Poly n°144 Novembre 2011

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MAGAZINE Richard Brautigan Relecture à La Filature St-Art & Thrill L’art contemporain à Strasbourg Pompidou-Metz “L’effet Bilbao” sur la ville Dossier L’Alsace sait faire un bon café N° 144 NOVEMBRE 2011 www.poly.fr les Bouroullec campent à Metz

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Poly, le magazine où la culture se cultive

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MAGAZINERichard BrautiganRelecture à La Filature

St-Art & ThrillL’art contemporain à Strasbourg

Pompidou-Metz“L’effet Bilbao” sur la ville

DossierL’Alsace sait faire un bon café

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CENTRE D’ART CONTEMPORAINLA SYNAGOGUE DE DELME

EXPOSITIONS 2011-2012Les mille rêves de Stellavista 17 octobre 2011-05 février 2012Exposition collective avec Ignasi Aballi, Stanley Brouwn, Daniel Buren, Clino Castelli, Delphine Coindet, Dunne & Raby, Michel François, Peter Friedl, Tamar Guimaraes, Susan Hiller, Sherrie Levine, Louise Hervé & Chloé Maillet, Gianni Pettena, R&Sie(n)… et quelques apparitions fantasmagoriques

Louise Hervé & Chloé Maillet25 février-13 mai 2012

Erick Beltrán1er juin-13 septembre 2012

COMMANDE PUBLIQUEGue(ho)st House - Berdaguer & PéjusInauguration été 2012 Réaménagement des abords du centre d’art et création de nouveaux espaces d’accueil des publics

À 1/2h de Metz et Nancy, 1h30 de Strasbourg / www.cac-synagoguedelme.org

Gue(ho)st House, Berdaguer & Péjus, Etude pour la commande publique, Image numérique : Gaëtan Robillard

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BRÈVES

NY No WaVEL’Auditorium du Musée d’Art Moderne et Contemporain de Strasbourg va prendre des allures de club new-yorkais enfumé des années 1980, mercredi 30 novembre. Anika sera-t-elle accompagnée de Geoff Barrow (Portishead), producteur de son disque composé essentiellement de captivantes reprises (Dylan, Yoko Ono, Kinks…) version post-punk et dub, dans la veine de P.I.L. ou de Leslie Winer, chanteuse androgyne proche de Basquiat ? www.musiques-volantes.org – www.musees.strasbourg.eu

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GIRLS YoU KNoW IT’S TRUEParfois comparé à MGMT, Girls (en concert à Strasbourg vendredi 18 novembre à La Laiterie) suit une trajectoire similaire. Un premier album remarqué qui débarqua avec tambours, trompettes et tapis rouge, suivi d’un second (Father, Son, Holy Ghost), moins tape-à-l’œil, plus sensible, mettant en exergue les talents de songwriting du duo américain. Girls, je vous aime. www.artefact.org

C’est le mois idéal pour souhaiter un joyeux anniver-saire à l’agence de communication Novembre qui fête ses vingt ans. Créée à Strasbourg en mars (hé oui…) 1991, la boîte orange (la couleur qu’elle s’est choisie) a opté pour un nom faisant référence à la période « où l’on prépare les champs pour les plantations de prin-temps », nous informe Emmanuel Knafou, co-fonda-teur d’une société résolument pragmatique et vision-naire. Comptant aujourd’hui plus d’une soixantaine de personnes réparties sur trois sites (Strasbourg, Paris

depuis 2004 et Lyon dès 2005), Novembre sait s’adap-ter à un marché en constante mutation. Pub, promo, digital… l’agence indépendante – qui compte Mars, BMW, Adidas, le Bioscope, la Place des Halles, le Cré-dit Mutuel, Meteor ou le CRT Alsace (Alsacez-vous !) parmi ses clients – garde sans cesse les yeux tournés vers l’innovation. Un bon sens « terrien » qui n’est sans aucun doute pas étranger à sa longévité. www.novembre.com

HaPPY BIRTHdaY NoVEmBRE

CENTRE D’ART CONTEMPORAINLA SYNAGOGUE DE DELME

EXPOSITIONS 2011-2012Les mille rêves de Stellavista 17 octobre 2011-05 février 2012Exposition collective avec Ignasi Aballi, Stanley Brouwn, Daniel Buren, Clino Castelli, Delphine Coindet, Dunne & Raby, Michel François, Peter Friedl, Tamar Guimaraes, Susan Hiller, Sherrie Levine, Louise Hervé & Chloé Maillet, Gianni Pettena, R&Sie(n)… et quelques apparitions fantasmagoriques

Louise Hervé & Chloé Maillet25 février-13 mai 2012

Erick Beltrán1er juin-13 septembre 2012

COMMANDE PUBLIQUEGue(ho)st House - Berdaguer & PéjusInauguration été 2012 Réaménagement des abords du centre d’art et création de nouveaux espaces d’accueil des publics

À 1/2h de Metz et Nancy, 1h30 de Strasbourg / www.cac-synagoguedelme.org

Gue(ho)st House, Berdaguer & Péjus, Etude pour la commande publique, Image numérique : Gaëtan Robillard

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#3 Salon du tourisme &de l’économie solidaire

#27 Salon Internationaldu Tourisme & des Voyages

Plongez-vous dans les décors d’un Palais des Mille et Une Nuitsà la découverte de l’ancien pays des Rois !www.sitvcolmar.com • INFO : 03 90 50 50 50

11-13 NOV. 2011COLMAR - 68 I FRANCEPARC DES EXPOSITIONS

L’Inde des MaharajasExposition événement

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MINISTÈREDES

AFFAIRES ÉTRANGÈRESET EUROPÉENNES

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#3 Salon du tourisme &de l’économie solidaire

#27 Salon Internationaldu Tourisme & des Voyages

Plongez-vous dans les décors d’un Palais des Mille et Une Nuitsà la découverte de l’ancien pays des Rois !www.sitvcolmar.com • INFO : 03 90 50 50 50

11-13 NOV. 2011COLMAR - 68 I FRANCEPARC DES EXPOSITIONS

L’Inde des MaharajasExposition événement

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MINISTÈREDES

AFFAIRES ÉTRANGÈRESET EUROPÉENNES

BRÈVES

ÉCLaTS dE

VERREEntre Venise-Murano et l’Alsace, le verre prend tout son éclat. À l’occasion de la Biennale internationale qui lui est consacrée jusqu’au 28 novembre, plusieurs manifestations sont organisées sur l’ensemble de la région (Cour des Boecklin, MAMCS, Musée Würth, La Chaufferie, etc.), célébrant avec brio, autour de figures tutélaires comme Maurice Marinot, un matériau qui n’en finit pas d’inspirer les créa-teurs. www.biennaleduverre.com

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Des natures mortes animalières de Dürer à Kokoschka, en passant par Chardin ou Goya… Cent vingt-cinq

œuvres, de la Renaissance au XXe siècle, sont réunies à l’occasion de la vaste exposition La beauté et la mort,

du 19 novembre au 19 février 2012, à la Staatliche Kunsthalle de Karlsruhe.

www.kunsthalle-karlsruhe.de

J.S. Chardin, Perdrix morte, poire et collet sur une table de pierre, 1748 © Blauel/Gnamm

ARTOTHEK

maRIoNNETTISTELe 1er janvier 2012, Renaud Herbin prendra les rênes du Théâtre Jeune Public, succédant à Grégoire Cailles. Diplômé de l’École nationale supérieure des Arts de la marionnette (Charleville-Mézières) et co-fondateur de la compagnie LàOù, il saura jouer des bonnes ficelles. On vous en reparle bientôt…www.theatre-jeune-public.com

BIEN CaRRoSSÉ Au resto strasbourgeois La Hache, Lolo Wagner expose dessins et sérigraphies dans le cadre de 40 ans de tôle. L’expo devrait réjouir les ama-teurs de bagnoles comme les inconditionnels du crayon… jusqu’au 21 novembre.http://alahache.com

PoLa’ oF YoUMembre du collectif OH ! (ex-Im-proviste), le trio voix / clavier / batterie Polaroid3 se produira au Caveau du Taps Scala (Strasbourg) du 15 au 17 novembre. L’occasion de découvrir les compos jazz-pop bizar-roïde du nouvel album du groupe. www.polaroid3.com

moRTEL

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stratégies intégrées | pub | promo | digital | social mediawww.novembre.com | 03 88 22 71 22

Il y a d’abord la forme et sa couleur. Mais plus qu’une enveloppe aux lignes pures, notre boîte est un

tout : un contenant et du contenu, des images et des idées, de la rigueur et de la liberté, du vécu et du vivant, une histoire et son avenir.

Depuis 20 ans novembre.communication a mis sa passion et ses expertises au service de plus de 200 marques. En plaçant sans relâche l’innovation au cœur de notre démarche, nous avons créé un modèle d’agence original et unique, l’agence intégrée.

Flashez le code* et bienvenue dans notre boîte !

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La VoIX dE

ZEUSDaft Punk, Air ou même le viril Kanye West : le vocoder (né, selon les experts, en 1791), appareil électronique transformant la voix en cri de souris qui aurait sniffé de l’hélium et mangé de l’acier, a encore le vent en poupe. Vendredi 4 novembre (à 18h30), Zeus B. Held (producteur de Killing Joke ou d’Alphaville) viendra présenter ce drôle d’instrument à la Médiathèque Malraux. www.mediatheques-cus.fr

HUmoUR & SWING

aRTISTa LoCo

KRoPRoJETSCulture, solidarité, développe-ment durable... Sur 736 projets associatifs, seize ont bénéficié cette année du mécénat assuré par la Fondation Kronen-bourg. Alors que le grand lauréat de la cuvée 2011 est le Fanal, compagnie de théâtre lyonnaise, le prix Brasseur de culture a été décerné à la coopérative d’activité et d’emploi Art en réel dont le projet Frich’Opéra devrait per-mettre aux ouvriers licenciés de Wesserling de se réapproprier, avec art, leur site industriel... www.fondation-kronenbourg.com

Se vautrer dans un fauteuil Pierre Paulin ou un canapé signé Emma-nuel Dietrich, s’asseoir sur une chaise en alu’ Jacques Ferrier ou une chauffeuse dessinée par André Kikoski… Du 4 au 14 novembre chez Roset à Strasbourg, Quartz à Colmar et Meubles Klein à Mul-house. Les grands designers sont à prix d’ami. www.ligneroset.fr

BRÈVES

Gyula Noesis – d’autres l’ayant appelé Giulio Nesi lorsqu’il était aux Arts déco de Strasbourg – part le 20 novembre prochain dans la jungle amazonienne. Billet aller simple et pas une thune en poche. Après la péninsule du Kamtchatka, en Sibérie orientale où l’artiste a erré seul et sans moyens de télé-communication, contraint de se nourrir de vers de terre, de fourmis et d’herbes amères, il veut faire « l’expérience de la jungle et préparer sa propre mort. » www.natator.org

Un artista loco y pobre que cruza la Amazonia para entender el mundo

La VIE EN RoSE(T)

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Entre musique et humour, le chansonnier Wally commente avec légèreté les choses de la vie, la vraie : les chips à l’ancienne ou l’intelligence artificielle. Au Kafteur stras-bourgeois, du 17 au 26 novembre.www.lekafteur.com

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avec le concours du Groupe Électricité de Strasbourg, mécène principal,

le soutien financier de la DRAC Alsace, du Conseil Régional d’Alsace, du Conseil Général du Bas-Rhin, du Réseau GDS, de la Caisse des Dépôts, du Crédit Industriel et commercial, de GDF Suez,

les DNA, partenaire média

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BRÈVES

JE LE SUIS ET JE LE RESTEIAM et Groundation fouleront le sol de la même scène samedi 12 novembre : celle du Parc des expositions de Mulhouse qui s’offre le modeste luxe d’accueillir les as du rap marseillais et la fine fleur du reggae californien. De textes vibrants en beats grisants, la soirée promet d’être volcanique. Cerise sur le gâteau : Sir Samuel de Saïan Supa Crew assurera la première partie. http://noumatrouff.fr

INdIaN VIBESAvis aux globe-trotters. La 27 e édition du Salon interna-tional du Tourisme et des Voyages ouvre ses portes au Parc des expos de Colmar du 11 au 13 novembre. Elle s’accompagne d’une exposition consacrée à l’Inde des Ma-harajas, orient fantasmé qui devrait délier les bourses de nombreux amateurs d’exotisme. Le Salon du Tourisme et de l’économie solidaire – en parallèle – saura pour sa part conquérir un public sensible à d’autres manières de voya-ger. Durant la manifestation, conférenciers et photographes régionaux évoqueront les chemins qu’ils ont arpentés aux cours de leurs pérégrinations. De quoi donner des idées. www.sitvcolmar.com

À BaS LE VIEUX moNdE À l’heure où le monde de l’art semble régi par les lois du mar-keting, Benjamin Sabatier cherche à réconcilier création et engagement politique, jetant les bases d’une esthétique de la lutte. C’est le propos de son exposition À bientôt j’espère, titre emprunté au documentaire de Chris Marker et Mario Marret réalisé en 1967 qui préfigurait les événements de 68. À découvrir au Pavé dans la mare (Besançon), du 17 novembre au 14 janvier 2012. www.pavedanslamare.org

BoURGEoNNaNTHip-hop teinté de jazz et de funk, la musique groovy d’Art District n’a pas fini de faire parler d’elle. Le groupe formé à Strasbourg en 2007, auteur d’un second album – Live in the Streets – paru en juin dernier, est présélectionné pour se produire lors de l’édition 2012 du Printemps de Bourges. Verdict vendredi 2 décembre, aux Tanzmatten de Sélestat.www.artdistrictband.com – www.tanzmatten.fr

avec le concours du Groupe Électricité de Strasbourg, mécène principal,

le soutien financier de la DRAC Alsace, du Conseil Régional d’Alsace, du Conseil Général du Bas-Rhin, du Réseau GDS, de la Caisse des Dépôts, du Crédit Industriel et commercial, de GDF Suez,

les DNA, partenaire média

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PMC Salle ÉraSMe - 20H30• Carlo rizzi direction• Rebecca Evans soprano• Patricia Bardon alto• Kresimir Spicer ténor• Andrew Foster Williams basse• Chœur de l’Orchestre philharmonique de StrasbourgCatherine Bolzinger chef de chœur

BrittenSinfonia da Requiem op. 20

tiPPettA Child of Our Time

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OrchestrePHILHARMONIQUE DE STRASBOURGORCHESTRE NATIONAL

SAiSON 2011>2012experts-comptables

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Capitale

européenne

Renseignements : 03 69 06 37 06 / www.philharmonique.strasbourg.euBilletterie : caisse OPS entrée Schweitzer du lundi au vendredi de 10h à 18h Boutique Culture, 10 place de la cathédrale du mardi au samedi de 12h à 19h

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BRÈVES

C’EST dÉJÀ dEmaINHerzfeld organise une nouvelle release party, jeudi 10 novembre au Hall des Chars (Strasbourg). À ma gauche, le duo sexy et glacial Einkaufen. À ma droite, Luneville qui, en plus d’être la ville de ma grand-mère, est le nom du nouveau projet electro-pop synthétique du label strasbourgeois. Luneville : c’est la musique du futur… imaginée au siècle dernier. www.halldeschars.eu – www.hrzfld.com

PIÈCES d’IdENTITÉSLe festival Des Films, des auteurs est la rencontre du public avec des professionnels du grand écran en Alsace : auteurs, réalisateurs et pro-ducteurs. Cette quatrième édition rassemble des films et des docs qui posent la ques-tion de l’identité… sociale, individuelle ou collective. Et du rapport à l’altérité. Décou-vrez notamment Le Naufragé de Guillaume Brac ou Anisso-roma, mes amis de Christian Van der Heyden, les 4 et 5 novembre à l’Hôtel de l’Ange et au Cinéma Le Florival de Guebwiller.www.safire.hautetfort.com

T’aS PaS QUaT’SoUS ?Certains parviennent à transcender la crise. Laurent Fré-churet, par exemple, qui nous propose une version actua-lisée de L’Opéra de Quat’sous, décomposée en trois actes correspondant à trois temps de crise : Londres – 1728, Berlin – 1928, France – 2011. Au Carreau, à Forbach, jeudi 24 et vendredi 25 novembre.www.carreau-forbach.com

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SaCRÉES SoIRÉES9 lieux, 15 ensembles. Du 4 au 6 novembre, Strasbourg or-ganise le festival des Sacrées journées sur les modèles des festivals Musica Sacra International (Marktoberdorf) et Musiques Sacrées (Fès). À l’affiche : le choeur arménien du monastère St-Geghard, la Compagnie franco-burkina-baise Sokan et le franco-irakien Fawzy Al Aiedy. Autour d’ensembles bouddhistes, musulmans, juifs, hindouistes, animistes ou chrétiens, l’événement s’attache à célébrer interculturalité et interreligiosité.http://sacreesjournees.eu

Fawzy chante… en 1969

Depuis 1999, chaque fin d’année est marquée par la manifestation artis-tique Regionale (du 25 novembre au 13 janvier 2012) qui s’étend entre l’Allemagne, la France et la Suisse, dans une quinzaine de lieux dédiés à l’art contemporain. Accélérateur de particules investira notamment le vaste espace d’exposition du Maillon-Wacken. Au programme, une sélection de vidéos… transfrontalières. www.regionale.org

Éléonore Cheynet, Balck Messa

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PMC Salle ÉraSMe - 20H30• Carlo rizzi direction• Rebecca Evans soprano• Patricia Bardon alto• Kresimir Spicer ténor• Andrew Foster Williams basse• Chœur de l’Orchestre philharmonique de StrasbourgCatherine Bolzinger chef de chœur

BrittenSinfonia da Requiem op. 20

tiPPettA Child of Our Time

jeudi 10 NOVeMBRe

OrchestrePHILHARMONIQUE DE STRASBOURGORCHESTRE NATIONAL

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Capitale

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Renseignements : 03 69 06 37 06 / www.philharmonique.strasbourg.euBilletterie : caisse OPS entrée Schweitzer du lundi au vendredi de 10h à 18h Boutique Culture, 10 place de la cathédrale du mardi au samedi de 12h à 19h

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DANSE / SLOVAQUIE, BELGIQUE

JOURNEY HOMELES SLOVAKS DANCE COLLECTIVE

JEU 15 + VEN 16 DÉCEMBRE / 20H30MAILLON-WACKEN

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www.le-maillon.com 03 88 27 61 81

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SommaIRE

22 dossier : En alsace, les torréfacteurs font de la résistance

30 Luc-antoine diquéro adapte Richard Brautigan à La Filature

33 augenblick, festival alsacien du cinéma en langue allemande

34 Thrill, exposition collective et vibrante d’art contemporain à Strasbourg

36 avec Your brother. Remember ?, Zachary oberzan nous entraîne dans l’intimité des siens

38 Le Centre international d’art verrier de meisenthal s’invite à St-art 2011

42 Claudio Tolcachir débarque au TNS avec deux pièces présentées successivement

47 destination metz : le renouveau d’une ville

54 Ciné-concert de Christoph Ehrenfellner sur Entr’acte de René Clair

66 Strasbourg vu par le photographe Gilles Leimdorfer

76 Promenade en Forêt noire, à allerheiligen

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Pour les Bouroullec qui exposent en ce moment au Centre Pompidou-Metz (lire page 52), les choses commencent souvent de manière expérimentale, « en coupant des pièces en polystyrène », comme pour les parois Clouds de ce photo-montage. « Nous avons dévelop-pé un thème pour arriver à lui donner une vraie réalité, devenir quelque chose que l’on peut installer dans une école maternelle par exemple. » Les designers se situent là : entre concept et pragmatisme. www.bouroullec.com

CoUVERTURE

© Paul Tahon et R&E Bouroullec

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DANSE / SLOVAQUIE, BELGIQUE

JOURNEY HOMELES SLOVAKS DANCE COLLECTIVE

JEU 15 + VEN 16 DÉCEMBRE / 20H30MAILLON-WACKEN

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numéros de licences 146 572 – 146 573 – 146 574 / photo Barreteau & Lapasin / création graphique Lenz et Perrottet

www.poly.fr

RÉDACTION / [email protected] – 03 90 22 93 49

Responsable de la rédaction : Hervé Lévy / [email protected]

RédacteursEmmanuel Dosda / [email protected] Flagel / [email protected]ée Lachmann / [email protected] rédaction / Sébastien Meyer

Ont participé à ce numéroGeoffroy Krempp, Éric Meyer, Pierre Reichert, Laure Roman, Irina Schrag, Daniel Vogel et Raphaël Zimmermann

GraphistesPierre Muller / [email protected]ïs Guillon / [email protected]

MaquetteBlãs Alonso-Garcia en partenariat avec l'équipe de Poly

© Poly 2011. Les manuscrits et documents publiés ne sont pas renvoyés. Tous droits de reproduction réservés. Le contenu des articles n’engage que leurs auteurs.

ADMINISTRATION / PublICITÉDirecteur de la publication : Julien Schick / [email protected]

Co-fondateur : Vincent Nebois / [email protected]

Administration, gestion, diffusion, abonnements : 03 90 22 93 38Gwenaëlle Lecointe / [email protected]

Publicité : 03 90 22 93 36Julien Schick / [email protected] Prompicai / [email protected] Nebois / [email protected]

Magazine bimestriel édité par BKN / 03 90 22 93 30S.à.R.L. au capital de 100 000 e16 rue Édouard Teutsch – 67000 STRASBOURG

Dépôt légal : novembre 2011SIRET : 402 074 678 000 44 – ISSN 1956-9130Impression : CE

COMMuNICATIONBKN Éditeur / BKN Studio – www.bkn.fr

OursListe des collaborateurs d’un journal, d’une revue (Petit Robert)

Au Mummelsee, octobre 2011 Photo : Hervé Lévy

dorothée Lachmann (née en 1978)Née dans le Val de Villé, mulhousienne d’adop-tion, elle écrit pour le plaisir des traits d’union et des points de suspension. Et puis aussi pour le frisson du rideau qui se lève, ensuite, quand s’éteint la lumière. [email protected]

Emmanuel dosda (né en 1974)Il forge les mots, mixe les notes. Chic et choc, jamais toc. À Poly depuis une dizaine d’années, son domaine de prédilection est au croisement du krautrock et des rayures de [email protected]

Stéphane Louis (né en 1973)Son regard sur les choses est un de celui qui nous touche le plus et les images de celui qui s’est déjà vu consacrer un livre mono-graphique (chez Arthénon) nous entraînent dans un étrange ailleurs.www.stephanelouis.com

marion Roger (née en 1987)L’illustratrice prolixe et nomade vit

(pour le moment) à Strasbourg et travaille sur différents projets, dont

des expositions collectives ou en solo. http://banapiti.blogspot.com

Thomas Flagel (né en 1982)Théâtre moldave, danse expérimentale, graffeurs sauvages, auteurs algériens… Sa curiosité ne connaît pas de limites. Il nous fait partager ses découvertes depuis trois ans dans [email protected]

Pascal Bastien (né en 1970)Libération, Télérama, Le Monde… et Poly : Pascal Bastien est un fidèle de notre magazine. Il alterne commandes pour la presse et travaux personnels.www.pascalbastien.com

Benoît Linder (né en 1969)Cet habitué des scènes de théâtre et des plateaux de cinéma poursuit un travail d’auteur qui oscille entre temps suspen-dus et grands nulles parts modernes.www.benoit-linder-photographe.com

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numéros de licences 146 572 – 146 573 – 146 574 / photo Barreteau & Lapasin / création graphique Lenz et Perrottet

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L’adaptation de Tintin par Steven Spielberg (produite par Peter Jackson) vient de sortir sur les écrans. Pas encore été au cinéma pour la découvrir… mais

on peut subodorer l’opération commerciale, de la part des ayants droit en tout cas, en direction du marché américain sur lequel se vendent annuellement 200 000 albums. Cinq fois moins qu’en France. Les premières critiques de la ver-sion en trois dimensions semblent mitigées. Dans Le Monde, Thomas Sotinel titre, par exemple : Un film qui fait à Tintin ce que la Castafiore fait à l’opéra. En viendrait-on à regret-ter les très désuets opus des années 1960 avec Jean-Pierre Talbot, Tintin et le mystère de la toison d’or et Tintin et les oranges bleues ? Chacun se fera son avis… mais l’univers des tintinophiles bruisse d’une affaire plus grave qu’une pochade à 130 millions de dollars qui retombera sans nul doute sur ses pattes.

Depuis quelques années, en Belgique, Tintin au Congo est at-taqué devant les tribunaux par Bienvenu Mbutu Mondondo, soutenu dans sa démarche par le Cran (Conseil représentatif des associations noires de France) qui souhaite faire interdire l’album où, tout au moins, qu’y soit appliqué un bandeau avertissant le lecteur de son caractère raciste. À l’issue des plaidoiries, mi-octobre, le procureur du Roi a renvoyé le jugement au 12 février 2012 (au plus tard). Si le débat juri-dique devrait demeurer sur le terrain de la prescription (la dernière version de l’album date de 1946 et la plainte a été déposée en 2007) et de la rétroactivité de la loi belge sur le racisme de 1981, le plus important est sans doute de réfléchir sur le fond. C’est alors que le délire commence… Il y a ceux qui insistent sur la parenté entre Tintin et le rexiste belge Léon Degrelle engagé dans la division SS Wallonie, qui aurait servi de modèle à Hergé. D’autres pointent la xénophobie latente de nombre d’albums. Les plus belles exagérations se font jour… Oui, à nos yeux d’occidentaux du XXIe siècle com-mençant, tout cela est évidemment hôôôôôôrible, mais pour l’époque, les années 1930, demeurait d’une triste banalité. Il semble aussi impensable que Tintin pousse les enfants au ra-cisme. Si on partait d’un tel postulat, il faudrait rouvrir bien des dossiers et corriger les premiers Buck Danny évoquant les “faces de citron”, par exemple. Mais d’autres pourraient pâtir d’une telle relecture. « Pourquoi les Juifs n’auraient-ils pas été anthropophages ? C’eût été la seule chose qui eût manqué au peuple de Dieu pour être le plus abominable peuple de la terre. » Et encore : « Je vois des singes, des

éléphants, des nègres, qui semblent tous avoir quelque lueur d’une raison imparfaite. » Quel est le salaud qui a écrit cela ? Louis-Ferdinand Céline éructant dans Bagatelles pour un massacre ? Eh bien, non… Il s’agit de Voltaire dans son Dictionnaire philosophique pour la première citation et dans le Traité de métaphysique, pour l’autre. Faisons un procès pour insérer un avertissement sur les deux couvertures. Pas assez efficace ! Interdisons donc les textes. Et puis tant qu’à faire, foutons les au feu ! Triste époque ou les idées toutes faites ont remplacé l’esprit.

Hervé Lévy

Tintin au pays des censeurs

ÉDITO

AU PAYS DES VACHESmontbéliArDES,nAiSSEnt DES lionS.

www.originAlEfrAnCHEComtE.fr

C’est sans doute grâce à Peugeot que l’esprit d’innovation accompagne notre territoire : du pôle de compétitivité Véhicule du Futur au pôle multimédia Numérica, les entreprises du Pays de Montbéliard partagent les valeurs d’audace, de performance et de réussite.

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Illustration signée Éric Meyer pour Poly

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DIMANCHE 4 DÉCEMBRE

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Musicien strasbourgeois aujourd’hui en exil à Bruxelles, Aymeric de Ta-pol a – entre autres tonnes de projets – créé des pièces musicales pour la compa-gnie de danse Dégadézo ou participé à divers trans-missions radiophoniques. En solo, le compositeur prolixe s’arme d’un micro et d’un magnéto pour capter le réel, qu’il pleuve ou qu’il vente, dans les métropoles ou en milieu naturel. Il agence alors les sons saisis, bourrasques ou bruissements, en des compos contemplatives. Son nouvel opus, Static Island, enregistré en partie sur une péniche voguant sur le Rhin, offre six (lon-gues) pistes évocatrices, débordantes de sonorités grondantes (Static Island), fluides (Ekman) ou gla-ciales (Frozen Tones). (E.D.)

Static Island, Tsuku Boshi Records Cd disponible sur http://cd1d.com ou sur www.a-musik.com (10 e) http://tsukuboshi.wordpress.comhttp://a.detapol.free.fr

Vous avez aimé l’aventure Cut qui s’est achevée brutalement, du moins sur le papier, le site conti-nuant d’être très actif ? Vous ado-rerez cet annuel qui en annonce d’autres, on l’espère. Luxueuse et classieuse, la revue de 130 pages (et pas une de pub’) permet de voir le cinéma autrement… Voilà de quoi ouvrir des horizons et bouleverser des idées reçues au-tour du cinéma d’horreur français, des moustaches, de Gérard Blain, du western ou encore d’Alain Guiraudie. Romain Sublon et son équipe frappent fort et posent des questions essentielles : « Qu’est-ce qu’un critique de cinéma en 2011 ? » Nous aussi, on se le demande… (H.L.)

En vente sur le site (10 e) et à Strasbourg, au Cinéma Star, au Troc’afé et à la librairie Quai des brumes (qui organise une rencontre mardi 8 novembre à 18h45) www.cutlarevue.fr

Alors que la guéguerre cinématogra-phique continue à faire rage entre les deux adaptations – l’une signée de Christophe Barratier, l’autre par Yann Samuell – du roman de Louis Per-gaud, celui-ci ressort opportunément en grand format (une autre édition est disponible dans la collection Folio junior, 5,70 €). Cette version du livre, illustré au début des années 1980 par Claude Lapointe, créateur et directeur – pendant plus de 30 ans – de l’ate-lier d’illustration de l’École des Arts

décoratifs de Strasbourg, était devenu introuvable… D’immenses tableaux restituent les épisodes les plus mar-quants de la truculente guerre entre les enfants de Longeverne et ceux de Velrans… Le trait est classique et inspiré. L’ouvrage s’achève avec un cahier iconographique permettant au lecteur de partir sur les traces de l’auteur et des lieux réels qui ont servi de cadre au roman. (H.L.)

Paru chez Gallimard Jeunesse (14,90 e)www.gallimard-jeunesse.fr

LIVRES – Bd – Cd – dVd

aYmERIC dE TaPoL

La GUERRE dES BoUToNS

CUT

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Figure controversée du XXe siècle, Louis-Ferdinand Céline continue de troubler nos contemporains, embar-rassant jusqu’au Ministre de la Culture Frédéric Mitterrand qui retira l’écrivain du Recueil des Célébrations nationales 2011. Son procès, organisé avec doigté par Alain Moreau (écriture) et Antoine de Meaux (réalisation) dans ce docu-mentaire de 52 minutes, est mené à grands renforts d’images d’archives et d’entretiens. D’abord à charge avec l’antisémitisme de L’Église, les 380 pages pamphlétaires de Bagatelles pour un massacre, ses obsessions hygiénistes et ses tentatives de fédérer les mouvements collabos en 1942… jusqu’à sa fuite à Sigmaringen avec le reste du gouvernement vichyste en exil. Puis à décharge, Pierre Assouline et d’autres vantant le génie de l’invention d’un style volcanique, la grande attaque contre le verbe, jusque dans un maté-riau idéologique à vomir. Reste qu’avec Céline, on juge le pire du XXe siècle et la façon dont la littérature l’affronte : engagé à 19 ans et marqué par les massacres inutiles de 14-18, il sera

l’auteur avec Voyage au bout de la nuit (Denis Podalydès en lit quatre chapitres dans le CD joint) d’un premier roman dénonçant dans le même élan la guerre, le colonialisme, la solitude, l’abrutisse-ment industriel et la société bourgeoise. (T.F.)

Coffret dVd + Cd, arte Éditions (20 e)www.arteboutique.com

mES SoUFFLES CoUPÉS PaR LE mILIEU Roja Chamankar est née dans le sud-ouest de l’Iran, deux ans après la révo-lution du Shah, mais vit, aujourd’hui, sur les bords de l’Ill. Les fins limiers de l’association Minuscule, éditrice de la revue littéraire Cyclocosmia, consacrent un premier recueil à la poé-tesse. On y croise l’amour, les klaxons continus de la pluie, les larmes de fiel et les rêves de ciel. La mer amère qui t’appelle et ces yeux tracés de Kohol qui se fer-ment sur des temps perdus. Dans un format à l’italienne fort soigné, Mes souffles coupés par le milieu nous plonge entre les traits du monde et les rendez-vous qu’on se donne à soi-même, les soleils oubliés et les nuits qui sifflent dans nos têtes. « Que les couleurs bruissent sous ma porte / L’automne déborde de la tasse / De la valise / De mes larmes / Remplissant la chambre… » (T.F.)

Édité par l’association minuscule (7 e)www.cyclocosmia.net

ToRSo Le Strasbourgeois a sans doute beaucoup abusé de Mon cerveau dans ma bouche de Programme et d’À Découvrir Absolu-ment de Diabologum. Comme eux, Torso (mal)mène la chanson française vers des territoires obscurs et biscornus. Gouaille à la manière de Taxi Girl, basse ronde évoquant les Cure, paroles âpres scandées façon spoken word… Le sombre cinq titres Des Taches sur mon Rorschach nous conduit sur les boulevards de Stalingrad ou, le pied au plancher, sur les nationales en direction de l’enfer (Élégie nocturne de troisième zone). Les tests psychologiques sont formels : Torso est ténébreux et tor-turé. Sa musique ? Tordue et torse. (E.D.)

www.factotumrecords.com www.torso-music.com

LE PRoCÈS CÉLINE

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CINQ QUESTIoNS À…

joëlle smadjaUne nouvelle directrice à la tête de Pôle Sud, mais pas un nouveau visage. Joëlle Smadja évoque avec nous ce lieu dédié à la danse et au jazz. Elle imagine un futur qui ne rime pas avec rupture.

Par Emmanuel DosdaPhoto de Benoît Linder pour Poly

Pôle Sud 1 rue de Bourgogne à Strasbourg

03 88 39 23 40 www.pole-sud.fr

Prochains spectacles Samedi 5 novembre (à L’Ésad) : La Ribot, Laughing Hole

Dimanche 6 novembre : Daniel Erdmann / Samuel Rohrer quartet + La Grande Campagnie des Musiques à ouïr, Duke & Thelonious (dans le cadre de Jazzdor)

Mardi 8 novembre : Django Bates, Beloved Bird + Joel Harrison String Choir, Plays the music of Paul Motian (dans le cadre de Jazzdor)

Mercredi 9 et jeudi 10 novembre (au Maillon) : Lemi Ponofasio - Mau, Birds with Skymirrors (lire Poly n°143)

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Vous n’êtes pas une inconnue pour les Strasbourgeois, étant passée par le Centre international de rencontres ar-tistiques (CIRA) puis le Fossé des Treize avant d’arriver à Pôle Sud – alors MJC Meinau – en 1984, et de devenir res-ponsable de sa programmation danse en 1989…En y songeant, il y a une certaine logique dans mon parcours, sans stratégie, ni plan de car-rière. Tout a été dirigé par une passion pour le spectacle, l’organisation, le travail avec les publics… Mon expérience au CIRA fut fonda-trice. J’y ai rencontré les artistes du Théâtre du Soleil, Steve Paxton, Mark Tompkins, Odile Duboc, etc. Le spectacle vivant est un virus dont je n’arrive pas à me débarrasser. Mes tout premiers contacts avec la danse ? Une répétition publique de Merce Cunningham accompagné de John Cage et, lors d’un stage de théâtre à Avignon, une représentation de Kazuo Ōno, grand maître du Butō que je per-cevais à l’époque comme un papy dansant avec une couche-culotte [rires]. Dans les deux cas, je me suis retrouvée face à quelque chose que je ne comprenais pas très bien, mais ces images sont restées ancrées en moi.

Cette année, alors qu’Alain Py a pris sa retraite, vous êtes seule au gouver-nail. Ressentez-vous le désir de chan-ger de cap, de privilégier la danse par exemple ?D’abord, ce n’était pas une évidence que je prenne la direction, mais je voulais essayer d’apporter la dernière touche au projet. Du-rant des années, il a fallu justifier notre pré-sence. Aujourd’hui, il faut montrer les pos-sibilités de cet équipement dans le quartier de la Meinau et sur le territoire. Nous avons, grâce aux résidences d’artistes, investi des pis-cines, créé des marathons chorégraphiques, fait des défilés… Ce potentiel n’est pas assez

mis en valeur. Il faudrait réinventer un lieu de fabrique de ce type d’idées. Quant à la pré-dominance de la danse, c’est déjà le cas, mais ça n’a rien à voir avec mes goûts personnels. Je signe des deux mains le projet jazz qui a de vrais partis pris esthétiques, de recherche. Pour lutter contre la perte de public, nous avons décidé de donner une nouvelle dyna-mique en proposant les “concerts club” au caveau, dans l’ancien bar, et en développant les concerts scénographiés, mélangeant BD, arts plastiques, cinéma, etc.

Avec ces “concerts club” vous sollicitez la scène jazz locale. Les compagnies de danse alsaciennes ne risquent-elles pas d’être jalouses ?Elles sont intégrées dans la programmation de Pôle Sud ! Il faut rappeler que nous avons au minimum deux créations d’artistes régio-naux intégrées dans la saison, aux côtés de compagnies, nationales ou internationales. Les groupes jazz du coin étaient cependant presque absents et il fallait nous rattraper. Les “concerts club”, s’adressant à 50 ou 60 personnes, seront tous des commandes, des projets originaux du Collectif L’Improviste. Est-ce envisageable d’adapter cette formule aux compagnies de danse ? Pourquoi pas ? Nous pourrions faire appel à des collectifs d’improvisation, à SomeBody ou Dégadézo qui pratiquent la composition instantanée…

Les hybridations, aujourd’hui de mise dans le spectacle vivant, vous ont pous-sé à créer une labellisation “sans AOC”. Par crainte de décevoir un public stric-tement “danse” ou “jazz” face à des pro-positions trop borderline ? Non, car les appellations, parfois artificielles, dépendent de l’origine même de l’artiste qui est aux commandes, pas de la forme du spec-tacle. Jonathan Capdevielle – labellisé “sans

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Le spectacle vivant est un virus dont je n’arrive pas à me débarrasser

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AOC ” –, par exemple, est acteur, marionnet-tiste, chanteur, comédien et danseur tandis que Maguy Marin – labellisé “danse” – est véritablement une chorégraphe, même si le ré-sultat de son travail utilise les arts plastiques, la scénographie, la musique et, de moins en moins, la danse… Mais Maguy Marin vient de là !

La saison semble parsemée de spec-tacles interrogant l’histoire de la danse…En effet, l’ombre de grands chorégraphes plane sur la programmation. La danse a récemment connu de petits cataclysmes : la mort de Merce Cunningham, de Pina Bausch

ou de Michael Jackson… qui a été un élément assez important pour la danse des garçons, comme l’a rappelé Foofwa d’Imobilité avec Pina Jackson in Mercemoriam (le 18 oc-tobre). Boris Charmatz, actuel directeur du Centre chorégraphique de Rennes, fait par-tie de ces artistes qui interrogent en bous-culant l’héritage, les acquis, qui revisitent le passé. Nous le verrons avec Improvisation (le 14 février) et surtout Flip Book (les 16 et 17 février). En jazz, le phénomène est identique : de nombreux jeunes musiciens programmés par Philippe Ochem questionnent l’influence de Miles Davis, Duke Ellington ou Thelonious Monk. Il faut regarder derrière soi pour voir comment avancer en ces temps incertains.

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Par Thomas FlagelLes industriels nationaux et internationaux règnent sans partage sur le marché du café. En Alsace, subsistent pourtant une petite dizaine de torréfacteurs plus ou moins artisanaux qui se répar-tissent intelligemment la clientèle. État des lieux.

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Le café demeure l’une des boissons préférées des Fran-çais dont ils sont le troisième importateur au monde derrière les États-Unis d’Amérique et l’Allemagne.

Quasiment un patrimoine. Représentant pas moins de 4% du commerce mondial des produits alimentaires, 100 millions de sacs en toile de jute de 60 kilos sont produits chaque année dans 70 pays – 34 millions par le seul Brésil. Les Français en consomment pas moins de 5 kg par an. Ce marché faramineux est bien entendu dominé par des firmes agroalimentaires internationales comme Kraft Foods (Jacques Vabre, Carte Noire, Grand-Mère, Tassimo, Hag…), Nestlé (leader mondial du café soluble avec Nescafé, mais aussi des capsules avec Nespresso) ou encore Segafredo Za-netti (Segafredo, San Marco, Philtre d’Or, Réveil de Stentor, Café Quotidien ou Café Corsica). En France, les rachats de torréfacteurs régionaux ont été nombreux depuis les années 1980, aboutissant à une concentration hyperconcurrentielle du secteur. L’arrivée, il y a six ans, des dosettes revigorait le marché, permettant notamment de vendre les machines correspondantes. Quant au double effet marketing/mode des capsules Nespresso, il a réussi le tour de force de trans-former un bien de consommation populaire, en produit de luxe.

Résistance alsacienneEn Alsace, les anciennes maisons sont toujours là, pour la plupart restées sous le giron familial. Ainsi les Cafés Sati découlent du magasin de torréfaction À la Renommée du Café de la rue des Francs-Bourgeois, à Strasbourg (1926). En 1936, ils prennent le nom de Sati – Société Alsacienne de Torréfaction et d’Importation – qui installe le premier entrepôt sous douane de la région au Port du Rhin (1964). Nicolas Schulé est aujourd’hui la troisième génération à gérer une entreprise qui réaffirme son régionalisme depuis la rentrée avec une énorme campagne de publicité arbo-rant le slogan « alSATIen ». Le destin de l’entreprise est en partie lié à celui des Cafés Reck, les deux familles ayant des participations croisées depuis des années. Créée en 1884, la maison Emmerich est reprise dès 1919 par les Reck. Une histoire et des traditions qui font la fierté de Thomas Riegert, actuel PDG qui affiche fièrement dans sa boutique strasbourgeoise de la rue de la Mésange : « Mon grand-père était torréfacteur. » C’est aussi une histoire de famille chez les Schreiber qui produisent, à Munster, les cafés éponymes depuis 1931. D’autres sont passés sous le giron de grosses entreprises étrangères comme les cafés Warca (créés en 1929 par le Mulhousien Wagner) et Brosio (fondés la même année à Schiltigheim) rachetés dans les années 1990 par le groupe allemand J.J. Darboven qui a fermé il y a quelques années l’usine de Wittenheim au profit de Hambourg. En 1997, les Cafés Henri acquéraient les marques lorraines Grillon et Stanislas, continuant l’exploitation de cette der-nière, très bien implantée sur ce territoire.

Quatre poids lourds…S’il existe aujourd’hui une petite dizaine de torréfacteurs al-saciens, brûlant leurs cafés vert selon des formules de temps

et de températures bien précises, trois d’entre eux se taillent la part du lion, Sati en tête. Avec son usine de production du port du Rhin, il torréfie pas moins de 2 500 tonnes de café par an pour sa propre marque et autant pour d’autres, comme Reck. Soit 20 millions de paquets de 250 g chaque année. Toutes les gammes sont en référence : café en grain, moulu, mélanges, arabica, dosettes, décaféiné et pures origines. Trop petit pour être national (une cinquantaine d’employés pour 30 millions d’euros de CA), trop grand pour être seulement régional, Sati est présent dans le Grand Est (de Belfort à la Lorraine) et dans une dizaine de pays, notamment grâce à une usine polonaise ouverte au début des années 1990 pour se positionner sur les pays de l’Est. 80% de ses ventes s’effectuent en Grandes et Moyennes Surfaces (GMS), les 20% restants dans les Cafés, Hôtels et Restaurants (CHR).

Avec 600 tonnes torréfiées chaque année, les Cafés Henri – créés en 1949 rue des Hallebardes à Strasbourg, repris en 1980 par Christine et Frédéric Steiner – regroupent petit à petit leur centre de production à Hoerdt. Huit boutiques traditionnelles et trois magasins d’usine, de Neuves-Mai-sons (54) à Illkirch-Graffenstaden s’ajoutent à une clientèle en CHR et en distribution automatique (pour entreprises et collectivités) en plein essor. Sa “Elsass line” ne passe pas inaperçue dans la grande distribution et lui permet aussi de viser les épiceries fines et l’exportation en jouant la carte de produit local, même si les caféiers ne poussent pas en Alsace. Avec 80 employés et 8 millions d’euros de CA, l’entreprise a la force de maîtriser en interne toutes les opérations, de la production à la distribution, notamment en ayant intégré Cadima, entreprise vendant des machines professionnelles et assurant leur service après-vente.

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Torréfiant quatre fois moins qu’Henri, Distri Cafés se po-sitionne lui aussi sur la distribution automatique, les col-lectivités et les CHR, mais dans le Haut-Rhin depuis le site de Colmar. Les sœurs Sophie Allheily et Estelle Petit-demange ont repris l’entreprise à la suite de leurs parents

qui rachetaient les cafés Au Bon Nègre en 1984. La marque, née en 1924, n’a alors que trois boutiques. Elle en compte aujourd’hui sept (Colmar, Mulhouse et Wittenheim) et em-ploie 38 personnes pour un chiffre d’affaires de 2,5 millions d’euros, dont la moitié est réalisé par leurs propres bou-tiques. Concessionnaire exclusif des machines expresso La Cimbali dans le Haut-Rhin, Distri Cafés a su « se diversifier, offrir – comme les Cafés Henri – du thé pour lequel l’en-gouement est soutenu depuis une poignée d’années et des produits régionaux connexes devenus aujourd’hui indis-pensables comme compléments face à l’augmentation du coût des matières premières » confie Estelle Petitdemange. Quant au nom historique, Au Bon Nègre, il vit ses dernières heures. « Même si nous y sommes attachées, il renvoie à une époque coloniale totalement dépassée. Nous sommes donc sur la voie de son remplacement… »

Enfin, les Cafés Reck avec 300 tonnes torréfiées annuelle-ment se positionnent sur un segment « haut de gamme dans lequel la quantité n’est pas une finalité » comme l’explique Thomas Riegert. Si le réseau CHR représente 80% de son chiffre d’affaire, les neuf boutiques où se mêlent produits du terroir, espaces de dégustation (expresso bars) et cafés fraîchement torréfiés, sont la véritable fierté du PDG qui propose encore « des mélanges inventés par [s]es grands-parents ». Il s’est d’ailleurs amusé à rappeler cette tradition à tous les passants de la rue de la Mésange en pastichant le « What else ? » placé au-dessous du passeport de George Clooney sur la vitrine de la boutique Nespresso de la même rue en indiquant : « Moi je suis torréfacteur ! » Un joli pied de nez à Nestlé, mastodonte suisse aux 250 boutiques dans le monde et 5 500 employés qui revendique quelque 10 mil-lions de consommateurs et 12 300 tasses de café (Nespres-so, of course) bues, chaque minute, en 2010 !

Prix et production des torréfacteurs alsaciens

Tonnes/an

Cafés Loegel

0 500 1000 2000 25001500

15 à 18 € 1,2 tonnes

4,5 tonnes

6 tonnes

15 à 20 €

6 à 16 €

16 à 24 €

13 € à 22 €

10 à 25 €

66 à 77 €

14 € à 22 €

(prix au kilo)

300 tonnes

600 tonnes

2500 tonnes

32 000 tonnes

150 tonnes

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Peu de concurrence géographiqueLa réussite et la pérennisation des entreprises de torréfac-tion alsaciennes artisanales tiennent à leur sage répartition du marché. Rien d’organisé – la concurrence existant sur certains secteurs – mais des zones de chalandise géographi-quement réfléchies qui permettent aux Cafés Rasco (instal-lés à Haguenau), Cafés Loegel (dans la galerie marchande d’Intermarché à Sélestat), Cafés Schreiber (atelier-boutique dans la Grand-Rue de Munster) et Cafés Yack de Mulhouse (positionné sur les restaurateurs de l’agglomération et de l’Alsace du sud) d’exercer leur métier avec aisance et d’axer leur production sur la qualité, la recherche aromatique et la diversité des provenances. En moyenne, ils offrent de 10 à 20 origines ou mélanges, fraîchement torréfiés par leurs soins, à une clientèle fidèle et connaisseuse. Et c’est bien sur la qualité de leurs produits et leur art de la torréfaction que se disputent les professionnels (de petite taille) du milieu, chacun vantant son savoir-faire.

Le petit dernier, Veda Vireswami, créateur en 2006 des Ca-fés Exquis, vient de frapper fort. Le 2 octobre, il se voyait at-tribuer, en même temps que 10 autres torréfacteurs hexago-naux, le titre de Meilleur torréfacteur de France 2011 par le Comité français du café. Une consécration pour cet esthète du produit installé à Geispolsheim qui vend ses cafés aux particuliers, à quelques épiceries fines et à des restaurateurs exigeants. Torréfiant manuellement et en petites quantités, « jamais plus de 22 kg à la fois pour conserver le meil-leur contrôle possible sur la qualité de son produit final », il est intarissable sur les cafés verts qu’il choisit d’après échantillons, privilégiant les plantations d’altitude, gage de grande qualité. Avec six tonnes de cafés par an, Veda espère beaucoup des retombées du concours et de la prochaine ouverture d’un espace de vente en ligne sur Internet.

Diversification face à spéculationDepuis juin 2010, le cours du café s’est envolé, prix d’assaut par la spéculation sur les matières premières. L’arabica (New York) et le robusta (Londres) ont quasiment triplé en quelques mois. En 2011, les prix ont quelque peu bais-sé mais restent tout de même, à l’heure où sont écrites ces lignes, deux fois supérieurs au cours d’avant spéculation. Conséquence directe pour les torréfacteurs, une augmen-tation d’autant de leur coût de revient et l’impossibilité de répercuter ces hausses sur les prix de vente au consomma-teur. Les plus gros (Sati, Henri et Reck) ont pu attendre un peu avant d’augmenter leur prix, les autres n’ayant guère la trésorerie nécessaire pour. Idem pour les dosettes et cap-sules, déjà bien plus chères que le café en grain ou moulu. Dès lors, vendre des breuvages d’exception comme le Blue Mountain de Jamaïque à 120 € le kilo (Distri Cafés, Cafés Schreiber…) devient mission impossible.

Face à la mode Nespresso, entre facilité d’utilisation et de-sign épuré, les entreprises alsaciennes refusent l’encapsu-lation à l’aluminium, leur préférant les dosettes en papier

type Senséo. Même Sati, qui a « payé pour voir en pas-sant outre le monopole de la dosette il y a cinq ans, bien avant l’ouverture à la concurrence décidée par l’UE ». Ils n’ont pas non plus choisi les Nep-Cap, capsules vides de type Nespresso à remplir soi-même de café moulu, fabriquées en prolypropylène par l’entreprise Red Point Source. Nos torréacteurs ont plutôt pris le parti de la diversification des produits, voire d’initiatives plus surpre-nantes. Ainsi, les Cafés Henri se lancent dans « le tourisme industriel » en proposant des visites de la torréfaction et des magasins d’usines par des « guides caféologues mai-son », suivies de dégustations. Un bon moyen d’attirer les touristes de passage et de donner une visibilité à la marque.

De plus en plus nombreux sont ceux à parier sur le segment de machines à expresso automatiques (moulant le grain directement pour faire un expresso). Pour Estelle Petitde-mange, « ce marché est en plein boom avec une croissance à deux chiffres chez Distri Cafés. » Ces machines automa-tiques représentent 20% du marché dans le Bade-Wurtem-berg, contre seulement 2 à 3% pour l’instant en France. Chez Sati, on « croit beaucoup en l’avenir de ce segment du marché, à la fois plus économique et écologique que les capsules mais surtout, offrant un bien meilleur café en tasse », assure Patrick Hubscher, directeur commer-cial. Même son de cloche chez Thomas Riegert qui sent lui aussi la bonne affaire. Il est d’ailleurs « le distributeur de la marque haut de gamme Thermoplan, dont Starbucks vient d’acquérir 50 000 machines ! Elles sont très en avance sur le lait, notamment, un marché multiplié par 15 en moins de 10 ans sur les salons professionnels. » De quoi réjouir les torréfacteurs artisanaux. Veda Vireswami en tête : « La France a un certain retard culturel dans la connaissance du café. Il faut que les petits artisans comme moi, amou-reux de leur produit, éduquent au goût et partagent leur plaisir du bon café. Plus les gens disposeront de machines performantes, meilleurs seront leur café. Reste pour eux à bien le choisir… »

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Portrait de Pascal Bastien pour Poly

souhaite un très bel anniversaire à Tomi Ungerer pour ses 80 printemps le 28 novembre...

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Chantal MiChel EXPOSITION

FRAC ALSACE, SÉLESTAT

24:09 11:12:2011EN SAVOIR + : FRAC.CULTURE-ALSACE.ORG

Visuel : Chantal Michel, Zwei zu Bett Gehende, 2010 / Photographie couleur sous plexiglas, 150 x 200 cm / Courtesy galerie Heinz-Martin Weigand, Ettlingen

Musée Historique A partir du 28 octobre 2011de 13h à 18h30 (sauf mardis et jours fériés)

Entrée libre

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TRÉSORS D’ARCHÉOLOGIE

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Par Hervé LévyPhoto de Benoît Linder pour Poly

BaNdE dESSINÉE

essai (cinémato) graphique Le nouvel album du Strasbourgeois Blutch, Grand Prix de la Ville d’Angoulême en 2009, est une réflexion graphique non narrative sur le cinéma. Quand le neuvième art tente d’en finir avec le septième…

Le point de départ ? « Un hors-série de Pilote sur le cinéma. Quelques planches livrées et l’impression d’avoir simple-

ment soulevé un coin du voile. » Blutch s’est alors engouffré dans la brèche pour explici-ter une réflexion sur un art qu’il découvre… à la télévision, enfant, avec « de Funès, les derniers Gendarme, les gendarmettes ou les extra-terrestres ». Après, il y eut les salles strasbourgeoises, aujourd’hui pour la plu-part disparues. Séquence souvenirs où appa-raissent le Rit’s, le Club, le Cinébref – évi-demment – dont on perçoit les échos, allusifs et assourdis dans l’album, avec des vues de la ville. Autobiographique ? Plutôt un question-nement sur le rapport au cinéma de Blutch, « entre attirance et répulsion. Mais c’est ma relation générale avec les choses » précise celui qui « n’a jamais été fan, ni idolâtre ». Dans son casting il n’y a pas d’acteurs d’au-jourd’hui : « J’en aime certains – comme Joa-quin Phoenix ou Javier Bardem – mais je ne sais pas quel sera leur destin. Peut-être vont-ils faire des films minables, et j’aimerais que le livre puisse encore être lu par un type qui le trouverait dans un vide grenier en 2080. C’est donc plus commode de parler de figures dont le destin est achevé, ou presque. »

Des planches d’une intense élégance en noir et quelque chose (rouge, bleu, vert, jaune…) – Blutch avoue avoir « pompé » Jean-Claude Forest dans Barbarella – pour un livre éclaté, intime et universel à la fois. Voilà un résumé possible d’un improbable objet dessiné où l’on croise un Jean-Luc Godard hagard pê-chant des poissons qui se desquament puis se désagrègent dès leur sortie de l’eau, une page comportant vingt portraits de Burt Lancaster, un Piccoli mélancolique, la boucle du cein-turon de John Wayne, les jambes luisantes de Stéphane Audran, La Planète des singes, un portrait composite, le plus beau qu’on ait vu, de Visconti en sept vignettes… Entre la grande Histoire, histoires multiples, intros-pection intime et onirisme méditatif, Blutch propose une errance inspirée sur les chemins de la nostalgie. Le cinéma n’est-il pas le plus beau moyen de voir le temps passer ? Il suffit de disséquer les métamorphoses du corps de Burt Lancaster : jeune brute, grande brute puis vieille brute… « Tout du long, l’artiste de cinéma livre à tout le monde le spectacle de sa lente décrépitude. »

Pour en finir avec le cinéma est paru chez Dargaud (19,95 €)www.dargaud.com

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Devant l’immense maquette de la Nou-velle Rome qui se déploie dans la grande salle du musée, on imagine

un gamin couché à plat ventre, disposant consciencieusement des soldats dans cette ville imaginaire faite d’emballages de télé-viseurs en polystyrène sculpté. Le petit gar-çon est aujourd’hui presque septuagénaire, mais rien n’a changé à ses jeux. « C’est une exposition qui ferme le cercle : l’enfance rejoint le monde des adultes » confie Ber-nard Latuner. Né à Mulhouse en 1942, il a débuté par l’abstraction avant d’orienter net-tement sa réflexion vers le péplum, dans les années 1980. Une manière de retrouver des émotions enfouies depuis longtemps, mais aussi de s’inscrire dans une histoire de l’art où l’inspiration antique, après avoir constitué le “grand genre”, était tombée en désuétude à la fin du XIXe siècle. L’artiste la remet au goût du jour en y associant sa passion pour le cinéma.

Ses peintures rappellent toutes des scènes de films : au visiteur d’y retrouver les traits de Brad Pitt en Achille, de Marlon Brando en Jules César, de Charlton Heston en Ben Hur ou encore de Russell Crowe en Maximus. « Le péplum est redevenu très à la mode ces dernières années, depuis le film Gladiator. Il y eut ensuite Troie, Alexandre, 300... et puis la série télé Rome, qui est un gros succès. C’est un processus subtil pour faire passer une idéologie : le péplum hollywoodien diffuse un message subliminal évoquant l’empire américain. »

Sur les toiles de Bernard Latuner, les choses sont plus claires encore : Gladiator et la guerre du Golfe, même combat. Les ruines, qu’elles soient de Dresde ou de Carthage, sont semblables. Quant aux impérialismes contem-porains, ils n’ont qu’un père : Alexandre le Grand. Dans cette exposition entièrement dédiée au péplum, le culte du corps, omni-présent, est traité avec un décalage jubilatoire. Possesseur d’une collection de poupées Barbie et Action Man qui ferait pâlir d’envie bien des bambins, le plasticien en a fait les héros de vidéos et séries de Polaroïds particulièrement inspirées. « Sous des dehors ludiques et par-fois ridicules, je dénonce des choses graves », insiste celui qui n’avait pas exposé dans sa ville natale depuis... vingt-cinq ans. Avec ses multiples lectures, Péplum séduira autant les cinéphiles que les amateurs d’art, les passion-nés d’histoire que les gourmands d’images. Mais elle réjouira, en premier lieu, tous les petits garçons (et filles) devenus grand(e)s.

du pain et des jeuxTandis que le péplum connaît, depuis Gladiator, une nouvelle jeunesse au cinéma et à la télévision, l’artiste mulhousien Bernard Latuner affiche, sur les murs du Musée des Beaux-Arts, sa passion pour cette antiquité fantasmée.

Par Dorothée Lachmann

À Mulhouse, au Musée des Beaux-Arts, jusqu’au 15 janvier 2012

03 89 33 78 11 www.musees-mulhouse.fr

EXPoSITIoN – MULHOUSE

Bernard Latuner, Il faut détruire Carthage, 2010

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on est maintenantdemain

Par Thomas Flagel

À Mulhouse, à La Filature, du 16 au 18 novembre

03 89 36 28 28www.lafilature.org

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Comment avez-vous découvert ce livre ?Je suis tombé sur son dernier écrit, paru en 1994, dix ans après sa mort. Il contient tout, son humour tinté de mélanco-lie, l’écriture en fragments chère à Brautigan. Ce journal est ce qu’il décrit comme une « carte-calendrier » de quelques mois de sa vie, avec des petites choses ne reposant sur rien, une sensation qui s’efface… J’ai eu envie de suivre ce grand auteur s’épuisant à continuer à écrire, se raccrochant coûte que coûte à cette nécessité même s’il souffrait d’une absence de reconnaissance après avoir connu la fulgurance du succès.

Vous aviez déjà créé For the good times, Elvis avec le musicien Marc Delhaye. Vous aimez cette liberté que confère l’adaptation d’un roman où l’on peut agencer à l’envi, sans souci d’exhaustivité ?Cela permet en effet de plonger dans la subjectivité d’un futur interprète pour le metteur en scène ponctuel que je suis. Ce n’est pas une pièce de théâtre mais Brautigan écrit à la première personne, ce qui facilite sa mise en parole. Faire, comme il le dit, « fonctionner passé et présent », provoque une architecture productrice d’une certaine énergie dont je m’empare pour mettre tout cela en forme, avec le souci de rester au plus près de l’économie de son style. Je me pose sans cesse des questions : d’où ça part ? Qui parle ? Utilisant le désarroi que cela procure et cette marche en avant contre la dépression qu’est pour lui l’écriture d’une fiction sur sa propre vie. On la connaît mal car il vivait plutôt reclus et n’a pas profité de sa notoriété.

Il raconte d’ailleurs lire une biographie de William Faulkner, dont il admire les livres, et trouver sa vie lamentable. Seules les œuvres comptent…Il a lu ses pairs, les aime, mais avec ironie. Sa vie ne regarde que lui. Il n’était pas intéressé par le reste. Il s’est d’ailleurs profondément isolé dans l’alcool. Brautigan a même fait croire aux gens qu’il vivait dans une maison, pour se suicider dans une autre où il ne sera retrouvé que plus tard. On sent dans Cahier d’un retour de Troie la présence de la mort, la sienne et celle de deux femmes, l’une pendue dans une des maisons où il séjourne et celle de son amie victime d’un can-cer. Nous voilà face à quelque chose de simple : la présence de l’échec qu’on tente de bannir par l’action d’écrire.

La musique est un véritable dialogue entre Marc Delhaye et vous ?C’est notre troisième spectacle ensemble. Il n’y aura qu’une seule citation musicale, c’est-à-dire une reprise, indiquant l’époque du texte. Tout se construit au fur et à mesure. Marc et moi essayons de trouver un lien entre mon dire et le regard sonore qu’il pose au même instant sur le plateau. C’est une écoute attentive que j’ai la chance d’avoir à mes côtés.

Vous prenez pour titre les magnifiques mots qu’il envoie à son amie en train de mourir d’un cancer : « Les mots sont des fleurs de néant. Je t’aime. » Sublime et terrible pour lui qui n’a que l’écriture…Effectivement, il y a quelque chose de la catharsis, chez lui, à répandre du noir sur des feuilles blanches. Son amie part trop vite et lui partira bientôt, entre alcool et désespoir. Mal-gré la richesse et la qualité que peuvent avoir ses phrases, le néant prend le dessus. Ce titre évoque la vie et la création, l’éphémère de ce que cela apporte. Le plaisir vient de dire ses mots qui parlent d’une époque. Dans un espace ouvert, presque vide, seul contre tous, évoluer délicatement dans ses phrases pour rendre compte de ce que j’ai ressenti.

Brautigan se livre, hanté par le passé, les pannes d’écriture, ses amourettes ratées, ses visites de cimetières et ses soirées trop alcoolisées avec un attrait pour les petites choses du quotidien. Des instantanés de vie quasi anecdotiques dont il révèle toute la poésie…Voilà le plus difficile. Choisir dans tout cela pour tenir en 1h30. J’essaie de donner à entendre son ironie mordante et douce, contrebalancée par ses constats morbides et froids, oscillant entre les “presque riens” et ce qui nous rappelle au néant. Ce sera la clé du spectacle final.

Avec ses longues descriptions de neige et flocons, on n’a jamais lu autant de pages sur des orages qui n’adviennent pas : faut-il y voir des métaphores sur ses propres changements intérieurs ?Ne me dites pas ça, je commence à avoir des regrets ! Voilà des choses que je n’ai pas conservées et ce sont des choix douloureux. C’est sa manière à lui de dire le vide de sa vie, d’aller se balader dans les neiges du Montana et de constater que les flocons qui tombent seront bientôt des glaçons dans son Whisky. Au début, j’avais retenu ces orages. Aujourd’hui, ils n’y sont plus. Je les laisse aux lecteurs du livre.

Brautigan finira, en 1984, par se suicider au 44 mag-num, une bouteille d’alcool à la main. Vous évoque-rez cette fin tragique ?Je me suis posé la question de clore le spectacle avec le bruit d’une détonation, ce coup de flingue qu’il s’est mis dans les nasses. Mais finalement non, car il n’en est pas encore là. Je m’en tiens au processus de désenchantement d’un homme, loin d’être dupe, qui peine à écrire et raconte la disparition de ses amis, de l’enfance, des êtres chers, du succès, d’une époque…

Les mots sont des fleurs de néant. Je t’aime. Voilà le titre choisit par le comédien Luc-Antoine Diquéro pour sa création, à La Filature, de l’adaptation du dernier livre de Richard Brautigan, Cahier d’un retour de Troie. Rencontre au mitan des répétitions.

THÉÂTRE – MULHOUSE

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barbès bandSi la musique adoucit les mœurs, il en est la preuve swingante : l’Orchestre national de Barbès présente son dernier album métissé, Rendez-vous Barbès, sur la scène de La Coupole.

mUSIQUE – SAINT-LOUIS

Par Dorothée LachmannPhoto d’Ali Mobarek

À Saint-Louis, à La Coupole, vendredi 18 novembre

03 89 70 03 13 www.lacoupole.fr

Barbès, c’est le rendez-vous du monde entier. Venus d’Algérie, du Maroc, de Tunisie, du Portugal, « de la France

d’en haut, de la France d’en bas, d’à côté et d’ailleurs », les musiciens de l’ONB s’y sont naturellement retrouvés. Sous l’impulsion de Youssef Boukella, ex-bassiste de Cheb Mami, la formation voit le jour en 1995 et devient aussitôt un joyeux laboratoire où fusionnent les styles et les influences. On y retrouve évidemment les musiques du Maghreb (raï,

chaâbi, gnawa), mais la sonorité si originale des gars de Barbès provient de leur mélange avec funk, salsa, rock, reggae, jazz, ska... Un métissage musical porté comme une philoso-phie, pour ces artistes qui respirent la frater-nité. « Nous défendons les couleurs de la rue et des quartiers populaires avec beaucoup d’amusement », assure Youssef Boukella.

Avec son énergie explosive et sa joie de vivre communicative, l’ONB a déjà enflammé les planches du monde entier, de l’Olympia à Montréal, de Toulouse à Essaouira, de la Courneuve à Monaco. « Le groupe s’est construit tout seul grâce à la scène puisqu’on a fait plus de 500 concerts en six ans ! » Pas étonnant que le premier disque soit un live. Ce n’est qu’en 1999 que l’Orchestre se décide à travailler en studio et à enregistrer un deu-xième album, Poulina, autoproduit par souci de liberté (comme tous ceux qui suivront). Les tournées s’enchaînent à un rythme effréné, et il faut attendre 2008 pour découvrir un troi-sième opus, baptisé Alik. L’orientation rock s’y fait plus nette, notamment avec l’étonnante reprise de Sympathy for the devil des Rol-ling Stones. Mais Alik est aussi un hommage aux grands artistes de la chanson algérienne comme Cheikh Mamachi, Slimane Azem ou Mohamed Mazouni. Tout à la fois la tradi-tion et la rupture, le décloisonnement des genres pour réinventer une universalité de la musique.

Avec ce Rendez-vous Barbès, les voilà qui reviennent aux origines, délaissant l’épisode rock pour retrouver les ingrédients qui ont fait leur succès. Les rythmes ensoleillés du Ma-ghreb y sont savamment mélangés et saupou-drés d’une touche de ska par onze musiciens débridés. Des chansons voyageuses, drôles et engagées, qui transportent des cabarets ora-nais jusqu’aux portes du désert, sur des textes chantés en français, en arabe ou en kabyle. Dans une ambiance de fête, l’Orchestre natio-nal de Barbès va faire souffler avec bonheur un grand vent de liberté et de tolérance.

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der himmel über alsacePour sa septième édition, Augenblick, le festival alsacien du cinéma en langue allemande fait la part belle à la jeune création germanophone. Coup d’œil sur une programmation éclectique.

Par Hervé LévyPhoto tirée de Das Lied in mir

Dans toute l’Alsace, du 8 au 25 novembre

www.festival-augenblick.fr

Un tarif unique (4,50 €), seize cinémas participants dans le Haut- et le Bas-Rhin, six films inédits en compétition

(un prix du jury et un prix des spectateurs), une rétrospective (intitulée Pass für Ame-rika qui, de Murnau à Wenders, présente les cinéastes allemands “montés” à Hollywood), un “hors compétition” d’une belle variété, près de 15 000 spectateurs sur tout le territoire l’année passée… Voilà un rapide résumé d’Au-genblick. Directrice de l’association Alsace Cinémas, organisatrice du festival, Stéphanie Dalfeur explique qu’il s’agit d’une occasion unique « de percevoir la vitalité de la jeune création germanophone ». Quelques événe-ments sont également programmés comme l’exceptionnelle projection, en clôture, de Welcome in Vienna (vendredi 25 novembre au cinéma La Coupole de Saint-Louis) d’Axel Corti en version numérique restaurée (et iné-dite depuis 1986) ou un ciné-concert avec Tonio Marinescu, RED et Philippe Tessier, sur le traumatique (pour les Français en général, et Patrick Battiston en particulier) match de 1982, à Séville (jeudi 10 novembre au cinéma Colisée de Colmar et le lendemain au cinéma Palace d’Altkirch). L’heure de la réconciliation footballistique a sonné… sur fond de musique !

Les films en compétition – tous inédits en France – sont pour leur grande majorité l’œuvre de réalisateurs trentenaires. Une belle occasion de découvrir que le cinéma de langue allemande ne se limite pas à Der Himmel über Berlin (Les Ailes du désir en VF), Good bye, Lenin ! ou La Vie des autres. Même s’il n’existe pas de réelle thématique, tous « posent une question fondamentale : comment s’intégrer dans la société dans la-quelle on vit ? » Bien moins introspectif que le jeune cinéma français donc… Preuve avec Die Ausbildung (L’Apprentissage), une réflexion sur la place possible (ou pas) dans un monde du travail de plus en plus déshumanisé ou Das Lied in mir (La Chanson en moi) une variation sur l’adoption et la quête d’identité. Le film le plus attendu de la sélection ? Sans aucun doute Neukölln Unlimited, un documentaire qui obtint l’Ours de cristal, (section “Generation 14+”) à la Berlinale 2010. Dans le quartier le plus mélangé de Berlin, Agostino Imondi et Dietmar Ratsch s’attachent à suivre le quoti-dien d’une famille libanaise menacée d’expul-sion. Entre hip-hop, problèmes scolaires et méandres administratifs, voilà une version pleine de punch, parfois puissamment déca-pante, du Multikulti à l’allemande.

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le thrill parfait Impact et Accélérateur de particules s’associent pour une exposition collective d’art contemporain vibrante, Thrill. Vingt créateurs dressent un portrait éclaté du monde d’aujourd’hui.

Par Emmanuel Dosda

À Strasbourg, à L’Ancienne douane, du 19 novembre au 15 janvier 2012

http://thrill-art.com

aRT CoNTEmPoRaIN – STRASBOURG

Le lieu du Thrill ? La galerie de l’An-cienne douane à Strasbourg, fermée depuis l’incendie de juin 2000, espace

ayant accueilli de prestigieuses manifestations artistiques comme celle, mémorable, dédiée à la marchande d’art Jeanne Bucher, en 1994. Ses 1000 m2 seront investis par une vingtaine d’artistes essentiellement originaires d’Alle-magne, de France ou de Suisse. Résolument orientée “peinture”, l’expo rassemble Marc

huile sur toile, 2010, 200 x 150 cm (courtesy Galerie Zürcher, Paris)

Desgrandchamps, Bernhard Martin ou des créateurs plus confidentiels comme Chris-tine Camenisch et les frères Léoplold & Till Rabus… Des plasticiens pour la plupart nés dans les années 1970, représentatifs d’une génération flippée par une situation de crise, une actualité souvent plus sinistre que les clips de Cure auxquels ils ont été biberon-nés. Mais tout n’est pas si noir. Selon Yas-mina Khouaidjia, commissaire principale, « un parcours en crescendo » nous conduit face à des représentations d’un monde que les artistes cherchent à ordonner, à abstraire, (le travail géométrique de Kim Lux, les com-positions en trompe-l’œil de Sinta Werner) ou à accommoder (l’univers vaporeux décrit par Marc Desgrandchamps, etc.). Parfois, « plus direct, plus politiques », ils l’exposent dans toute sa violence, sa noirceur, sa saleté (les toiles agitées de Stéphane Pencréac’h ou apo-calyptiques de Damien Deroubaix, voir Poly n°141), quitte à bousculer le spectateur… qui passe alors des frissons aux spasmes.

Marc Desgrandchamps (sans titre)Sur des surfaces immenses, on dirait que la peinture s’est diluée. Les êtres se déploient dans une étonnante évanescence et res-semblent à des spectres oniriques dont le rapport au monde, entre présence et absence est le fondement. Ces formes translucides, presque indéterminées, ont une force peu commune : il est possible que leur dissolution leur ait paradoxalement conféré une puissance accrue. Mais que représentent ces silhouettes transparentes ? On peut percevoir, dans ce concentré d’humanité, la substance laiteuse et impalpable qui nous composerait tous. La disparition / affirmation de l’être est renfor-cée par les coulées de peinture qui barrent les œuvres, comme si la matière, trop liquide, avait dégouliné par endroits, provoquant un réseau aqueux et coloré, une fine pellicule qui ressemble à la matrice du tableau. (H.L.)

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Léopold Rabus (Envol d’oiseaux)« Mes tableaux ont rarement des thèmes », nous confie Léopold Rabus pour lequel « les femmes nues ou les fruits posés sur une table sont les plus beaux sujets ». Selon l’artiste de Neuchâtel (né en 1977), l’essentiel est que « la peinture puisse s’exprimer ». Difficile cepen-dant de ne pas s’arrêter sur le symbolisme de sa toile en mouvement (l’artiste parvient ici à donner, dans une image fixe, la totali-té du geste de l’oiseau qui s’en va). L’Envol d’oiseaux – s’échappant du « bénitier » où ils se sont abreuvés pour aller vers l’obscurité – évoque en effet, la perte de la virginité. La tête d’un des volatiles ressemble d’ailleurs étran-gement à… un pénis. Mais qu’importe, « nous ne sommes pas obligés de comprendre toute la symbolique de chaque centimètre carré du Retable d’Issenheim pour apprécier sa qualité picturale. » D’abord la peinture, la matière,

huile sur toile, 2009, 240 x 300 cm

donc. Puisant dans son environnement, les œuvres de Léopold Rabus sont souvent le reflet de ses balades, autour de sa maison. On lui fait remarquer son traitement de l’horizon, ombragé et menaçant, de certains détails plu-tôt morbides… mais il se défend : « J’essaye de mettre de l’humour dans mes toiles. J’ai bien rigolé en faisant l’Envol d’oiseaux, par exemple en peignant cette colombe, à droite, qui s’est plantée dans la neige. J’aimerais beaucoup faire des choses qui dégagent de la bonne humeur, de l’érotisme, qui soient joviales, un peu comme chez Rubens, mais j’ai encore pas mal de peine. Quand je peins une main ou une oreille, j’ai envie d’éclater ma palette colorée pour que ça soit beau. Mais le résultat s’avère étrange… car se sont plu-tôt les cadavres qui sont plein de couleurs. » (E.D.)

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Au début des années 1990, Jean-Claude Van Damme est la star de films d’ac-tion et de baston aux scripts tenants

sur des tickets de métro. Bloodsport, Cyborg, Kickboxer, Full Contact, Timecop ou encore Universal soldier font la part belle aux talents physiques du Belge alliant vélocité, souplesse – ses grands écarts en ont tant fait rêver – et impressionnante musculature. Alors adoles-cents, Zachary, son grand frère Gator et leur sœur en guest star s’amusent à re-tourner leurs scènes favorites, la maison familiale du Maine pour unique décor, avec une caméra de la taille d’une valise. Quand Van Damme frappe un arbre pour s’entraîner, Gator mar-tyrise un ficus de son tibia, on lui jette une noix de coco sur les abdos de plusieurs mètres, c’est une pantoufle qui atteint l’ado… Vingt ans plus tard, Zachary a embrassé la carrière d’artiste avec le collectif Nature Theater of Oklahoma à New York. Il propose à son frère de rejouer ces mêmes scènes à l’identique : mêmes plans, engoncés dans des tenues devenues visible-ment trop petites, leurs improvisations d’alors devenues dialogues de référence.

Serial qui leurreZachary s’empare de ce matériau brut sur le plateau, projetant sur grand écran des juxta-positions entremêlées de diverses scènes origi-nales et reproduites. Tel le MC d’une pièce en puzzle dont lui seul saurait agencer les pièces, il embarque le public dans un ovni théâtral drôle et grave, doublant une partie des dialo-gues en direct, multipliant ainsi le nombre de filtres à la réalité qui nous est offerte. Si l’on ne manque pas de rire des propos, parfois té-nus, d’un Jean-Claude Van Damme se livrant sans retenue, l’on découvre rapidement que le

spirit of jcvdÀ travers un savoureux mélange de scènes cultes et de vieilles parodies de films de karaté tournées avec son frère, le comédien et musicien Zachary Oberzan nous entraîne, avec Your brother. Remember ?, dans l’intimité des siens.

Par Thomas FlagelPhoto de Nancy Geeroms

À Strasbourg, au Théâtre de Hautepierre, du 27 au 29 novembre (en anglais surtitré en français)

03 88 27 61 81 www.le-maillon.com

Projection du film Flooding with love for the Kid de Zachary Oberzan suivie d’une rencontre, dimanche 27 novembre, au Star

www.cinema-star.com

THÉÂTRE & VIdÉo – HAUTEPIERRE

temps est un serial qui leurre. Entre les deux tournages amateurs, l’aîné des frères Oberzan a mal tourné, confiant en 2010 : « On peut résumer ma vie par deux overdoses, un sé-jour en prison et mon décrochage sur le tour-nage. » Ainsi l’extrait de la confession en gros plan tirée de l’excellent JCVD signé Mabrouk el Mechri où Van Damme parle avec sincérité du succès, de la drogue, de la fuite en avant de sa vie… offre un écho saisissant à la trajectoire d’un Gator sous méthadone qui a pris 45 kg et quelques tatouages durant son passage en pri-son. Dans une apparente simplicité, Zachary distille des bribes de confessions de son frère, révélant la complexité humaine dans toute sa grandeur. Une intimité non imitée dévoilée en un tempo précis dont le montage fait penser aux poupées russes dont on découvre les simi-litudes et les différences, infimes mais essen-tielles en glissant de la réalité à la fiction, du passé au présent.

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L’amour prend différentes significations selon les gens… Mais l’amour est immanentJean-Claude Van Damme

À la vie à l’amorSi le metteur en scène avoue, la gorge nouée, qu’il a tout appris de son métier d’acteur en regardant son frère aîné, pour ce dernier, le plaisir venait avant tout de prétendre être quelqu’un d’autre. La manipulation et la comé-die comme moyens de survivre, d’obtenir des autres de quoi assouvir ses addictions. Pas de pathos ici, ni de chaudes larmes. Plutôt une retenue pudique portée par un rythme saisis-sant entre scènes rejouées, extraits de films et morceaux de rushes amateurs drôles et tou-chants s’appuyant sur des bribes de leur vie, comme ces extraits de lettres envoyées depuis sa cellule ou encore les savoureuses reprises de chansons aux paroles trafiquées par Gator (On the road again devient Overdosed again…) in-terprétées à la guitare, sur scène, par Zachary. Your brother. Remember ?, citation tirée de Kickboxer donnant son titre à la pièce, parle en soi. Réflexion sur le temps qui passe, l’enfance,

les liens d’une fratrie, cette thérapie familiale à dimension universelle procède, dans son contenu formel et fictionnel, à la manière d’un Michel Gondry dans Soyez sympa, rem-bobinez : faire un film avec zéro moyens, des acteurs amateurs sans se prendre au sérieux, c’est partager de la vie et du plaisir, créer du lien social et replacer l’imaginaire au centre de nos vies. « L’amour prend différentes significations selon les gens… Mais l’amour est immanent », affirme JCVD en ouverture de la pièce. Your brother. Remember ? Une lettre d’amour d’un frère malgré l’éloignement de trajectoires de vies aux antipodes. Et dire que Zachary laisse entendre que le spectacle pourrait être une sorte de work in progress auquel s’ajouterait une suite… dans 20 ans ! Rendez-vous en 2030.

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plus de transparence À l’occasion de St-Art 2011, le Centre international d’Art verrier expose dix créateurs français ayant travaillé coude-à-coude avec les maîtres de Meisenthal. Sélection commentée par Yann Grienenberger, directeur du CIAV*.

aRT CoNTEmPoRaIN – STRASBOURG

Par Emmanuel Dosda

À Strasbourg, au Parc des expo-sitions du Wacken, du 25 au 28 novembre (vernissage jeudi 24 sur invitation)

www.st-art.com

*Centre international d’art verrier, place Robert Schuman à Meisenthal (57) — 03 87 96 87 16www.ciav-meisenthal.fr

Cage de Françoise PétrovitchCette artiste qui évolue dans un univers figura-tif utilise, « outre le dessin, différents médiums comme la céramique à Sèvres, ou le verre à Meisenthal, pour s’exprimer », note Yann Grie-nenberger. Françoise Pétrovitch est déjà venue plusieurs fois au CIAV, pour la réalisation de Ne bouge pas poupée (poupon en verre soufflé) ou Tue Lapin (lièvre décapité reposant sur une flaque de sang). Sa Cage, enfermant de petits « animaux improbables qui se regardent en chien de faïence » est, elle aussi, à la fois « mi-gnonne et violente », la plasticienne dessinant et réalisant beaucoup de figures faussement naïves, enfantines, mais démembrées, ensan-glantées… La série des cages a été réalisée pour l’exposition monographique de la plasticienne au Musée de la chasse et de la nature à Paris, jusqu’au 8 janvier 2012. www.francoisepetrovitch.com

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Handsigns de Michel Paysant« En général, les artistes viennent avec des croquis, passent quelques jours avec les verriers et échangent au sujet des hypothèses de travail », afin de définir « la capacité du verre à s’adapter aux formes voulues. Il y a un ajustement mutuel : parfois, le dessin évolue, sans changer le ques-tionnement initial. À d’autres moments, c’est le verrier qui pousse la technique dans ses retran-chements et invente un outil pour trouver un compromis », explique le directeur du CIAV. C’est également ainsi que les choses se sont passées avec Michel Paysant qui a réalisé un ensemble de 26 micro-sculptures translucides conditionnées dans une boîte conçue par un relieur d’art. Il s’agit de petites mains qui exécutent l’alphabet en langage des signes. Handsigns s’avère « précieux et ludique. On peut jouer avec les pièces, les manipuler. » Elles rappellent son exposition de l’an passé, au Louvre. L’artiste méticuleux y montrait notamment des mini-copies d’œuvres du département des Antiquités orientales. Le travail présenté à St-Art a été réalisé grâce à la technique traditionnelle du chalumeau, « comme les artisans, sur les marchés, qui font des chevaux ou des chatons, mais passé par le filtre du regard d’un créateur contemporain. » www.michelpaysant.fr

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Bulb Light de David Dubois« Voici une manière innovante de considérer l’éclairage. C’est le mariage improbable entre un vase et un verre taillé transformé en abat-jour. Le câble, visible, placé dans une encoche en haut du vase, subit sa propre inertie. » Avec Bulb Light, le designer a réalisé un objet de déco à la fois pratique (on déconseillera cependant d’y verser de l’eau) et esthétique, lampe et sculpture. Touche-à-tout, David Dubois (scénographe, créa-teur de mobilier, etc.) a dessiné un verre à bière Kronenbourg, imaginé une chambre de résidence d’artistes à la Villa Noailles ou encore pensé un banc pour le Mudam. « Nous avons beaucoup de demandes de créateurs qui désirent travailler chez nous », assure Yann Grienenberger, « mais il faut faire le bon choix : leurs questionnements nous intéressent-ils, ont-ils un projet de mons-tration derrière, une galerie où présenter leurs pièces ? Tout ceci se construit au même titre que l’objet en verre. » www.davidduboisproduct.com

re-st-art La seizième édition de St-Art, foire d’art contemporain stras-bourgeoise, devrait, cette année encore, accueillir quelque 30 000 visiteurs. Manifestation artistique populaire et interna-tionale, avec 40% de galeries étrangères parmi la centaine pré-sente, St-Art se réinvente chaque année, annonçant quelques nouveautés pour 2011. Citons l’installation Studio Glass organi-sée par l’ESGAA (www.biennaleduverre.eu), l’exposition dédiée aux collections de cinq amateurs strasbourgeois qui mêle la photo de Patrick Bailly-Maitre-Grand, le travail de Peter Klasen ou la peinture de Stéphane Pencréac’h. Autre focus : celui sur Christopher Payne, artiste new-yorkais qui s’est introduit dans des hôpitaux psychiatriques abandonnés pour une saisissante série de photographies. Murs défraîchis, sols salis, documents empilés, couloirs vides… Beau et flippant.

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Dans le paysage photographique, le tra-vail de Sophie Zénon (née en 1965) détonne : alors que la société toute

entière semble frappée par un véritable déni de la mort, ses clichés prennent le corps dé-funt pour sujet central. Comme elle l’explique dans sa note d’intention, « la mort s’est par-tiellement soustraite au regard quotidien pour se réfugier dans les images sensation-nelles ou insolites des magazines, de la télé-vision, ou du cinéma, témoignant ainsi de sa radicale extériorité. Elle est ainsi devenue un spectacle, un fantasme, qui ne concerne plus chacun dans son intériorité. » Ce néant, sans cesse refoulé aujourd’hui, l’artiste nous le balance en pleine figure renvoyant chacun à ses angoisses et à ses référents cultuels et culturels, les vanités du XVIIe siècle de Sébas-tien Stoskopff, par exemple.

L’exposition est composée de trois séries dis-tinctes : la première nous entraîne dans les catacombes du couvent des Capucins de Pa-lerme… peuplées de quelque 8 000 momies, enfermées là entre 1599 et 1920 et vêtues de leurs habits de fête. La deuxième a été réalisée à Naples, au milieu des 40 000 crânes de vic-times de l’épidémie de peste de 1656 rassem-blés au Cementerio Fontanelle. La dernière, la plus surprenante, est le fruit de la collabo-ration avec des thanatopracteurs (qui inter-viennent, à la demande de la famille, pour rendre au cadavre un aspect “présentable”) : ces ultimes portraits de défunts – au visage apaisé – entrent en résonance avec des vues aux Rayons X de jambes, dans des cercueils, encore parées de leurs “accessoires”, simples chaussures ou bottes ultra glamour… Eros et Thanatos.

Une réflexion sociologique et ethnographique implicite sur le rapport à la mort dans nos sociétés (et dans celles du passé) est évidem-ment à l’œuvre dans ces images… mais on ne

peut les réduire à leur aspect documentaire. La photographe entraîne en effet le visiteur dans un pays peuplé de spectres flottants et de fantômes évanescents. Voilà une vision pos-sible d’un “au-delà”, d’un enfer où des crânes aux orbites sombres contemplent les vivants d’un regard à jamais éteint. Et l’on se souvient, glacés, du poème fameux de Baudelaire : « Et de longs corbillards, sans tambours ni mu-sique / Défilent lentement dans mon âme ; l’Espoir / Vaincu, pleure, et l’Angoisse atroce, despotique / Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir.»

la traversée du styxAvec In Case we die, la photographe Sophie Zénon réalise une étonnante série de vanités contemporaines. Errance hallucinée au milieu de son armée des morts.

Par Pierre Reichert

À Saint-Louis, à l’Espace d’art contemporain Fernet-Branca, jusqu’au au 11 décembre

03 89 69 10 77 www.museefernetbranca.org

EXPoSITIoN – SAINT-LOUIS

Sophie Zénon, Aristocrate napolitain 1 (Naples, 2010)

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La Philharmonie de poche est née de l’envie commune « de plusieurs musi-ciens de l’Orchestre philharmonique

de Strasbourg et du SWR Sinfonieorchester Baden-Baden / Freiburg de jouer ensemble » explique Philippe Bertrand, bassoniste à l’OPS et initiateur du projet. « Il ne s’agit pas d’un groupe figé, mais d’un ensemble à géomé-trie variable qui va d’un seul instrumentiste à un véritable orchestre de chambre d’une vingtaine de musiciens. » Très rapidement, le contact est noué avec Éric Wolff, directeur du Point d’eau d’Ostwald qui accueille l’ensemble en “résidence permanente”. Pour cette pre-mière saison chambriste, trois concerts sont proposés. Dans l’avenir, cependant, « il nous apparaît essentiel de mêler les disciplines en invitant des plasticiens, des comédiens, des vidéastes, des conférenciers… afin de sortir du cadre, parfois un peu rigide, du concert classique, de créer des décalages, d’imaginer ensemble des objets artistiques difficilement identifiables. »

Pour son premier rendez-vous (le 20 no-vembre) la Philharmonie de poche a décidé de jouer à saute-mouton avec les siècles et de mettre les bois en avant, invitant Philippe Grauvogel, hautbois solo de l’Ensemble Inter-contemporain, à jouer la Sequenza VII (1969) de Luciano Berio construite sur un principe de prolifération mélodique. Sont également au

programme des pages baroques méconnues : la Deuxième Récréation (1737) de Jean-Marie Leclair, « tellement “française”, scintillante et d’une intense clarté » et une Sonate en trio (1715) de Jan Dismas Zelenka sur laquelle « l’ombre de Bach plane sans cesse ». Dans son second concert (11 mars), un éclairage particulier sera donné sur les cordes avec des pages de Mozart et de Schoenberg. On entendra la sublime Nuit transfigurée, écrite d’après un poème de Richard Dehmel dans lequel, au cours d’une promenade nocturne, une femme annonce à son amant qu’elle at-tend un enfant d’un autre homme… La par-tition, où l’amour triomphe, doit beaucoup à Wagner et oscille entre le crépuscule du ro-mantisme et l’aube d’un langage nouveau. Elle nous entraîne dans les arcanes d’un amour conscient qui semble se renforcer d’une tra-hison acceptée : « Deux êtres marchent dans un bois froid et dénudé / La lune glisse avec eux, ils la regardent / La lune glisse par-des-sus les grands chênes. Aucun nuage ne ternit la limpidité du ciel / Vers lequel les branches dénudées se tendent ». Cette saison cham-briste s’achèvera en apothéose (le 3 juin) par un incontournable du genre, l’Octuor de Schu-bert.

à géométrie variableLa Philharmonie de poche, ensemble voué à l’exploration du répertoire chambriste, investit le Point d’eau pour trois concerts : une promenade musicale, du baroque à la musique contemporaine.

Par Hervé LévyPhoto de Pascal Bastien

À Ostwald, au Point d’eau, les dimanches 20 novembre 2011, 11 mars et 3 juin 2012

03 88 30 17 17www.lepointdeau.com

mUSIQUE – OSTWALD

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THÉÂTRE – STRASBOURG

Un an après avoir présenté La Omisión de la familia Coleman (Le Cas de la famille Coleman) au Théâtre national

de Strasbourg, Claudio Tolcachir revient avec cette pièce qu’il fera résonner avec sa dernière création, El Viento en un violín (Le Vent dans un violon). L’occasion de plonger, en quelques semaines, dans l’univers de cet argentin de 36 ans qui met en scène ses propres textes. Avec sa compagnie Timbre 4, installée dans le quartier populaire de Boedo à Buenos Aires, il porte un théâtre énergique et hyperréaliste dans lequel les dialogues fusent, s’enchaînent, nous emportent et nous malmènent. Avec ses fidèles comédiens, Tolcachir s’appuie sur de longs temps d’improvisation nourrissant leurs créations.

Sclérose familialeDans une scénographie ouverte (un lit, une table et un canapé, espaces délimités par un savant jeu de lumières), La Omisión de la

familia Coleman conte l’invivable cohabita-tion d’une famille à la limite de l’implosion. Une grand-mère, sa fille et ses quatre petits-enfants se débattent dans un quotidien au bord de la misère. Les manques affectifs en étendard et l’absence d’intimité, dans un logis exigu, rendent le moindre mouvement pré-texte au clash. La disparition brutale de la matriarche qui imposait le respect et apaisait les douleurs d’être (notamment d’un petit fils à moitié fou) crée la déflagration de l’éclate-ment. Les rêves d’ailleurs, d’amour, d’intimité – empêchés par des liens familiaux agissant comme un aimant sur ces adultes – resur-gissent alors et mettent à jour leur incapacité de prendre pied à l’extérieur du noyau filial, hors de ce huis clos psychologiquement mor-tifère.

Tout le brio de Claudio Tolcachir et des inter-prètes est de transmettre, par les mots mais aussi les corps, les tensions internes, les

éclats familiauxAvec deux pièces présentées successivement au TNS, El Viento en un violín et La Omisión de la familia Coleman*, l’auteur et metteur en scène argentin Claudio Tolcachir nous conduit au cœur de fratries étranges. Un théâtre fleuve, savoureux et réaliste.

Par Irina SchragPhotos de Timbre 4

El Viento en un violín (en argentin surtitré en français), au Théâtre national de Stras-bourg, du 15 au 26 novembre

La Omisión de la familia Cole-man (en argentin surtitré en français), au Théâtre national de Strasbourg, du 29 novembre au 4 décembre

Rencontre avec le metteur en scène Claudio Tolcachir, lundi 21 novembre au TNS dans le cadre du cycle Théâtre en pensées.

03 88 24 88 24 – www.tns.fr

* Le Cas de la famille Coleman et Le Vent dans un violon sont publiés par les éditions Voix navigableswww.voixnavigables.eu

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surgissements d’une violence verbale et des sentiments exprimant la rudesse d’une vie balbutiée, où chacun négocie en permanence ses désirs avec les autres. Omission de soi. Omission de ses aspirations. Doublées d’un amour profond et sincère. Destructeur aussi. La famille Coleman, monstre qui dévore ses membres par la peur, la solitude et les ab-sences. L’absence du père bien entendu, mais aussi de la construction identitaire d’enfants tenant le rôle de parents pour leur mère tota-lement perdue. Avec sa manière bien à lui de suggérer le contexte et les éléments biogra-phiques de ses personnages, Claudio Tolcachir laisse une grande part de sensibilité et d’ima-ginaire aux spectateurs : à eux d’inventer et de remplir les vides.

All we need is loveCette notion de famille aux liens étroits et forts a perdu ses lettres de noblesse dans nos socié-tés au profit d’un individualisme menant à l’éclatement et aux recompositions. Mais l’on comprend aussi, chez ces personnages au bord de l’explosion, submergés par les trop pleins d’une vie qui déborde de tout (sentiments, manques, accommodations avec des gens qu’ils n’ont pas choisis), l’aspect tyrannique que peut représenter toute fratrie, point de repère indispensable et monstrueux, à biens des égards. De famille, il en est aussi ques-tion dans El Viento en un violín. Là encore l’absence de père se remarque. Mécha est une femme d’affaire aussi bordélique qu’hysté-

rique élèvant seule Dario, jeune trentenaire un brin différent et perturbé qui sèche allè-grement la fac mais pas sa thérapie, persuadé qu’il pourrait aider son psy avec ses autres patients en échange de la gratuité de ses séances. Son destin va croiser celui de Céleste (fille totalement instable de Dora, la servante de Mécha) et son amante Léna. Une nuit de fête, elles forceront Dario à “prendre” Céleste pour leur donner l’enfant qu’elles désirent ensemble.

Les conséquences seront surprenantes, no-tamment pour le public qui jouit, grâce à l’agencement des situations et des ramifica-tions personnelles de l’histoire, d’un temps d’avance sur la découverte des événements par les comédiens. Et l’on se délecte de la distance existant entre la réalité et la manière dont la reçoivent et la traitent les personnages, appor-tant une dimension comique que ne se prive pas d’exploiter Claudio Tolcachir. Sa pièce est un révélateur d’âmes dans lequel tout le monde fuit sa position pour ne surtout pas affronter la réalité : Dario s’invente un travail et des compétences d’analyste, Mécha veut croire que son fils (qui a pourtant déjà 30 ans) va « démarrer » comme tous les autres, Dora fait mine d’ignorer la grave maladie de Céleste qui elle-même pense pouvoir être mère, ce qui est le rêve impossible de Léna… Mais l’amour d’un être en devenir issu de l’improbable coït modifiera la donne. L’amour pansant les âmes, par-delà tous les déterminismes.

Tout ce que je vois est dans tes yeux. Regarde. Regarde. Regarde.

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«La panthère, c’est la bête identi-taire. Si on la blesse, elle devient très dangereuse. » La metteuse en

scène Hala Ghosn a choisi pour son spectacle le titre du dernier chapitre des Identités meur-trières. « Étant aussi d’origine libanaise, la réflexion de Maalouf me parle beaucoup : comment en arrive-t-on à oublier tout ce qui nous relie aux autres parce que l’une de nos appartenances est mise en danger ? Com-ment des individus coexistant dans la paix peuvent-ils basculer dans l’hystérie meur-trière ? » Adapter un essai au théâtre est une gageure. C’est avec l’auteure Jalie Barcilon et son collectif d’acteurs qu’Hala Ghosn s’y est collée. Une écriture en commun, basée sur l’histoire personnelle de chacun des comé-diens. « Nous leur avons inventé une nouvelle identité, en extrapolant sur ce qu’ils sont, en leur fantasmant une vie. L’une des actrices parle allemand : elle est devenue allemande. Un autre a des parents pieds-noirs : on en a tiré un personnage dont le père est algérien et la mère catholique. C’est une démarche qui permet aux comédiens d’être très concer-nés par leur rôle… et de bien connaître leur sujet. » Au final, la pensée d’Amin Maalouf prend vie grâce à une galerie d’hommes et

de femmes, Algériens, Allemands, Bretons, Croates ou Bosniaques, tous aux prises avec le nationalisme et confrontés à leurs propres ambiguïtés. Il y a celle qui se veut citoyenne du monde, celui qui se prétend sans fron-tières. Mais que reste-t-il des idéaux et de l’ouverture au monde lorsque son identité, ou l’une des facettes qui la composent, se trouve menacée ? « Si demain, on posait des bombes dans les églises de France, que deviendrait notre idéologie laïque et républicaine ? La pièce décrit les mécanismes qui conduisent au nationalisme : personne n’est à l’abri de cela », estime la metteuse en scène. Tra-quer la bête en nous, la part d’ombre, en être conscient pour mieux savoir l’apprivoiser… Mais Hala Ghosn n’est pas une donneuse de leçons. « L’histoire de ces personnages est plutôt un prétexte à interroger le spectateur, la pièce pose des questions, n’impose pas de réponses. » Des parcours humains, des récits du quotidien plutôt que de grandes théories, est la marque de fabrique de cette jeune met-teuse en scène, qui a déjà connu le succès avec Beyrouth adrénaline. Entre profondeur et autodérision, Apprivoiser la panthère trouve aussi sa force dans une dramaturgie brillante qui transcende la justesse du propos.

la bête en nousInspiré par Les Identités meurtrières de l’écrivain franco-libanais Amin Maalouf, Apprivoiser la panthère questionne le nationalisme, cette revendication désespérée de soi qui, si souvent, mène au désastre. Au TAPS, des destins sur le fil du rasoir, entre fable et réalisme.

Par Dorothée LachmannPhoto de Thierry Laporte

À Strasbourg, au TAPS Scala, du 18 au 20 novembre

03 88 34 10 36 www.taps.strasbourg.eu

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AU PAYS DES VACHESmontbéliArDES,nAiSSEnt DES lionS.

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C’est sans doute grâce à Peugeot que l’esprit d’innovation accompagne notre territoire : du pôle de compétitivité Véhicule du Futur au pôle multimédia Numérica, les entreprises du Pays de Montbéliard partagent les valeurs d’audace, de performance et de réussite.

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musiques de paixAvec un programme britannique, l’Orchestre philharmonique de Strasbourg nous entraîne à la découverte de deux odes à la paix écrites en pleine guerre, signées Benjamin Britten et Michael Tippett.

Par Hervé LévyPortrait de Michael Tippett par Mike Ward

À Strasbourg, au Palais de la musique et des congrès, jeudi 10 novembre

03 69 06 37 06www.philharmonique.strasbourg.eu

Les institutions culturelles strasbour-geoises ont choisi de célébrer avec éclat la Présidence du Comité des Mi-

nistres du Conseil de l’Europe exercée par le Royaume-Uni entre novembre 2011 et mai 20121 en organisant une véritable “mini sai-son” culturelle anglaise. C’est dans ce cadre que s’inscrit un concert qui débute par la Sinfonia da Requiem que Benjamin Britten composa en 1940. Elle lui fut originellement commandée par… le gouvernement japonais pour commémorer les 2 600 ans de l’Empire. Les références chrétiennes (les titres des trois parties sont signifiants : Lacrymosa, Dies irae et Requiem aeternam) ne plurent guère aux Nippons et, finalement, l’œuvre fut créée à New York en 1941, puis donnée à Londres, en plein Blitz, en 1942. Douleur, effroi, chaos, ambiances funèbres, recherche permanente mais vaine, de l’apaisement… Le bruit et la fureur de la guerre sont la toile de fond d’un requiem sans paroles dans lequel sont percep-tibles les réminiscences du célèbre discours de Winston Churchill : « Je n’ai rien d’autre à offrir que du sang, du travail, des larmes et de la sueur. » Presque contemporain de cette partition symphonique, l’oratorio d’un autre

compositeur britannique, Michael Tippett, A Child of Our Time (écrit entre 1939 and 1941) est, pour sa part, inspiré par le meurtre, à Pa-ris, le 7 novembre 1938, de l’attaché d’ambas-sade allemand Ernst von Rath par un jeune réfugié juif, Herschel Grynszpan, qui servit de prétexte aux nazis pour déclencher la Nuit de Cristal. Dans cette œuvre se fondent de multiples in-fluences musicales : Bach, Haendel, Purcell, Beethoven, Stravinsky, les negro-spirituals, le jazz, le blues… L’arrière-plan intellectuel est a trouver chez Carl Jung comme l’explique Jean-Philippe Heberlé, professeur de littéra-ture et de civilisation britanniques à l’Uni-versité Paul Verlaine de Metz et spécialiste du compositeur2 : « La question de la dualité entre le bien et le mal est abordée dans une optique jungienne. Le psychanalyste diffé-rencie l’inconscient personnel de l’inconscient collectif, le premier étant lié au passé d’un individu, le second contenant des matériaux ataviques. Tippett, influencé par Jung, déve-loppe l’idée que connaître les forces obscures de son inconscient est la condition préalable à une meilleure conscience de soi. »

1 www.coe.int2 Il est l’auteur de Michael Tippett, ou l’expression de la dualité en mots et en notes (L’Harmattan, 2006) www.editions-harmattan.fr

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Metz profite-t-elle d’un “effet Bilbao” ? Tout le monde semble affirmer qu’en effet, l’édification du Centre Pompidou-Metz, majestueux chapiteau sur plan

hexagonal traversé par trois galeries, est bien plus qu’un symbole : un atout majeur pour la ville. Ouvert en mai 2010, ce bâtiment conçu par les architectes Shigeru Ban et Jean de Gastines a, selon Antoine Fonté, adjoint au Maire chargé de la culture, « fait gagner 40 ans de communica-tion à Metz. » Depuis Pompidou, la cité vit une nouvelle dynamique. Une renaissance ? « Nous n’étions pas une ville morte, mais depuis une dizaine d’années, Metz était en perte de vitesse. » Succès de manifestations culturelles telles que la Nuit blanche (la quatrième édition de cet événement mêlant performances, installations sonores ou architectures éphémères a eu lieu le 30 septembre), Salon du livre redé-fini… « il a fallu libérer le carcan qui pesait sur une culture, prisonnière d’un système très fermé. Le secteur associatif

est aujourd’hui libre de s’exprimer. Nous avons augmenté l’aide aux acteurs locaux de 47% en trois ans, alors qu’avant tout allait aux grandes institutions, L’Arsenal ou l’Opéra-Théâtre. La cathédrale attirait déjà 500 000 visiteurs par année, mais Pompidou, qui a fait venir un million de visi-teurs, transforme notre image. Nous passons de ville de gar-nison à ville branchée » bénéficiant d’une image moderne et de retombées positives pour tout le tissu économique, commerçants, hôteliers, restaurateurs, etc. Metz ne néglige pas son patrimoine pour autant, puisqu’elle devrait obtenir le label “Ville d’art & d’histoire”, auquel la cité est candidate, au cours du mois de novembre. La nouvelle politique culturelle de Metz Métropole, présentée en octobre, est ambitieuse : elle prévoit d’affecter au secteur, jusqu’en 2014, plus de 22 millions d’euros. Parmi eux 3,5 millions seront dédiés au Musée de La Cour d’Or et 1,45 million à la première phase de réhabilitation de l’Opéra-Théâtre.

Ville de garnison ou cité branchée ? Nous penchons pour la seconde option : depuis l’arrivée du Centre Pompidou, Metz connaît un nouvel élan. Art contemporain, nuit blanche, musiques “volantes”, opéra “en fusion”… Metz reborn.

Par Emmanuel Dosda et Hervé Lévy

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Centre Pompidou-Metz (© Roland Halbe)

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Marina Abramović, Stromboli, 2002

L’art contemporain en libertéForte d’un Centre Pompidou (lire article sur l’exposition des frères Bouroullec, page 52) qui attire touristes et presse inter-nationale, d’une École supérieure d’art dynamique ou d’un magnifique Frac Loraine, Metz est-elle en passe de devenir métropole de l’art contemporain ? Citons les très récentes galeries Modulab, dédiée au dessin, à l’image imprimée et à la petite édition, mais aussi Toutouchic, spécialisée dans les

arts graphiques. En rase campagne, La Synagogue de Delme, ancien lieu de culte transformé en centre d’art contemporain, propose depuis 1993 des expos dédiées à Ann Veronica Jans-sens ou Jean-Marc Bustamante. Parlons encore d’Octave Cowbell, lieu d’exposition associatif situé dans un appart où l’on pénètre en passant par la fenêtre, comme un voleur, ou de Faux mouvement. Ce centre d’art créé en 1983 (sans lieu fixe au départ) privilégie le travail in situ en conviant des ar-

du spirituelEn ces temps confus, l’équipe du Frac Lorraine, qui a choisi d’axer l’exposition contemplative Le moins du monde sur le thème de la méditation, invite à une errance parmi les travaux de Craigie Horsfield ou d’Ann Veronica Janssens. Dans la plupart des espaces, le visiteur est convié à s’asseoir, voire à s’allonger, afin de s’imprégner des œuvres, pour qu’il se trouve « sous influence », selon Béatrice Josse, directrice du Frac. Après être passé par le Circle on the floor (cercle parfait dessiné au sol, à la craie, de l’Américain Ian Wolson), il découvre les encres sur papier de Yaziz Oulab rendant hommage aux stylites (ermites qui se retiraient en hauteur), se trouve confron-té aux recherches corporelles et artistiques de Marina

Abramović (artiste qui, parfois, « se met en danger ») ou se perd dans l’environnement immaculé de Susanna Fritscher. Une des salles est dédiée au travail de Tania Mouraud, plasticienne qui, depuis la fin des années 1960, invente des Initiation Rooms, lieux propices au recueille-ment et à l’ouverture des sens, présentés ici sous forme de dessins et maquettes. Le « rêve secret » de la directrice du Frac est d’ailleurs de « faire réaliser une Initiation Room, en Lorraine, dans la nature », au milieu d’un bois ou en haut d’un mont. Autour de la même thématique :

ERRE, Variations labyrinthiques, au Centre Pompidou-Metz, jusqu’au 5 mars 2012 – www.centrepompidou-metz.fr

Les mille rêves de Stellavista, à La synagogue de Delme, jusqu’au 5 février 2012 – www.cac-synagoguedelme.org

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aux enfersVoilà une production qui fait figure d’événement de la saison lyrique 2011 / 2012 – et pas seulement lor-raine ! – tant Françoise de Rimini, ultime opéra du compositeur messin Ambroise Thomas – à qui l’on doit les plus connus Mignon et Hamlet – est rarement monté. Créée en 1882, l’œuvre est inspirée de Dante. Au deuxième cercle des enfers, le poète guidé par l’ombre de Virgile, rencontre les damnés qui ont com-mis le péché de chair. Parmi eux, Paolo et Francesca. Les deux amants narrent l’histoire de leur damnation. Sa cause ? Un livre contant les amours du chevalier Lancelot et la reine Guenièvre.

À l’Opéra-Théâtre, du 18 au 22 novembre 03 87 15 60 60 – http://opera.metzmetropole.fr

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tistes comme Cécile Bart « qui a fait un beau projet avec ses écrans transparents », se souvient sa directrice, ou Vincent Lamouroux qui a métamorphosé l’espace en « réalisant un parquet en “vagues” de bois, pour la préfiguration de Pom-pidou-Metz ». Selon Maryse Jeanguyot, fondatrice de Faux Mouvement, le Centre Pompidou (avec lequel le centre d’art travaille régulièrement) a bien « créé un vrai appel d’air ».

La musique en ébullitionL’autre atout de Metz ? Les musiques, qu’elles soient ac-tuelles (voir pages 50 et 51) ou plus classiques. Avec son acoustique exceptionnelle et sa très belle saison, L’Arse-nal fait figure de locomotive. L’espace transformé en salle de concert ultra moderne par Ricardo Bofill accueille les concerts de l’Orchestre national de Lorraine tenu de main de maître par son directeur musical Jacques Mercier et propose une programmation de haute volée. S’y croisent la soprano Véronique Gens, le contre-ténor Philippe Jaroussky (soirée Haendel & Vivaldi le 16 novembre) ou le pianiste François-Frédéric Guy (suite de son intégrale des Sonates de Beetho-ven le 6 décembre). Quant à l’Opéra-Théâtre – le plus ancien de France – il attend de connaître une nouvelle jeunesse sous la houlette de Paul-Émile Fourny, ancien directeur de l’Opéra de Nice (2001-2009) entré en fonction au début de cette saison. Son ambition première ? « Remplir la salle et faire y venir un nouveau public, plus jeune, en présentant des pièces susceptibles d’aiguiser sa curiosité » comme, la saison prochaine – la première qu’il construira – la créa-tion française du Journal d’Anne Frank de Grigori Fried. Pour lui, il importe aussi de « créer des passerelles avec les autres institutions ». Une réflexion commune avec L’Arsenal sur le répertoire baroque est ainsi envisagée. Si les futurs axes artistiques semblent séduisants qu’en est-il, pour le Maquette du décor (Vincent Tordjman)

Centre Pompidou-Metz, Galerie 3 (© Olivier H. Dancy)

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nouveau directeur, de la thématique qui agite le landernau musical lorrain : la “fusion” des orchestres et des opéras de Metz et de Nancy ? Il se contente de mettre en avant « la complémentarité possible des deux villes », souhai-tant « travailler en bonne intelligence et développer les coproductions ». Quant à la décision finale, il la laisse « aux politiques ».

La même question posée à Antoine Fonté nous vaut un amusé : « Vous avez connu cela en Alsace avec l’Opéra national du Rhin… qui nous donne des enseignements sur ce qu’il faut faire ou ne pas faire. » De toute manière, pour lui, Metz « doit rester un lieu de création et de production. Sur le rapprochement éventuel, nous avançons petit à petit et commençons à nous apprivoiser à travers des coproduc-tions, comme Carmen en 2010 / 2011 entre les deux opéras,

ou la saison prochaine une Symphonie n°9 de Beethoven rassemblant les deux orchestres. » La réflexion lancée par les villes, les communautés d’agglomération, la région et l’État – qui devait aboutir en 2014 sur la création d’un pôle lyrique, symphonique et chorégraphique en Lorraine – pourrait prendre plus de temps que prévu…

Reprenons la comparaison initiale avec Bilbao, ville indus-trielle – contrairement à Metz – en déclin au moment de l’implantation du Guggenheim, en 1997. La cité lorraine ne se situe pas à une quinzaine de kilomètres de la mer, s’avère bien plus petite (120 000 habitants environ contre plus de 350 000) et a fait des investissements conséquents, certes, mais bien moindres que les Basques. Reste qu’un musée semble également changer son destin.

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© Rudy Ricciotti

Et Bam !Au printemps 2013, la municipalité sera dotée d’une seconde salle dédiée aux mu-siques actuelles : la BAM… comme Boîte à Musique. Gérée par Metz en Scènes qui régit L’Arsenal et Les Trinitaires, ce bâti-ment confié à l’architecte Rudy Ricciotti (notamment auteur de l’impressionnant Pavillon Noir d’Aix-en-Provence) permet-

tra à la Ville de bénéficier d’un « disposi-tif à deux têtes », selon les responsables. Ainsi, les concerts auront lieu dans cette rutilante salle modulable de 1200 places ou, pour des événements à échelle plus humaine, aux Trinitaires. La BAM accueil-lera un tiers de programmation directe, un tiers de location privée et un tiers de projets associatifs. www.metzenscenes.fr

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Postée sur les hauteurs de la colline Sainte-Croix, l’association Musiques Volantes coordonne le festival du même nom. Un événe-ment aussi pointu que le clocher de l’ancien couvent des Trinitaires.

Basés à Metz, Patrick Perrin et l’équipe de Musiques Volantes gèrent, depuis fin 2009, environ un tiers de la prog’

des Trinitaires*, mythique (des concerts y sont organisés depuis le milieu des années 1960) et mystique (il s’agit d’un lieu sacré) salle des musiques nouvelles. Leur festival éponyme est le moment phare de la saison. « C’est l’apothéose, alors on met les bouchées doubles », s’amuse Patrick. Attablé à proxi-mité du cloître, il évoque cet événement volant non identifié qui ne craint ni les crashes ni les prises de risques, partant de Metz pour s’étendre à Strasbourg, Paris ou même Bor-deaux. Musiques Volantes est l’œuvre « de programmateurs d’horizons divers ayant pour objectif de mutualiser nos efforts, idées et réseaux » afin de proposer une affiche affriolante, reflet de la musique pop d’au-jourd’hui. Patrick loue une « affiche exigeante, qui sort des schémas habituels. Chaque pro-

grammateur rattaché à un lieu – Le Point éphémère à Paris, Le Confort moderne à Poi-tiers… – propose un artiste pour le plateau de Metz et, si possible, le reprend ensuite pour sa propre structure. » La manifestation fait le focus sur des musiciens émergeants, des esthétiques différentes, avec une scénographie originale « qui colle au côté temporaire du festival ». Ainsi, la seizième édition convie le trublion punkoïde / performeur un peu dingo Hawnay Troof et Chokebore, célèbre groupe hawaïen mené par Troy Von Balthazar. Le rock grungy franchement enthousiasmant de Bass Drum of Death et l’electro qui travaille du chapeau de The Chap (voir photo). La pop rigolote et bricolo de GaBLé et le dub pas-sionnément eighties d’Anika (lire page 3). Le légendaire Arto Lindsay et sa no wave version Copacabana ou encore les rockeurs messins de Feeling of Love. De la haute voltige.

Musiques Volantes, du 3au 13 novembre à Metz (aux Trinitaires, au Centre Pompidou-Metz…) et du 3 au 30 novembre dans les autres villes : Strasbourg (au MAMCS, au CEAAC, au Hall des Chars…), Offenbourg, Luxembourg (Exit07)…

03 87 37 19 78 www.musiques-volantes.org

* Les Trinitaires, 10-12 rue des Trinitaires à Metz03 87 20 03 03 www.lestrinitaires.com

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Le duo nous accueille à l’entrée de l’ex-position que lui consacre l’institution messine. Montrant leur diversité d’ap-

proches, Bivouac a été entièrement conçu et confectionné par les frères Bouroullec. « Sauf les vis et les câbles », s’amusent-ils. « Nous sommes arrivés ici et avons déballé notre sac à dos », prétendent ceux qui cherchent à « s’adapter en permanence ». Dans les paque-tages de ces designers exposés partout dans le monde (New York, Los Angeles, Londres, Paris…) et édités par les prestigieuses mai-sons Vitra, Ligne Roset ou Cappellini, nous

découvrons une quinzaine d’années de labeur en commun : la célèbre et répandue Vegetal Chair ou le Lit clos, entre baldaquin et pièce architecturale « fondatrice ». Erwan Bou-roullec, à propos de ce meuble “manifeste” de 1999, proche de la cabane : « À l’époque, nous étions jeunes et naïfs quant à la possibilité qu’un tel lit puisse exister sur le marché. Il s’agit néanmoins d’un de nos travaux les plus publiés et qui a généré plein d’enfants dont le canapé de la collection Alcove, sa traduction la plus directe, au bout de dix ans. Un de nos best-sellers. »

campingRonan & Erwan Bouroullec, superstars du design, posent leur Bivouac sur les quelque 1 000 m2 de la Galerie 3 du Centre Pompidou-Metz. Une monographie fournie sous forme de campement éphémère.

Par Emmanuel DosdaPhotos de Paul Tahon et R&E Bouroullec

À Metz, au Centre Pompidou-Metz, jusqu’au 30 juillet 2012

03 87 15 39 39www.centrepompidou-metz.fr

www.bouroullec.com

Clouds (Kvadrat, 2008), un ingénieux sys-tème modulaire textile qui peut s’adapter à

chaque espace. La tête dans les nuages…

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Ronan (né en 1971) & Erwan (né en 1976) Bouroullec (© Ola Rindal) ont tous deux fait une école d’art avant d’associer leurs talents, en 1999, pour s’adonner au design. Entre autres projets, les frères vont prochainement se charger de la mise en valeur de l’escalier du pavillon Gabriel au Château de Versailles.

ArchitectureCampé dans le fameux sofa, Erwan passe ses réalisations en revue, éditions ou commandes (citons l’espèce de tente bédouine pour le café du Mudam Luxembourg), beaucoup étant de véritables éléments d’architecture, se glissant dans l’habitat, offrant une protection visuelle et acoustique, permettant de se replier sur soi-même. « Je n’ai pas plus l’envie de fermer que d’ouvrir. Les deux sont nécessaires. La table Vitra, grande plateforme collective, est exactement à l’inverse du canapé. Les deux co-existent, même s’il est vrai que nous cher-chons souvent à donner une qualité structu-relle à nos meubles. Notre stratégie est, sans toucher aux murs ou au bâtiment, d’apporter une forme de douceur dans les espaces, de recréer une armature pour se retrouver à l’échelle humaine. » Il évoque alors Le Cor-busier qui, comme eux aujourd’hui (voir leur système de cloisons North Tiles), « aimait suspendre des tapisseries, de grosses pièces textiles dans des intérieurs. Pour lui, il s’agis-sait d’un acte d’architecture visant à modifier l’espace. Le Corbusier est mal compris car associé au cube blanc, mais ses appartements étaient pensés afin que la vie s’installe, que les familles arrivent comme des nomades et prennent possession du lieu. » Ainsi, les frères designers veulent créer « un cadre de vie rigoureux » mais qui laisse libre cours à l’appropriation des usagers et favorise « l’inti-mité et le confort. En ça, on se rapproche du Corbusier. Il faisait des boîtes à habiter où la vie prenait le dessus. La nature humaine est comme une plante grimpante. »

Nature L’organique Vegetal Chair, les aériens Nuages de polystyrène permettant de scénographier l’espace, les Algues qui s’emboîtent les unes dans les autres pour former d’étranges parois ou les lampes Lianes pouvant transformer un intérieur en jungle étincelante… Si Ronan

et Erwan travaillent en étroite collaboration avec les industriels, la nature est omnipré-sente. « Une plante pousse de manière en-têtée et s’adapte incroyablement bien à son petit périmètre » note Erwan, se souvenant de son enfance bretonne : « Pendant long-temps, nous habitions au bord de la mer où il y a beaucoup de beaux arbres qui ont pris la forme du vent. Cette capacité à s’adapter nous semble très intéressante. » Les Algues qui se clipsent ou les tuiles Clouds s’assem-blant sont autant de modules à enchâsser. Les deux créateurs travaillent « autour de struc-tures désordonnées qui grandissent dans l’espace de manière un peu irrégulière. Nous cherchons à créer un contraste par les maté-riaux de ces parois qui sont là pour scinder l’espace, mais de manière subtile. Elles n’ont pas la qualité d’un mur en béton, définitif, elles sont toujours un peu poreuses. »

Haute coutureChez eux, une sorte de luxuriance inhérente à leurs pièces modulaires, pouvant “pousser” à l’infini, comme de mauvaises herbes, cohabite avec le « less is more » cher à Ludwig Mies van der Rohe. « Notre approche est plus radi-cale que minimale », rectifie Erwan. « Nous voulons concentrer dans chaque projet un point de vue très clair qui ne soit pas perverti par du bavardage autour », en s’imposant des règles comme, par exemple, celle d’utili-ser exclusivement du tissu pour North Tiles. Avec leurs formes à la fois « simples et “ex-plosantes” », les frères se sentent proches de parfumeurs distillant des huiles essentielles. Leur quête de « nouvelles solutions », leur démarche conceptuelle, les place à la frontière de l’art contemporain, de la haute couture, voire de « la recherche médicale : nous met-tons beaucoup d’énergie sur quelque chose qui est très éloigné de la réalité, mais qui, petit à petit, s’en rapproche. »

Facile de s’isoler dans le sofa Alcove (Vitra, 2007)

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La nature humaine est comme une plante grimpante

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Christoph Ehrenfellner (né en 1975) est un musicien complet : violoniste, chef2 et compositeur, il considère ces trois

facettes de son activité comme « interdépen-dantes. Sans mon travail au pupitre, je n’au-rais jamais pu écrire pour un orchestre. Sans la pratique de l’instrument, je n’aurais pas pu diriger. Réciproquement, la composition influence aussi ma manière de diriger et de jouer du violon », explique-t-il. À Vienne, il a étudié avec György Kurtág, mais s’avoue « as-sez éloigné de certaines esthétiques contem-poraines. Mon objectif est de bouleverser le cœur et l’âme des spectateurs. J’ai donc beaucoup plus à apprendre de Beethoven, Brahms, Mahler, Bartók, Stravinsky ou Chos-takovitch que de Lachenmann, Stockhausen, Rihm ou Boulez. »

Pour ce premier concert mulhousien le com-positeur s’attaque à une œuvre mythique : Entr’acte, moyen-métrage d’une vingtaine de minutes de René Clair diffusé, en 1924 à l’entracte (sic.) de Relâche, un ballet dadaïste de Jean Börlin et Francis Picabia. Dans la ver-sion originelle, la musique est signée d’Erik Satie… Elle est en harmonie avec le burlesque des scènes qui se déploient sur l’écran, où l’on

croise un savant fou immobilisant Paris grâce à un rayon diabolique, un corbillard traîné par un chameau… et bien des personnages célèbres, Man Ray et Marcel Duchamp jouant aux échecs, Francis Picabia et Erik Satie dé-plaçant un canon ou encore la légendaire Kiki de Montparnasse. Après une introduction ros-sinienne (avec l’ouverture de La Cenerentola), le film sera projeté, une première fois, avec la musique de Satie. Suivront l’ouverture du Songe d’une nuit d’été de Mendelssohn et une seconde vision d’Entr’acte avec la musique imaginée par Christoph Ehrenfellner cette fois. La confrontation s’annonce féconde entre les sautillements inspirés de Satie et la partition d’un jeune compositeur : « Notre époque, envahie par les flux d’images, de sons et de mots produit un chaos qui n’est pas sans évoquer le dadaïsme. À partir de cela, j’ai souhaité générer, chez le spectateur, un puis-sant sentiment onirique : dans ce désordre apparent, jamais, il ne sait s’il est encore dans la réalité ou s’il a déjà basculé dans le rêve. » Une confusion des sens que n’aurait sans doute pas reniée Erik Satie.

back to dadaEn résidence à Mulhouse1 au cours de la saison 2011 / 2012, le compositeur autrichien Christoph Ehrenfellner a écrit, pour ce premier rendez-vous, une partition destinée à accompagner Entr’acte de René Clair.

1 Sa résidence est organisée conjoin-tement par l’Orchestre symphonique de Mulhouse, le Conservatoire de la cité haut-rhinoise et La Filature2 Depuis avril 2011, il est directeur artistique du Sinfonietta Baden www.sinfoniettabaden.at

Par Hervé Lévy

À Mulhouse, à La Filature, jeudi 10 novembre

03 89 36 28 29www.lafilature.org

www.orchestre-mulhouse.frwww.christophehrenfellner.at

CINÉ-CoNCERT – MULHOUSE

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Médiathèque de Haguenau

Rencontre - Dédicace

Ateliers - Lectures 

Projections

Expositions De la forêtIsabelle Mazzucchelli

Le souffle de la forêtInside land art - Patrick Straub

Les HerbiersEmilie Vast

Les 4 saisons de la forêtGroupe de Recherche et d’Actions Photographiques, « GRAPh »

Animaux de la forêt de France et d’EuropeAgence COMVV

La forêt - une communauté vivanteFondation GoodPlanet

Forêts

Crédits photos : Michel Rauch, Daniel Perrot, Johnny Stiegler, Jean-Georges Ott

Du 15 novembre 2011au 11 février 2012

Médiathèque de la Vieille Ile24 rue André Traband

Bibliothèque des Pins44a rue des Carrières

mediatheque.ville-haguenau.fr foret2011.ville-haguenau.fr

Les Trinitaires12, rue des Trinitaires 03 87 20 03 03 [email protected]

LES TRINITAIRESnovembre 2011

www.lestrinitaires.com

MER 2 | 18:30 WARM UP

SONIC VISIONS RENCONTRE AVEC LES SALLES DE CONCERT DE LA GRANDE RÉGION

20:30 THE YOKEL

+ NATAS LOVES YOU + JAAKKO & JAY

JEU 3 - DIM 13 FESTIVAL MUSIQUES VOLANTES # 16

GALA DROP + KIT W. HAWNAY TROOF

+ CHOKEBORE + ARTO LINDSAY

+ ANTILLES + OPERA MORT

+ BASS DRUM OF DEATH + THE FEELING OF LOVE

+ INSTALLATION CLIQUETIS

+ MINI SILENT DISCO + VJ BOMBAKLAK

+ THE CHAP + THE JUAN MACLEAN

+ AFRIKAN BOY + HOQUETS

+ UPROOT ANDY + MARIE MADELEINE + ÉTIENNE JAUMET & RICHARD PINHAS

+ CANT

MER 16 | 20:00 SIR SAMUEL

JEU 17 | 20:00 SCORN + PICORE

+ SORNETTE

VEN 18 - SAM 19 | 20:00 CONCERTS DE SÉLÉCTION

LES DÉCOUVERTES 2012 DU PRINTEMPS DE BOURGES CRÉDIT

MUTUEL

MER 23 | 21:00 JAM SESSION JAZZ

VEN 25 | 21:00 AKRON/FAMILY

+ A SECOND OF JUNE

SAM 26 | 22:00 PUISSANCE #07

ARMAGNAC RELEASE PARTY + ARTO MWAMBE

+ D-FINE + MARIE-MADELEINE DJ SET

MER 30 | 20:00 CLAIRE DENAMUR

Du mardi au vendredi de 10h à 17h.Samedi, dimanche et jours fériés de 10h à 18h.1er janvier 2012 de 13h à 18h. Fermé les 24 et 31 décembre 2011 ainsi que le 16 février 2012.

Visite guidée en français les samedis et dimanches à 14h30.

La

Natures mortes animalières de la Renaissance à l’époque moderne 19 novembre 2011–19 février 2012

beautémortet la

STAATLICHE KUNSTHALLE KARLSRUHEHans-Thoma-Straße 2-6 D-76133 Karlsruhe www.kunsthalle-karlsruhe.de

Jan Weenix, Le paon blanc, 1693 (détail), Gemäldegalerie der Akademie der bildenden Künste Vienne

CarolinePRISSE

L’École supérieure des arts décoratifs de Strasbourg fait partie du Pôle Alsace d’enseignement supérieur des arts, établissement public de coopération culturelle, qui réunit depuis 2011 l’ESADS, Le Quai - École supérieure d’art de Mulhouse et l’enseignement supérieur de la musique du Conservatoire de Strasbourg. www.esad-stg.org

Exposition17 nov. - 17 déc. 2011

du mardi au samedi : 15 h - 19 h Vernissage le 17 nov. à 12h30

Conférence de l’artiste le 16 nov. à 20h30 au musée Würth (Erstein)

Cette exposition est présentée dans le cadre de la Biennale internationale du Verre SiO2nH2O 00Illuminations et transitions.

La ChaufferieGalerie de l’École supérieure des arts décoratifs, Strasbourg5, rue de la Manufacture des Tabacs

Les 24 et 25 novembre 2011

Colloque internationalperformances & exposition

Auditorium École supérieure des arts décoratifs1 rue de l’Académie 67000 Strasbourghttp://[email protected]

DIGITAL ARTCONSERVATION

http://www.digitalartconservation.org/

Artistes, programmeurs,

théoriciens...

PRACTICALAPPROACHES

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L’action des derniers romans de Pierre Pelot, La Montagne des bœufs sau-vages1 et Maria2, se situe dans un

environnement qu’il connaît bien : les mon-tagnes vosgiennes, sources d’inspiration de l’ensemble de son œuvre et dans lesquelles il a choisi de s’établir définitivement. Auteur hyper prolifique (presque deux cents ouvrages à son actif), Pelot s’est essayé avec succès à différents genres littéraires : du western à la science fiction en passant par la bande dessi-née et le roman noir. Ses ouvrages de jeunesse sont influencés par les textes d’Hemingway, Giono, Barjavel ou Cendrars, mais il est aussi féru de BD et plébiscite plus particulièrement Astérix et Les Schtroumpfs ! Aujourd’hui, il salue l’œuvre d’écrivains contemporains

comme celle du Canadien Joseph Boyden, dont l’ouvrage Les Saisons de la solitude3 est son livre préféré. Pelot s’agace des faux-sem-blants et met son écriture au service de ses convictions. L’écrivain, « c’est un être hors-la-loi qu’on ne traque pas, pour la capture de qui nulle récompense n’est accordée, nul avis de recherche placardé sur les murs. Caché parmi les gens d’ici qui n’en finissent pas de s’enfuir pour survivre eux aussi, ici ou ail-leurs. » D’une langue parfois acérée, souvent émou-vante, il assemble et désassemble les mots, détourne les vieux adages et se joue des idées reçues, pour le plus grand plaisir de lecteurs qui savourent ce bagout d’une rare éloquence. À déguster…

en tête de pelotonPierre Pelot, figure saillante du paysage littéraire contemporain, est l’invité d’honneur du 22e Salon du Livre de Colmar, consacré cette année au monde de la forêt. Rien de surprenant à ce que cet inconditionnel de la nature, vis-céralement attaché à ses Vosges natales, ait été sollicité.

Par Sébastien MeyerPhoto de Pascal Bastien

Rencontre avec Pierre Pelot, dimanche 27 novembre à 16h30

LIVRE – COLMAR

sous le signe des forêtsLa 22e édition du Salon du Livre de Colmar nous invite à découvrir l’uni-vers de la forêt, en écho à l’année internationale qui lui a été dédiée par l’ONU. Ces Effroyables forêts ? seront l’occasion de s’interroger sur une thé-matique largement traitée par la litté-rature et, autre temps fort du salon, de faire un point sur l’état de la micro- édition en Alsace. Cafés philo, histoire et littéraire mais aussi projections, expos, spectacles et lectures publiques vous attendent, en présence d’auteurs régionaux (Simone Morgenthaler, Marc Haeberlin…) et internationaux (Fred Vargas, Michel Quint, Enki Bilal…).

À Colmar, au parc des expositions, samedi 26 et dimanche 27 novembre03 89 24 48 18www.salon-du-livre-colmar.com

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Apprivoiserla panthèred’après Les identités meurtrièresd’Amin MaaloufIdée originale et mise en scène Hala Ghosn

Écriture collectiveAuteur associé Jalie Barcilon

Cies La Poursuite et Maquizart, Beuzeville, Limousin – création 2010

Taps Scala vendredi 18, samedi 19 novembre à 20h30dimanche 20 novembre à 17h

Les Tapsinfo. 03 88 34 10 36

www.taps.strasbourg.euVisu

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Une publicité des années 1960, un des-sin de la même époque de Tomi Unge-rer représentant une cow girl glamour,

des affiches anciennes, une huile du XVIIIe siècle de Gaspard Gresly qui a pour sujet une fileuse endormie, le premier jeans signé des créateurs Marithé+François Girbaud (sous la marque Ça…), des œuvres commandées à de jeunes artistes pour l’occasion, des photos de Marylin ou de James Dean… En tout, plus d’une centaine de pièces sont rassemblées dans une exposition que Bénédicte Mathey a construite en trois parties comportant, chacune, de multiples entrées possibles : élé-ments historiques (aves les héros d’une épo-pée, Davis et Levi Strauss en tête), réflexion sociologique et parcours plastique (où l’on croise notamment Jean Le Gac). « Banal en apparence, ce tissu a pourtant beaucoup à dire » explique-t-elle. Avec son dense passé

le monde est bleuAvec son riche passé textile, Bischwiller est la cité idéale pour accueillir La Saga du jean, exposition dédiée au mythique tissu. Histoire, économie, sociologie et arts se mêlent pour une plongée dans le grand bleu.

Par Hervé LévyPhoto de Stéphane Louis pour Poly

À Bischwiller, à la Maison des Arts jusqu’au 31 décembre (ouvert de vendredi à dimanche, de 14h à 18h)

03 88 53 99 28 www.bischwiller.com

1 Une entreprise textile produisant des vêtements occupant plus de 1 000 personnes à Bischwiller dans les années 1980 qui a fermé en 20022 Appellation faisant référence à Nîmes, ville dont est originaire cette toile

EXPoSITIoN – BISCHWILLER

textile (que l’on peut découvrir au Musée de la Laub, distant d’une centaine de mètres), Bischwiller était un choix logique, « même si on n’y a jamais fabriqué de jeans », Vestra1 se contentant d’en revendre… après y avoir apposé sa propre étiquette.

Le point de départ symbolique d’une scéno-graphie intime et allusive imaginée pour la Maison des Arts – une petite et chaleureuse demeure alsacienne – est un tableau ano-nyme du XVIIe siècle où un jeune mendiant est vêtu d’une veste en jean. Se déploie alors l’histoire du denim2, faite de multiples aller- retour entre l’Europe et les États-Unis. D’abord tenue de travail, le jeans (le pluriel désignant le pantalon et non plus la toile dont il est fait) devient le symbole de la contestation et des revendications politiques. Le sociologue Georges Friedmann compara même ceux qui portaient le pantalon aux… sans-culottes de la Révolution ! Dans les sixties, pour Marshall McLuhan, les jeans renvoient « à une attitude de révolte et de rage face à l’establishment ». Aujourd’hui, uniforme passe-partout, il est devenu vêtement mondialisé dont se sont em-parés de multiples artistes depuis la pochette culte du disque des Stones imaginée par Andy Warhol. Tout l’intérêt de cette exposition est de proposer un intelligent parcours entre ses différents pôles, d’inviter, en douceur, le visi-teur à la réflexion et à la contemplation. Un vaste monde est décidément contenu dans la platitude apparente d’un morceau de tissu bleu…

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Focus référents

Le Théâtre de Haguenau www.relais-culturel-haguenau.com

Le Cinéma Bel Air de Mulhouse www.cinebelair.org

Le Café Broglie de Strasbourg 03 88 32 08 08

L’Hôtel du Parc à Mulhouse www.hotelduparc-mulhouse.com

La Mairie de Belfort www.mairie-belfort.com

où trouver ?Les lieux référents (plus de 120 exemplaires)

Bas-RhinStrasbourg La Boutique Culture, CG67, Cinéma L'Odyssée, Graphigro, Restaurant la Victoire, CUS, Région Alsace, Pôle SudOberhausbergen PréOHaguenau Médiathèque, Théâtre, MairieSélestat Frac Alsace, MairieSchiltigheim Mairie, École de Musique, Le Cheval BlancIllkirch L’IlliadeBischwiller MAC

Haut-RhinColmar Le Poussin Vert, CG68, Cinéma ColiséeKingersheim Espace TivalMulhouse Cinéma Bel Air, MairieSaint-Louis Mairie, Musée Fernet Branca

Franche-ComtéBelfort Centre chorégraphiqueMontbéliard L’Allan

LorraineForbach Le Carreau

Les lieux de diffusion ++Bas-RhinBischheim Mairie, Centre Culturel, Salle du Cercle, Bibliothèque (Cour des Bœcklin) Haguenau École de Musique, Musée Historique, Relais CulturelHœnheim MairieIllkirch MairieLingolsheim Mairie Obernai Espace AthicOstwald Mairie, Château de l'Île, Le Point d'EauSélestat ACASaverne RohanSchiltigheim Ferme LinckStrasbourg Arte, CIRDD, Espace Insight, FEC, La Choucrouterie, L'Artichaut, Le Kafteur, Lisaa, La Maison des Associations, Stimultania, Strasbourg Événements, 3 magasins Bemac Mésange, Neuhof & St Nicolas, Café Broglie, Snack Michel, Trolleybus, Archives de la Ville de Strasbourg et de la CUS, CEAAC, CRDP, Restaurant Chez Yvonne, Cinéma Star St Éxupéry, IUFM, Afges, Électricité de Strasbourg, MAMCS, TJP Petite Scène et Grande Scène, Espace avenir de l'Université de Strasbourg, CCI de Strasbourg, La Laiterie, les Taps Gare et Scala, Pôle Sud, Le Vaisseau, l'École d'Architecture de Strasbourg, Fnac, BNU, Bibliothèques du Neudorf, Hautepierre, Kuhn, Meinau & de Cronenbourg, Creps Cube Noir, Le Maillon, l'Opéra National du Rhin, l'École supérieure des Arts décoratifs, Le Théâtre national de StrasbourgVendenheim Mairie

Haut-RhinAltkirch Crac Alsace Cernay Espace GrünColmar Hiéro Colmar, Lézard, Le Grillen, Civa, Bibliothèque Municipale, Musée d'Unterlinden, FnacGuebwiller Les Dominicains de Haute-Alsace, IEACHuningue TriangleIllzach Espace 110Kembs Espace RhénanKingersheim CréaMulhouse Société Industrielle, Maison du Technopole, La Filature, Fnac, Bibliothèque Médiathèque, Bibliothèque FLSH, Musée des Beaux Arts, École Le Quai, Bemac, CCI, Kunsthalle, Théâtre de la Sinne, Hôtel du Parc, L'Entrepôt, Musée de l'Impression sur Étoffes, Office du TourismeRibeauvillé Salle du ParcRixheim La PasserelleSaint-Louis Théâtre de la Coupole, Médiathèque Thann Relais Culturel

Franche-ComtéBelfort Mairie, Le Granit,Bourogne Espace Multimédia GantnerMontbéliard Le 10neuf

Et dans plus de 100 autres lieux (bars, restaurants, magasins…)

Les lieux de lecturec Les salles d’attente des Hôpitaux

Universitaires de Strasbourg, Mulhouse, Montbéliard

c 70 barsc 50 restaurants

c 60 salons de coiffurec 40 cabinets médicaux et dentairesSi vous souhaitez vous aussi devenir un lieu de diffusion pour Poly, n’hésitez pas à nous en faire la demande.

c Contact : [email protected]

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marion rogerDepuis toujours, Marion passe son temps en compagnie de ses crayons : c’est donc vers les arts plastiques qu’elle se dirige avec cette envie grandissante d’illustrer des textes et de faire des livres. Elle atterrit à l’École euro-péenne supérieure de l’image d’Angoulême avant de partir dans le grand Nord (Helsinki) pendant quelques mois. Marion donne suite à ses envies de voyages avec une exposition collective d’étudiants sur le nomadisme, à Berlin. L’illustratrice vit (pour le moment) à Strasbourg et travaille sur différents projets, dont des expositions collectives ou en solo.

http://banapiti.blogspot.com

Exposition à La Mandragore (Strasbourg) du 1er décembre au 29 février 2012 et au Hall des Chars début 2012

L’ILLUSTRaTRICE

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El viEnto

29 novembre > 4 décembre 2011

Textes et mises en scène Claudio TolCaChir – Cie Timbre 4 •Spectacles en espagnol (Argentine) surtitrés en français •03 88 24 88 24 • www.tns.fr

15 > 26 novembre 2011

Joseph Bowie, Jamaaladeen Tacuma, Jean-Paul Bourelly Trio New languagePremière française - JazzdorLundi 14 novembre20h30 - Cheval Blanc

Alex BeaupainPourquoi battait mon cœurChanson françaiseMercredi 16 novembre 20h30 - Cheval Blanc

Michel Portal quintet BaïladorClôture de Jazzdor 2011Vendredi 18 novembre20h30 - Salle des Fêtes

So dandy Cie CabarecitésCabaret / Théâtre musicalSamedi 19 novembre20h30 - Cheval BlancDimanche 20 novembre 17h - Cheval Blanc

Cahina BariFestival Strasbourg Méditerranée Conte - Mercredi 30 novembre20h30 - Cheval Blanc

ZebdaFestival Strasbourg Méditerranée Nouvel albumMusique du mondeVendredi 2 décembre20h30 - Salle des Fêtes

Pan-Pot ou modérément chantantCollectif petit travers Jonglage contemporain Vendredi 16 décembre20h - Salle des Fêtes

Réservations et abonnements au 03 88 83 84 85 sur www.ville-schiltigheim.fr et fnac

Schiltigheim Culture 2011-2012

L’ échappée BellePrédictions Novembre / Décembre

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On les avait quittés furieux. Les voilà revenus à de délicats sentiments. Quoique… mieux vaut ne pas trop

les titiller : pour les calembours, ils partent toujours au quart de tour. Si vous avez la brillante idée de leur demander d’où vient ce nom étrange, Framboise frivole, la réponse arrive, évidente : « C’est parce que nous fai-sons de la chanson sans fraise. » Question humour belge, voilà longtemps qu’ils ont décroché l’AOC. Depuis trente ans, ce duo de musiciens hors pair n’a pas son pareil pour faire pleurer de rire les mélomanes. Après une brève infidélité, le flamboyant Peter Hens, chanteur et violoncelliste, retrouve son ori-ginel complice (et souffre-douleur) Bart van Caenegem au piano. Tous deux, de formation

la framboise frivoleAprès son grand succès Furioso, la Framboise frivole se détend et propose Delicatissimo, un spectacle d’humour musical virtuose et déjanté. Le duo flamand s’installe pour quelques jours à Vendenheim, afin d’en créer la version française.

Par Dorothée LachmannPhoto de Didier Pallagès

À Vendenheim, à l’Espace culturel, jeudi 17 et vendredi 18 novembre

03 88 59 45 50 www.vendenheim.fr

À Illzach, à l’Espace 110, vendredi 16 et samedi 17 mars 2012

03 89 52 18 81 www.espace110.org

aRTISTES aSSoCIÉS

classique, œuvrent à dissoudre les frontières entre les genres et ne craignent pas de marier Chopin et Bowie, Beethoven et Goldman. « On aime absolument tous les styles de musique et ça nous amuse de mélanger les grands clas-siques à des chansons pop rock, ou de jouer une valse en tango et un tango en valse », explique Peter Hens. « Avant de se lancer dans cette nouvelle création, on a écouté tous les disques de Salut les copains et découvert au moins 200 chansons qu’on ne connaissait pas. Maintenant nous essayons de les combi-ner pour raconter une histoire, en cherchant toujours la drôlerie. »

Car, sous ses airs de récital, le spectacle révèle tout autant d’extraordinaires comédiens. Les deux compères ont mis au point un duo ma-gnifiquement rôdé, jouant sur l’opposition de leurs personnages. Cette fois, ils seront les « aventuriers de l’archet perdu », en quête des partitions disparues des plus grands com-positeurs… Elles réapparaîtront étrangement dans le répertoire des Rolling Stones ou de Florent Pagny. Bref, un vrai thriller musical. Il n’est pas impossible qu’en plus, la techno-logie s’en mêle… Quant à la mise en scène, on peut d’ores et déjà s’attendre à tout. « Notre idée est de transformer le piano en voiture. » On vous avait prévenus. Pour cette nouvelle aventure, actuellement en plein chantier, le public de Vendenheim fera office de cobaye. Après quelques jours de résidence à l’Espace culturel, la Framboise frivole va en effet « tes-ter » cet opus inédit sur les spectateurs : « Ils vont nous aider à faire le tri dans nos trou-vailles. »

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Un festival organisé par Alsace Cinémasen partenariat avec le Goethe-Institut Nancy

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Cinéma Odyssée de Strasbourg

Cinéma Star et Star St-Exupéry de Strasbourg

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Haut-RhinCinéma Palace de Altkirch

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Cinéma Le Florival de Guebwiller

Cinéma Le Bel Air de Mulhouse

Cinéma Le Palace de Mulhouse

Cinéma Le Saint-Grégoire de Munster

Cinéma Le Rex de Ribeauvillé

Cinéma La Passerelle de Rixheim

Salle La Galerie de Staffelffelden

Cinéma La Coupole de Saint Louis

Relais Culturel Régional de Thann

Cinéma Gérard Philipe de Wittenheim

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Entre des cours de littérature et de sociologie dispensés à la Sorbonne et sa thèse sur Kateb Yacine, la jeune

Kaoutar Harchi a trouvé le temps d’écrire son second roman. Originaire de l’Elsau, elle avait signé, en 2009, un premier récit futuriste1 qui traitait pêle-mêle de l’enfer des banlieues, de l’homosexualité et des difficultés d’être soi entre béton et bitume. Les quartiers popu-laires délaissés sont une nouvelle fois la toile de fond de son récit. Les deux livres se voient malicieusement réunis par l’évocation de « cette zone cinglée, mon enfance saccagée ». L’environnement urbain est noir. Les liens sociaux misérables. La frustration énorme. L’insatisfaction paroxystique. Le sexe… tarifé.

Sous la plume de Kaoutar, les personnages se définissent par leurs douleurs et leurs inter-rogations sur l’existence, à l’ombre, toujours, de passés pesants. Implacablement. Arezki, 30 ans, vit reclus, à moitié fou dans sa barre d’immeuble, hanté jusque dans ses rêves par l’image d’une vieille femme au front tatoué qu’il ne connaît pas. Élevé dans le silence cou-pable d’un Si Larbi qu’il ne comprend pas. Commettant l’irréparable un soir de pluie, Arezki connaîtra l’angoisse de la prison puis la quête de la vérité au cœur même de son Algérie natale. L’Algérie. Lieu de tous les comptes à régler. De toutes les âmes à panser pour chaque personnage : Ryeb, un maton venant au secours d’Arezki, souhaitant dépo-ser les cendres de sa mère au fond d’un puit de ce pays qui lui reste inconnu. Mais aussi Si Larbi, enfermé dans sa haine de soi et des autres, une soif d’amour incommensurable et le malheur d’avoir fauté, terriblement, avec son meilleur ami Riddah, voilà 30 ans. Entre silence et secret, les traumatismes se perpétuent. Cette vieille société algérienne est « en guerre contre le désir » et la liberté, productrice de frustrations pour plusieurs générations. Les questions identitaires, les

poids du passé et du secret, leur violence, l’exil et la prostitution jalonnant le récit ne sont pas sans rappeler le dernier roman de Boualem Sansal, Rue Darwin2, alors même que deux générations les séparent. Coïncidences de re-gards sur ces blessures d’enfance qui jamais ne cicatrisent…

silence mes angesÀ 24 ans, Kaoutar Harchi signe un second roman en forme de tragédie antique. L’Ampleur du saccage, ou comment l’on ne guérit jamais de son enfance.

Par Thomas FlagelPhoto de Tanguy de Montesson

Regards croisés / L’homme du double pays, rencontre et lecture musicale avec Kaoutar Harchi et Yahia Belaskri dans le cadre de Strasbourg-Méditerranée, samedi 3 décembre, à la Librairie Kléber

www.strasmed.com

LITTÉRaTURE

1 Zone Cinglée, éditions Sarbacanewww.editions-sarbacane.com2 voir Poly n°142 – www.poly.fr

L’Ampleur du saccage est paru chez Actes Sud (15 €)www.actes-sud.fr

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66 Poly 144 Novembre 11

Avec un tel nom, on jurerait que le photographe né en 1964 à Paris est d’origine alsacienne… mais pas du

tout. « Leimdorfer est ma tenue de camou-flage quand je viens à Strasbourg », plai-sante celui qui fut très tôt sensibilisé à la prise en main des Leica et autres Minolta. « Mon père était abonné au magazine Photo. En plus des femmes à poil, il y avait des choses passionnantes. » Le numéro de mai 1979, qu’il conserve comme une relique, concentre toutes ses préoccupations d’aujourd’hui. « Il y avait un sujet sur Depardon, quelqu’un d’impor-tant dans mon parcours, un article sur le Prix Pulitzer récompensant le photo reportage et un portfolio de Joel Meyerowitz qui tra-vaille avec une chambre couleur, comme moi actuellement. » Piges pour l’AFP, commandes pour Grands Reporters ou Geo… Gilles œuvre aussi en indépendant pour les entreprises (Carrefour, BNP, GDF…) ou les collectivités qui lui permettent, à partir de 2000 (« très tardivement »), de financer et développer un

travail personnel. « Un jour, j’ai réussi à voir Paris comme si j’étais un touriste. Grâce à cette distance, j’ai commencé à photographier les façades haussmanniennes. C’est comme ça que j’ai intégré, l’an passé, France 14 à la BnF, exposition collective de Depardon sur la question du territoire. » Il est alors repéré par La Chambre, galerie qui le pousse à participer au concours de la Mission photographique de Strasbourg, projet réalisé dans le cadre de l’Atelier urbain de la Ville visant à impliquer les citoyens dans une réflexion sur la cité.

« J’étais venu plusieurs fois à Strasbourg pour faire des sujets liés à l’actu, par exemple lorsque l’automobile fut interdite de circu-lation au centre-ville, au début des années 1990 », se souvient-il, « mais sans me sou-cier de la couleur de la ville. » Il a donc fallu se familiariser avec elle. Lors de discussions avec le directeur de l’Urbanisme, Gilles étu-die plans et photos satellite dans lesquelles il remarque les remparts du XIXe siècle, les

strasbourg vu par gilles leimdorferLe travail photographique de Gilles Leimdorfer, actuellement exposé à La Chambre, interroge le territoire strasbourgeois. Intrusion derrière ses façades…

Par Emmanuel DosdaPhotos de Gilles Leimdorfer

Exposition de restitution à La Chambre jusqu’au 27 novembre

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frontières de la ville, « très nettes », qui déli-mitent son champ d’action. « Qu’est-ce qui se passe sur et à l’intérieur de cette frontière ? » Pour répondre à cette question, il repère le cardo maximus (axe le plus important d’une ville) et part du « point zéro », croisement de la rue du Dôme et des Hallebardes, qu’il photographie.

Il débute son travail, construit en trois sé-ries correspondant à trois sessions de quinze jours, au printemps 2011. La plus importante rassemble les façades. Exit tout ce qui « par-ticipe à l’imaginaire de la ville » trop souvent réduite aux clichés « qui vampirisent Stras-bourg ». Pas de Petite France, ni de cathé-drale, ni d’institutions européennes, mais des immeubles d’habitation (l’Esplanade, la rue du Vieux-Marché-aux-Vins…), de commerces (la Maison rouge…) ou publics (la fac de droit…). Pas d’architecture monumentale, mais domes-tique, « là où on vit et travaille », représen-tant des époques et des quartiers différents, en décrivant les différentes strates historiques et sociales. Toujours, Gilles montre un per-sonnage, perdu dans l’immensité de l’image, accoudé à une fenêtre ou posant sur un pas de porte. De même, il laisse des signes (voitures garées, vitrines, individus sur le trottoir…), des indications sur l’époque. « Je donne la même valeur à chaque façade », insiste celui qui « juxtapose des photos afin de brouiller l’espace urbain. C’est un portrait de la cité par petites touches, une ville confettis. » Pré-

senté également sur les colonnes Morris (du 13 octobre au 2 novembre), dans les rues, son travail prend la forme d’un puzzle perturbant, « invitant un quartier dans un autre quartier, l’Esplanade à l’hyper-centre par exemple. »

Jugeant que « la ville et les gens dans leur environnement n’étaient pas encore assez présents », il réalise une deuxième série, des triptyques en panoramique, usant d’une « dis-torsion de perspectives », qui montrent trois images d’un même lieu, avec des personnages prenant la pose. Il se rend aussi sur la fron-tière de la ville pour une troisième série, pho-tographiant notamment des Strasbourgeois dans les jardins ouvriers. « Il y a un dedans et un dehors », insiste Gilles Leimdorder au sujet de cette large ceinture. « Pour aller à Hautepierre en Tram, il faut emprunter un tunnel : symboliquement, c’est très fort. Tout l’enjeu de la ville va être d’estomper cette frontière, également présente à Paris par exemple. » L’avenir de sa démarche ? « Avec Strasbourg, j’ai cerné ce que je veux faire. J’aimerais continuer à photographier des villes françaises pour dégager des traits com-muns et des particularités locales. Je viens d’une ville monolithique, Paris, et la variété de l’architecture de Strasbourg m’a paru très intéressante. Elle a une empreinte culturelle forte. »

Faire en sorte que les Strasbourgeois regardent leur lieu de vie avec davantage de bienveillance“

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68 Poly 144 Novembre 11

UN REGaRd

Par Hervé Lévy

L’exposition Rock Prints est présentée à Sélestat, à la Bibliothèque humaniste, jusqu’au 21 novembre

03 88 58 07 20 www.bh-selestat.fr

Contraste. Clash des cultures et des époques. Des incunables, des gravures anciennes et les Rock Prints signés de l’artiste mulhousien Henri Walliser. Diplômé de l’École des Arts décoratifs de Strasbourg, il crée des œuvres en noir et blanc qu’on peut situer dans une zone esthétique improbable, quelque part entre la Renaissance et les Expressionnistes allemands, eux aussi adeptes de la technique. Les Clash… Joe Strummer et ses potes. Concentrées dans la linogravure se trouvent

rassemblées la folie d’un triple album – San-dinista ! – et la puissance d’un double qui a métamorphosé bien des existences, London Calling. Fin des années 1970. Quelque chose a-t-il changé depuis ? Pas trop, il me semble. Monty Clift était déjà mort. Alors… « London calling to the faraway towns / Now war is declared, and battle come down / London calling to the underworld / Come out of the cupboard, you boys and girls. » Retour inexo-rable de la punk attitude…

the clash de henri walliser

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70 Poly 144 Novembre 11

mUSIQUE – BADEN-BADEN

cabaret & tango Temple de la musique classique, le Festspielhaus délaisse, pour deux soirées, Beethoven, Tchaïkovski et consorts pour accueillir deux voix envoûtantes : Ute Lemper et Max Raabe.

Par Hervé LévyPhotos de Lucas Allen (Ute Lemper) et de Frank Eidel (Max Raabe)

À Baden-Baden, au Festspiel-haus, vendredi 25 novembre (Max Raabe) et samedi 26 (Ute Lemper)

+49 7221 3013 101www.festspielhaus.de

Aujourd’hui, Max Raabe est devenu une star internationale : ses shows rem-

plissent le Metropolitan Opera ou la Salle Pleyel. Tout avait commencé à Berlin, à la fin des années 1980 : alors apprenti chanteur (lyrique), celui qui s’appelait encore Matthias Otto fonde, avec quelques amis, le Palast Or-chester, une formation dédiée à la (re)décou-verte des musiques de l’entre-deux-guerres. Ambiance Ange bleu, chansons populaires et cabaret. La recette du succès ? Un réper-toire inédit et passionnant allié avec une voix à nulle autre pareille, suave et cassante, tendre et caustique. Une tessiture improbable, venue du passé, qui séduit. Les voilà sur scène avec leur dernier projet : intitulé Küssen kann man nicht alleine… Tout un programme !

Le lendemain, le Festspielhaus reçoit Ute Lemper pour un hommage au maître du tango Astor Piazzola… et quelques incur-sions dans les univers de Jacques Brel ou Kurt Weill. Trouvant, comme Max Raabe, ses racines musicales dans le cabaret berli-

nois de la République de Weimar, parenthèse (presque) enchantée entre les Orages d’acier de la première guerre mondiale et la botte nazie, la chanteuse allemande se fit connaître en France en 1987, dans le Cabaret de Jérôme Savary, où elle incarnait Sally Bowles. Mais son répertoire ne se limite pas à ces musiques “dégénérées” fichtrement régénératrices. Elle se promène en effet dans un univers protéi-forme où se rencontrent Sting (avec une ver-sion inspirée de Moon over Bourbon Street), Édith Piaf, Tom Waits, Van Morisson et, dé-sormais, Astor Piazzola. Dans ses concerts, Ute Lemper s’amuse, implique le public, entraînant les spectateurs dans sa cavalcade musicale lascive, dialoguant sans cesse avec eux, jouant avec les mots… La chanteuse aime les textes et leurs alliances surprenantes, sou-vent sensuelles comme dans un de ses albums les plus connus, Espace indécent (musiques composées par Art Mengo, 1993) : « De l’es-pace indécent / Silencieusement s’étend / La Sève immobile / D’espérances peu dociles. »

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Pour lire le QR Code, téléchargez l’application compatible avec votre Smartphone

www.festival-entrevues.comFestival organisé par la Ville de Belfort - Cinémas d’aujourd’hui.

26 E FESTIVAL INTERNATIONAL DU FILM26 NOVEMBRE04 DÉCEMBRE 2011AU CINÉMA PATHÉ

SOyEz DÉCOUVREURSDE talents

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72 Poly 144 Novembre 11

Lorsque David Gauchard crée L’Uni-jambiste en 1999, le credo du collectif installé dans la Creuse est déjà bien

présent : il s’agit de « fusionner » les talents, de « rendre miscible des composants sup-posés non miscibles ». Le résultat est une structure multiple qu’accueillent ensemble Le Granit de Belfort et la Scène nationale du Pays de Montbéliard pour deux pièces de Shakespeare… ainsi qu’une variété de pro-positions sonores imaginées par les musi-ciens du collectif et présentées au Moloco et à la Poudrière. Tout débute avec Richard III. « Encore, Richard III » se plaindront les bougons qui ont déjà vu 67 893 la pièce. Oui, encore… Mais cette version est décidément

dans le chaos du mondeAssociés cette saison pour l’accueil du collectif L’Unijambiste, Le Granit de Belfort et la Scène nationale du Pays de Montbéliard présentent un ébouriffant Richard III de Shakespeare.

Par Raphaël Zimmermann Photo de Thierry Laporte

Richard III est présenté à Montbéliard, au Théâtre, jeudi 17 novembre

0 805 710 700 www.mascenenationale.com

Le Songe d’une nuit d’été sera donné à Belfort, au Granit, du 14 au 16 février 2012

03 84 58 67 67 www.legranit.org

www.unijambiste.com

THÉÂTRE – MONTBÉLIARD & BELFORT

atypique : elle nous fait l’effet d’un coup de poing en pleine gueule, comme si la mise en scène polymorphe de David Gauchard multi-pliait par dix la puissance du verbe shakespea-rien impeccablement servi par la traduction d’André Markowicz.

L’histoire est connue : la Guerre des deux Roses est tout juste achevée. Edouard IV (1442-1483) règne sur l’Angleterre. Mais son frère, Richard, est assoiffé de pouvoir. Il doit donc se débarrasser du Roi et de tous ceux qui le précèdent dans l’ordre de succession afin d’accéder au pouvoir… Dans la tragé-die se mêlent trahisons, meurtres, duplicité, complots et infamies de toutes sortes. Le chemin du trône est pavé de très mauvaises intentions. Celui qui bafoue la morale, l’arri-viste difforme, c’est Richard, ici triplement incarné par un comédien (Vincent Mourlon), un rappeur (Arm) et un musicien (le guita-riste Olivier Mellano). La mise en scène qui intègre intelligemment vidéo et musiques réussit l’exploit de concilier fidélité absolue au texte et parti-pris ultra contemporain. Pour David Gauchard, il s’agit d’une pièce « sur le chaos. Ne cherchez pas l’humain, il n’y en a pas. Allégorie du mal, Richard III détruit tout sur son passage. C’est un homme contre-nature, qui apporte et incarne le désordre. Le pouvoir absolu sans aucune compassion. L’ordre des choses n’est plus, nos valeurs sont mises à mal et lui, avec grand charisme, nous emmène dans les mécanismes incroyables du pouvoir. » Terriblement actuel… On at-tend donc avec impatience la création, en février, du Songe d’une nuit d’été qui clôtu-rera une “trilogie Shakespeare” initiée avec Hamlet en 2003.

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"Broadway in SatinBillie Holiday reviSited"

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08/10/2011-12/02/2012AU MUSÉE D‘ART MODERNE ETCONTEMPORAIN, STRASBOURGSous le haut-patronage du Ministère de la Culture et de la Communication / Sous le patronage du Conseil de l’Europe

L‘EUROPE DES ESPRITS OU LA FASCINATION DEL‘OCCULTE, 1750-1950

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Avec Sous nos pieds, le MNHA propose une exposi-tion sur l’archéologie au Luxembourg entre 1995 et 2010. Didactique, scientifique et esthétique…

Le Musée de la faïence de Sarreguemines rend hommage au riche passé industriel lorrain dans une exposition consacrée à la production céramique.

Archéologie : mode d’emploi… Dans une première partie, l’exposition restitue une “fouille type” décrivant avec minutie les différentes

étapes du processus archéologique, des sondages initiaux à la sécu-risation des objets trouvés. Sont également présentées les méthodes utilisées, qu’elles concernent l’analyse scientifique ou la restauration. Dans une seconde section, le visiteur est invité à découvrir les principales trouvailles faites au Luxembourg ces dernières années… Un voyage qui le mène de l’oppidum celtique du Titelberg aux ateliers sidérurgiques médiévaux de Peppange-Genoeserbusch, en passant par les restes du monument funéraire du gouverneur du Luxembourg, Claude de Neuf-châtel ou la tombe d’une noble dame de Bertrange datant du VIe siècle après Jésus-Christ qui renfermait bien des trésors… Voilà la parfaite continuation de l’exposition Empreintes du passé qui ferma ses portes en juin 1996. (P.R.)

À Luxembourg, au Musée National d’Histoire et d’Art jusqu’au 2 février 2012+352 47 93 30 1 – www.mnha.public.lu

Art déco. La céramique de Lorraine des années folles aux années noires retrace l’histoire de cet art industriel en

plein essor durant l’entre-deux-guerres. Les objets présentés témoignent des mutations économiques et artistiques que connaît alors l’ensemble du monde occidental. Économiques, car les exigences de la société industrielle – production sé-rielle et nécessité d’étendre les marchés – se répercutent sur les objets exécutés et leur procédé de fabrication et entraînent une diffusion accrue de bon nombre d’entre eux. Artistiques, car avec les Arts déco, fonctionnalité et esthétique fusionnent, encourageant la démocratisation de la création. Si les maté-riaux et les influences sont multiples, l’ensemble des artistes concernés – Géo Condé et Hermann Bernhard, pour ne citer qu’eux – convergent dans la volonté de simplifier formes et décors et s’inspirent d’événements qui leur sont contempo-rains : des assiettes évoquant l’avènement du jazz en France côtoient des boîtes aux motifs abstraits et géométriques rap-pelant l’esthétique moderniste alors en vogue. (S.M.)

À Sarreguemines, au Musée de la faïence, jusqu’au 29 janvier 201203 87 98 93 50 – www.sarreguemines-museum.com

Bijoux en or venant d’une tombe noble à Bertrange (sixième siècle après Jésus-Christ) © MNHA

aux arts citoyens !

Faïenceries de Sarreguemines, Coll. Musée de la faïence © Christian Thévenin

empreintes du passé (suite)

PMC Salle ÉraSMe - 20H30

• Kazuki Yamada direction

• Augustin Hadelich violon

TCHaïKovSKiConcerto pour violon et orchestre en ré majeur op. 35

CHoSTaKoviTCHSymphonie n°5 en ré mineur op. 47

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Capitale

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Renseignements : 03 69 06 37 06 / www.philharmonique.strasbourg.euBilletterie : caisse OPS entrée Schweitzer du lundi au vendredi de 10h à 18h Boutique Culture, 10 place de la cathédrale du mardi au samedi de 12h à 19h

aRT – LUXEMBOURG & SARREGUEMINES

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Capitale

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Renseignements : 03 69 06 37 06 / www.philharmonique.strasbourg.euBilletterie : caisse OPS entrée Schweitzer du lundi au vendredi de 10h à 18h Boutique Culture, 10 place de la cathédrale du mardi au samedi de 12h à 19h

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cascades en cascadeDirection la Forêt noire, terra incognita pour bien des Alsaciens, et Allerheiligen1 plus précisément, pour une promenade au milieu des flots tumultueux et joyeux du plus beau réseau de cascades du Rhin supérieur. Romantisch und typisch…

PRomENadE

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Par Hervé LévyPhotos de Stéphane Louis pour Poly

1 Toussaint, en français2 Fabricant, depuis 1946, de maquettes spécialisé dans les éléments de décor pour réseau de modélisme ferroviaire www.faller.de3 Extrait de Einsamkeit (solitude) tiré du Voyage d’hiver : « Comme un sombre nuage / S’enfuit dans l’air lumineux / Quand, à la cime du sapin, / Souffle un vent léger / Ainsi je vais mon chemin / Allant d’un pas pesant / Par la vie claire et joyeuse / Seul et sans espoir »

Une fois Kehl passé avec ses centres commerciaux blafards où se pressent des foules alsaciennes avides de

bonnes affaires (« Hé oui, mon bon monsieur, les prix y sont 20% inférieurs » m’informait récemment un expert du Picon bière), la route commence, après le passage au-dessus du tronçon d’Autobahn Basel / Karlsruhe en perpétuel travaux, à se perdre dans les luxu-riantes prairies allemandes. Oberkirch puis Oppenau : la vigne et les pommiers sont rois… Plus le goudron monte vers les contreforts de la Forêt noire, plus le paysage environnant ressemble à un charmant train électrique avec ses prairies d’un vert impeccable entre-tenues à la perfection, ses bovins souriants et ses bicoques à colombages qu’on croirait directement sorties des usines de la vénérable maison Faller 2.

PierresL’arrivée à Allerheiligen en impose puisque des parkings gigantesques nous accueillent. Ils sont bien garnis… La journée, ensoleillée et glacée, est en effet propice à la randonnée. On avait le souvenir d’un endroit touristique, mais pas à ce point. Reste que la promenade demeure agréable, les gens s’étant éparpil-lés dans tout le massif ou, pour une partie non négligeable, attablés au bistrot, scotchés devant une bière. La marche débute par la visite des ruines d’un couvent de Prémon-trés. Elle donne la tonalité de tout ce qui va suivre : “total romantisch”. Ne reste en effet

plus de l’abbaye construite à la fin du XIIe siècle par Uta von Schauenburg (et détruite au tout début du XIXe après avoir été frappée par la foudre) que des fragments de la longue nef, du porche et de la sacristie de l’église ainsi que les souvenirs d’un cloître. « Habi-tuée aux aspects calmes, elle se tournait, au contraire, vers les accidentés. Elle n’aimait la mer qu’à cause de ses tempêtes, et la ver-dure seulement lorsqu’elle était clairsemée parmi les ruines » écrivait, un brin ironique, Flaubert dans Emma Bovary. C’est guidé par ce sentiment doux-amer que nous traversons quelques installations touristiques : auberge (voir encadré), magasin vendant des spéciali-tés locales, miel, coucou tonitruant ou kirsch…

Une courte montée mène au monument commémorant la mémoire des membres du Schwarzwaldverein (équivalent local du Club vosgien ; voir encadré) tombés pendant les deux guerres mondiales… Œuvre de Carl Anton Meckel et Arnold Rickert, au milieu des années 1920, ce temple circulaire renferme la statue d’un colosse hyperboréen, assis là pour l’éternité, une épée brisée à la main, qui semble regarder vers l’au-delà. L’impression produite est étrange et vient rappeler que les canons artistiques – un néo-classicisme mar-tial un brin pataud, pour résumer – dont Arno Breker et Josef Thorak furent les représentant les plus marquants sous le troisième Reich, sont antérieurs à l’avènement du nazisme. Fascination et répulsion mêlées…

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763mHIRSCHKOPF

775mHUNDSKOPF

WATTENSTEIN

CHUTES D’EAUD’ALLERHEILIGEN

LIERBACH

ABBAYE EN RUINESD’ALLERHEILIGEN

ST URSULA

EauxLe parcours se poursuit sur le Sagenrund-weg (sentier des légendes) en direction des célébrissimes chutes d’eau qui ont tant fait pour la réputation du lieu depuis qu’elles ont été rendues accessibles au public, en 1840. Ici, la Lierbach tombe de plus de 90 mètres avec plusieurs “étages” de cascades au milieu de falaises encaissées et vertigineuses. La promenade est néanmoins aisée et s’adresse aux marcheurs de 7 (voire moins) à 77 ans (et plus). Des escaliers ont été aménagés, des rambardes posées. Ces installations peu gla-mour ne réussissent cependant pas à amoin-drir le puissant sentiment étreignant tout randonneur normalement constitué qui ren-voie, pêle-mêle, aux toiles de Caspar David Friedrich, à la figure éminemment germa-nique du Wanderer ou à la musique de Franz Schubert. Le Winterreise chanté par Dietrich Fischer-Dieskau avec Gerald Moore au pia-no. « Wie eine trübe Wolke / Durch heitre Lüfte geht / Wenn in der Tanne Wipfel / Ein mattes Lüftchen weht / So zieh ich meine Straße / Dahin mit trägem Fuß / Durch helles, frohes Leben / Einsam und ohne Gruß. »3 Par-tout, des plaques nous racontent des histoires anciennes. Oubliées… Vraies ou fausses, on ne sait pas. Celle du Frère Paul ou une autre, tragique, d’un hobereau strasbourgeois fiancé à une tsigane qui se fait voler la bague qu’il allait lui offrir par deux espiègles corbeaux, sans oublier la légende des anges chevauchant un vaisseau de rocher. Peu importe que le sen-tier soit trop “policé”. Ici tout est splendide, violent… et d’une intense poésie. Le bruit de l’eau est assourdissant. On ne s’entend guère parler. Pas grave. Que dire, en effet, qui ait un poids ou un intérêt quelconque en ces cir-constances ? Certains se hasardent, désignant d’un geste ample une forêt presque à 100% composée de conifères : « C’est pas comme en face. » Dans les Vosges, les feuillus sont en effet plus nombreux. Cela méritait d’être noté puisque c’est le vert profond des sapins qui a donné son nom au massif.

Les dernières cascades sont moins hautes. L’eau ne gronde plus, menaçante. Elle se fait glougloutante et joyeuse. Une plaque de pierre vient cependant nous confirmer que l’endroit demeure dangereux (le chemin est même complètement fermé en hiver lorsque la neige fait son apparition) rappelant qu’en ces lieux, le 2 avril 1893, le Lieutenant Wilhelm Schulze (du 132e Régiment d’infanterie de Strasbourg) a fait une chute mortelle. Au pied de la der-

Une association active

Au milieu du XIXe siècle, la randonnée et l’explora-

tion des massifs montagneux connaissent un réel essor : c’est pour accompagner cette mutation sociétale que naissent des associa-tions destinées à les promouvoir comme le Schwarzwaldverein fondée en 1864 à Fribourg. Pour répondre à la structure imaginée de l’autre côté du Rhin, son homo-logue français, la Société Alsato-Vosgienne voit le jour en 1868. Il s’agit du lointain ancêtre du Club vosgien qui ne nomme ainsi depuis 1918 (après s’être logi-quement appelé Vogesenverein). Mais revenons au Schwarzwald-verein qui compte aujourd’hui quelque 75 000 membres répar-tis en 238 sections locales (aux-

quelles il convient de rajouter 70 groupes de jeunes). Leur rôle ? Il est multiple et va du balisage des sentiers (ultra efficace) à l’édition de cartes et de guides en passant par la protection de l’environne-ment et la promotion du patri-moine.

www.schwarzwaldverein.de

autour de allerheiligen

distance 4 kmTemps estimé 1 h10Strasbourg 55 km

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maultaschen et compagnieLa Gastätte Allerheiligen est une au-berge typisch de la Forêt noire… Au menu, des spécialités du coin comme une savoureuse Truite au bleu (13,20 €) ou de belles Maultaschen (7,80 €), ces ravioles rectangulaires rebondies qui excitent bien des papilles. Elles sont ac-compagnées d’une sublime – et on pèse ses mots – salade de pommes de terre. C’est simple et roboratif… Un retour aux sources de la gastronomie germa-nique. Eh non, les deux termes ne sont pas incompatibles ! Au rayon liquides, on pourra évidemment se plonger dans un océan de bières, mais aussi tenter l’Apfelschorle (2,90 € les 40 cl ou 1,90 € les 25 cl) mélange d’eau gazeuse et de jus de pomme capable d’apaiser les soifs les plus inextinguibles. Un habitué des lieux – Ossie passé à l’Ouest – nous informe qu’on y sert aussi la meilleure Schwarzwälder (le gâteau au chocolat avec les cerises, la crème et tout et tout) de l’univers. Nous n’avons pas testé, mais lui faisons totale confiance… Une bonne raison pour y retourner, en tout cas !

Ouvert tous les jours à partir de 10h(à l’entrée du site à côté des ruines du couvent)+49 78 04 12 00 – www.klosterhof-allerheiligen.de

nière cascade, le chemin opère une boucle nous ramenant en deux kilomètres et quelque aux voitures et permettant de revoir le site, de haut cette fois, et de continuer à s’interroger sur la vanité humaine qui consiste à tenter, tout le temps et toujours, de dompter les élé-ments… On sait qui gagne à la fin.

PRomENadE

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1 Avec les restaurants Flamme & Co à Kaysersberg et à Strasbourg www.flammeandco.fr2 On le découvre dans Mon Alsace, paru chez Menu Fretin en 2009 et sous-titré Fragments d’un territoire culinaire – www.menufretin.fr

le terroir réinventéOlivier Nasti est aujourd’hui un des cui-siniers les plus inventifs de sa généra-tion. Un tour dans son établissement de Kaysersberg, Le Chambard, permet de le vérifier. On en ressort les sens agréable-ment chamboulés.

Par Hervé LévyPhoto de Stéphane Louis pour Poly

Le Chambard est situé 9/13 rue du Général de Gaulle à Kaysers-berg. Le restaurant est fermé lundi toute la journée, mardi et mercredi à midi. Menus de 80 € (trois plats et dessert) à 119 € (cinq plats et deux desserts)

03 89 47 10 17www.lechambard.fr

www.oliviernasti.com

La tradition revisitée : voilà comment nombre de cuisiniers décrivent leur credo. Malheureusement, sous les

mots, se dissimule, bien trop souvent, une réalité fade et sans surprises. Pas chez Olivier Nasti à qui l’on doit notamment, depuis 2006, une réinterprétation décapante de la tarte flambée1. Mais les créations les plus débridées de cet « Alsacien d’adoption » sont à découvrir au Chambard, un Macaron au Guide Michelin depuis 2005. Au cours des années et au fil de ses premières expériences avec Jean Schillinger (Colmar), Olivier Roellinger (Cancale) ou la famille Haeberlin (Illhaeusern), puis à la tête des cuisines du Caveau d’Eguisheim (entre 1993 et 2000), il s’est toujours interrogé sur la notion de terroir. L’Alsace ? Il en est « tombé amoureux »2 et ne cesse de questionner ses plats et ses produits emblématiques dans un exigeant processus de déconstruction / reconstruction visant à en sublimer les saveurs, comme dans le Baeckeoffe de foie gras chaud au lard avec ses légumes. Une base venue du fond des âges alliée à un traitement – visuel et gustatif – ultra contemporain : voilà la recette de

celui qui a obtenu le très prestigieux titre de Meilleur Ouvrier de France en 2007 et qui travaille main dans la main avec son frère Emmanuel, sommelier de haute volée.

« Mon métier consiste aussi à connaître les fournisseurs, à savoir comment, par exemple, les escargots que j’achète sont nourris, à choi-sir, chaque fois, le meilleur pour mettre le produit en valeur » dans une carte qui change très régulièrement, au rythme des saisons et des arrivages. Preuve avec une hallucinante variation sur la betterave (récoltée dans le propre potager du chef, à Colmar) accompa-gnée de ravioles d’oignons rouges et d’une émulsion à la truffe. Plusieurs jours après, les souvenirs gustatifs demeurent précis, acérés comme le sont les inventions d’Olivier Nasti qui utilise les procédés les plus pointus de la cuisine moléculaire… Si l’azote liquide n’a plus de secrets pour lui, par exemple, il s’en sert uniquement aux fourneaux, refusant les effets trop faciles d’une « cuisine spectacle. L’important est que la technique ne se voit pas. » Mission accomplie…

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GaSTRoNomIE

crier victor

La première visite Chez Victor s’avère… complexe. Salade (7,30 € la grande), tartine ou sandwich à composer (5,30 € + une boisson) ? Comme base : viande (poulet, coppa, parme), poisson (crevettes, saumon) ou antipasti (tomate séchée, auber-gine marinée) ? Une fois décidé, ne pas crier victoire trop vite, de nouveaux choix cornéliens se présentant. Fondue ou pas, la mozza ? Radis émincés ou carottes râpées ? Pesto ou tapenade ? L’établissement du 19 rue des Frères (Strasbourg) nous complique le déjeuner… mais nous régale.

[email protected]

déguster vins & crémantsOuverte depuis quelques mois, l’élégante bou-tique Wolfberger de Strasbourg (située 7 rue des Orfèvres) s’est récemment enrichie d’un espace unique en son genre, un salon (au deuxième étage, juste au-dessus du magasin) où sont orga-nisées des dégustations commentées pour les particuliers, les associations, les entreprises… Pendant le Marché de Noël, le lieu sera dédié à la présentation du savoir-faire de la première marque de vins et de crémants d’Alsace*.www.wolfberger.com

goûter les arts À Montbéliard, MA Scène nationale organise, du 7 au 10 novembre, Gou-tez voir ! un festival pluridiscipli-naire : ateliers de confection culinaire autour du fingerfood, mini-marché, conte savoureux adapté d’Hansel et Gretel et, surtout, l’hallucinant Vege-table Orchestra (jeudi 10 au Théâtre) dédié aux mélomanes et gastronomes. Les Autrichiens jouent en effet avec des instruments faits de… légumes sculptés. Et à la fin tout se termine, avec eux, par une soup party !

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Dans la série des bières de Noël*, on essayera la savernoise Licorne. Spécialement brassée pour les fêtes, elle oscille entre agréable amertume et saveurs caramélisées. Une robe ambrée, une mousse d’une belle densité et une finale sucrée font de ce breuvage un incontournable… qui peut être servi dans un kitsch et charmant verre en forme de botte (en coffret de quatre + la chope = 7,90 € environ). Ma parole, c’est Noël avant l’heure ! www.brasserielicorne.com

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ww.mascenenationale.com

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Dernière crasse entendue à votre sujet. Lamartine a dit : « La critique est la puissance des impuissants ! » No comment.

Après Boulogne et Abesses, votre der-nier métro.Ligne 2. Barbès / Ménilmontant. Retour à la maison.

Dernier coup de cœur cinématogra-phique depuis The Party.The Social Network : scénario exceptionnel.

Dernière Bonne Nouvelle vous concer-nant.On joue à Montréal le 9 et nous sommes le 6.

Le monde a connu beaucoup d’émeutes depuis la sortie de Manual For Success-ful Rioting. Quelle est la dernière mani-festation que vous ayez soutenue. Nous avons été responsables d’émeutes posi-tives dira-t-on. La dernière manif que nous avons soutenue était contre les discrimina-tions raciales.

Teki Latex n’est jamais le dernier quand il s’agit de s’intégrer dans des projets aventureux. C’est pour ça que vous avez fait appel à lui.Tek est un ami de longue date : sa présence au

studio, avec Para One, a facilité l’idée de bos-ser ensemble. Il a écouté l’album pendant son élaboration et sa participation s’est faite natu-rellement. Son talent et sa générosité aidant…

Dernier coup de flip.Celui de DJ Need, le skater du groupe.

Votre morceau favori avec “dernier” : Le Dernier empereur (IAM), Last night a DJ saved my life (Indeep), Last Christmas (Wham !)…Last night changed it all (Esther Williams).

Avant-dernier mot.Nous avons hâte de revenir jouer à Stras-bourg !

Dernier mot.RIP DJ Mehdi. We love U so !

Dernier album. Defiant Order (Savoir Faire).

Par Emmanuel Dosda Photo de Samuel Kirszenbaum

En concert vendredi 18 novembre au Zénith de Strasbourg

www.zenith-strasbourg.frhttp://birdynamnam.com

Birdy Nam Nam

DJs et oiseaux de nuit

LaST BUT NoT LEaST

RESTAURANT

Restauration 7j/7Entreprises : Fêtes de fin d'année

Cocktails / Réceptions

Parc de l’Orangerie67000 STRASBOURG

Le Jardin de l’Orangerie

Tél : 03 90 41 68 05www.jardinorangerie.fr

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RESTAURANT

Restauration 7j/7Entreprises : Fêtes de fin d'année

Cocktails / Réceptions

Parc de l’Orangerie67000 STRASBOURG

Le Jardin de l’Orangerie

Tél : 03 90 41 68 05www.jardinorangerie.fr

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rendez-vous

épargneclarté

une banque qui appartient à ses clients, ça change tout.Le Crédit Mutuel est une banque authentiquement mutualiste, qui appartient à ses clients-sociétaires. Non coté en bourse, sa valeur ne fluctue pas au gré des marchés et ça, ça change tout. En particulier la manière dont nous envisageons l’épargne : plus proche, plus sûre, plus accessible, plus claire. À l’heure où les produits d’épargne sont de plus en plus nombreux, nous vous aidons à faire le point pour épargner en toute connaissance de cause, avec les idées claires.

Caisse Fédérale de Crédit Mutuel et Caisses affiliées, SA coopérative au capital de 2 084 960 080 euros, 34 rue du Wacken, 67913 Strasbourg Cedex 9, RCS B 588 505 354.

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