© Journal of Hydrocarbons Mines and Environmental Research Volume 2, Issue 2, December 2011, 167-176 http://jhmer.univ-rennes1.fr

ISSN: 2107-6502

* Corresponding author: mridekha@hotmail.fr (A. Mridekh)

Imagerie électrique des structures crétacées et tertiaires sur la transversale Guisser-Ben Ahmed, plateau des phosphates, Maroc central. Implications

hydrogéologiques

Abdelaziz Mridekh 1,2,*, Hassan Echarfaoui 2 , Bouabid El Mansouri 2 and Rachid Touam 2

1 Université Moulay Ismail, F.S.T Errachidia, Département de Géologie, Unité de Géophysique et de Géologie des formations superficielles, B.P.509, 52000 Errachidia, Morocco 2 Université Ibn Tofail. F.S. Kénitra, Laboratoire Géosciences des Ressources Naturelles, Faculté des Sciences, Campus Maamora, BP.133, 14000 Kénitra, Morocco

Received: 08 October 2011 Accepted: 28 March 2012 Available online: 28 March 2012

Résumé : Dans le plateau des phosphates, l’interprétation des données géophysiques (sondages, trainés électriques et tomographie) permet de mettre en évidence l’existence de nouvelles limites paléogéographiques à l’intérieur du plateau de Settat-Ben Ahmed. La géométrie des unités géoélectriques montre un approfondissement des séries crétacés vers le SE, tendance expliquée par l’existence de flexure (site d’El Gaida) et/ou de failles à l’intérieur même du plateau. Analysées dans leur cadre régional, ces fractures sont comparables à celles affectant la série mésozoïque du bassin de Doukkala. Ces résultats ouvrent de nouvelles perspectives à la reconstitution des événements tectoniques du plateau ainsi que leurs rapports avec les accidents paléozoïques. Ils constituent aussi de nouveaux éléments pour la compréhension des circulations hydriques dans les aquifères crétacés.

Mots clés: Settat, tomographie, sondage, hydrogéophysique, phosphate, faille, plateau

Electrical imaging of the Cretaceous and Tertiary structures along the Guisser-Ben Ahmed transverse, '' Plateau des Phosphates'', Central Morocco. Hydrogeological implications

Abstract: The analysis of newly acquired geophysical data of the “plateau des phosphates” (Electrical sounding, profiling and electrical tomography) reveals the existence of new Cretaceous and Tertiary paleogeographic limits within the Ben Ahmed-Settat Phosphate Plateau. The geometry of the geoelectric units shows a deepening of the Cretaceous series to the SE, which is explained by the existence of several flexures (El Gaida site) and/or faults. On a regional framework, these fractures are similar to those affecting the Mesozoic series of the Doukkala Basin. These results open new perspectives for the reconstruction of the main tectonic events that controlled the geological evolution of the plateau, especially the importance of the Paleozoic faults in this evolution. They also provide new elements for the understanding of water circulation in the Cretaceous aquifers.

Keywords: Settat, tomography, sounding, hydrogeophysics, phosphate, fault, plateau

1. Introduction

Le plateau des phosphates fait partie de la Meseta occidentale marocaine et englobe les plateaux de Settat-Ben Ahmed, Oued-Zem, Khouribga et Guisser. Il est limité au Nord par le massif hercynien du Maroc central et le bassin de Berrechid, à l’Ouest par le bassin côtier de la Chaouiya, au sud par le Massif des Rehamna alors que vers l’Est et le Sud-Est le plateau des phosphates se termine par la plaine de Tadla contre la partie sud du Moyen Atlas (Fig.1). Les dépôts crétacés du plateau sont alors à cheval entre deux domaines à structuration hercynienne polyphasée (Michard et al., 2008 ; El Kamel et EL Hassani, 2006) et ils s’organisent en une géométrie sub-tabulaire, à faible pendage vers le SE et le SSW.

Les reconstitutions paléogéographiques (Frizon de Lamotte et al., 2008) mettent en évidence l’existence, au cours du Crétacé, d’un golfe à obédience atlantique. L’individualisation du plateau des phosphates a débuté au Lutétien, provoquant la formation d’un bombement de fond qui s’est accentué au cours du Miocène (Ettazarini, 2002). En conséquence, la couverture crétacée est faiblement structurée, malgré une nette progression de la fracturation au niveau de la partie centrale du plateau (Ettazarini, 2002); une telle géométrie rend difficile l’observation directe des caractères pétrographiques de la stratigraphie du plateau. La colonne lithologique de la couverture n’est, en conséquence, connue que localement, ou à travers les forages hydrogéologiques et les rares affleurements observés le long des oueds. L’absence d’éléments structuraux de surface exclut, en plus, toute tentative de

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caractérisation de ce bassin à partir des méthodes de géologie classique, caractérisation qui permettrait

d’établir les modalités de passage entre les Rehamna au Sud et le Maroc central au Nord.

Fig.1. Carte géologique du "plateau des phosphates" et localisation des sites de prospection géophysique. Extrait de la Carte géologique au 1/200 000 du plateau des phosphates et de la zone synclinale du Tadla (Beni Amir - Beni Moussa - Srarhna nord) : (Bolelli et al., 1959). (Projection conique conforme de Lambert). 1: failles cartographiées; 2: Flexures déduites de la géophysique; 3: Centres urbains; 4: Sites de prospection géophysique; 5: Failles de la Meseta Nord-Occidentale; 6: Ligne de corrélation lithologique; 7: Ligne sismique DA8; 8: Pléistocène moyen; 9: Pléistocène (Moghrébien); 10: Pliocène moyen; 11: Miocène moyen; 12: Cénomanien; 13: Infra-cénomanien ; 14: Maestrichtien, Eocène; 15: Sénonien; 16: Turonien.

Geological map of the "plateau des phosphates" and location of the geophysical prospected sites. (based on the geologic map of the ‘’plateau des phosphates’’1/200 000 and on the Tadla synclinal area (Beni Amir - Beni Moussa - Srarhna nord) , after Bolelli et al., 1959). (Lambert projection). 1: Mapped faults, 2 : Flexures deducted from geophysics, 3: Urban areas 4: Prospected sites, 5: NW Meseta Fault 6: lithologic correlation cross-section 7: seismic line DA8, 8: Middle Pleistocene, 9 : Pleistocene (Moghrebian), 10 : Middle Pliocene, 11 : Middle Miocene, 12: Cenomanian, 13 : Infra-Cenomanian, 14: Maestrihtian, Eocene, 15 : Senonian, 16 : Turonian. Du point de vue hydrogéologique, les observations faites au niveau des forages hydrogéologiques de la région de Settat ont montré une relative abondance des ressources en eau dans la partie occidentale et une rareté manifeste dans la partie centrale. Un des moyens utilisés pour expliquer le fonctionnement des aquifères crétacés, l’imagerie géophysique, permet de suivre le comportement en subsurface des aquifères crétacés. Dans ce travail, on présente les résultats d’une campagne géophysique visant à (1) mettre en évidence l’existence, en profondeur de zones de fractures et/ou de flexures à l’intérieur du plateau des phosphates, notamment sur la transversale Guisser-Ben Ahmed (2) expliquer la différence de distribution des ressources en eau des différentes provinces du plateau des phosphates

et (3) intégrer l’évolution du plateau dans le cadre de son évolution régionale notamment dans celui de la marge atlantique marocaine.

2. Lithostratigraphie et horizons géoélectriques

Le plateau des phosphates a été abondement étudié (Gentil, 1922; Russo, 1933; etc.), les formations stratigraphiques ont été datées par Salvan (1950, 1954, 1960, 1969) ; Arambourg (1950), Arambourg et al. (1950) et Archambault et al.(1975). Sur les schistes et les quartzites paléozoïques d’âge carbonifère et ordovicien, et après une lacune du Jurassique, le Crétacé inférieur présente une série détritique marno-gréseuse gypsifère de l’Infra-

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Cénomanien, et calcaro-dolomitique parfois marneux du Cénomanien (Fig.2).

Fig.2 : Colonne stratigraphique synthétique du "plateau des phosphates" (Bolelli, 1952). Synthetic stratigraphic column of the "plateau des phosphates" (Bolelli, 1952).

Au-dessus, le Turonien est formé de faciès calcaires et marneux très épais, formant une dalle fissurée bien marquée dans la topographie (Salvan, 1954). Le Crétacé supérieur est fait de faciès marno-gréseux à marno-calcaires caractéristique des milieux littoraux confinés. Ils sont localement interrompus par une épaisse formation dite «dalle calcaire intercalaire» (Salvan, 1954). Enfin, la série se termine par les dépôts de la série phosphatée de 30 à 50 m d’épaisseur. Les phosphates marneux du Maestrichtien (5 à 28 m), sont surmontés par des faciès fins variés de l’Eocène, marnes phosphatées et phosphates sableux à nombreuses intercalations calcaires (20 à 30 m). Dans la partie centrale du plateau, la corrélation des forages hydrogéologiques (Figs.1, 3) permet de suivre l’évolution des volumes de dépôts et leurs variations. Ainsi, on constate un net épaississement des faciès calcaro-dolomitiques et marneux du Cénomanien vers le Sud-Est, qui est corrélable avec une diminution des épaisseurs des séries du Cénomanien et du Sénonien. Par ailleurs, le Maastrichtien, qui termine la série crétacée, n’est rencontré que dans le forage d’Oulad Hammou, au Sud-Est (Fig.3).

Fig.3. Corrélation lithostratigraphique des forages hydrogéologiques dans le plateau des phosphates (voir Fig.1 pour la localisation). Lithostratigraphic correlation of hydrogeological wells in the "plateau des phosphates" (see Fig.1 for location). Les unités géoélectriques identifiées sur les sondages et les coupes de tomographie électrique comprennent (Fig.4) : (i) une unité supérieure résistante dont la valeur de résistivité varie entre 130 à 200 Ω.m. Elle peut être attribuée, selon les sites, aux dépôts calcaires et calcaires

marneux de l’Eocène et du Crétacé supérieur (Sénonien supérieur) ; (ii) une unité médiane conductrice généralement plus épaisse attribuée aux dépôts marno-calcaires du Sénonien inférieur. Cette unité est encadrée par deux autres unités intermédiaires ayant une valeur de résistivité voisine de 50 Ω.m;

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(iii) une unité résistante inférieure, formée de calcaires fracturés parfois gréseux avec intercalations de niveaux grossiers aquifère, est attribuée au Cénomano-Turonien.

Afin de pouvoir suivre le comportement de la couverture crétacée, nous avons cherché à caractériser électriquement le socle paléozoïque. Ceci est réalisé par le sondage SM près du site lakramcha (Fig.1), au voisinage des affleurements du Maroc central. La valeur de résistivité interprétée pour le socle est de l’ordre de 1300 Ω.m.

3. Hydrogéologie du plateau des phosphates

L’analyse des données des forages hydrogéologiques montre que le plateau des phosphates est constitué

d’aquifères étagés (Ettazarini et El Mahmouhi, 2004). Pour la plupart, ces aquifères sont continus, parfois diaclasés et associés à des niveaux marneux rendant difficiles les circulations hydriques verticales (Fig.2). Ils affleurent au centre du bassin (Fig.1) et sont composés de séries crétacées et tertiaires, qui se prolongent sous la couverture pliocène et quaternaire de la plaine de Tadla au Sud-Ouest (Fig.1). Par endroit, la nappe du Crétacé est confondue avec celle du Paléozoïque, c’est le cas de la nappe de Gueffaf-Sidi-Amor située au Nord de Khouribga (Ferre et Hazzan, 1964). Ailleurs, les nappes d’eaux se distribuent dans les sédiments de l’infra-Cénomanien, gypseux, loin des bordures du bassin, avec des niveaux sableux s’intercalant dans la série argileuse (Bolelli, 1952).

Fig.4. Valeurs caractéristiques des résistivités des séries crétacées (a) et du socle paléozoïque (b) du plateau de Settat-Ben Ahmed. La coupe de tomographie est acquise dans le site de Dhaba, le SEV dans le site Lakramcha (voir Fig.1 pour la localisation des deux sites). Characteristic values of the resistivity of the Cretaceous series (a) and of the Paleozoic Basement (b) of the ‘’plateau de Settat-Ben Ahmed’’. The electrical tomography profile is acquired in the Dhaba site, and the VES in the Lakramcha site (see Fig.1 for location of both the two sites).

Les réservoirs hydrogéologiques potentiels se répartissent dans les calcaires et les calcaires phosphatés du Cénomano-Turonien, du Crétacé supérieur et de

l’Eocène; ainsi que dans les faciès détritiques rouges du Crétacé inférieur et les zones de fractures, les failles et les filons dans le substratum ante-Crétacé (Fig.2).

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Pour les aquifères recensés, les couches sont affectées d’ondulations peu marquées qui dessinent des bombements et des cuvettes jouant un rôle essentiel dans l’accumulation et la circulation des eaux souterraines (Archambault et al., 1975).

4. Méthodologie de résistivité

La méthode de résistivité est basée sur la mesure du potentiel électrique qui est le résultat de l’application d'un courant électrique dans le sous-sol. Les levés de résistivité s’effectuent moyennant un dispositif quadripôle à distance inter-électrodes croissante (sondage) ou à espacement constant (profil) (Telford et al., 1990). L’interprétation des sondages électriques verticaux (SEV) n’est pas unique en raison des principes

connus ‘’d’équivalence’’ et de ‘’suppression’’. D’autre part, dans un dispositif de tomographie électrique (Griffiths et Turnbull, 1985), l’utilisation simultanée d’un grand nombre d’électrodes permet au système d’imagerie de combiner la technique du sondage et de profil sans avoir recours au changement de position des électrodes. L’objectif de l’acquisition électrique est de donner une image de la variation en 2D des niveaux calcaires turoniens. Les coupes de tomographie, pour lesquelles la méthode d’inversion adoptée est celle des moindres carrées, ont été réalisées et interprétées en parallèle avec les SEV. Ces derniers ont été calés aux forages hydrogéologiques.

Fig.5. Carte du réseau hydrographique de la région de Settat. Le réseau hydrographique est extrait des cartes topographiques au 1/50000 (Projection conique conforme de Lambert). Les anomalies du réseau hydrographique sont représentées par des changements brutaux (CB), des courbures et changement de direction (CCD), des pincements (PC), des rectilinarités (RC) et des Treillis recourbés (TR).

Map of the hydrological River system of the Settat area extracted from the topographic Map (1/50000) (Conic Lambert projection). The river system anomalies are represented by abrupt changes (CB), bends and changes of direction (CCD), pinching out (PC) rectilinarity (RC) Rebended Treillis.

Le recours à l’imagerie géophysique a fait suite à une analyse détaillée des anomalies du réseau hydrographique qui permet de relever plusieurs anomalies pouvant être interprété en terme d’éléments structuraux de subsurface (Le Pape, 1998; Defontaines, 1990; Floissac, 1997) (Fig.5). Les plus importantes sont

des changements brutaux (CB), des courbures et changements de direction (CCD), des pincements (PC) situées dans le prolongement potentiel des accidents régionaux des Rehamna et du Maroc central hercynien. En outre, l’utilisation de la carte de linéaments régionaux (Benali, 2000) (Figs.1,5) a permis de combiner l’information obtenue du réseau hydrographique et de la

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géophysique profonde (anomalies LAK, COM et KHL) pour établir le programme d’acquisition géophysique. Les levés géophysiques réalisés dans la présente étude ont concerné 11 sites répartis suivant une direction NE-SW (Fig.1); cependant seuls 3 sites situés sur cette transversale reliant la localité de Guisser à celle de Ben Ahmed sont présentés dans le présent travail (Figs.1,5). Il s’agit des sites Lagaïda (Gaa), Oulad Sidi Ahmed Labiad (SAL) et Lakramcha (LAK) (Figs.1,5,6).

Fig.6a. Carte de position des sondages électriques, des profils géoélectriques et des tomographies effectuées (a: Sidi Ahmed Labiad, b: Lagaïda, c: Lakramcha ). Location map of the executed Vertical Electrical Soundings, geoelectrical and tomography profiles (a: Sidi Ahmed Labiad, b: Lagaïda, c: Lakramcha).

Fig.6b. Lagaïda Au SW et au centre du plateau, les anomalies du réseau hydrographiques détectées (de direction NE-SW) et les données de terrain ont permis de choisir des profils de direction NW-SE ou EW, dans la partie nord (sites LAK et Gaa) les anomalies sont Est-Ouest, les profils géophysiques sont alors en grande partie subméridiens. Pour les SEV, le dispositif adopté et de type Schlumberger, alors que pour l’acquisition des profils de tomographie électrique, un dispositif Wenner avec un espace inter-électrodes de 10 m est justifié par le fait que la géométrie des couches connues régionalement est celle d’une configuration horizontale. Lorsqu’une anomalie verticale est décelée, le recours à d’autres techniques (notamment les profils de trainés électriques) permet de s’affranchir des autres solutions possibles. Les longueurs de lignes AB se répartissent entre 1000 m et 4000 m.

Fig.6c. Lakramcha

5. Géométrie de la couverture crétacée sur la transversale Guisser-Ben Ahmed

Les diverses images obtenues (SEV interprétés et corrélés, coupes de tomographies électriques et profils de traînés électriques) ont permis de confirmer l’existence à l’intérieur même du plateau des phosphates d’anomalies structurales variables d’un site à l’autre. Ces zones de transition depuis la partie ouest vers la partie centrale du plateau se présentent en flexures et/ou failles. Ainsi, l’étude comparée de la couverture montre qu’elle se présente en plusieurs configurations, en relation probable avec les structures régionales : Au Sud-Ouest de la zone d’étude, au niveau du site SAL (Figs.1,6a), la couverture crétacée s’épaissie d’Ouest en Est, le socle paléozoïque est passé de 190 m de profondeur au niveau du SEV SAL1 à 95 m au niveau du SEV SAL14 (Figs.6a,7). Entre ces deux sondages la couverture n’est pas homogène, attestée par les importants changements notés sur l’allure des SEV SAL1 et SAL14 (Fig.7). La couverture crétacée se présente, au niveau du SEV SAL14, sous forme d’une série de bicouches (alternance de niveaux conducteurs marneux et résistants calcaires), contre un passage progressif, sur le SEV SAL1, depuis le conducteur (Sén-C0) vers le socle paléozoïque par deux électrofaciès intermédiaires (Sén-A0 et Sén-A1). Le comportement de la couverture crétacée, et des aquifères qu’elle contient, est illustré par la coupe de tomographie électrique (Figs.6a, 9) où la couverture sénonienne est marquée par une hétérogénéité manifeste, expression des changements latéraux de faciès. Une de ces discontinuités, par faille, met en contact un faciès résistant contre un faciès conducteur (Fig.9). La carte de la figure 1 montre que ce site est situé dans le prolongement potentiel des accidents régionaux qui affectent le socle paléozoïque plus au Sud et au voisinage d’un linéament régional, très probablement une des composantes de la zone de cisaillement ouest

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mésétienne, connu par la géophysique (noté COM en Fig.1).

Fig.7. Corrélation de deux sondages électriques verticaux (SEV) dans le site de Sidi Ahmed (SAL14, SAL1) (voir Fig.6a pour la localisation). Les deux sondages sont distants de ~5 km. (Sen: Sénonien. R, C et A indiquent respectivement Résistant, Conducteur et Intermédiaire). Correlation of two Vertical Electrical Soundings (VES) from Sidi Ahmed Labiad site (SAL14, SAL1) (see Fig.6a for its location). Both soundings are ~5 km from each other. (Sen: Senonian. R, C and A indicate Resistant, Conductive and Intermediate respectively). 6. Sites de Lagaïda (Gaa) et Lakramcha (LAK)

Fig.8. Corrélation des sondages électriques verticaux (SEV) dans le site de Lakramcha (LAK) (voir Fig.6b pour la localisation) (Rp : niveau résistant paléozoïque, Sen-Tur: Sénonien-Turonien). Correlation of two Vertical Electrical Soundings (VES) in the area of Sidi Ahmed (SAL) (SAL14 et SAL1) (see Fig.6a for location). (Rp: Paleozoic resistant level, Sen-Tur: Senonian-Turonian).

Au Nord du plateau des phosphates, dans une zone située au voisinage d’une ligne de partage des eaux des bassins versants d’Oum Errabi et du Bouregregue (Fig.5), la coupe de tomographie électrique (Fig.10) illustre un autre mode de passage à travers la transversale Guisser-Ben Ahmed. Ce passage se réalise par la flexuration de la couverture crétacée (Figs.6b,10) et l’épaississement du NNW au SSE des calcaires du toit

du Sénonien (plage de résistivité > 400 Ω.m). Cet épaississement se serait réalisé à travers une zone de discontinuité par faille, les valeurs de résistivité du résistant supérieur diminuent lors de ce passage et les faciès deviennent plus conducteurs, probablement à cause de la dominance de la composante marneuse. Le niveau résistant inférieur (Fig.10), très probablement l’aquifère turonien, subit un important approfondissement, ce qui justifie la rareté des ressources en eau dans la partie SE du plateau. La tendance d’approfondissement des aquifères crétacées vers le SE se confirment dans le site Lakramcha (LAK) situé sur la bordure nord orientale du plateau des phosphates dans son contact avec le Maroc central paléozoïque. L’analyse comparée des sondages réalisés sur une transversale NNE-SSW (Figs.6c,8) permet de montrer la réduction vers le nord de la série d’âge sénonien et turonien, cénomanien et infracénomanienne qui passe de 190 m (SEV LAK13) à 45 (SEV LAK16). Particulièrement, les sondages voisins LAK15 et LAK16 (Figs.6c,8) présentent le même nombre de couches mais le décalage manifeste des parties homologues des deux SEV serait l’expression du jeu probable d’une faille de direction est-ouest. Une telle structure serait une composante de l’anomalie profonde (notée LAK sur la figure 1) déduite de la géophysique (Benali, 2000) (Fig.1).

7. Synthèse et discussion

Le plateau des phosphates est un élément géomorphologique important de la Meseta occidentale marocaine. Les études réalisées jusqu’à présent ont juste permis de mettre en évidence des ondulations de la couverture à l’origine d’une distribution disproportionnées des ressources en eau. La nature des liens existant entre les Rehamna au Sud et le Maroc central au Nord est, aussi, restée énigmatique. Dans ce travail, nous avons mis en évidence l’existence de discontinuités de la couverture crétacée aussi bien au Nord qu’au Sud du plateau des phosphates, ces discontinuités sont vraisemblablement attribuées à des failles et/ou flexures NE-SW ou E-W, jusque-là inconnues. Ces éléments structuraux sont vraisemblablement à l’origine de structures qui confèrent aux dépôts du Crétacé une configuration proche de celle des demi-grabens dont les failles bordières seraient la conséquence du rejeu de failles compressives hercyniennes du socle, de direction NE-SW, affleurant au Sud et au Nord du plateau des phosphates mais dont l’existence est hypothétique en profondeur. Cette hypothèse peut être justifiée par le fait que les anomalies mises en évidence dans les sites SAL, Gaa et LAK, sont situées dans le prolongement du couloir de failles de la zone de cisaillement ouest-mesetien, entre les massifs du Maroc central, au Nord-Est et des Rehamna au Sud-Ouest et sur des directions subéquatoriales en rapport avec les phases d’ouverture de l’Océan Atlantique (Fig.1). Des structures affaissées analogues sont observées au Nord-Ouest, dans le bassin de Berrechid

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(El Mansouri, 1993) et à l’Ouest du synclinal d’Imfout, notamment au Nord du bassin de Doukkala, où des demi-grabens mésozoïques se développent sur d’anciennes failles compressives paléozoïques. En effet, il est actuellement connu que la structuration distensive des bassins côtiers atlantiques, a réactivée principalement les failles hercyniennes du socle, qui forment des zones de faiblesse crustale (Fig.11) (Echarfaoui, 2003). La configuration globale en blocs

basculés des séries méso-cénozoïques illustrées par ce profil sismique permet de suggérer qu’un mécanisme similaire serait à l’origine de la mise en place des structures du plateau des phosphates. En outre l’existence de coulées basaltiques sur le profil sismique permet de suggérer que la zone d’étude faisait partie, au Trias, de la province magmatique de l’Atlantique central (Knight, 2004).

Fig.9. Tomographie électrique (Azimut N80°, espacement inter-électrode : 10 m) du site de sidi Ahmed Labiad (voir Fig.6a pour la localisation). Noter le contact entre des faciès conducteurs et résistants de part et d’autre d’une zone de discontinuité électrique. Electrical tomography at the Sidi Ahmed Labiad area (Azimut N80°, electrode spacing: 10 m) (see Fig.6a for location). Notice the contact between conductive and resistant levels on both sides of a zone of electrical discontinuity.

Fig.10. Tomographie électrique du site de Lagaida (Azimut N110°, espacement inter-électrode : 10 m). (voir Fig.6b pour la localisation). Noter le comportement du niveau résistant du Sénonien en direction du SE. Electrical tomography at the Lagaïda site (see Fig.6b for location). Notice the behavior of the Senonian resistant level southeasterly.

Fig.11. ligne sismique DA8 illustrant la structure mésozoïque en demi-graben localisée à l’Ouest du synclinal d’Imfout (voir Fig.1 pour la localisation). Seismic line DA8 illustrating the Mesozoic Half-Graben structure located to the West of the Imfout syncline (see Fig.1 for location). Du point de vue hydrogéologique les nouvelles structures mises en évidence montrent que l’hétérogénéité des aquifères du plateau de Settat-Ben Ahmed (Archambault et al., 1975) n’est pas seulement due à des variations de faciès (argument le plus évoqué jusqu’à présent) mais aussi à une structuration de la

couverture en zones de failles et/ou de flexures associée à un exhaussement alpin dont la conséquence immédiate est l’approfondissement des niveaux aquifères vers l’Est du plateau.

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8. Conclusion

Le plateau des phosphates est connu comme une zone ayant une faible tectonique active, les accidents paléozoïques cartographiés au Nord dans la zone du Maroc centrale ou au sud dans la zone des Rehamna sont difficilement décelables à travers la couverture crétacée. L’utilisation conjointe des SEV et des coupes de tomographie électriques permet d’apporter de nouveaux éléments à la connaissance de la structure de subsurface de cette partie de la Meseta marocaine. Ils montrent la présence, au sein de la série crétacée, d’un réseau de fractures de direction probable NE-SW et E-W affectant la partie centrale et la partie nord du plateau de Settat-Ben Ahmed. L’analyse comparée avec les zones voisines permet de mettre en liaison cette fracturation avec celle mise en évidence dans la partie est du bassin de Doukkala. Les demi-grabens de cette partie de la marge reprennent vraisemblablement d’anciennes structures paléozoïques qui forment le prolongement de la zone de cisaillement ouest mesetienne. Du point de vue des ressources hydriques, la mise en évidence de telles zones de fractures, ainsi que la mise en reliefs des séries crétacées au centre du plateau explique leur faible potentiel hydrogéologique par rapport à celui de la partie occidentale.

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