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HAL Id: hal-00895965 https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-00895965 Submitted on 1 Jan 1992 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Réflexions sur le concept de qualité dans l’agro-alimentaire. L’exemple de la filière lait fromage dans les Alpes du Nord Brigitte Dubeuf To cite this version: Brigitte Dubeuf. Réflexions sur le concept de qualité dans l’agro-alimentaire. L’exemple de la filière lait fromage dans les Alpes du Nord. INRA Productions Animales, Paris: INRA, 1992, 5 (2), pp.91- 101. hal-00895965

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HAL Id: hal-00895965https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-00895965

Submitted on 1 Jan 1992

HAL is a multi-disciplinary open accessarchive for the deposit and dissemination of sci-entific research documents, whether they are pub-lished or not. The documents may come fromteaching and research institutions in France orabroad, or from public or private research centers.

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, estdestinée au dépôt et à la diffusion de documentsscientifiques de niveau recherche, publiés ou non,émanant des établissements d’enseignement et derecherche français ou étrangers, des laboratoirespublics ou privés.

Réflexions sur le concept de qualité dansl’agro-alimentaire. L’exemple de la filière lait fromage

dans les Alpes du NordBrigitte Dubeuf

To cite this version:Brigitte Dubeuf. Réflexions sur le concept de qualité dans l’agro-alimentaire. L’exemple de la filièrelait fromage dans les Alpes du Nord. INRA Productions Animales, Paris: INRA, 1992, 5 (2), pp.91-101. �hal-00895965�

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Brigitte DUBEUF

INRA Unité de Recherches sur les

Systèmes Agraires et Développement,Route de Saint-Cyr - 78026 Versailles Cedex

Réflexionssur le conceptde qualité dansl’agro-alimentaire.L’exemple de la filièrelait fromage dans lesAlpes du Nord.

La qualité est un enjeu économique d’importance croissante sur les marchésdes produits agro-alimentaires. Elle est également un enjeu central desrelations entre les différents acteurs impliqués dans ces filières deproduction et dans l’aménagement d’un territoire. C’est pourquoi il nous estapparu intéressant de faire le point sur ce concept de qualité, en l’illustrantpar l’exemple de la filière lait-fromage d’une zone de montagne, où sonimpact est vital.

Depuis le début des années 80, la saturationdes marchés internationaux et la limitationde l’offre des produits agricoles imposée par laCommunauté Européenne ont profondémentmodifié le fonctionnement des marchés desproduits agro-alimentaires. Dans de tellesconditions, l’action sur les prix et les quanti-tés n’assure pas à elle seule l’ajustement del’offre et de la demande. La qualité des bienscontribue également à réguler l’activité écono-mique, comme l’énonce la théorie des conven-tions de l’économie de marché (Eymard-Duverney 1989).

On assiste en conséquence à un renforce-ment des règles propres à divers types de pro-duits, telles que les appellations d’origine, leslabels, les produits de l’agriculture biologique,l’appellation et la provenance "montagne", lacertification de conformité. Parallèlement,pour les entreprises, "faire de la qualité"apparaît désormais comme "le prix à payeraujourd’hui pour être encore sur le marché de

demain" (Valceschini 1991). Elles attaquent lemarché en le segmentant pour mieux cibler lademande, et diversifient leurs produits pour yrépondre de manière plus spécifique. Ellescherchent également à garantir le niveau dequalité de leur production, grâce à la mise enplace des systèmes d’assurance-qualité.A la veille de l’ouverture du marché unique

européen, nous nous proposons de faire lepoint sur le concept de "qualité" dans l’agro-alimentaire, et sur ses difficultés d’applicationen nous appuyant sur l’exemple du secteurlaitier, et plus particulièrement des filièreslait-fromage dans les Alpes du Nord.

Le présent article, destiné à faire réfléchirsur le concept de qualité à partir d’une explo-ration de la littérature française consacrée àce sujet, aborde d’une manière générale lanotion de qualité, à travers la perception deséconomistes, des technologues, puis des diffé-rents acteurs de la filière agro-alimentaire :producteurs, entreprises et consommateurs. Ilpropose ensuite une application de ce conceptde qualité à l’analyse des relations entre pro-ducteurs de lait et entreprises fromagères.Un prochain article traitera des outils mis

en place en vue du marché unique pour identi-fier et garantir la qualité des produits et del’entreprise, et s’interrogera sur leur adapta-tion concrète aux besoins d’une filière telleque la filière lait-fromage des Alpes du Nord.

Résumé ’

Le concept de qualité est soumis à des interprétations variées. La définition de laqualité des produits d’une filière n’est pas dictée uniquement par l’aval, mais résulted’un processus complexe, dans lequel les relations entre agents sont déterminantes.La mise en place d’une politique de qualité nécessite une mobilisation collective àl’échelle d’une filière. Une démarche de modélisation est proposée pour construiredes outils d’aide à la décision en matière de maîtrise de la qualité.

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1 / Le concept de qualité desproduits

l.i / Une grille de lecture : les &dquo;modesde définition&dquo; de la qualité

Dans le cadre du marché agro-alimentaire,la qualité des produits prend une place cen-trale, puisqu’elle participe activement à sarégulation. Comment aborder cette probléma-tique de la qualité, dont chacun s’empareaujourd’hui ? Comment comprendre ce que lesacteurs économiques mettent concrètementderrière ce terme ? Comment la Recherche

peut-elle les aider à concevoir et à instrumen-ter des politiques de qualité adaptées à leursbesoins ? Les réflexions actuelles sur les&dquo;modes de définition&dquo; de la qualité proposent,nous semble-t-il, un cadre d’analyse pertinentdes discours et des pratiques qui se dévelop-pent autour des politiques de qualité. C’est1&dquo;’économie des conventions&dquo; qui fournit le filconducteur nécessaire, en s’appuyant surl’étude des confrontations entre les agentséconomiques et qui amène à distinguer troismodes de définition de la qualité des produits(Sylvander 1991) :

* Le premier mode de définition se réfère àdes règles objectives, à des normes, quiconduisent à une standardisation des produitset des procédés de fabrication. On parle de&dquo;coordination industrielle&dquo; entre acteurs éco-nomiques.

* Le deuxième mode de définition est fondésur la fidélité, l’estime, la confiance enversune personne, le fromager par exemple, et/ouun produit et sa marque. On parle de &dquo;coordi-nation domestique&dquo;.

* Le troisième mode de définition repose surle prix du produit, établi selon le jeu de laconcurrence, de l’offre et de la demande. On

parle de &dquo;coordination marchande&dquo;.

A côté de ces formes de coordination quipeuvent fonder des principes d’évaluation dela qualité des produits, on distingue enfin uneforme de coordination fondée sur la solidaritécollective, telle que l’on peut la concevoir parexemple entre une coopérative, ses produc-teurs et ses clients : il s’agit alors de &dquo;coordi-nation civique&dquo; (Valceschini et Heintz 1991). >.

Selon leur logique de production, les entre-prises aménagent des compromis entre les dif-férentes formes de coordination. L’entreprisequi recherche l’amélioration des rendementset la réduction des coûts de production privilé-giera la coordination industrielle. Enrevanche, celle qui souhaite garantir le main-tien des modes de production et le renom de lamarque développera davantage les relationsdomestiques (Boisard et Letablier 1987). Il enrésulte que la définition de la qualité d’unproduit dépend le plus souvent d’une combi-naison entre les différentes formes de coordi-nation (Lebail et Valceschini 1990).

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également subi une évolution sensible, qui vaglobalement dans le même sens. Un produitalimentaire, un fromage par exemple, se défi-nit à travers de multiples composantes, quijouent toutes un rôle dans son éventuel succèscommercial (encadré 1). Ce panorama montrel’importance et la complexité des paramètresde qualité qui vont entrer dans l’identificationd’un produit.

Composantes entrantdans la définition d’un produit

(source : Buron 1990)

- L’objet (le produit en lui-même ; saforme ; son emballage).

- Sa dénomination.

- Sa marque commerciale.

- Les composants du marketing : politiquedes prix ; politique de publicité ; politiquede distribution.

- Son image pour le consommateur.

De nombreux auteurs ont étudié la séman-tique de la qualité des produits. Ce concept asubi une évolution parallèle à celle des exi-gences du marché, que Buron (1990) résumeen trois étapes :

1 - La qualité d’un produit se définit comme&dquo;l’ensemble des propriétés de l’aliment per-mettant une consommation satisfaisante&dquo; ;

2 - La qualité d’un produit se définit comme&dquo;une meilleure aptitude pour la consomma-tion&dquo; ;

3 - La qualité d’un produit se définit comme&dquo;l’adaptation à son emploi&dquo; (Juran 1974).

La première définition fait référence auxnormes dictées par les technologues et lesscientifiques. Elle fige la qualité pour un pro-duit donné. Dans ce sens, la qualité s’oppose àla non-qualité. Le désir du consommateurn’est, en pratique, pas pris en compte. Lescomposantes de la qualité qui sont prises enconsidération sont intrinsèques au produit et,pour la plupart, objectives et quantifiables(composition en éléments nutritifs, caractéris-tiques bactériologiques, etc.).La troisième définition ne parle plus de

&dquo;consommation satisfaisante&dquo;, ni mêmed&dquo;’aptitude à la consommation&dquo;, mais d&dquo;’adap-tation&dquo; à un emploi non précisé. Elle exprimele fait réel que l’obtention d’un bon niveau dequalité, et la satisfaction du consommateurfinal, passe par la satisfaction de toutes lespersonnes ayant une relation avec le produit :les consommateurs bien sûr, mais aussi tousles intervenants des circuits de fabrication etde distribution, les producteurs et leurs

conseillers techniques, etc. A l’échelle de l’en-treprise, cette définition introduit le conceptde &dquo;qualité totale&dquo; (Juran 1974), qui prend encompte l’ensemble des clients et des fournis-seurs internes, et répond à l’idée que la qua-lité doit être élaborée pas à pas à l’intérieurde l’entreprise (Buron 1990).Cette définition attire également l’attention

sur l’importance de l’identification précise de1&dquo;’emploi&dquo; des produits, en rapport avec le pro-cessus d’élaboration de la qualité : un produitdoit être adapté aux spécifications imposéespar son emploi. Ces spécifications précisentun certain nombre de conditions que le pro-duit doit remplir pour satisfaire l’utilisateur.Elles fixent les objectifs qui permettentd’orienter les actions de l’entreprise dans unedirection conforme à l’obtention de la qualité(Faillenet 1985, non publié). Les scientifiques,les techniciens, l’Administration, les profes-sionnels et tous ceux qui interviennent dansl’élaboration de ces spécifications ont lacharge de &dquo;traduire la voix du consommateur,mais sans introduire leur propre voix&dquo; (Buron1990). La qualité du produit est évaluée grâceà un ensemble de critères qui doivent per-mettre de juger de sa conformité vis-à-vis desspécifications : la pertinence du choix de cescritères est donc essentielle pour la réussited’une politique de qualité (figure 1).La qualité attendue variant selon les utili-

sateurs et les différentes occasions de consom-mation, il est nécessaire de détecter avec pré-cision les demandes du marché et de bien

La qualité d’unproduit prend encompte sescaractéristiquesintrinsèques, parexemple sacomposition, maisaussi un ensemblede critèrestraduisant son

adéquation à lademande duconsommateur.

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Pour les fromagestraditionnels de mon-

tagne, le positionnement tcommercial haut de

gamme est très lié à

l’image d’un fromage deterroir, au goût &dquo;typé&dquo;, &dquo;,issu de systèmes de

production respectueuxdes paysages alpins.

cibler chaque segment de marché. En défini-tive, la qualité d’un produit dépend du degréd’adéquation entre les caractéristiques dequalité du produit conçu et mis sur le marchéd’une part, celles du produit attendu par l’uti-lisateur d’autre part.

S’il existe actuellement un consensus despartenaires de l’agro-alimentaire pour définirle concept de qualité, conformément à lanorme AFNOR (NF X 50.109), comme &dquo;l’en-

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dans les Alpes du Nord pourraient être clas-sés comme suit :

- qualité bactériologique : nombre degermes, de cellules, absence de résidu d’anti-biotiques,

- qualité technologique : taux protéique,nombre de spores butyriques ;

- qualité sensorielle : odeur, goût, couleur,texture ;

- qualité d’usage : régularité des caractéris-tiques de la matière première, adaptation duvolume de laits livrés au marché du fromage ;

- qualité psycho-sociale : conformité àl’image d’une production traditionnelle de fro-mage de terroir, respectueux de l’environne-ment et des traditions locales.

La décomposition de la qualité du produiten caractéristiques pouvant faire l’objet demesures objectives permet d’harmoniser et denormaliser les critères de qualité ; elle tendvers la recherche d’une qualité standardiséedu produit. La fonction d’usage, qui fait appelaux préférences diversifiées des consomma-teurs, renvoie davantage le jugement de laqualité du produit à un mode d’évaluationmarchand, sanctionné par le jeu des prix(Eymard-Duverney 1989).

2 / Le concept de qualité ausein d’une filière

Les différents acteurs économiques d’unefilière n’ont pas les mêmes besoins ni la mêmedemande de qualité sur les produits de lafilière. A un même niveau de la filière, les per-ceptions de la qualité peuvent en outre êtretrès différentes.

2.i / Les producteurs et la qualitéReprenons l’exemple de la filière lait-fro-

mage de montagne : tous les producteurs n’ontpas la même attitude vis-à-vis de la qualité dulait. Si la formule de fixation du prix du lait,qui tient compte de sa composition chimiqueet de critères bactériologiques, incite collecti-vement les producteurs à rechercher une qua-lité qui leur rapportera davantage, la gammedes laits livrés n’en reste pas moins très large,y compris sur les critères de qualité en ques-tion.

Cela est particulièrement net en zone demontagne, où les contraintes liées au milieuphysique, aux structures d’exploitations etaux différents types de fromages fabriquéssont fortes, et où les objectifs des producteurspeuvent être très divers : réduction des coûtsde production, aménagement du temps de tra-vail en relation avec une double activité liéeau tourisme, valorisation d’un patrimoinereçu en héritage, amélioration de la producti-vité du travail par l’augmentation du niveaude production du troupeau, etc.. Aussi, lestechniques et les pratiques de production

sont-elles variées. Certaines sont détermi-nantes pour la qualité des laits (Gilibert et al1987). Mais leurs effets sur les performanceslaitières peuvent être différents d’un typed’exploitations à un autre (Coulon et al 1990).

Les exigences en matière d’approvisionne-ment pour la fabrication d’un fromage tel quele reblochon ne sont pas les mêmes pour une

fromagerie industrielle que pour une fromage-rie traditionnelle, car la perception de la qua-lité du lait est différente. Pour la première, laqualité du lait est plus à rechercher dans descritères bactériologiques et technologiques.Pour la seconde, ces critères de qualité sontégalement pris en considération, mais ils sontétendus à l’influence (encore mal connue) des

caractéristiques du terroir, des pratiques tra-ditionnelles et des moyens de production indi-gènes sur les aptitudes fromagères du lait quidécoulent de sa composition chimique et de saflore microbienne naturelle ainsi qu’à leurinfluence sur l’image associée au produit finidans l’esprit du consommateur.

Ainsi, dans une filière donnée, les produc-teurs comme les transformateurs peuvent-ilsavoir des perceptions et des attitudes trèsdiverses vis-à-vis de la qualité du lait. Lesrelations entre tous ces agents économiquesau sein de la filière intègrent nécessairementcette diversité d’approche, et la maîtrise col-lective de la qualité doit en tenir compte. Pourmaintenir inchangées tout au long de la filièreles valeurs qui fondent la qualité des produits,il est important, à cet égard, que les produc-teurs eux-mêmes aient une perception clairedu positionnement du fromage sur le marché,et donc de ce qui fait sa qualité.

2.2 / Les entreprises et la qualitéTravailler pour la qualité d’un produit au

sein d’une entreprise demande une prise deconscience à l’ensemble des acteurs de la&dquo;chaîne alimentaire&dquo; depuis le producteur delait jusqu’au consommateur. Depuis le débutdes années 90, quelques entreprises laitièresont fait de la politique de qualité un élémentmajeur de leur stratégie, et tentent d’orienterleur politique de marketing vers la satisfac-tion des besoins du consommateur. Elles sontencore très minoritaires.

De nombreux auteurs français (Multon etDavenas 1985), japonais et américains se sontpenchés sur la politique de l’entreprise enmatière de qualité. Cette politique se définitpar un projet, autour duquel le groupe socialreprésenté par l’entreprise va s’organiser et sestructurer.

L’élaboration de la qualité d’un produitpasse successivement dans l’entreprise parquatre étapes complémentaires, qui nécessi-tent de sa part quatre qualités distinctes(Bonnome 1990 non publié) :

1 - la connaissance du besoin, qui nécessited’être en permanence à l’écoute du consomma-teur (qualité d’écoute) ;

Les différentsintervenants d’une

filière contribuent àl’élaboration de la

qualité selon desconceptions et descritères parfois trèsdivers - D’où lanécessité de définircollectivement un

concept de qualitéqui puisse traverserl’ensemble de la

filière.

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2 - la pertinence du choix des spécifications,qui doivent être adaptées aux attentes identi-fiées, de manière à garantir au produit undegré de satisfaction donné du besoin (qualitéde conception) ;

3 - l’adaptation de l’appareil de production àla fabrication programmée, qui permet de réa-liser les produits conformément aux spécifica-tions (qualité de réalisation) ;

4 - l’aptitude à détecter des &dquo;dérives de qua-lité&dquo;, la mise en évidence de leurs causes etl’élaboration des actions correctives néces-saires pour obtenir la satisfaction visée desconsommateurs envers les produits (qualitéd’usage).Ces étapes renvoient à des fonctions diffé-

rentes de l’entreprise. Il faut donc, pour lesatteindre, développer la motivation, la cohé-rence et la compétence de l’ensemble du per-sonnel.

Dans le cas de l’approvisionnement des fro-mageries en lait, l’étape 1 consiste de leur

part à positionner leur fromage par rapport àun créneau de marché bien identifié ; l’étape 2à formuler clairement leurs exigences enmatière de qualité du fromage et donc de qua-lité du lait (cahier des charges), les étapes 3 et4 à s’informer sur la fréquence et l’importancedes livraisons non conformes et à mettre en

place les procédures susceptibles de les sup-primer, et d’aboutir au strict respect du cahierdes charges. Les deux principaux moyens d’ac-tion dont usent concrètement les entrepriseslaitières vis-à-vis de leurs fournisseurs sontd’une part l’information et le conseil délivréspar leurs services techniques, d’autre part lagrille de fixation du prix du lait en fonction desa qualité.

La réussite de la stratégie de qualité de l’en-treprise repose sur une bonne connaissance deses objectifs et de ses moyens (matières pre-mières, process, matériels, hommes). Les&dquo;outils de la qualité&dquo; qui seront présentésdans un prochain article, contribuent à cetteréussite.

L’entreprise doit donc s’efforcer de fournirdes produits dont les caractéristiques sontdéfinies en fonction de demandes spécifiques.D’après une étude du Groupe Internationalsur les Recherches Alimentaires (GIRA) quicherche à préciser les segments de marché dufromage de l’an 2000 (tableau 2), les petitesentreprises laitières, pour acquérir un avan-tage concurrentiel face à la présence de plusen plus vive des mégacoopératives et des mul-tinationales, devront privilégier deux axes dedéveloppement : l’innovation et le travail surdes produits de terroirs type AOC (Richard1990).

2.3 / Les consommateurs et la qualitéLes études menées ces vingt dernières

années sur l’analyse des déterminants de laconsommation alimentaire montrent que si lestatut social et le niveau des ressources res-tent des critères discriminants pour la diffé-renciation des consommations (Bourdieu1979, Grignon et Grignon 1980), &dquo;la structuredes emplois du temps des ménages&dquo; (Herpin1980), donc le mode de vie et le manque detemps (Sylvander 1988), influent fortementsur les attitudes des consommateurs vis-à-visdes caractéristiques d’usage des produits.

Parallèlement, les consommateurs recher-chent une plus grande sécurité alimentaire.Le &dquo;poulet aux hormones&dquo; a été en quelquesorte un révélateur. La part croissante desproduits industriels ne fait qu’amplifier l’in-certitude des consommateurs sur les qualitésdes produits alimentaires. Cette incertitudese concrétise par la recherche de produitspour lesquels le recours à une pratique tradi-tionnelle et/ou artisanale pourrait être garan-tie et par l’intérêt accru pour les produits dits&dquo;naturels&dquo;, &dquo;frais&dquo; et &dquo;biologiques&dquo; (Sylvanderet al 1986).

De fait, l’étude précitée du GIRA sur le mar-ché du fromage en l’an 2000 fait ressortir dessegments de marché en plein essor (Richard1990) :

- un marché basé sur la &dquo;praticité d’utilisa-tion&dquo; : le consommateur attend des produitsadaptés aux différentes occasions de consom-mation, par exemple les fromages emballés enparts individuelles.

- un marché développant la composante&dquo;naturelle&dquo; : Dans cette optique, les fromagestraditionnels, les fromages frais et les fro-mages naturels (ni allégés, ni enrichis) ont debonnes perspectives de développement.

- un marché des produits dits &dquo;nutrition-nels&dquo; ou diététiques (allégés en matièresgrasses, appauvris en cholestérol, enrichis envitamines, etc.).

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Si les consommateurs se trouvent dans l’in-certitude face à la qualité des produits, ils lesont également face aux facteurs de produc-tion de cette qualité. L’exemple connu duPoulet Label le démontre : le consommateurdéfinit sa qualité supérieure par une bonneadhérence de la viande sur la carcasse et l’ex-plique par la spécificité de l’alimentation(Sylvander 1991), alors que ce critère de qua-lité est fortement corrélé avec l’âge à l’abat-tage (Touraille et al 1981).

La qualité des produits et le respect de l’en-vironnement sont des préoccupations qui sesont affirmées au fil de ces vingt dernièresannées. Aussi sont-ils souvent associés dansl’esprit du public comme dans de nombreuxdiscours politiques. Or, ce sont deux pro-blèmes très différents, qui peuvent difficile-ment être résolus simultanément, d’une partà cause de leur spécificité respective, d’autrepart en raison de leur statut économique diffé-rent (usage privatif pour le premier, collectifpour le second), ainsi que le relève Thiébaut(1991). Les produits d’Appellation d’OrigineContrôlée jouent certes sur la relation qualité-environnement. Ainsi certains fromagesappuient-ils leur publicité sur la qualité d’unpaysage préservé. Mais si la nature du terroircontribue bien à la qualité des produits, l’im-pact sur l’environnement des systèmes de pro-duction qui élaborent ces produits est rare-ment envisagé.Des catégories de consommateurs recher-

chent même des produits élaborés dans le res-pect de certaines valeurs sociales, qui contri-buent au maintien de la qualité de l’environ-nement, et cela indépendamment de la qualitéintrinsèque du produit (Thiébaut 1991). Maisla plupart des demandes des consommateurssont satisfaites par des produits qui ont enréalité, directement ou non, une incidence deplus en plus négative sur l’environnement(demande d’emballage, de réfrigération...). Onpeut donc penser que le marché des produitsde qualité &dquo;respectueux de l’environnement&dquo;ne se développera à terme que si s’instaurevéritablement une convergence entre d’unepart la qualité des produits et d’autre partl’incidence sur l’environnement des pratiquesliées à leur production.

3 / Le concept de qualité desproduits agricoles

3.i / Qualité &dquo;interne&dquo; et qualité&dquo;externe&dquo;

Plus encore qu’un produit alimentaire, leproduit agricole destiné à la transformationest souvent perçu à travers son système deproduction. Ceci est lié en partie à un élargis-sement de la conception de la qualité chez lesparticipants de la filière. Aussi, pour des pro-duits agricoles, ce concept comporte générale-ment deux volets (Demeyer 1991, Thiébaut1991) :

- la qualité &dquo;interne&dquo;, ou qualité directementliée au produit ;

- la qualité &dquo;externe&dquo;, ou qualité &dquo;indirecte&dquo;,liée à son système de production. Dans le casd’une demande de produits &dquo;respectueux del’environnement&dquo;, la qualité &dquo;externe&dquo;, définiecomme &dquo;le respect par les processus de pro-duction d’un certain nombre de valeurs&dquo;(Thiébaut 1991), devient fondamentale. LeBeaufort, par exemple, véhicule l’image d’unemontagne humanisée et s’accomoderait mald’une montagne en friche.

Aux yeux des entreprises laitières, l’organi-sation de la production et de la collecteentrent dans la définition de la qualité du lait.La gestion de la qualité du lait consiste eneffet à maîtriser non seulement des critèresbactériologiques, technologiques, mais aussila variation au cours de l’année du volumelivré sur l’ensemble de la zone de collecte. Lefait qu’il soit possible de payer au même prix,dans la même entreprise, deux laits de qualitébactériologique et technologique très diffé-rente (tableau 3), ou à l’inverse que le prixd’un lait de qualité constante varie selon lasaison montre clairement que le concept dequalité du lait inclut, pour les entreprises, saqualité externe.

3.2 / Analyse de la qualité d’unproduit agricole : le lait

D’un point de vue technique ou économique,la qualité du lait, telle qu’elle est évaluée parles critères définis plus haut, peut être consi-

Le prix du laitdestiné à la

fabricationfromagère tientcompte nonseulement des

caractéristiquestechnologiques etbactériologiquesmais aussi decritères tels que lemois de production.

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dérée comme une performance de production,dans la mesure où ce terme désigne précisé-ment tout indicateur ou combinaison d’indica-teurs permettant de juger de la qualité d’unanimal, d’un système d’élevage ou d’un pro-cessus de production (Landais 1987). A la dif-férence d’autres performances de production,la qualité du lait apparaît certes complexe,aussi bien par son mode de définition que parson objectivation, et la part de subjectivitédans la définition de la qualité peut être trèsimportante. Néanmoins, cette assimilation dela qualité à une performance particulière al’intérêt de situer le problème de sa maîtrisedans une problématique plus générale, qui estcelle de la &dquo;modélisation de l’élaboration des

performances&dquo; (figure 2). L’objectif de ce cetype de démarche consiste à fournir auxacteurs concernés des outils d’aide à la déci-sion, principalement pour ce qui concerne leschoix stratégiques, qui sont au centre dudébat sur les politiques de qualité.Cette problématique intègre les questions

relatives au mode de définition et à l’objecti-vation de la qualité. Son mode de définitionrelève des systèmes de relations entre produc-teurs et organismes collecteurs de lait(Boisard et Letablier 1987, Eymard-Duverney

Relations entre producteurs agricoleset entreprises laitières dans les Alpesdu Nord : la fixation du prix du lait.

Pour préserver le consommateur, l’Admi-nistration impose de strictes règles hygié-niques et sanitaires, qui normalisent ladéfinition et les modes d’évaluation descaractéristiques bactériologiques (germes,cellules, résidus d’antibiotiques) qui ontune répercussion directe sur la qualité dulait. Les entreprises réagissent en instau-rant un paiement du lait différent selon laclasse bactériologique. De même, poursatisfaire aux exigences de la transforma-tion fromagère, l’entreprise peut être ame-née à normaliser des critères technolo-giques (taux protéique, spores butyriques,lipolyse), qui vont alors intervenir dans lesmodalités d’évaluation du lait. Mais cer-tains paramètres entrant dans la fixationdu prix du lait, et surtout du &dquo;prix de base&dquo;,peuvent échapper totalement à l’entreprise.Dans l’Isère, la fixation du prix de base estliée à un consensus entre entreprises. Elledépend en Savoie comme en Haute-Savoiede la moyenne pondérée nationale del’Emmental Est Central. Mais en Haute-Savoie elle est soumise aussi au jeu de laconcurrence entre l’offre et la demande delait, et diffère selon la zone d’appellation(Reblochon ou Emmental). Enfin, dans lescoopératives en gestion directe de Savoie,elle fluctue avec le marché du fromage.

1989, Valceschini 1991). La question ne sepose donc pas sous une forme unique et géné-rale pour une filière de produits donnée, maissous des formes variées selon la stratégie desentreprises et la &dquo;panoplie&dquo; de producteurs dechacune d’entre elles. Ce tissu de relationsentre producteurs et entreprises repose surdes confédérations sociales et économiques,parfois très localisées (Caneill et Capillon1990). La gestion des quotas laitiers, lesmodalités d’évaluation et de paiement du lait,le niveau local de la concurrence, les rapportsde force établis entre producteurs, transfor-mateurs et affineurs, le réseau relationnel(agents de Développement, agents commer-ciaux), etc., en forment la trame. Tous ces élé-ments exercent une influence sur la gestion dela qualité. La diversité des méthodes de fixa-tion du prix du lait dans les Alpes du Nordillustre bien la complexité de ce type de pro-blème (encadrés 2 à 4).

Il est clair que la qualité du lait recherchéepar l’entreprise est en partie dictée par l’aval :

- d’une part, la qualité intrinsèque d’un fro-mage est en étroite relation avec celle du lait,et sa qualité &dquo;externe&dquo; avec l’image des sys-tèmes de production et des paysages agraires ;

- d’autre part, le caractère saisonnier deslivraisons de lait doit être pris en compte nonseulement pour des raisons techniques (il

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peut pénaliser la fabrication de certains fro-mages), mais aussi parce que le planning deproduction doit s’adapter à la saisonnalité dela demande. C’est pourquoi le prix du lait, àqualité intrinsèque constante, varie large-ment au cours de l’année, avec une amplitudedifférente selon le contexte (figure 3).

La qualité de la matière première souhaitéepar l’entreprise dépend également de son pro-cess (techniques de production et contraintesde fabrication) et probablement, dans une cer-taine mesure, de la perception qu’elle a de sesproducteurs-fournisseurs et de leur offre dequalité, comme l’ont montré Lebail et

Valceschini (1990) dans le secteur du blé durdestiné à la semoulerie-patisserie. La repré-sentation que se fait l’entreprise de sa zone decollecte, du point de vue de la géographieagraire mais aussi à travers la diversité per-çue des systèmes de production mis en œuvrepar ses fournisseurs (en termes d’atouts et decontraintes vis-à-vis de la qualité du produitlivré), peut donc exercer une influence sur ladéfinition de la qualité qu’elle recherche !

La qualité du lait recherchée par l’entre-prise se traduit par le choix des critères dequalité, qui sont définis, comme nous l’avonsvu, en conformité avec les spécifications. Dansle cas d’un fromage d’Appellation d’OrigineContrôlée (AOC) fabriqué au lait cru, ces spé-cifications sont imposées par le décret relatif àl’AOC, par les dispositions réglementairesconcernant les laits crus (décret du 21 mai1955) et la liste des critères microbiologiquesauxquels doit satisfaire le lait destiné à latransformation (arrêté du 17 septembre1984).

Relations entre producteurs agricoleset entreprises laitières dans les Alpesdu Nord : la gestion des quotas laitiers.(source : Buisson et Guglielmi 1990).

En Savoie, les quotas laitiers sont géréspar un GIE départemental, qui est l’uniqueacheteur ONILAIT. Cette situation a per-mis à la zone de production de Beaufort decontinuer à progresser en lait. Dans cetterégion, les fruitières fabriquent un fromagede qualité, dont la demande est soutenue.La forte croissance de la production laitièreest assurée par des petits livreurs. Pourmaintenir cette croissance, les fruitièresn’hésitent pas à soutenir, voire à pousserleurs producteurs. En revanche, dansd’autres zones du département, certainescoopératives, par crainte des pénalités, ontfreiné leurs producteurs, entraînant mêmeun renversement de situation se traduisantpar une diminution trop importante de leurlivraison de lait ! En Haute-Savoie, un sys-tème de prêt de quotas assure à tous lesproducteurs ayant besoin de croissance lesdroits à produire nécessaires. En pratique,il a surtout bénéficié aux gros livreurs.

La modélisation du processus d’élaborationd’une performance, en vue d’une meilleuremaîtrise de son obtention, passe par unephase de décomposition de la performance glo-bale en composantes, puis par une phased’analyse des facteurs de variation de chaquecomposante et des pratiques par lesquelles lesopérateurs peuvent intervenir pour modifierdans un sens ou dans un autre le niveau deces composantes. A l’échelle d’un systèmecomplexe, cette modélisation suppose que l’onconnaisse tous les phénomènes biotechniquesmis en jeu, mais également la manière spéci-fique dont ils se combinent, en raison des mul-tiples interactions possibles (Landais 1987).

Dans la perspective d’une meilleure maî-trise de la qualité dans une filière fromagèrede montagne, considérée comme un systèmecomplexe piloté par les acteurs de ses diffé-rents niveaux d’organisation, le &dquo;processusd’élaboration de la qualité du lait&dquo; pourraitainsi être étudié, en suivant cette démarche, àla lumière du processus global de la filière(production-transformation-commercialisa-tion-consommation) et de l’analyse des rela-tions entre ses divers participants. L’une desretombées attendues d’une telle étude pour-rait consister à amener les entreprises lai-tières à améliorer la représentation qu’elles sefont de leur bassin de collecte et à adopter despolitiques de qualité plus diversifiées, plus

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Relations entre producteurs agricoles etentreprises laitières dans les Alpes duNord : le partage de la valeur ajoutée.

Dans certaines filières fromagères protégéespar une appellation d’origine, les acteurséconomiques ont mis en place des stratégiesde différenciation des produits et des méca-nismes puissants de protection du marché.Ces filières ont bénéficié ainsi d’une rente demonopole, dont la redistribution a été plusou moins bénéfique aux producteurs selon lerapport de force entre les producteurs, lestransformateurs et les affineurs (Perrier-Cornet 1990).

Le Beaufort a su générer, par un positionne-ment haut de gamme, une forte valeur ajou-tée, qui profite largement aux producteursorganisés en fruitières. Le cas du reblochonest plus complexe, en partie du fait de la seg-mentation de son marché. La filière reblo-chon laitier bénéficie également d’une valeurajoutée élevée, qui a été accaparée en grandepartie par les transformateurs. Toutefois, leprix payé aux producteurs de lait, quoiqueplus fluctuant que celui de la zone Beaufort,est relativement élevé, grâce à la créationdes zones d’appellation. Dans le segment defilière occupé par le reblochon fermier, lesproducteurs-fromagers profitent plus complè-tement de la forte valeur ajoutée du produit.

pertinentes et au total plus efficaces, face à ladiversité de leurs livreurs.

Conclusion

Cette rapide revue des manières d’aborderle concept de qualité et de ses principales dif-ficultés d’emploi fait ressortir les élémentssuivants :

- La mise en place d’une véritable politiquede qualité relève d’une démarche collective àl’échelle de la filière, à l’intérieur de laquellecoexistent généralement, selon les partici-pants, des conceptions et des stratégies trèsdiverses en matière de qualité. Ceci résulte àla fois de la diversité de ces acteurs et des dif-férentes formes de coordination pouvant exis-ter entre eux. La principale difficulté consistedonc à identifier et négocier collectivement unconcept de qualité qui puisse être partagé partous, et traverser l’ensemble de la filière. Il

semble important, en particulier, que les pro-ducteurs agricoles comme les entreprises detransformation aient une claire perception dupositionnement du produit final sur le mar-ché, et donc une bonne compréhension de lademande de qualité. De plus, la motivation etla mobilisation de l’ensemble du personnel del’entreprise apparaissent comme des élémentsessentiels d’une politique de qualité.

- Tous les acteurs d’une filière intervien-nent, directement ou indirectement, à diffé-rents niveaux du processus d’élaboration de laqualité d’un produit (mode de définition, éva-luation, élaboration proprement dite). Cettequalité résulte d’un processus complexe, danslequel les relations entre agents sont détermi-nantes. Une voie possible, pour aborder ceprocessus dans sa complexité, est celle de lamodélisation systémique. Le concept actuel dequalité se développe en effet, de manière plusou moins explicite, à partir d’une perceptiontrès systémique du fonctionnement desfilières, depuis la production jusqu’à la mise

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en marché. Il en ressort que l’instruction de cetype de dossier relève désormais dedémarches pluridisciplinaires intégrées asso-ciant chercheurs et praticiens dans le cadred’un partenariat d’un nouveau type et d’unedémarche de recherche-action (Avenier 1989).

Travail réalisé dans le cadre du programmeRecherche-Déueloppement des Alpes du Nord -(GIS, 1 rue du Château, 73000 Chambéry).

Remerciements

L’auteur remercie Geneviève Baud, Annie Soyeux et EgizioValceschini, pour leur aide déterminante dans la recherchedes documents qu’elle a utilisés et leurs conseils construc-tifs, ainsi que Jean-Baptiste Coulon, Gérard Larrieu etEmmanuel Mingasson, pour leur lecture critique. Mercienfin à Etienne Landais, pour l’appui qu’il a fourni à laconception et à la rédaction de ce texte.

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Summary

Reflexions on the concept of quality of agriculturalproducts. The example of milk for cheese in frenchNorth Alps.The concept of quality leads to different interpre-tations. Agricultural product quality is not mecha-nically controlled by demand, but is the result of acomplex process, in which relationships betweenproducers and firms are very important. To set up

a quality strategy a collective mobilization ofthese agents is required. A modelling approach isproposed for the construction of decision makingaids that will enable economic actors to bettercontrol the quality of their products.DUBEUF Brigitte, 1992. Reflexions sur le concept de qua-lité dans I’agro-alimentaire. L’exemple de la fili6re laitfromage dans les Alpes du Nord. INRA Prod. Anim., 5 (2),91 - 101.