul ne dcouvre impunment. Dans un coin, des bandelettes pourpres voilaient un seuil, le seuil d'une cabane vermoulue o venait de briller la flamme et de brler l'encens ; un peuplier ornait le temple de ses hautes frondaisons et leur ombre touffue abritait des chants d'oiseaux. C'est de ce ct qu'il se prcipite, une paisse poussire sur sa barbe sche, ; il se tient la porte et ce n'est plus un dieu qui parle : " O vous, dit-il, qui jouez dans cette grotte sacre et ce bois, coutez ma prire ; ouvrez votre sanctuaire l'hospitalit ; ouvrez le aux pauvres hommes fatigus. Je cherche une source d'eau vive et je l'entends sonner clair par ici : remplir le creux de ma main, je n'en demande pas davantage. Avez vous entendu parler de quelqu'un qui porta le monde sur son dos? C'est moi : la terre que j'ai reprise aux monstres me nomme Alcide,. Qui n'a entendu parler d'Hercule et de ses exploits de sa massue, des flches toujours sres qu'il dcochait aux grands fauves, du seul homme pour qui ont lui les tnbres du Styx?... L'acaritre Junon, si c'tait elle que vous sacrifiiez, toute martre qu'elle est, ne m'aurait pas interdit ses fontaines. Si mon aspect et ma peau de lion jettent l'pouvante, et si mes cheveux ont t brls par le soleil de Libye, c'est pourtant moi, qui jadis, occup aux besognes serviles, travaillais un manteau sidonien ; c'est moi qui filais tout le jour la quenouille lydienne ; une molle ceinture enveloppait ma poitrine velue et mes rudes mains taient faites aux travaux des jeunes filles. Voil ce que dit Alcide ; mais voici ce que lui rpond une vnrable prtresse dont une bandelette de pourpre attache les cheveux blancs : "Songe tes yeux, tranger ; loigne tes pas de ce bois redoutable ; allons, va-t-en, quitte ce seuil et cherche ton salut dans la fuite, l'abri dans cette cabane carte, il y a ici un autel. Il en cota cher au devin Tirsias pour avoir vu Pallas dpuille de la Gorgone, et baignant ses membres robustes. Puissent les dieux t'indiquer d'autres sources : l'eau qui coule dans ce coin solitaire est rserve aux femmes." Ainsi parla la vieille femme ; lui, d'un coup d'paule, branle jusqu'aux montants ombreux de la porte et la porte ne peut tenir devant son courroux et sa soif. Dans l'onde qu'il puise, il teint son ardeur ; puis ses lvres peine sches laissent tomber le sinistre arrt : "Tranant partout mon destin, j'arrive en ce coin du monde et c'est peine si cette terre s'ouvre ma fatigue. Le Grand Autel que j'ai fait vu d'lever , pour avoir retrouv mes troupeaux, ce grand autel, dit-il, que mes mains auront bti, je veux que jamais, sous peine de sacrilge, il ne s'ouvre nulle femme : ce sera la vengeance d'Hercule, que l'on a chass quand il mourrait de soif."

    OVIDE Traduction :M. HEGUIN de GUERLE - M. F. LEMAISTRE, Classiques Garnier, 1927. Ars Amatoria, III, 243-244 Quae male crinita est, custodem in limine ponat, Orneturue Bonae semper in aede deae.

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    Toute femme qui a peu de cheveux doit mettre une sentinelle sa porte ou se faire toujours coiffer dans le temple de la Bonne Desse. Ars Amatoria, III, 633-638 Quid faciat custos, cum sint tot in urbe theatra, Cum spectet iunctos illa libenter equos, 635 Cum sedeat Phariae sistris operata iuuencae, Quoque sui comites ire uetantur, eat, Cum fuget a templis oculos Bona Diua uirorum, Praeterquam siquos illa uenire iubet? Que peut le gardien d'une femme, quand il y a dans Rome tant de thtres, quand elle assiste tantt aux courses de chars, tantt aux ftes donnes en l'honneur de la gnisse de Memphis; quand elle va dans des lieux interdits ses gardiens; quand la Bonne Desse exclut de son temple les hommes, except ceux qu'il lui plat d'y admettre. Fates, V, 147-158 Traduction : R. Schilling, Belles Lettres, 1993 [5,145] mille Lares Geniumque ducis, qui tradidit illos, Urbs habet, et uici numina terna colunt. Quo feror? Augustus mensis mihi carminis huius ius dabit: interea Diua canenda Bona est. Est moles natiua, loco res nomina fecit: [5,150] appellant Saxum; pars bona montis ea est. Huic Remus institerat frustra, quo tempore fratri prima Palatinae signa dedistis aues; templa patres illic oculos exosa uiriles leniter adcliui constituere iugo. [5,155] Dedicat haec ueteris Crassorum nominis heres, uirgineo nullum corpore passa uirum: Liuia restituit, ne non imitata maritum esset et ex omni parte secuta ~uirum~. Cependant, je dois clbrer la Bonne Desse. Il existe un massif naturel qui a reu son nom de sa structure il s'appelle Rocher (Saxum) ; il englobe une bonne partie de la colline. C'est l que s'est install sans succs Rmus, au temps o vous, oiseaux du Palatin, vous avez donn les premiers signes son frre. L, nos pres ont lev au sommet d'une pente lgre un temple interdit aux yeux des hommes. Il a t ddi par l'hritire de l'antique nom des Crassus, une vierge qui n'a pas connu l'homme. Il a t restaur par Livie, qui ne voulait pas demeurer en reste de son mari qu'elle entendait suivre en tout point. VELLEIUS PATERCULUS trad. P. Hainsselin-H. Watelet, Paris, 1932

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    II, 45, 1 Per idem tempus P. Clodius, homo nobilis, disertus, audax, quique neque dicendi neque faciendi ullum nisi quem vellet nosset modum, malorum propositorum executor acerrimus, infamis etiam sororis stupro et actus incesti reus ob initum inter religiosissima populi Romani sacra adulterium, cum graves inimicitias cum M. Cicerone exerceret (quid enim inter tam dissimiles amicum esse poterat?) et a patribus ad plebem transisset, legem in tribunatu p148tulit, qui civem Romanum indemnatum interemisset, ei aqua et igni interdiceretur: cuius verbis etsi non nominabatur Cicero, tamen solus petebatur. XLV. -- Publius Clodius, homme noble, loquent, audacieux, qui ne connaissait dans ses paroles et ses actions d'autre frein que son bon plaisir et se montrait plein d'ardeur dans l'excution de ses coupables desseins, qui, infme amant de sa soeur, tait encore accus d'inceste pour avoir commis un adultre pendant les plus vnrables crmonies de la religion romaine, poursuivait alors de la plus lourde haine Marcus Cicron. Pouvait-il en effet y avoir quelque amiti entre des hommes si diffrents ? Pass des rangs des patriciens dans ceux de la plbe et devenu tribun, Clodius fit voter une loi par laquelle tout homme qui avait fait prir un citoyen romain qui n'avait pas t condamn, se voyait interdire l'eau et le feu. Ce texte ne nommait pas Cicron, mais il tait seul vis. ASCONIUS Traduction personnelle In Pisonianam, 15 [ 89] Quod populari illi sacerdoti sescentos ad bestias socios stipendiarios que misisti. Manifestum est P. Clodium significari. que tu envoyas ce prtre populaire six cents de nos amis et de nos allis pour les exposer aux btes? Il est vident que P. Clodius est sous-entendu ici. In Milonianam, 27 a. d. XIII Kal. Febr. Acta etenim magis sequenda et ipsam orationem, quae Actis congruit, puto quam Fenestellam qui a. d. XIIII Kal. Febr. tradit Milo Lanuvium, ex quo erat municipio et ubi tum dictator, profectus est ad flaminem prodendum postera die. Occurrit ei circa horam nonam Clodius paulo ultra Bovillas, rediens ab Aricia, prope eum locum in quo Bonae Deae sacellum est; erat autem allocutus decuriones Aricinorum.

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    In Milonianam , 39 Illud vos meminisse non dubito per Q.Fufium illo quoque tempore quo de incesto P.Clodi actum est factum ne a senatu asperius decerneretur. In Milonianam , 43 Dixit, C.Causinius Schola Interamnanus, familiarissimus, et iden comes Clodi, P.Clodium illo die in Albano mansurum fuisse. Hic fuit Causinius apud quem Clodius manisse Interamnae videri volebat qua nocte deprehensus est is Caesaris domo, cum ibi in operto virgines pro populo Romano sacra facerent. SENEQUE Traduction : H. Noblot, Belles Lettres, 1962 Ad Lucilium Epistolarum Moralium , XVI, 97, 2 (2) Credat aliquis pecuniam esse uersatam in eo iudicio in quo reus erat P. Clodius ob id adulterium quod cum Caesaris uxore in operto commiserat, uiolatis religionibus eius sacrificii quod 'pro populo' fieri dicitur, sic summotis extra consaeptum omnibus uiris ut picturae quoque masculorum animalium contegantur? Atqui dati iudicibus nummi sunt et, quod hac etiamnunc pactione turpius est, stupra insuper matronarum et adulescentulorum nobilium stilari loco exacta sunt. Qui croirait que l'argent circula dans le procs o Clodius avait rpondre d'un adultre, commis dans la salle des mystres avec la femme de csar, en profanant des rites de ce sacrifice qui s'offre pour le salut du peuple en un lieu clos, d'o tout homme est limin si formellement que l'on va jusqu' voiler l les reprsentations d'animaux mles? Eh! bien, des sommes furent comptes aux juges, et, chose plus honteuse encore qu'un tel marchandage, ils exigrent comme pot de vin qu'on livrt leur luxure des patriciennes et des adolescents de bonne maison. PLINE L'ANCIEN Traduction : E. de Saint Denis, Belles Lettres, 1961 Naturalis historia, X, 61, 77 Gallinarum generositas spectatur crista erecta, interim et gemina, pinnis nigris, ore rubicundo, digitis imparibus, aliquando et super IIII digitos traverso uno. Ad rem divinam luteo rostro pedibusque purae non videntur, ad opertanae sacra nigrae. Les bonnes poules se reconnassent leur crte droite, parfois mme double, leurs ailes noires, leur bec rouge, leurs doigts ingaux, et parfois un doigt transervsal qui s'ajoute aux quatre autres. Pour les offices religieux, les poules bec et pattes jaunes ne sont pas considres comme pures

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    ; pour les mystres, on prend des noires. MARTIAL Traduction franaise : Pierre RICHARD, Martial, Les pigrammes. Tome II : Livres VIII XIV. Paris, Garnier, 1931 Epigrammaton libri, X, 61 (v.7) Mense nouo Iani ueterem, Proculeia, maritum Deseris atque iubes res sibi habere suas. Quid, rogo, quid factum est? subiti quae causa doloris? Nil mihi respondes? Dicam ego: praetor erat. Constatura fuit Megalensis purpura centum Milibus, ut nimium munera parca dares, Et populare sacrum bis milia dena tulisset.

    Au nouvel an, tu plantes l ton vieux mari, Proculia, et tu lui signifies la sparation de biens. Que s'est-il pass, je te prie? Quel motif cette brusque antipathie? Tu ne me rponds pas? Je le dirai donc : il tait prteur. Sa dignit devait te coter, aux jeux mgalsiens, mille sesterces, au risque de passer pour chiche. La fte du peuple en et cot vingt mille.

    PLUTARQUE Traduction de Vie de Cicron : R. Flacelire, Belles Lettres, 1976 - Vie de Cicron : XIX XXVIII ,,,,,., Dj le soir tait venu, et le peuple attendait, mass auprs du temple. Cicron sortit et informa de l'affaire les citoyens. Puis, escort par eux, il se rendit dans la maison d'un ami qui tait son voisin, parce que la sienne tait occupe par les femmes qui clbraient des crmonies secrtes en l'honneur de la divinit appele par les Romains la Bonne Desse, et par les Grecs Gynaecia. Chaque anne, dans la maison du consul, la femme ou la mre de celui-ci lui offre un sacrifice auquel assistent les Vestales. - Vie de Cicron, XX

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    [20],.,,.,,,.,,,?,. Pendant que Cicron tait en proie cette perplexit, un signe fut donn aux femmes qui offraient le sacrifice. Le feu de l'autel semblait dj assoupi quand s'leva de la cendre et des corces brles, l'clat d'une immense flamme. La plupart des femmes furent saisies d'effroi, mais les vierges sacres engagrent Terentia, pouse de Cicron, aller en toute hte trouver son mari pour lui dire d'accomplir ce qu'il avait rsolu pour le bien de la patrie, car la desse lui envoyait une grande lumire comme gage de salut et de gloire. Terentia (qui n'tait pas oarticulirement douce ni timide de nature, mais qui avait de l'ambition et, comme le dit Cicron lui-mme, prenait part ses soucis politiques plus qu'elle ne lui faisait part des affaires domestiques) lui rapporta les paroles des Vestales et l'excita contre les conjurs. Il fut galement press d'agir par son frre Quintus et par Publius Nigidus, un de ses compagnons dans l'tude de la philosophie, qui lui rendait de frquents et trs grands services pour ses actes politiques. - Vie de Cicron, XXVIII [28],,.,,.,,?,?.,,,.,.,,.,,.

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    Tout cela valut Cicron de nombreuses inimitis, et les partisans de Clodius se ligurent contre lui pour la raison suivante. Clodius tait un jeune noble de caractre hardi et prsomptueux. Etant pris de Pompeia, femme de Csar, il pntra secrtement dans sa maison avec le costume et l'attirail d'une joueuse de lyre. Les femmes y clbraient le sacrifice secret dont la vue est interdite l'autre sexe, et aucun homme ne se trouvait l. Mais Clodius, tant tout jeune et encore imberbe, esprait se glisser avec les femmes chez Pompeia sans tre reconnu. Cependant, comme il tait entr de nuit et que la maison tait grande, il ne savait pas o passer. Tandis qu'il errait ici et l, une servante d'Aurlia, mre de Csar, l'aperut et lui demanda son nom. Contraint de parler, il dit qu'il cherchait une suivante de Pompeia, du nom d'Habra La servante s'aperut que sa voix n'tait pas une voix fminine ; elle poussa un cri et appela les femmes. Celles-ci fermrent les portes, fouillent toute la maison et surprennent Clodius rfugi dans la chambre de la jeune esclave qui l'avait fait entrer. L'affaire s'bruita ; Csar rpudia Pompeia, et Clodius se vit intenter une action d'impit.

    - Vie de Csar : IX - X Traduction : R. Flacelire et E. Chambry, Belles Lettres, 1975 [9],.,.,,,.,,,,.,.,.,,,.,,. [10],,,,,,,,,,,,,.

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    ,,,,,,,,.,.,,,.,,,.,.,,.;.,,.,,,. 9. Cependant Cependant, cette prture ne fut marque par aucun trouble politique, mais un incident dsagrable pour Csar se produisit dans sa maison. Publius Clodius tait un homme de naissance patricienne, remarquable par sa fortune et par son loquence, mais qui, pour l'audace et l'insolence, ne le cdait aucun des Romains dcris cause de leur dpravation. Il aimait Pompeia, l'pouse de Csar, qui elle-mme, n'tait pas insensible sa passion. Seulement, le gynce tait rigoureusement gard, et la mre de Csar, Aurlia, personne d'une grande sagesse, veillait sans cesse autour de la jeune femme, et rendait la rencontre des amants difficile et dangereuse pour eux. Les Romains ont une divinit qu'ils appellent la Bonne Desse, et les Grecs Gynaecia ; les Phrygiens, qui la revendiquent pour eux, prtendent qu'elle tait la mre du roi Midas ; les Romains voient en elle une nymphe des bois, pouse de Faunus ; les Grecs enfin, une des mres de Dionysos, celle qu'il est interdit de nommer. De l vient que les femmes qui clbrent sa fte couvrent leurs tentes de sarments de vignes et qu'un serpent sacr est plac prs de l'image de la desse, conformment au mythe. Alors il n'est permis aucun homme de participer la clbration des mystres ni de se trouver dans la maison o elle a lieu ; les femmes, demeures seules et entre elles, accomplissent, dit-on dans leur service religieux beaucoup de rites analogues ceux de l'orphisme. En consquence, lorsqu'arrive la date de la fte, le consul ou le prteur sort de chez lui, ainsi que tous les mles du logis ; sa femme prend possession de la maison et la dispose comme il convient. Les crmonies les plus importantes se font de nuit, et cette fte nocturne est mle de divertissements, o la musique tient une large place. 10. Comme cette anne l, la fte tait clbre par pompia, Clodius, qui tait encore imberbe et qui esrait passer ainsi inaperu, prit les vtements et l'attirail d'une joueuse de harpe et vint la maison sous l'apparence d'une jeune femme. Il trouva la porte ouverte et fut introduit en toute

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    scurit par une servante qui tait complice et qui courut avertir Pompeia. Mais un certain temps s'coula, pendant lequel Clodius, n'ayant pas la patience d'attendre l'endroit o on l'avait laiss, se mit errer dans la maison, qui tait grande, en esseyant d'viter les lumires. Une suivante d'Aurlia le rencontra et, croyant s'adresser une femme, l'invita jouer un air. Comme il refusait, elle le tira au milieu de la pice et lui demanda qui elle tait et d'o elle venait. Clodius rpondit qu'il attendait la servante favorite (habra) de Pompeia (Habra tait justement son nom), mais sa voix le trahit, et la suivante s'lana aussitt vers les lumires et vers l'assemble en criant qu'elle avait surpris un homme. L'pouvante saisit les femmes ; Aurlia fit cesser la crmonie et voiler le sobjets sacrs, puis elle ordonna de fermer les portes et parcourut la maison avec des flambeaux la recherche de Clodius. On le trouva rfugi dans la chambre de la jeune servante qui l'avait introduit. Les femmes le reconnurent et le jetrent la porte. Puis aussitt, alors qu'il faisait encore nuit, elles sortirent et allrent conter l'affaire leurs maris. Avec le jour, le bruit se rpandit par la ville que Clodius avait commis un sacrilge et qu'il devait une satisfaction non seulement ceux qu'il avait outrags, mais encore la cit et aux dieux. En consquence, un des tribuns de la plbe le poursuivit pour impit, tandis que les snateurs les plus influents se groupaient contre lui et attestaient qu'entre autres abominations il s'tait rendu coupable d'inceste avec sa soeur, qui tait la femme de Lucullus. Mais leurs efforts se heurtrent l'opposition du peuple, qui dfendit Clodius et lui fut d'un grand secours auprs des juges effrays et redoutant la foule. Csar rpudia aussitt Pompeia, mais appel au procs comme tmoin, il dclara qu'il ne savait rien des faits reprochs Clodius. Cette dclaration parut trange et l'accusateur lui demanda : "Pourquoi donc as-tu rpudi ta femme?" "Parce que, rpondit-il, j'ai estim que la mienne ne devait pas mme tre souponne." Les uns prtendent qu'en parlant ainsi, Csar tait sincre ; les autres, qu'il voulait plaire au peuple, bien dcid sauver Clodius. Quoi qu'il en soit, Clodius fut absous de l'accusation qui pesait sur lui, la plupart des juges ayant crit leur verdict de faon illisible : ils voulaient ainsi viter la fois de s'exposer au danger devant la foule par une condamnation, et de perdre leur rputation auprs des nobles par un acquittement. JUVENAL Trad. Henri Clouard I, 2, 82-90 foedius hoc aliquid quandoque audebis amictu; nemo repente fuit turpissimus. accipient te paulatim qui longa domi redimicula sumunt frontibus et toto posuere monilia collo 85 atque bonam tenerae placant abdomine porcae et magno cratere deam. sed more sinistro exagitata procul non intrat femina limen: solis ara deae maribus patet. 'ite, profanae,' clamatur, 'nullo gemit hic tibicina cornu.' Un jour, tu iras plus loin encore dans lindcence ; personne nest arriv dune fois la perfection de la honte. Tu finiras par faire partie de la confrrie des gens qui senferment chez eux, senrubannent le front, se mettent des colliers au cou et font leur cour la Bonne Desse en lui offrant le ventre dune jeune truie et un grand cratre ; mais ils renversent la tradition : dfense formelle aux femmes dentrer, les mles seuls ont droit lautel de la desse. Au large profanes, scrient-ils, aucune joueuse de flte ne vient ici faire gmir son instrument. II, 6, 314-345 nota bonae secreta deae, cum tibia lumbos incitat et cornu pariter uinoque feruntur 315

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    attonitae crinemque rotant ululantque Priapi maenades. o quantus tunc illis mentibus ardor concubitus, quae uox saltante libidine, quantus ille meri ueteris per crura madentia torrens! lenonum ancillas posita Saufeia corona 320 prouocat et tollit pendentis praemia coxae, ipsa Medullinae fluctum crisantis adorat: palma inter dominas, uirtus natalibus aequa. nil ibi per ludum simulabitur, omnia fient ad uerum, quibus incendi iam frigidus aeuo 325 Laomedontiades et Nestoris hirnea possit. tunc prurigo morae inpatiens, tum femina simplex, ac pariter toto repetitus clamor ab antro 'iam fas est, admitte uiros.' dormitat adulter, illa iubet sumpto iuuenem properare cucullo; 330 si nihil est, seruis incurritur; abstuleris spem seruorum, uenit et conductus aquarius; hic si quaeritur et desunt homines, mora nulla per ipsam quo minus inposito clunem summittat asello. atque utinam ritus ueteres et publica saltem 335 his intacta malis agerentur sacra; sed omnes nouerunt Mauri atque Indi quae psaltria penem maiorem quam sunt duo Caesaris Anticatones illuc, testiculi sibi conscius unde fugit mus, intulerit, ubi uelari pictura iubetur 340 quaecumque alterius sexus imitata figuras. et quis tunc hominum contemptor numinis, aut quis simpuuium ridere Numae nigrumque catinum et Vaticano fragiles de monte patellas ausus erat? sed nunc ad quas non Clodius aras? Connus maintenant sont les mystres de la Bonne Desse quand la flte aiguillonne les reins, que trompette et vin s'accordent pour mettre en feu les mnades de Priape qui tordent leurs cheveux et poussent des cris. Quelle rage d'accouplement s'empare alors d'elles, de quelle voix rugit leur dsir bondissant, quels flots de vin vieux leur trempe cuisses et jambes ! Elles veulent rivaliser avec les filles de bordel, l'enjeu est une couronne, et Saufia remporte le prix de la hanche cambre ; mais elle-mme doit applaudir Mdullina pour ses ondulations de rein. On partage la palme entre les deux reines : privilge gal celui de la naissance. Ce n'est pas du jeu, ici, tout se fait pour de bon ; il y aurait de quoi incendier le fils de Laomdon glac par l'ge et Nestor malgr sa hernie. Et voici que le rut ne peut plus attendre, il n'y a plus prsent que la femelle toute pure, un cri unanime retentit dans tout le repaire : " C'est l'heure permise par la desse, nous voulons les hommes ! l'amant est dans son lit, on lui fait dire qu'il ait prendre son manteau pour accourir ; si l'amant fait dfaut, on livre assaut aux esclaves ; faute d'esclaves, on appelle un porteur d'eau ; si enfin il n'y a pas moyen de trouver d'homme, on n'attendra pas davantage, on se couchera sous un ne. Plt aux dieux que les rites antiques et le culte public eussent chapp de telles profanations ! Mais Maures et Indiens savent bien quel jeune homme osa, dguis en joueuse de flte, introduire un membre (de plus fort calibre que le rouleau des deux Anti-Caton de Csar) l mme d'o le rat n'ose approcher s'il se sait mle, l o c'est une loi de la peinture de faire pendre un voile. Et cependant quel homme en ce temps-l aurait os blasphmer ? Lequel aurait raill la coupe et le bassin noir de Numa et les fragiles assiettes fabriques sur le mont Vatican ? Mais aujourd'hui quel autel n'a pas son Clodius ?

    III, 9, 115-117 sed prodere malunt 115

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    arcanum quam subrepti potare Falerni pro populo faciens quantum Saufeia bibebat.

    Mais voyons ! Ils ont plus de joie trahir un secret qu' s'abreuver de Falerne vol en faisant la pige Saufia quand il sacriflait pour le peuple romain.

    SUETONE Traduction personnelle Divus Julius, VI, 3 In Corneliae autem locum Pompeiam duxit Quinti Pompei filiam, L. Sullae neptem; cum qua deinde diuortium fecit adulteratam opinatus a Publio Clodio, quem inter publicas caerimonias penetrasse ad eam muliebri ueste tam constans fama erat, ut senatus quaestionem de pollutis sacris decreuerit. Pour remplacer Cornlie, il pousa Pompeia, fille de Q. Pompe et petite-fille de L. Sylla; mais, dans la suite, il divora d'avec elle, sur le soupon d'un commerce adultre avec Publius Clodius, si publiquement accus de s'tre introduit chez elle sous un costume de femme, pendant une fte religieuse, que le snat dut ordonner une enqute pour sacrilge. Divus Julius , LXXIV, 4 in Publium Clodium Pompeiae uxoris suae adulterum atque eadem de causa pollutarum caerimoniarum reum testis citatus negauit se quicquam comperisse, quamuis et mater Aurelia et soror Iulia apud eosdem iudices omnia ex fide rettulissent; interrogatusque, cur igitur repudiasset uxorem: "Quoniam," inquit, "meos tam suspicione quam crimine iudico carere oportere." Appel en tmoignage contre Publius Clodius, qui tait la fois accus de sacrilge et convaincu d'adultre avec Pompeia, sa femme, il affirma ne rien savoir, quoique sa mre Aurlia et sa soeur Julie eussent fidlement dclar aux mmes juges toute la vrit; et comme on lui demandait pourquoi donc il avait rpudi Pompeia: "C'est, dit-il, parce que je veux que les miens soient aussi exempts de soupon que de crime." FESTUS Traduction personnelle s.v. Damium Damium sacrificium quod fiebat in operto in honore Deae Bonae, dictum a contrarietate quod minime esset damosion, id est publicum. Dea quoque ipsa Damia et sacerdos eius damiatrix appellabatur. Le Damium tait un sacrifice qui tait offert en secret en l'honneur de Bona Dea ; il tait ainsi nomm pour son sens contraire, comme c'tait le moins du monde damiosion, ce qui est public. La desse tait aussi appele Damia et sa prtresse damiatrix.

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    DION CASSIUS Traduction personnelle de Philippe Remacle XXXVII, 35, 3-4 ,,,,,,,,,,.

    Cependant une foule d'hommes libres et d'esclaves, ceux-ci par crainte, ceux-l par compassion pour Lentulus et pour ses complices, se disposaient les enlever tous, pour qu'ils ne subissent point la peine capitale. Cicron, instruit de leur dessein, plaa pendant la nuit une garde dans le Capitole et dans le Forum. Puis, ayant reu des dieux un bon prsage, ds l'aurore (car dans un sacrifice clbr chez lui par les vestales pour le salut de l'tat, la flamme s'tait leve plus haut que de coutume), il ordonna au peuple de prter serment entre les mains des prteurs et de s'enrler, si on avait besoin de soldats. En mme temps il convoqua le snat et tcha de l'amener, par le trouble et par la crainte, dcrter la peine capitale contre ceux qui avaient t arrts.

    XXXVII, 45, 1-2 ,,,,(),,,,

    A la mme poque, P. Clodius souilla l'honneur de la femme de Csar, dans sa propre maison, pendant les sacrifices que les Vestales clbraient chez les consuls et chez les prteurs, et dont l'accs tait interdit aux hommes par la coutume des anctres. Csar, persuad que Clodius, soutenu par sa faction, ne serait pas condamn, ne l'appela pas en justice ; mais il rpudia sa femme, non qu'il ajout foi aux bruits rpandus contre elle ; mais parce qu'il ne pouvait plus la garder auprs de lui, du moment qu'elle tait souponne d'adultre ; car, disait-il, une femme vertueuse doit non seulement tre exempte de faute, mais ne pas mme encourir un soupon dshonorant.

    SERVIUS In Vergilii Aenidos , VIII, 314 Haec nemora indigenae fauni "indigenae", id est inde geniti, "autochtons", et sciendum secundum Hesiodi theogoniam primo deos genitos, inde hemitheos, post heroas, inde homines innocentes, ultimos sceleratos : quem et hic nunc ordinem servat. sane sicut supra disctim est, Faunus Pici filius dicitur, qui a fando, quod futura praediceret, Faunus appellatus est : quorum etiam responsa ferebantur. hic Faunus

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    habuisse filiam dicitur / omam castita et disciplinis omnibus eruditam, quam quidam, quod nomine dici prohibitum fuerat, Bonam Deam appellatam volunt. hos Faunos etiam Fatuos dicunt, quod per stuporem divina pronuntient, quidam Faunum appellatum volunt eum quem nos propitium dicimus. MACROBE Saturnalia, I, 12, 20-29 Traduction : C. Guittard, Belles Lettres, 1997 20 Adfirmant quidem, quibus Cornelius Labeo consentit, hanc Maiam cui mense Maio res divina celebratur terram esse hoc adeptam nomen a magnitudine, sicut et Mater Magna in sacris vocatur: adsertionemque aestimationis suae etiam hinc colligunt quod sus praegnans ei mactatur, quae hostia propria est terrae: et Mercurium ideo illi in sacris adiungi dicunt, quia vox nascenti homini terrae contactu datur, scimus autem Mercurium vocis et sermonis potentem. 21 Auctor est Cornelius Labeo huic Maiae, id est terrae, aedem Kalendis Maiis dedicatam sub nomine Bonae Deae: et eandem esse Bonam Deam et terram ex ipso ritu occultiore sacrorum doceri posse confirmat: hanc eandem Bonam Faunamque et Opem et Fatuam pontificum libris indigitari: 22 Bonam, quod omnium nobis ad victum bonorum causa est; Faunam, quod omni usui animantium favet; Opem, quod ipsius auxilio vita constat; Fatuam a fando, quod, ut supra diximus, infantes partu editi non prius vocem edunt quam attigerint terram. 23 Sunt qui dicant hanc deam potentiam habere Iunonis, ideoque regale sceptrum in sinistra manu ei additum. Eandem alii Proserpinam credunt, porcaque ei rem divinam fieri, qui segetem quam Ceres mortalibus tribuit porca depasta est: alii E, Boeoti Semelam credunt. 24 Nec non eandem Fauni filiam dicunt, obsititisseque voluntati patris in amorem suum lapsi, ut et virga myrtea ab eo verberaretur, cum desiderio patris nec vino ab eodem pressa cessisset: transfigurasse se tamen in serpentem pater creditur et coisse cum filia. 25 Horum omnium haec proferuntur indicia, quod virgam myrteam in templo haberi nefas sit, quod super caput eius extendatur vitis qua maxime eam pater decipere temptavit, quod vinum in templum eius non suo nomine soleat inferri, sed vas in quo vinum inditum est mellarium nominetur et vinum lac nuncupetur, serpentesque in templo eius nec terrentes nec timentes indifferenter appareant. 26 Quidam Medeam putant, quod in aedem eius omne genus herbarum sit ex quibus antistites dant plerumque medicinas, et quod templum eius virum introire non liceat propter iniuriam quam ab ingrato viro Iasone perpessa est. 27 Haec apud Graecos h o dicitur, quam Varro Fauni filiam tradit adeo pudicam, ut extra i numquam sit egressa nec nomen eius in publico fuerit auditum nec virum umquam viderit vel a viro visa sit, propter quod nec vir templum eius ingreditur. 28 Unde et mulieres in Italia sacro Herculis non licet interesse, quod Herculi, cum boves Geryonis per agros Italiae duceret, sitienti respondit mulier aquam se non posse praestare, quod feminarum deae celebraretur dies nec ex eo apparatu viris gustare fas esset: propter quod Hercules facturus sacrum detestatus est praesentiam feminarum, et Potitio ac Pinario sacrorum custodibus iussit ne mulierem interesse permitterent.

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    29 Ecce occasio nominis, quoniam Maiam eandem esse et terram et Bonam Deam diximus, coegit nos de Bona Dea quaecumque conperimus protulisse. 20. Certains, avec l'assentiment de Cornlius Labo, prtendent que cette Maa, gratifie d'un sacrifice au mois de mai, est la terre, ainsi nomme d'aprs son tendue, de mme qu'on lui donne aussi le nom de Magna Mater (Grande Mre) dans les sacrifices et ils tirent encore une preuve l'appui de leur affirmation, de l'usage consistant lui immoler une truie pleine, victime spcialement consacre la terre. Et Mercure, selon eux, lui est associ dans les pratiques rituelles, parce que la parole n'est donne l'homme sa naissance qu'au contact de la terre ; or, on sait que Mercure est le dieu de la parole et du langage. 21 Cornlius Labo atteste qu'aux calendes de mai un temple fut ddi Maa, c'est dire la Terre, sous le nom de la Bonne Desse et il assure qu'une preuve de l'identit de la terre et de Bona Dea se trouve dans les rites plus secrets de son culte ; cette mme divinit, ajoute-t-il, est mentionne dans les livres pontificaux sous les noms de Bonne Desse et de Fauna, d'Ops et de Fatua ; 22 Bonne Desse parce qu'elle est la source de tous les biens ncessaires notre subsistance, Fauna parce qu'elle favorise (favet) tout ce qui est utile aux tres vivants, Ops (assistance) parce que la vie se maintient grce son assistance, Fatua, du verbe fari (parler), parce que, comme nous l'avons dit, les nouveau-ns ne font entendre leur voix qu'aprs avoir eu un contact avec la terre. 23 Il en est qui attribuent cette desse le pouvoir de Junon, attest, selon eux, par la prsence en sa main gauche du sceptre royal. D'autres l'identifient Proserpine et, disent-ils, on lui offre une truie en sacrifice, parce que la truie dvore la moisson, prsent de crs aux mortels. D'autres encore voient en cette desse Chtnia Hcat, les Botiens Sml. 24 De Bona Dea, on dit aussi qu'elle est fille de faunus et qu'elle s'opposa aux dsirs de son pre, qui s'tait pris d'elle, au point qu'il la frappa avec une baguette de myrte, pour lui avoir rsist, mme sous l'effet du vin. Mais le pre, croit-on, se transforma en serpent et s'unit sa fille. 25 Toutes ces donnes reposent sur les preuves suivantes : la prsence d'une baguette de myrte est sacrilge en son temple ; sur sa tte se dploie le rameau de la vigne, suprme instrument de la sduction paternelle ; dans son temple, il n'est pas d'usage d'introduire le vin sous son propre nom, mais le vase qui le contient est appel vase miel et le vin prend le nom de lait ; quant aux serpents, ils apparaissent dans l'indiffrence dans son temple, n'inspirant ni ne ressentant d'effroi. 26 Certains voient en elle Mde parce que, disent-ils, on trouve en son temple toutes sortes d'herbes, dont ses prtres composent ordinairement des mdicaments, et parce que l'entre en son temple est interdite aux hommes, cause de l'outrage qu'elle a reu de son ingrat mari, Jason. 27 Elle reoit chez les Grecs le nom de theos gynakeia (divinit des femmes), Varron la cite comme la fille de Faunus, si pudique qu'elle ne franchit jamais le seuil du gynce, que jamais son nom ne fut entendu en public, que jamais elle ne vit un homme, pas plus qu'un homme ne la vit, ce qui explique l'interdiction tout homme d'entrer dans son temple. D'o vient aussi l'interdiction aux femmes en Italie de participer au culte d'Hercule : en effet, alors qu'il conduisait travers les territoires d'Italie les boeufs de Gryon, un jour qu'il avait soif, une femme rpondit Hercule qu'elle ne pouvait lui donner d'eau boire, parce qu'on clbrait ce jour l la fte de la desse des femmes et que la loi divine interdisait aux hommes de goter de ce qui tait destin la crmonie. Devant ce refus, Hercule, qui allait accomplir un sacrifice, carta avec des imprcations la prsence des femmes et ordonna Potitus et Pinarius, desservants de son culte, de n'admettre la prsence d'aucune femme. 29 Voil comment, l'occasion du nom de Maia, en qui nous avons reconnu la fois la Terre et la Bonne Desse, nous avons t amen exposer tout ce que nous savons sur la Bonne Desse. CHRETIENS DU BAS-EMPIRE TERTULLIEN Traduction personnelle

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    Ad Nationes, II, 9, 22 Si Fauni filia pudicitia praecellebat, ut ne conversaretur quidem inter viros, aut barbaria aut conscientia deformitatis aut rubore insaniae paternae, quanto dignior bona dea Penelopa, quae inter utilissimos amatores diversata, obsessam castitatem tenere protexit? Si Faune, fils de Picus, tait frapp de dmence, et s'agitait en rendant la justice, il convenait de le gurir plutt que de le consacrer par l'apothose: si la fille de ce mme Faune tait tellement chaste, qu'elle ne voulait pas mme converser avec les hommes, cela tenait peut-tre la rudesse de ses moeurs, la conscience de sa difformit, ou bien la honte qu'elle prouvait de l'infirmit de son pre. S'il vous fallait tout prix une Bonne Desse, que ne preniez-vous Pnlope, qui, en butte aux poursuites de nombreux amants, conserva intacte sa pudeur toujours menace. ARNOBE Traduction personnelle : Adversus Nationes ,I, 36 Fenta fatua, Fauni uxor, Bona Dea quae dicitur sed in vini melior et laudabilior potu,

    Fenta Tatua, la femme de Faunus que l'on appelle Bonne Desse mais qui est meilleure et plus louable lorsqu'il s'agit de boire du vin.

    Adversus Nationes , V, 18 Fentam igitur Fatuam, Bona quae dicitur Dean transeamus, quam murteis caesam virgis, quod marito nesciente seriam meri ebiberit plenam, Sextus Clodius indicat sexto de diis graeco, signumque montstrari quod, cum ei divinam rem mulieres faciunt, vini amphora constituatur obtecta nec myrteas fas sit inferre verbenas, sicut suis scribit in causalibus Butas.

    Passons donc Fenta Fatua, que l'on appelle Bonne Desse, pour laquelle Sextus Clodius indique dans son sixime livre crit en grec sur les dieux qu'elle fut battue mort avec des verges de myrte car sans que son poux le sache, elle aurait bu une jarre entire de vin pur; et la preuve de cette histoire mise en avant est que quand les femmes clbrent sa fte, une amphore de vin recouverte est prsente et il n'est pas permis d'amener des verges de myrtes, comme l'crivit Butas dans son livre "Des causes".

    LACTANCE Divinae Institutiones, I, 22, 9-11 Traduction : Pierre Monat, Sources Chrtiennes, 1986

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    Sed ut Pompilius apud Romanos institutor ineptarum religionum fuit, sic ante Pompilium Faunus in Latio qui et Saturno auo nefaria sacra constituit et Picum patrem inter deos honoravit et sororem suam Fentam Faunam eamdemque conjugem consecravit; quam Gauius Bassus tradit " Fatuam nominatam quod mulieribus fata canere consuessetut Faunus viris" Eamdem Varro scribit "tantae pudicitiae fuisse ut nemo illam quoad vixerit praeter suum virum mas viderit nec nomen ejus audierit. Idcirco illi mulieres in operto sacrificant et Bonam Deam nominant." Et Sextus Clodius in eo libro quem graece scripsit, refert " Fauni hanc uxorem fuisse; quae qui contra morem decusque regium clam vini ollam ebiberat et ebria facta erat, virgis myrteis a viro ad mortem usque caesam; postea vero cum eum facti sui paeniteret ac desiderium eius ferre non posset, divinum illi honorem detulisse; idcirco in sacris ejus obuolutam vini amphoram poni." Mais, tout comme Pompilius fut, chez les Romains, le fondateur des religions ineptes, de mme, avant Pompilius, il y eut, dans le Latium, Faunus, qui institua des mystres impies en l'honneur de son grand-pre Saturne, honora parmi les dieux son pre Picus et consacra comme desse Fenta Fauna, qui tait la fois sa soeur et son pouse; celle-ci, d'aprs Gavius Bassus, "fut appele Fatua parce qu'elle avait coutune de donner des oracles aux femmes, comme Faunus le faisait pour les hommes." Varron crit que "cette mme Fauna avait tant de pudeur qu'aucun mle, exept son poux, ne la vit ni n'entendit son nom aussi longtemps qu'elle vcut. Voil pourquoi les femmes l'appellent la Bonne Desse." Et Sextus Clodius, dans le livre qu'il crivit en grec, rapporte "qu'elle tait l'pouse de Faunus : comme celle-ci, au mpris des habitudes et des convenances royales, avait bu en cachette un coup de vin et s'tait nivre, son mari la battit mort avec des verges de myrte; mais par la suite, il se repentit de son acte, et, ne pouvant supporter son absence, il lui rendit des honneurs divins : voil pourquoi, dans les crmonies en son honneur, on prsente une amphore de vin cache sous son voile." Divinae Institutiones , III, 20, 3-4 Traduction personnelle Romae et in plerisque urbibus scimus esse quaedam sacra quae aspici a viris nefas habeatur. abstinens igitur aspectu quibus contaminare illa non licet, et si forte vel errore casu quopiam vir aspexit, primo poena eius, deinde instauratione sacrificii scelus expiatir. Surement, ceux qui cherchent profaner les choses caches du monde et de son temple cleste par leurs intentions impies sont bien plus mauvais que celui qui est entr dans le temple de Bona Dea, ou de Vesta, ou de Crs. Institutionum Epitome, 17, 1 Traduction : M. Perrin, Sources Chrtiennes, 1987 Has omnes ineptias primus in Latio Faunus induxit, qui et Saturno auo cruenta sacra constituit et Picum patrem tamquam deum coli voluit et Fentam Faunam conjugem sororemque inter deos conlocavit ac Bonam Deam nominavit, Faunus fut le premier introduire toutes ces inepties dans le Latium ; il tablit des sacrifices

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    sanglants en l'honneur de son ael Saturne, voulut que son pre Picus ft honor comme un dieu, plaa parmi les dieux Fenta Fauna, son pouse-soeur, et l'appela la Bonne Desse. MARTIANUS CAPELLA Traduction personnelle II, 107 ipsam quoque terram, qua hominibus invisa est, referciunt longaevorum chori, qui habitant silvas, nemora, lucos, lacus, fontes ac fluvios appellanturque Panes, Fauni, Fones, Satyri, Silvani, Nymphae, Fatui Fatuaeque vel Fantuae vel etiam Fanae, a quibus fana dicta, quod soleant divinare. Hi omnes post prolixum aevum moriuntur ut homines, sed tamen et praesciendi et incursandi et nocendi habent praesentissimam potestatem.

    Des groupes trs anciens remplissent aussi cette terre inconnue des hommes, et qui habitent les forts, les bois, les bois sacrs, les lacs, les fontaines et les rivires et qui sont appels Panes, Faunes, Fones, Satyres, Silvains, Nymphes, Fatui et Fatuae ou Fantuae ou aussi Fanae, desquels noms le mot fanum (temple) car ils ont l'habitude de pratiquer la divination. Ils meurent tous comme les hommes aprs une longue vie, mais cependant ils ont le pouvoir inn de connatre l'avenir et d'assaillir (les personnes) et de (leur) nuir.

    PLACIDE Traduction personnelle s v Damium (p.59-60) D Damium : sacrificum quod in operto fit, quod Bonae Deae mulieres faciunt. D Damium : Bonae Deae sacrum. Damium : un sacrifice qui est fait en secret, que les femmes font Bona Dea. Damium : le sacrifice Bona Dea ISIDORE

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    Traduction personnelle Etymologiae, X, 103 Fatuus ideo existimatur dictus, quia neque quod fatur ipse, neque quod alii dicunt intellegit. Fatuos origine duci quidam putant a miratoribus Fatuae, Fauni uxoris fatidicae, eosque primum fatuos appellatos, quod praeter modum obstupefacti sunt vaticiniis illius usque ad amentiam.

    On dit que Fatuus est appel ainsi car il ne comprends ni ce qu'il dit, ni ce que disent les autres. Certains pensent que les Fatui descendent des admirateurs de Fatua, la femme prophtesse de Faunus, et que ceux-ci taient d'abord appels sots (fatui) car ils taient devenus frapps outre mesure de stupeur par ses prdictions jusqu' en devenir fous.

    PAULUS DIACONUS Traduction personnelle EPITOME s v Damium (p.60) Damium sacrificium, quod fiebat in operto in honore Deae Bonae, dictum a contrarietate, quod minime esset damosion , id est publicum. Dea quoque ipsa Damia et sacerdos ejus damiatrix appellabatur. Damium est le sacrifice qui tait offert en secret en honneur Bona Dea, et et tait ainsi appele selon diverses significations en opposition, car elle n'tait pas le moins du monde damosion, et ce sacrifice tait publique. Aussi la desse elle-mme tait appelle Damia et sa prtresse damiatrix.

    Sur Crs : REPUBLIQUE HOMERE (PSEUDO - ) Traduction : Ernest Falconnet Hymne homrique Dmter , v.47-50, v. 305, 206 seqq HYMNE IV Crs Je chanterai d'abord Crs la belle chevelure, desse vnrable, et sa fille lgre la

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    course, jadis enleve par Pluton. Jupiter, roi de la foudre, la lui accorda lorsque, loin de sa mre au glaive d'or, desse des jaunes moissons, jouant avec les jeunes filles de l'Ocan, vtues de flottantes tuniques, elle cherchait des fleurs dans une molle prairie et cueillait la rose, le safran, les douces violettes, l'iris, l'hyacinthe et le narcisse. Par les conseils de Jupiter, pour sduire cette aimable vierge, la terre, favorable l'avare Pluton, fit natre le narcisse, cette plante charmante qu'admirent galement les hommes et les Immortels : de sa racine s'lvent cent fleurs ; le vaste ciel, la terre fconde et les flots de la mer sourient ses doux parfums. La desse enchante arrache de ses deux mains ce prcieux ornement ; aussitt la terre s'entrouvre dans le champ nysien, et le fils de Saturne, le roi Pluton, s'lance port par ses chevaux immortels. Le dieu saisit la jeune vierge malgr ses gmissements et l'enlve dans un char tincelant d'or. Cependant elle pousse de grands cris en implorant son pre, Jupiter, le premier et le plus puissant des dieux : aucun Immortel, aucun homme, aucune de ses compagnes n'entendit sa voix. Mais la fille prudente de Persus, Hcate au long voile, l'entendit du fond de son antre, et le Soleil, fils brillant d'Hyprion, entendit aussi la jeune fille implorant son pre Jupiter : en cet instant, le Soleil, loign de tous les dieux, recevait dans son temple les sacrifices somptueux des faibles mortels. Ainsi, du consentement de Jupiter, Pluton, qui dompte tout, fils renomm de Saturne, port par ses immortels coursiers, entranait cette jeune fille malgr sa rsistance et quoiqu'il ft son oncle paternel. Tant qu'elle aperut encore la terre, le ciel toil, la vaste mer et quelques rayons du soleil, elle espra que sa mre vnrable ou quelqu'un des dieux immortels pourrait l'entrevoir. Cette esprance inspirait du calme sa grande me, quoique accable de tristesse. Les montagnes jusques leur sommet, la mer jusque dans ses profondeurs, retentissaient des clats de sa voix divine. Son auguste mre l'entendit. Une vive douleur descend aussitt dans son me, de ses deux mains elle dchire les bandelettes autour de ses cheveux divins ; elle revt ses paules d'un manteau d'azur, et, comme l'oiseau, s'lve impatiente sur la terre et sur les mers. Mais aucun dieu, aucun homme ne voulut lui dire la vrit ; le vol d'aucun oiseau ne put la guider par un augure certain. Pendant neuf jours la vnrable Crs parcourut la terre, portant dans ses mains des torches allumes : absorbe dans la douleur, elle ne gota durant ce temps ni l'ambroisie ni le nectar, elle ne plongea point son corps dans le bain. Mais lorsque brilla la dixime aurore, Hcate, un flambeau dans les mains, se prsenta devant elle et lui dit ces paroles : "Auguste Crs, desse des saisons et des moissons, lequel des dieux ou des mortels a donc enlev Proserpine et rempli ainsi votre me de chagrins ? Je viens d'entendre sa voix ; mais je n'ai pu apercevoir quel tait le ravisseur." Ainsi dit Hcate. Crs, la fille de Rhe, ne rpond point ce discours, mais elle s'loigne avec la desse en tenant dans ses mains les torches allumes. Toutes deux se rendent auprs du Soleil, observateur des dieux et des hommes. Arrives devant ses coursiers, elles s'arrtent, et Crs l'interroge par ces paroles : "Soleil ! si jamais mes actions ou mes discours ont pu vous rjouir, traitez-moi comme une desse, prenez piti de ma douleur. J'ai entendu dans les airs la voix et les plaintes de la fille que j'ai enfante, tendre fleur, admirablement belle : il m'a sembl que quelque audacieux lui faisait violence, et mes yeux n'ont pu la dcouvrir ; mais vous qui du haut des cieux clairez de vos rayons et la terre et les mers, dites-moi avec sincrit, divinit chrie, si vous avec dcouvert quelque chose et quel est celui des dieux ou des hommes qui a saisi ma fille avec violence et l'a enleve loin de moi." Elle dit. Le fils d'Hyprion lui rpondit alors en ces mots : "Fille de Rhe la belle chevelure, puissante Crs, vous connatrez la vrit : je vous

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    honore et je prends piti des peines que vous ressentez de la perte de votre fille chrie. Aucun des Immortels n'a caus votre malheur, si ce n'est Jupiter, dieu des nuages, qui permit Pluton de nommer votre fille sa tendre pouse, quoique son oncle paternel. Ce dieu a enlev la jeune vierge et malgr ses cris l'a conduite avec ses coursiers au sein des tnbres ternelles. desse ! calmez votre grande douleur ; ne livrez pas inutilement votre me la colre indomptable. Pluton, roi puissant entre tous les dieux n'est point indigne d'tre votre gendre : oncle paternel de votre fille, il est du mme sang que vous ; un grand honneur lui est chu lorsque, dans le principe, les trois parts furent faites ; maintenant il habite avec ceux sur lesquels il lui fut accord de rgner." En achevant ces mots, il excite ses coursiers. Eux, s'lanant sa voix, emportent facilement le char lger, comme des oiseaux rapides aux ailes tendues. Cependant Crs s'abandonne une douleur plus vive et plus profonde. Irrite contre le fis de Saturne, elle s'loigne pour longtemps de l'assemble des dieux et du vaste Olympe ; puis, aprs avoir chang de forme, elle parcourt, les villes et les champs fertiles des mortels. Aucun homme, aucune femme aux larges tuniques ne la reconnut en la voyant, avant qu'elle ft venue dans la maison du vaillant Clus, qui rgnait alors dans la ville parfume d'leusis. Le coeur plein de tristesse, elle s'assied sur les bords de la route, prs du puits Parthnius, o les citoyens venaient se dsaltrer. Elle se tient l'ombre d'un olivier touffu, sous les traits d'une femme fige, prive des faveurs de Vnus, comme sont les nourrices des enfants des rois qui rendent la justice et les intendantes des palais aux votes sonores. Les filles de Clus, venant puiser l'eau jaillissante pour la porter dans les vases d'airain au palais de leur pre, l'aperurent assise. Elles taient quatre, belles comme des divinits et blouissantes de jeunesse : Callidice, Disidice, l'aimable Dmo et Callitho, l'ane de toutes. Elles ne reconnaissent point Crs : il est difficile aux mortels de reconnatre les dieux ; elles abordent la desse et font entendre ces paroles : "Bonne femme, quels peuples anciens venez vous de quitter ? Pourquoi vous loigner de la ville et ne pas venir dans nos demeures ? L, dans nos palais ombrags, sont des femmes de votre ge ; il en est aussi de plus jeunes : elles vous accueilleraient avec amiti ; leurs discours et leurs paroles seraient pour vous remplis de bienveillance." Elles parlrent ainsi. L'auguste desse rpondit en ces mots : "Mes enfants, quelque rang que vous occupiez parmi les femmes, soyez heureuses ; je vais vous rpondre : nous devons parler sincrement ceux qui nous interrogent. Mon nom est Do ; je l'ai reu de ma mre vnrable. Maintenant j'arrive, malgr moi, de la Crte porte sur le vaste dos de la mer. Des pirates m'ont enleve avec violence ; puis leur navire a abord Thorice, o plusieurs captives sont descendues sur la plage, tandis que les nautoniers prparaient le repas du soir prs du vaisseau amarr. Pour moi, qui n'avais aucun dsir de prendre la douce nourriture, je me suis chappe furtivement le long du rivage, j'ai fui ces matres insolents qui voulaient me vendre un grand prix quoiqu'ils m'eussent obtenue sans ranon. Mes courses errantes m'ont amene jusqu'en ces lieux. J'ignore quel est ce pays, quels sont les hommes qui l'habitent. Quant vous, puissent les dieux qui rgnent dans l'Olympe vous accorder d'tre unies bientt de jeunes poux et de donner le jour des enfants salon vos dsirs ! Cependant prenez piti de moi, jeunes filles ; ayez de la bienveillance pour moi, enfants chris, jusqu' ce que j'arrive dans la maison d'un homme ou d'une femme o je remplirai avec plaisir tous les devoirs qui conviennent une femme ge : je porterai dans mes bras un enfant nouveau-n, je l'lverai avec soin et j'aurai la garde de la maison ; ou bien, dans l'intrieur de la chambre, je prparerai le lit des

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    matres, et j'enseignerai leurs tches aux femmes. " Voil ce que dit Crs. Alors une de ces jeunes vierges, Calladice, la plus belle fille de Clus, lui rpondit en ces termes : " ma mre! toutes nos peines, quelque grandes qu'elles soient, il faut les supporter, puisque les dieux nous les envoient : leur puissance est plus grande que la ntre. Je vous indiquerai tous les hommes qui tiennent ici le premier rang dans le pouvoir, qui sont grands parmi le peuple et dont la prudence et la justice protgent les murs de la cit. Voici la demeure du sage Triptolme, celle de Diocle, celle de Polyxne, celle de l'irrprochables Eumolpe, celle de Dolichus et celle de notre gnreux pre. Les pouses de ces hros veillent avec soin dans leurs maisons : peine vous auront-elles vue qu'elles vous accueilleront toutes ; aucune ne mprisera votre extrieur ; aucune ne vous loignera de son foyer, car vous ressemblez une divinit. Mais si vous voulez, attendez ici, nous irons dans le palais de mon pre, nous raconterons fidlement cette aventure notre mre, la vnrable Mtanire ; et si la reine nous ordonne de vous conduire dans notre maison, vous n'aurez plus chercher un autre asile. Ce palais renferme un fils que mes parents ont eu dans leur vieillesse, jeune enfant qu'ils dsiraient de toute l'ardeur de leur me et qu'ils chrissent avec tendresse : si vous l'levez et qu'il atteigne heureusement son adolescence, vous serez rcompense des soins donns son enfance si richement que toutes les femmes en vous voyant envieront votre sort." Telles furent les paroles de la fille de Celus. Crs fait un signe de tte pour approuver ce dessein. Aussitt les jeunes tilles emportent les vases brillants qu'elles ont remplis d'eau ; elles arrivent la maison paternelle et racontent leur mre tout ce qu'elles ont vu, tout ce qu'elles ont entendu. Mtanire aussitt leur commande d'appeler cette femme et de lui promettre de sa part de riches salaires. Pareilles de jeunes biches, ou plutt des gnisses rassasies du pturage qui bondissent sur la prairie durant la saison du printemps, les jeunes filles s'lancent en retenant les plis de leurs robes sur la route sillonne par les chars ; leur chevelure, semblable la fleur du safran, flottait en longues boucles sur leurs paules. Elles retrouvent la desse toujours assise au bord du chemin o peu de temps auparavant elles l'avaient laisse ; elles lui servent de guides pour la conduire dans la maison de leur pre. Crs les suivait le cur inond de chagrin et la tte couverte ; son voile bleu descendait jusqu' ses pieds. Elles arrivent ainsi au palais de Clus. Leur vnrable mre tait assise tout prs de la porte solide, tenant son jeune enfant, tendre fleur qui reposait sur son sein : ses filles, empresses, accourent autour d'elle. Cependant la desse franchit le seuil ; sa tte touche aux poutres de la salle et fait resplendir un clat divin travers les portes. Alors la surprise et la ple crainte s'emparent de la reine ; elle lui offre son sige, elle l'engage s'asseoir ; mais Crs, desse des saisons et des moissons, ne veut point se reposer sur ce trne clatant, elle reste silencieuse et tient ses beaux yeux baisss jusqu' ce que la sage Iamb lui prsente un sige qu'elle couvre d'une blanche peau de brebis. L elle s'assied et de ses mains elle retient son voile. Triste, elle resta longtemps sur son sige, ne disant rien, n'interrogeant ni de la voix ni du geste, mais immobile dans sa douleur, sans prendre ni breuvage ni nourriture, et le cur consum de tristesse par le dsir qu'elle avait de revoir sa fille la flottante tunique. Enfin la sage Iamb, s'abandonnant mille paroles joyeuses, parvint distraire l'auguste desse, la fit doucement sourire et rpandit le calme dans son me. Les aimables saillies de cette jeune fille la lui rendirent dans la suite toujours plus chre. Alors Mtanire lui prsente une coupe remplie d'un vin dlicieux. Elle le refuse, disant qu'il ne lui est pas permis de boire du vin ; mais elle demande qu'on lui donne

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    boire de l'eau mle avec de la farine dans laquelle on broierait un peu de menthe. Mtanire alors prpare ce breuvage et le lui prsente comme elle le dsire. L'auguste Do accepte par grce, et Mtanire commence l'entretien en ces termes : "Salut, trangre. Je ne puis croire que vous soyez issue de parents obscurs : vous tes certainement ne de hros illustres ; vos yeux sont resplendissants de grce et de pudeur comme ceux des rois qui rendent la justice. Quelles que soient nos peines, il faut savoir les supporter parce qu'elles nous viennent des dieux : c'est le joug qui pse sur notre tte. Puisque vous tes arrive en ces lieux, vous prendrez part tous les biens que je possde. Ayez soin de ce fils que les Immortels m'ont accord dans ma vieillesse l'instant o je ne l'esprais plus ; ce fils, objet