L'inexistence du contrat - CORE · 2016-12-23 · Présentée et soutenue publiquement le 18 mai...

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L’inexistence du contrat Alexis Posez To cite this version: Alexis Posez. L’inexistence du contrat : Un autre regard sur sa formation. Droit. Universit´ e Panth´ eon-Assas, 2010. Fran¸ cais. <tel-01201755> HAL Id: tel-01201755 https://halshs.archives-ouvertes.fr/tel-01201755 Submitted on 18 Sep 2015 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destin´ ee au d´ epˆ ot et ` a la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publi´ es ou non, ´ emanant des ´ etablissements d’enseignement et de recherche fran¸cais ou ´ etrangers, des laboratoires publics ou priv´ es.

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  • Linexistence du contrat

    Alexis Posez

    To cite this version:

    Alexis Posez. Linexistence du contrat : Un autre regard sur sa formation. Droit. UniversitePantheon-Assas, 2010. Francais.

    HAL Id: tel-01201755

    https://halshs.archives-ouvertes.fr/tel-01201755

    Submitted on 18 Sep 2015

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  • UNIVERSIT PANTHON-ASSAS (PARIS II) DROIT CONOMIE ET GESTION SCIENCES POLITIQUES

    LINEXISTENCE DU CONTRAT ___________

    UN AUTRE REGARD SUR SA FORMATION

    THSE POUR LE DOCTORAT EN DROIT PRIV (Arrt du 7 aot 2006)

    Prsente et soutenue publiquement le 18 mai 2010 par

    Alexis POSEZ

    DIRECTEUR DE RECHERCHE

    Monsieur Dominique BUREAU, Professeur lUniversit Panthon-Assas (Paris II)

    MEMBRES DU JURY

    Monsieur Franois CHNED, Professeur lUniversit Rennes I Madame Dominique FENOUILLET, Professeur lUniversit Panthon-Assas (Paris II) Monsieur Guillaume WICKER, Professeur lUniversit Montesquieu (Bordeaux IV) Monsieur Claude WITZ, Professeur lUniversit de la Sarre

  • LUniversit Panthon-Assas nentend donner aucune approbation ni improbation aux opinions mises dans les thses. Ces opinions doivent tre considres comme propres leurs auteurs.

  • I

    AVERTISSEMENTS

    COMPUTATION DES ALINAS

    Contrairement la tradition, qui dsigne par le mot dalina tout paragraphe termin par un

    point suivi dun retour la ligne (1), le lgislateur a rcemment entrepris dintroduire une

    nouvelle dfinition consistant voir un alina dans tout paragraphe suivi dun renvoi la

    ligne, quil soit ou non termin par un point conclusif (2).

    Le choix soffrant soit dadopter cette dernire nomenclature et de porter ce faisant faux

    toutes rfrences antrieures au risque de perdre le lecteur et justiciable (3), soit de conserver

    le sens constant du terme en contradiction avec les dispositions nouvelles, on prendra le

    parti, lorsque la difficult se prsentera, de mentionner entre guillemets le numro lgal

    de lalina et de le faire suivre entre parenthses du numro que lui attribue encore le sens

    commun.

    En consquence, et pour seul exemple, larticle 815-3 du Code civil tant aujourdhui

    compos de quatre alinas dont le premier se subdivise en quatre numros plutt que

    de huit comme indiqu par larticle 2 de la loi no 2006-728 du 23 juin 2006 portant rforme

    des successions et des libralits (sic), on mentionnera son deuxime alina de la faon

    suivante : C. civ., art. 815-3, al. 6 (al. 2).

    TYPOGRAPHIE DES CITATIONS

    Les citations sont reproduites entre guillemets en caractres italiques. Pour autant, la

    variation typographique voulue par lauteur cit sera respecte comme participant

    pleinement la signification de son texte. Elle sexprimera donc par lemploi de caractres

    romains au sein de la citation en italique. Lorsque, exceptionnellement, on scartera de

    cette rgle afin de mettre en vidence un passage ou une expression, le passage incrimin

    sera indiqu comme non soulign par lauteur [n.s.a.].

    (1) Dfinition qui est aussi celle du Grand Robert : Sparation entre la phrase termine et la phrase nouvelle, celle-ci tant commence en retrait, la ligne suivante, aprs un petit intervalle laiss en blanc. (sens 1), et Passage compris entre deux alinas. (sens 2, appliqu, en exemple, aux articles du Code civil). (2) V. circ. 20 oct. 2000, JO 31 oct. 2000, p. 17302, qui recommande aux rdacteurs de se plier au nouvel usage parlementaire, constatant que le Conseil dtat a lui-mme fini par sy rallier. Comp. auparavant, en sens contraire, circ. 30 janv. 1997, JO 1er fvr. 1997, p. 1720, dont larticle 1.1.3.5 rappelait de la faon la plus claire : Un alina comprend au moins une phrase entire. Il ny a donc dalina que lorsque lon va la ligne aprs un point. Par suite, quand un alina se compose dun chapeau suivi, aprs renvoi la ligne, dune numration sous forme de tirets ou dune numrotation (1 2 3), cet ensemble ne forme quun seul alina. (3) Sur quoi, v. A. LE GALL, Alina, vous avez dit alina ? , D. 2001, point de vue, p. 133.

  • III

    ABRVIATIONS et autres locutions typographiques

    1re civ. : Premire chambre civile de la Cour

    de cassation 2e civ. : Deuxime chambre civile de la

    Cour de cassation 3e civ. : Troisime chambre civile de la

    Cour de cassation ABGB : Allgemeines Brgerliches Gesetzbuch

    (Code civil Autriche, 1812) acad. : acadmie actual. : actualits adde : ajouter adm. : administratif ar. : arien aff. : affaires AGBG : Gesetz zur Regelung der Allgemeinen

    Geschftsbedingungen (Loi sur les conditions gnrales des contrats daffaires RFA, 9 dc. 1976)

    agric. : agricole, agriculture AJ : Actualit jurisprudentielle AJ : Actualit juridique AJDA : Actualit juridique de droit

    administratif AJDI : Actualit juridique

    Droit immobilier (1998-) AJPI : Actualit juridique

    Proprit immobilire (1956-1997) AktG : Aktiengesetz (Loi sur les actions

    mobilires [et les socits par actions] RFA, 1965)

    al. : alina All. : Allemagne AMF : Autorit des marchs financiers anc. : ancien ann. : annales antr. : antrieur, antrieurement APD : Archives de philosophie du droit app. : appendice(s) arbitr. : arbitrage arch. : archives arg. : argument arr. : arrt art. : article ass. : assemble Ass. pln. : Assemble plnire

    de la Cour de cassation assoc. : association assur. : assurance augm. : augment autom. : automobile av.-pr. : avant-propos

    av.-proj. : avant-projet aviat. : aviation banc. : bancaire Belg. : Belgique BGB : Brgerliches Gesetzbuch

    (Code civil All., 1900) BGH : Bundesgerichthof

    (Cour fdrale de justice RFA) BGHZ : Entscheidungen des Bundesgerichthofes

    in Zivilsachen (Recueil officiel des arrts civils de la Cour fdrale de justice RFA)

    BIAJ : Bulletin dinformations administratives et juridiques

    bibl. : bibliothque BICC : Bulletin dinformation de la Cour

    de cassation BJIPA : Bulletin juridique international de

    protection des animaux BLD : Dalloz Bulletin lgislatif BOCC : Bulletin officiel de la concurrence,

    de la consommation et de la rpression des fraudes

    BODACC : Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales

    BOI : Bulletin officiel des impts BOSP : Bulletin officiel des services et des

    prix BRDA : Bulletin rapide de droit des affaires BT : Bulletin des transports (1895-1990) BTL : Bulletin des transports et de la

    logistique (1991-) Bull. : Bulletin de la Cour de cassation

    (chambres civiles ou criminelle) Bull. Joly : Bulletin mensuel Joly

    dinformation des socits c. : contre C. : Code C. cass. : Cour de cassation C. constit. : Conseil constitutionnel CA : cour dappel CAA : cour administrative dappel cah. : cahiers Cah. dr. entr. : Cahiers de droit de lentreprise

    (suppl. au JCP CI puis JCP E) Cah. dr. eur. : Cahiers de droit europen Canon. contemp. : Le Canoniste contemporain CASF : Code de laction sociale et des

    familles CCA : Commission des clauses abusives

  • IV

    CCC : Contrats, concurrence, consommation

    CCE : Communication Commerce lectronique

    CCH : Code de la construction et de lhabitation

    CCNE : Comit consultatif national dthique

    C. const. : Conseil constitutionnel CCR : Cadre commun de rfrence

    pour un droit priv europen CDE : Code du domaine de ltat CE : Conseil dtat

    ou Communauts europennes CECUP : Code de lexpropriation pour cause

    dutilit publique CEDH : Cour europenne des droits de

    lhomme cep. : cependant CESEDA : Code de lentre et du sjour des

    trangers et du droit dasile cf. : confer (se reporter ) CGI : Code gnral des impts CGPPP : Code gnral de la proprit des

    personnes publiques ch. : chambre Ch. mixte : Chambre mixte

    de la Cour de cassation Ch. runies : Chambres runies

    de la Cour de cassation chap. : chapitre chr. : chronique CIC : Codex iuris canonici

    (Code de droit canonique, 1983) CIDE : Convention internationale des

    droits de lenfants (ONU, 20 nov. 1989)

    CIJ : Cour internationale de justice circ. : circulaire cit. : citation civ. : civil CJCE : Cour de justice des Communauts

    europennes (-2009) CJEG : Cahiers juridiques de llectricit et

    du gaz CJUE : Cour de justice de lUnion

    europenne (2009-) CLJ : Cambridge Law Journal CLR : California Law Review CMF : Code montaire et financier CMP : Code des marchs publics CNC : Conseil national de la

    consommation CNUDCI : Commission des Nations Unies

    pour le droit commercial international

    CO : Code des obligations (Suisse, 1911) COJ : Code de lorganisation judiciaire col. : colonne coll. : collection collab. : collaboration Com. : Chambre commerciale et

    financire de la Cour de cassation com. : commerce, commercial comm. : commission comment. : commentaire commun. : communautaire communic. : communication comp. : comparer, compar, comparative compl. : complter par compt. : comptable conc. : concurrence concl. : conclusion(s) conf. : confrence cons. : conseil consid. : considrant consom. : consommation const. : constitutionnel constr. : construction cont. : contentieux contract. : contractuel conv. : convention, conventionnel Conv. EDH : Convention europenne de

    sauvegarde des droits de lhomme et des liberts fondamentales (Rome, 4 janv. 1950)

    coord. : coordination copr. : coproprit CPC : Code de procdure civile CPCE : Code des postes et des

    communications lectroniques CPI : Code de la proprit intellectuelle CPP : Code de procdure pnale c.r. : compte rendu Crim. : Chambre criminelle

    de la Cour de cassation crit. : critique CSP : Code de la sant publique CSS : Code de la scurit sociale cult. : culture CVIM : Convention des Nations Unies sur

    les contrats de vente internationale de marchandises (Vienne, 11 avril 1980)

    D. : Recueil Dalloz DA : Dalloz Recueil analytique

    (1941-1943) D. Aff. : Dalloz Affaires (1995-1999) dactyl. : dactylographi DBF : Droit bancaire et financier DC : Dalloz Recueil critique

    (1941-1943)

  • V

    DCFR : Draft Common Frame of Reference (Projet de cadre commun de rfrence, par le Groupe dtude sur un code civil europen, dir. Ch. Von Bar, 2007)

    DDHC : Dclaration des droits de lhomme et du citoyen (France, 1789)

    dc. : dcision dcr. : dcret D.-L. : dcret-loi Defr. : Rpertoire du notariat Defrnois dlict. : dlictuel dont. : dontologique dp. : dpartement dern. : dernier, dernirement DH : Dalloz Recueil hebdomadaire

    (1924-1940) dict : dictionnaire Dig. : Digeste (Justinien, 533) DIP : droit international priv dir. : direction discipl. : disciplinaire div. : divers DMF : Le Droit maritime franais doc. : document, documentation Doc. fr. : La Documentation franaise doctr. : doctrine dom. : domaine DP : Dalloz Recueil priodique

    (1825-1940) DPCI : Droit et pratique du commerce

    international dr. : droit Dr. et cult. : Droit et cultures Dr. & Patr. : Droit & Patrimoine Dr. fam. : Droit de la famille Dr. soc. : Droit social Dr. socits : Droit des socits Droits : Droits Revue franaise de

    thorie, de philosophie et de culture juridiques

    DUDH : Dclaration universelle des droits de lhomme (1948)

    e.g. : exempli gratia ( titre dexemple) con. : conomie, nonomique d. : dition duc. : ducation gal. : galement EheG : Ehegesetz

    (Loi sur le mariage All., 1946) lect. : lection, lectoral lectr. : lectrique encycl. : encyclopdie, encyclopdique enreg. : enregistrement entr. : entreprise env. : environ envir. : environnement

    eod. loc. : eodem loco (au mme endroit) eod. num. : eodem numerus (au mme numro) eod. pag. : eodem pagina ( la mme page) esp. : espce et al. : et alii (et autres) etc. : et ctera tr. : tranger tym. : tymologie eur. : europen EWHC : England and Wales High Court ex. : exemple expropr. : expropriation f : folio fac. : facult fam. : famille, familier fasc. : fascicule fd. : fdration fin. : financier fisc. : fiscal FJ : La France judiciaire (1877-1910) fonc. : foncier fr. : franais Gaz. Pal. : Gazette du Palais Gaz. trib. : Gazette des tribunaux gn. : gnral, gnralement GIE : groupement dintrt conomique GmbHG : Gesetz betreffend die Gesellschaften

    mit beschrnkter Haftung (Loi relative aux socits responsabilit limite All., 1892)

    gouv. : gouvernement gr. : grec hab. : habitation Halde : Haute Autorit de lutte contre les

    discriminations et pour lgalit handic. : handicap hist. : historique HGB : Handelsgesetzbuch

    (Code de commerce RFA) homolog. : homologation, homologu huiss. : huissier IALS : International Association of Legal

    Science i.e. : id est (cest--dire) ibid. : ibidem (mme endroit) id. : idem (de mme) id. auct. : idem auctor (mme auteur) id. cit. : idem citatio (mme citation) id. ex. : idem exemplum (mme exemple) id. tit. : idem titulus (mme intitul) IGEC : Instruction gnrale relative ltat

    civil (Min. Justice, 21 sept. 1955) imm. : immeuble, immobilier impl. : implicite, implicitement impr. : impression, imprimeur in : dans in-4 : in-quarto

  • VI

    in-8 : in-octavo incap. : incapacit, incapable ind. : industrie, industriel indemn. : indemnit, indemnitaire ind. : indit in-f : in-folio inf. : infrieur inform. : informatique infra : ci-dessous INPI : Institut national de la proprit

    intellectuelle Inst. : Institutes

    (Gaius, env. 150 ; Justinien, 533) instr. : instruction int. : international intell. : intellectuel introd. : introduction IR : Informations rapides J.-Cl. : Juris-Classeur JCP : Juris-Classeur Priodique (Semaine

    juridique) dition gnrale JCP A : Juris-Classeur Priodique (Semaine

    juridique) dition Administration JCP CI : Juris-Classeur Priodique (Semaine

    juridique) dition Commerce et Industrie (1948-1983)

    JCP E : Juris-Classeur Priodique (Semaine juridique) dition Entreprise (1984-)

    JCP N : Juris-Classeur Priodique (Semaine juridique) dition notariale

    JCP S : Juris-Classeur Priodique (Semaine juridique) dition sociale

    J.-Data : Juris-Data JDI : Journal de droit international

    (Clunet) JLH : Journal of Legal History JO : Journal officiel

    (de la Rpublique franaise) JOAN : Journal officiel Assemble

    nationale JOCE : Journal officiel des Communauts

    europennes (1952-2002) JOUE : Journal officiel de lUnion

    europenne (2003-) journ. : journal Journ. notaires : Journal des notaires et des

    avocats (1808-1992) JT : Journal des tribunaux jud. : judiciaire jur. : juridique ou jurisprudence Justices : Justices Revue gnrale de droit

    processuel L. : loi lat. : latin lg. : lgislatif, lgislation

    LGDJ : Librairie gnrale de droit et de jurisprudence

    Liais. soc. : Liaisons sociales libr. : libraire, librairie liv. : livre LJ : Law Journal LJA : La Lettre des juristes daffaires LLR : Louisiana Law Review loc. cit. : loco citato (passage cit) loy. : loyer(s) Loy. et copr. : Loyers et coproprit LR : Law Report Ltd. : Private limited company LUFC : Convention portant loi uniforme

    sur la formation des contrats de vente internationale des objets mobiliers corporels (La Haye, 1er juill. 1964)

    LUVI : Convention portant loi uniforme sur la vente internationale des objets mobiliers corporels (La Haye, 1er juill. 1964)

    magistr. : magistrat, magistrature mar. : maritime march. : marchandise, marchand McGill LJ : McGill Law Journal MDD : La Mmoire du Droit md. : mdecine, mdical MEFRA : Mlanges de lcole franaise de

    Rome Antiquit mm. : mmoire mton. : mtonymie milit. : militaire min. : ministre, ministre, ministriel MLR : Modern Law Review modif. : modifi par Mon. : Le Moniteur (Belgique) mor. : moral(e) myth. : mythologie, mythologique no, nos : numro, numros Nap. : Napolon nat. : national nav. : navigation NBW : Nieuw Burgerlijk Wetboek

    (Nouveau Code civil Pays-Bas, 1992)

    NCPC : Nouveau Code de procdure civile (1976-2007)

    niv. : niveau NJW : Neue Juristische Wochenschrift

    (Nouvel hebdomadaire juridique, All.)

    not. : notamment nouv. : nouveau Nov. : Novelles (Justinien) n.s.a. : non soulign par lauteur obs. : observation(s)

  • VII

    off. : officiel OGH : Oberster Gerichtshof

    (Cour suprieur de justice Autriche)

    ONU : Organisation des Nations Unies op. cit. : opere citato (ouvrage cit) OPA : offre publique dachat OPE : offre publique dchange opp. : oppos ord. : ordonnance org. : organisation orig. : origine, original, originaire ouvr. : ouvrage ouvr. coll. : ouvrage collectif p., pp. : page, pages PA : Petites Affiches Pacs : pacte civil de solidarit pan. : panorama paragr. : paragraphe part. : partie Pas. : Pasicrisie ou Recueil gnral de la

    jurisprudence des cours et tribunaux de Belgique

    passim : a et l patr. : patrimoine PCC : Principes contractuels communs

    (vo PCCR) PCCR : Projet de cadre commun de

    rfrence pour un droit europen des contrats Terminologie contractuelle commune et Principes contractuels communs (Assoc. H. Capitant et SLC, 2007)

    PDEC : Principes du droit europen du contrat (1998-2002, dir. O. Lando)

    pn. : pnal pens. : pension(s) phil. : philosophie, philosophique PIDC : Pacte international des droits civils

    et politiques (ONU, 1966) PIDE : Pacte international des droits

    conomiques, sociaux et culturels (ONU, 1966)

    pln. : plnier, plnire pol. : politique post. : postrieur pr. : praefatio (prambule) prat. : pratique prc. : prcdent ou prcit prf. : prface prfect. : prfecture, prfectoral prem. : premier, premirement prs. : prsident Principes Acquis : Principes du droit des

    contrats issu de lacquis communautaire (Groupe Acquis, 2007)

    Principes Unidroit : Principes relatifs aux contrats du commerce international (Institut international pour l'unification du droit priv, Rome, 1994, rvision 2004)

    proc. : procdure procur. : procureur proj. : projet, projet prol. : prolgomnes propr. : proprit protect. : protectorat prudhom. : prudhommes, prudhomal psych. : psychologie publ. : publi, publication PU : Presses universitaires PUAM : Presses universitaires

    dAix-Marseille PUF : Presses universitaires de France PUG : Presses universitaires de Grenoble quest. : question Quot. jur. : Le Quotidien juridique rapp. : rapport Rapp. : Rapport annuel de la Cour de

    cassation rappr. : rapprocher RCA : Responsabilit civile et assurances RCC : Revue de la concurrence et de la

    consommation RCDIP : Revue critique de droit

    international priv (1934-) RCJB : Revue critique de jurisprudence

    belge RCLJ : Revue critique de lgislation et de

    jurisprudence (1853-1939) RCS : Registre du commerce et des

    socits RD : revue de droit RDA : Rpublique dmocratique

    dAllemagne (1949-1990) RDAE : Revue de droit des affaires

    europen RDAI : Revue de droit des affaires

    internationales RDB : Revue de droit bancaire et financier RDC : Revue des contrats RDCB : Revue de droit commercial belge RD imm. : Revue de droit immobilier RD int. : Revue de droit international

    (1927-1940) RDIDC : Revue de droit international et de

    droit compar RDIP : Revue droit international priv

    (1905-1933) RDP : Revue du droit public et de la

    science politique RDR : Revue de droit rural RDSS : Revue de droit sanitaire et social

  • VIII

    RDT : Revue de droit du travail Rec. : Recueil des dcisions

    (Conseil constitutionnel, Conseil dtat, CJCE ou CJUE)

    rech. : recherche(s) recomm. : recommandation rect. : rectorat, rectoral REDC : Revue europenne de droit de la

    consommation rd. : rdition rf. : rfrence(s) rgl. : rglement, rglementaire rimpr. : rimpression rel. : reliure, reli rp. : rpertoire ou rponse Rp. civ. : Rpertoire civil Encyclopdie

    juridique Dalloz Rp. cont. adm. : Rpertoire de contentieux

    administratif Encyclopdie juridique Dalloz

    rp. min. : rponse ministrielle reprod. : reproduction, reproduit Req. : Chambre des requtes de la Cour

    de cassation (-1947) req. : requte rquis. : rquisition(s) rsol. : rsolution resp. : responsabilit rtrosp. : rtrospectif rev. : revue ou review Rev. adm. : Revue administrative Rev. arb. : Revue de larbitrage Rev. dr. suisse : Revue de droit suisse Rev. huiss. : Revue des huissiers de justice Rev. loyers : Revue des loyers et des fermages Rev. sc. mor et pol. : Revue de lAcadmie des

    sciences morales et politiques Rev. socits : Revue des socits RFA : Rpublique fdrale dAllemagne

    (1949-) RFAP : Revue franaise dadministration

    publique RFDA : Revue franaise de droit

    administratif RFDC : Revue franaise de droit

    constitutionnel RGAT : Revue gnrale des assurances

    terrestres (1930-1995) RGD : Revue gnrale du droit

    (1877-1938) RGD (Ottawa) : Revue gnrale de droit de

    lUniversit dOttawa RGDA : Revue gnrale du droit des

    assurances (1996-) RGDC : Revue gnrale de droit

    commercial (Belgique)

    RGDIP : Revue gnrale de droit international public (1894-1977)

    RHD : Revue historique de droit franais et tranger

    RHFD : Revue dhistoire des facults de droit et de la science juridique

    RIDA : Revue internationale du droit dauteur

    RID Antiq. : Revue internationale des droits de lAntiquit

    RIDC : Revue internationale de droit compar

    RIDE : Revue internationale de droit conomique

    RIEJ : Revue interdisciplinaire dtudes juridiques (Belgique)

    Riv. dir. civ. : Rivista del diritto civile RJC : Revue de jurisprudence

    commerciale RJDA : Revue de jurisprudence de droit

    des affaires RJPF : Revue juridique Personnes &

    Famille RJS : Revue de jurisprudence sociale RLC : Revue Lamy de la concurrence RLDA : Revue Lamy de droit des affaires RLDC : Revue Lamy de droit civil RLDI : Revue Lamy Droit de limmatriel RLJ : Revue de lgislation et de

    jurisprudence (Revue Wolowski, 1834-1853)

    ronot. : ronotyp RPC : Revue des procdures collectives RPDA : Revue pratique de droit

    administratif RPDF : Revue pratique de droit franais

    (1856-1884) RRJ : Revue de la recherche juridique RSC : Revue de science criminelle et de

    droit compar RTD civ. : Revue trimestrielle de droit civil RTD com. : Revue trimestrielle de droit

    commercial et conomique RTD eur. : Revue trimestrielle de droit

    europen RTDF : Revue trimestrielle de droit familial RTDH : Revue trimestrielle des droits de

    lhomme rur. : rural S. : Recueil Sirey (1807-1965) s. : et suivant(s) s.a. : soulign par lauteur SA : socit anonyme SAFER : socit damnagement foncier et

    dtablissement rural sanit. : sanitaire SARL : socit responsabilit limite

  • IX

    SAS : socit anonyme simplifie SC : sommaires comments sc. : science(s) SCI : socit civile immobilire scolast. : scolastique SCP : socit civile professionnelle SCS : socit en commandite simple s.d. : sans date sect. : section scur. : scurit slect. : slection smin. : sminaire sent. : sentence serv. : service s.l. : sans lieu SLC : Socit de lgislation compare s.n. : sans nom, anonyme SNC : socit en nom collectif Soc. : Chambre sociale de la Cour de

    cassation soc. : social sol. : solution somm. : sommaire spc. : spcialement StGB : Strafgesetzbuch

    (Code pnal RFA, Autriche) sup. : suprieur suppl. : supplment, supplmentaire supra : ci-dessus syn. : synonyme synall. : synallagmatique synd. : syndicat SZ : Sammlung Zivilsachen

    (Recueil des affaires civiles, de la Cour suprieur dAutriche)

    t. : tome TAHC : Travaux de lAssociation

    Henri Capitant TCC : Terminologie contractuelle

    commune (vo PCCR) TCE : Trait instituant la Communaut

    europenne (Rome, 1957) TFUE : Trait sur le fonctionnement de

    lUnion europenne (Lisbonne, 2007)

    Thmis : La Thmis ou Bibliothque du jurisconsulte (1819-1831)

    tit. : titre TUE : Trait sur lUnion europenne

    (Maastricht, 1992) techn. : technique tlcom. : tlcommunication(s) terr. : terrestre territ. : territoire, territorial TGI : tribunal de grande instance th. : thse TI : tribunal dinstance TPI : Tribunal de premire instance de

    lUnion europenne trad. : traduction transp. : transport(s) trav. : travail, travaux trib. : tribunal, tribunaux trim. : trimestriel UCC : Uniform Commercial Code

    (tats-Unis) UE : Union europenne UFR : Unit de formation et de recherche ult. : ultime, ultime unil. : unilatral univ. : universit, universitaire urban. : urbanisme v. : voir vo, vis : verbo, verbis (mot(s), entre(s)) val. : valeur var. : variante, variable var. auct. : varii auctores (divers auteurs) vers. : version vict. : victime vol. : volume vs. : versus vve : veuve VVG : Versicherungsvertragsgesetz

    (Loi sur le contrat dassurance RFA, 2008)

    WSr : Wetboek van Strafrecht (Code pnal Pays-Bas)

    ZAC : zone damnagement concert ZPO : Zivilprozeordnung

    (Code de procdure civile RFA) ZUP : zone durbanisation prioritaire

    ________________

  • XI

    SOMMAIRE _______

    INTRODUCTION

    PREMIRE PARTIE

    LINEXISTENCE POUR CAUSE DE DFICIENCE CHEZ LAUTEUR DE LA VOLONT

    CHAPITRE I LABSENCE DE PERSONNALIT JURIDIQUE

    CHAPITRE II LABSENCE DE CONSCIENCE JURIDIQUE

    SECONDE PARTIE

    LINEXISTENCE POUR CAUSE DE DFICIENCE DANS LA TENEUR DE LA VOLONT

    TITRE I LA DFAILLANCE DUNE CONDITION DE FORMATION

    COMMUNE TOUS LES CONTRATS

    CHAPITRE I LE CONTRAT : UN ACCORD DE VOLONT

    CHAPITRE II LE CONTRAT : UN ACCORD DE VOLONT DESTIN PRODUIRE

    DES EFFETS DE DROIT

    TITRE II LA DFAILLANCE DUNE CONDITION DE FORMATION

    PROPRE CERTAINS CONTRATS

    CHAPITRE I LA PERFECTION DU CONTRAT SUBORDONNE UNE CONDITION DE FORME

    CHAPITRE II LA PERFECTION DU CONTRAT SUBORDONNE UNE CONDITION DE FOND

    CONCLUSION

  • 1

    INTRODUCTION

    1. Une interrogation philosophique Au commencement de la rflexion philosophique, on trouve ces mots de GORGIAS (1) : Premirement, rien nexiste ;

    deuximement, mme sil existe quelque chose, lhomme ne peut le concevoir ; troisimement, mme si

    on peut le concevoir, on ne peut ni le formuler ni lexpliquer. On ne saurait mieux dire que la

    question de lexistence ou de linexistence des choses est premire entre toutes, et quelle

    saccompagne dune difficult, parfois tenue pour invincible, de concevoir jusqu son ide

    mme.

    Le concept, pourtant, est depuis lors apparu incontournable. Pour les philosophes,

    en effet, lventualit du nant conditionne lexistence de ltre (2). Non seulement tout objet

    peut tre pens aussi bien comme existant que comme nexistant pas, mais, plus encore,

    (1) Du non-tre, ou de la nature, daprs Sextus Empiricus, in Les Prsocratiques, par J.-P. Dumont, La Pliade, Gallimard, 1988, p. 1022. Si lon se situe ici au commencement de la philosophie, ce nest que de la philosophie occidentale, et pour ce que Gorgias, le Sicilien, fut celui qui, en introduisant la technique rhtorique Athnes, cra le discours philosophique. Sur cette histoire, et sur lorigine judiciaire de ce discours, on consultera avec profit O. REBOUL, Introduction la rhtorique, 4e d., PUF, 2001, spc. pp. 13-22. (2) Contre Parmnide, v. ainsi PLATON, Le Sophiste, in uvres compltes, trad. A. Dis, Les Belles Lettres, t. VIII, 3e part., 1925, 259 a, p. 375, pour qui le non-tre participe de ltre : Ltre et lautre pntrent travers tous et se compntrent mutuellement. Ainsi lautre, participant de ltre, du fait de cette participation, est ; G. W. F. HEGEL, Encyklopdie der philosophischen Wissenschaften im Grundrisse [Encyclopdie des sciences philosophiques], 3 d., 1830, Wissenschaft der Logik [Science de la logique], trad. B. Bourgeois, d. J. Vrin, 1970, sect. II, La thorie de lessence, 112, p. 372 : cette ngativit nest pas extrieure ltre mais est sa propre dialectique ; M. HEIDEGGER, Was ist Metaphysik ? [Quest-ce la mtaphysique ?], 1929, 5e d., trad., av.-pr. et annot. H. Corbin, Gallimard, NRF, 1938, p. 35 : Le Nant ne survient ni pour soi , ni ct de lexistant auquel, pour ainsi dire, il adhre. Le Nant est la condition qui rend possible la rvlation de lexistant comme tel pour la ralit-humaine. Le Nant ne forme pas simplement le concept antithtique de lexistant, mais lessence de ltre mme comporte ds lorigine le Nant. Cest dans ltre de lexistant que se produit le nantir du Nant. , et p. 40 : Le Nant ne reste pas loppos indtermin lgard de lexistant, mais il se dvoile comme com-posant ltre de cet existant. ; J.-P. SARTRE, Ltre et le Nant, Gallimard, 1943, p. 40 : Cest la possibilit permanente du non-tre, hors de nous et en nous, qui conditionne nos questions sur ltre. , et p. 80, o il pose nouveau le non-tre comme condition de la transcendance vers ltre. Et considrant inversement, que lide du nant nexiste elle-mme que par ngation dun tre prexistant, v. H. BERGSON, Lvolution cratrice, F. Alcan, 1907, chap. IV, pp. 298-322, spc. p. 310 (rd. PUF, Quadrige, 2003, pp. 275-298, spc. p. 286), qui souligne qu il y a plus, et non pas moins, dans lide dun objet conu comme nexistant pas que dans lide de ce mme objet conu comme existant , car lide de lobjet nexistant pas est ncessairement lide de lobjet existant , avec, en plus, la reprsentation dune exclusion de cet objet ; J.-P. SARTRE, op. cit., p. 46 : la ngation est refus dexistence. Par elle, un tre (ou une manire dtre) est pose puis rejet au nant. , et p. 52 : Cela signifie que ltre est antrieur au nant et le fonde. Par quoi il faut entendre non seulement que ltre a sur le nant une prsance logique mais encore que cest de ltre que le nant tire concrtement son efficace. Cest ce que nous exprimions en disant que le nant hante ltre. Cela signifie que ltre na nul besoin de nant pour se concevoir et quon peut inspecter sa notion exhaustivement sans y trouver la moindre trace du nant. Mais au contraire le nant qui nest pas ne saurait avoir quune existence emprunte : cest de ltre quil prend son tre .

  • 2 LINEXISTENCE DU CONTRAT 2

    cest le fait mme de pouvoir le penser comme inexistant qui permet seul den reconnatre

    lexistence : pour concevoir ltre, il faut, en somme, avoir conu le nant (3).

    Il nen va pas autrement en droit, l surtout o toute chose nest quintellectuelle.

    Pour pouvoir affirmer quun contrat existe, puisquil sagit de lui, il faut ncessairement

    avoir identifi ses conditions dexistence, et postul au moins implicitement que, sans

    celles-ci, il ne serait pas. Si lon ne pouvait dire dun contrat, comme de tout autre objet

    juridique, quen certaines occasions et le plus souvent mme il nexiste pas, on ne

    pourrait soutenir avec certitude quil existe en dautres circonstances (4). lexamen

    dailleurs, il tombe sous le sens que toute convention est dabord inexistante avant que

    dapparatre la vie juridique. Nous nous rencontrons, puis nous contractons : avant cela

    le contrat est inexistant ; aprs cela, mme ananti pour quelque autre cause, le contrat aura

    exist. Linexistence du contrat prcde donc, elle aussi, son existence (5).

    Linexistence apparat ainsi comme la forme la plus parfaite du nant (6) : il ny a jamais

    rien eu (7), ou rien du moins de ce que lon attendait.

    2 . Lassimilation historique de linexistence la nullit Il est peu prs certain quaux premiers temps hiratiques du droit, lorsque lacte juridique naissait quasi

    magiquement de lnonciation de formules sacres ou de laccomplissement de quelque (3) Il sen infre que, si les deux ralits sont matriellement antinomiques, les deux ides sont quant elles rciproquement consubstantielles lune de lautre. Cest prcisment sur cette dialectique que sappuie toute la Logique hglienne : v. G. W. F. HEGEL, Wissenschaft der Logik [Science de la logique], liv. I, Die Lehre vom Seyn [La thorie de ltre], 2e d., 1832, trad. S. Janklvitch, d. Aubier Montaigne, 1947, rd. 1971, sect. I, chap. I, tre, pp. 72-99, qui estime, p. 75, qu il ny a rien dans le ciel et sur la terre qui ne contienne la fois ltre et le nant. , pour affirmer rsolument, p. 98, lunit de ltre et du nant . Et cest ce mme rapport qui sert la dmonstration existentialiste : v. not. les dveloppements de SARTRE sur les deux termes du questionnement, ci-dessus, note prc. Rappr. la dialectique de la vie et de la mort, lesquelles ne se dfinissent pas lune sans lautre, sopposant aussi bien quelles se confondent. V. en particulier Encyclopdie ou Dictionnaire raisonn des sciences, des arts et des mtiers, par D. Diderot et J. dAlembert, d. Briasson et al., Paris, t. XVII, 1765, vo Vie, que L. DE JAUCOURT dfinit de la sorte : cest loppos de la mort, qui est la destruction absolue des organes vitaux ; X. BICHAT, Recherches physiologiques sur la vie et la mort, Brosson et Gabon, Paris, 1800, nouv. d., 1855, annot. F. Magendie, rd. J. Vrin, 1981, p. 1, qui commence son ouvrage en posant cette clbre formule : On cherche dans des considrations abstraites la dfinition de la vie ; on la trouvera, je crois, dans cet aperu gnral : La vie est lensemble des fonctions qui rsistent la mort. ; C. BERNARD, Dfinitions de la vie , Rev. Deux Mondes, mai 1875, t. IX, pp. 326-349, qui en vient, p. 344, affirmer, sans incohrence, le contraire de lnonc encyclopdiste : Si nous voulions exprimer que toutes les fonctions vitales sont la consquence ncessaire dune combustion organique, nous rpterions ce que nous avons dj nonc : la vie cest la mort , pour conclure, p. 346 : Tout le monde sentend quand on parle de la vie et de la mort. Il serait dailleurs impossible de sparer ces deux termes ou ces deux ides corrlatives, car ce qui vit, cest ce qui mourra, ce qui est mort, cest ce qui a vcu. , association quil reprendra dans ses Leons sur les phnomnes de la vie communs aux animaux et aux vgtaux, 1878, rd. J. Vrin, 1966, prf. G. Canguilhem, estimant, p. 30, que nous ne distinguons la vie que par la mort et inversement ; M. HEIDEGGER, Sein und Zeit [tre et Temps], 1927, trad. F. Vezin, Gallimard, 1986, rd. 1999, 49, p. 300, pour qui : La mort est, au sens le plus large du mot, un phnomne de la vie. Et lon pourrait poursuivre le mme raisonnement en dmontrant quil nest pas de bien sans mal, de paix sans guerre, de libert sans contrainte, etc. (4) Cest bien en ce sens que lon a pu affirmer que linexistence constitue une ralit intellectuelle : v. P. HBRAUD, obs. sur Trib. civ. Seine, ord. rfr, 19 juin 1957, RTD civ. 1958, p. 123, qui la juge en outre incontestable . (5) Tandis que la nullit la suit, en ce quelle prsuppose un contrat existant : v. infra, no 10. (6) Nant se trouve en lat. scolast. sous la forme non ens, cest--dire littralement non-tant, soit inexistant. (7) Du lat. existentia, driv de ex-sistere, puis existere : sortir, surgir, slever de. Est in-existant ce qui na jamais paru.

  • 2 INTRODUCTION 3

    autre rite (8), les actes furent inexistants avant que dtre nuls. De l ce principe que lon peut

    tenir comme lun des plus anciens qui ft : Forma dat esse rei. Il est facile de comprendre en

    effet quun degr suprieur de juridicit ncessitait dtre atteint pour admettre lexception

    puis laction destines constater cet tat dinexistence, et que tel fut ds lorigine lobjet de

    laction en nullit (9).

    Lorsquune autre action fut plus tard institue, il ne sest pas agi de subdiviser laction en

    nullit prexistante, mais den adjoindre une nouvelle, de nature facultative pour le

    contractant protg, et rpondant des causes restes jusque-l sans sanction (10). Lide de (8) Pour les premiers ges du droit romain, antrieurs la lacisation du droit rvle par la loi des XII Tables, v. not. R. VON JHERING, Geist des rmischen Rechts [Lesprit du droit romain], t. III, 3e d., 1875, trad. O. de Meulenaere, d. A. Marescq, 1887, p. 112 et s., spc. pp. 134-148 ; P. HUVELIN, Les tablettes magiques et le droit romain , Annales internationales dhistoire Congrs de Paris 1900, 2e sect., A. Colin, 1902, pp. 15-81, puis Magie et droit individuel , LAnne sociologique 1905-1906, pp. 1-47, spc. pp. 25-42, o ltude slargit dautres droits anciens ; G. GURVITCH, La magie et le droit , in Essais de sociologie, Sirey, 1938, rd. Dalloz, 2003, passim, et la prface de F. TERR ; H. LVY-BRUHL, Nouvelles tudes sur le trs ancien droit romain, Sirey, 1947, pp. 6-10 et 99-104 ; J. ELLUL, Histoire des institutions, t. I, LAntiquit, 8e d., PUF, 1992, rd. Quadrige, 1999, pp. 234-240 ; A. MAGDELAIN, Le ius archaque , MEFRA 1986, 1, pp. 265-358, spc. pp. 280-319 ; M. HUMBERT, Droit et religion dans la Rome antique , Arch. phil. dr., t. 38, Droit et religion, 1993, pp. 35-47, spc. pp. 39-42. Plus rserv cep., v. J. GAUDEMET, Droit priv romain, 2e d., Montchrestien, 2000, pp. 254 et 264, et Naissance dune notion juridique Les dbuts de l obligation dans le droit de la Rome antique , Arch. phil. dr., t. 44, Lobligation, 2000, pp. 19-32, spc. pp. 27-28, qui ny a jamais vu quune pure conjecture, mme probable. Pour les autres droits anciens, malgr un consensualisme parfois plus prcoce, v. E. CASSIN, Symboles de cession immobilire dans lancien droit msopotamien , LAnne sociologique 1952, PUF, 1955, pp. 107-161 ; E. REVILLOUT, Les obligations en droit gyptien compar aux autres droits de lAntiquit, E. Leroux, 1886, pp. 34-38 et 275-327, puis Prcis du droit gyptien compar aux autres droits de lAntiquit, Giard et Brire, t. II, 1903, pp. 1209-1217 ; L. GERNET, Hypothses sur le contrat primitif en Grce , Rev. tudes gr. 1917, pp. 249-293 et 363-383, spc. p. 365 et s., puis Droit et prdroit en Grce ancienne , LAnne sociologique 1948-1949, PUF, 1951, pp. 21-119, spc. pp. 21-69 et 104-119 ; jusquau puissant symbolisme des droits germaniques primitifs, sur lequel v. M. THVENIN, Contributions lhistoire du droit germanique , RHD 1880, pp. 447-461, Du rle de la forme dans les contrats ; A. ESMEIN, tudes sur les contrats dans le trs-ancien droit franais, Larose & Forcel, 1883, pp. 6-9 et 69-70 ; G. LEPOINTE et R. MONIER, Les obligations en droit romain et dans lancien droit franais, Sirey, 1954, pp. 453-455. (9) En ce sens, v. par ex. R. JAPIOT, Des nullits en matire dactes juridiques, th. Dijon, 1909, A. Rousseau, p. 52 : aussi loin que lhistoire ait pu remonter pour nous fournir des donnes ou des conjectures srieuses, on voit la notion de linefficacit, comme celle de lacte juridique efficace, natre et se prciser pour ainsi dire dans le formalisme et par le formalisme. La notion de linefficacit qui de cette manire apparat au dbut de lhistoire est singulirement proche de celle que les auteurs modernes ont caractrise par le terme dinexistence. , et p. 53 : Ainsi la sanction de nullit fait son apparition dans le domaine du Droit sous sa forme la plus stricte et la plus rigide. Cest cette conception rigoureuse et absolue qui naturellement devait se faire jour la premire : il y un acte ou il ny en a pas , lauteur distinguant bien par ailleurs les notions dinexistence et de nullit de plein droit (v. not. pp. 667-669 et 721-722). Plus concis, mais tout aussi nets, v. gal. M. PLANIOL, Trait lmentaire de droit civil, 9e d., LGDJ, t. I, 1922, no 328, p. 133, qui rappelle que dans les premiers temps du droit romain : lacte nul nexistait pas au point de vue de la loi, il navait ni existence, ni effet juridique ; il ny avait rien. ; A. COLIN et H. CAPITANT, Cours lmentaire de droit civil franais, 8e d., Dalloz, t. I, 1934, no 65, p. 78 : les textes romains ne font pas de diffrence entre linexistence et la nullit absolue. (10) Les prteurs romains institurent cette actio in integrum restitutio, de mme quune exception opposable la demande dexcution, aux cas notamment de violence, de dol ou de lsion du vendeur et de limpubre. La plupart de ces causes de restitution passrent dans les anciennes coutumes de France puis, une fois redcouvertes en tant que nullits de droit romain, furent toutes soumises limptration de lettres de rescision dlivres par le pouvoir royal, seul mme dautoriser ses sujets exciper dun droit tranger pour se pourvoir en sa justice. La pratique fut dfinitivement entrine par une ordonnance de Louis XII de juin 1510 (art. 46), et il fallut attendre la fin de lAncien Rgime pour quon labolisse finalement (loi du 7 sept. 1790, art. 20 et 21), une fois que, la source romaine tarie, ces causes de nullit furent reconnues de droit franais au mme titre que toutes autres. De cette histoire, il est cependant rest que les nullits relatives ne peuvent tre invoques que par le seul contractant ls, en observance de dlais de prescription propres, et que le contrat demeure objectivement valable dfaut dexercice de ce droit de critique.

  • 4 LINEXISTENCE DU CONTRAT 2

    rescision, ou de nullit de droit (11), trouva ainsi sopposer celle dinexistence, que lon

    dsigna alors prfrablement, par esprit de systme, sous le terme de nullit de plein

    droit (12). Assez tt, le fondement de cette opposition se dcouvrit dans la nature de lintrt

    protg (13). Mais leffort intellectuel que lon produisit pour affirmer cette distinction

    nouvelle et construire la thorie des nullits dtourna de celui que lon aurait pu fournir

    (11) Sur la signification respective des expressions de droit et de plein droit, v. infra, no 13, spc. note 237. (12) V. par ex. J.-B. DENISART, Collection de dcisions nouvelles et de notions relatives la jurisprudence actuelle, 7e d., Vve Desaint, t. III, 1771, vo Nul, Nullit, no 5, p. 469 : Les nullits de la seconde espce, & quon nomme nullits de droit, sont celles qui, suivant notre usage, ne rendent pas les actes & les contrats nuls de plein droit, mais qui donnent seulement ouverture les faire casser & rescinder par le moyen de la restitution en entier, en obtenant des lettres de rescision Cette terminologie se rencontre encore parfois en droit positif. V. ainsi 3e civ., 3 mars 2004, Bull., III, no 49, qui juge que la convocation dune assemble gnrale par un syndic dont le mandat est expir, [a] pour seul effet de rendre cette assemble annulable sans la frapper de nullit de plein droit . On parle plus souvent aujourdhui, quoique moins prcisment, de nullit absolue et de nullit relative, expressions que lon trouvait dj dans les plaidoyers du Chancelier DAGUESSEAU. V. en ce sens J. PORTALIS, discussion en Conseil dtat, sance du 4 vend. an X (in P. A. Fenet, Recueil complet des travaux prparatoires du Code civil, t. IX, p. 52, art. 184, et J.-G. Locr, La lgislation civile, commerciale et criminelle de la France, t. IV, p. 374, no 6), propos des nullits du mariage : tout ce qui est conforme la nature des choses et lordre public de saurait tre barbare. Ces expressions, nullits absolues, nullits relatives, sont des termes techniques et simples, qui rendent des ides composes, et qui, sous ce rapport, doivent tre conservs dans le langage des lois. M. dAguesseau distingue, dans tous ses plaidoyers, les nullits absolues des nullits relatives ; et il tenait cette distinction, parce quil tenait la paix des familles . (13) V. dj A. ALCIATI, Paradoxorum ad Pratum, I. Giunta, Lyon, 1529, lib. III, cap. IV, 5 ; B. dARGENTR, Coustumes gnralles du pays et duch de Bretagne, J. Du Puys, Paris, 1584, art. 283, gl. 1, 9 et s., col. 1368 ; G. COQUILLE, Les coustumes du Pays et Duch de Nivernois, Abel LAngelier, Paris, 1605, chap. XXIII, art. I, p. 511 ; F. DUNOD DE CHARNAGE, Trait des prescriptions, 1re d., Briasson, Paris, 1730, 1re part., chap. VIII, pp. 47-48, et chap. XII, pp. 78-79 ; J. BOUHIER, Les coutumes du duch de Bourgogne, Aug, Dijon, 1742, chap. XIX, no 12, p. 333 : Nos auteurs distinguent deux sortes de nullitez. Les unes ont pour principe lintrt public, soit que lActe soit contre les bonnes murs, ou quil ait mrit destre prohib par quelquautre considration politique. [] De telles nullitez sont appelles absolus, en ce quelles peuvent tre opposes par toutes sortes de personnes, & quelles anantissent lActe essentiellement, & radicalement, en sorte quon le regarde comme non fait, & non avenu [] Les autres nullitez sont celles, qui ont t introduites en faveur de certaines personnes [] Comme ces nullitez ne regardent que lintrt des particuliers, elles sont appelles respectives, ou selon dautres, causatives, parce quelles ne peuvent tre opposes que par ceux, au profit de qui elles ont t tablies. ; R.-J. POTHIER, Trait du contrat de vente, J. Debure, Paris, et Vve Rouzeau-Montaut, Orlans, 1772, nos 13 et 14, t. I, pp. 15-17, in uvres de Pothier, par J. Bugnet, t. III, Paris, 1847, pp. 7-9. Et le mme principe de distinction se trouve encore chez DEMOLOMBE (Cours de Code Napolon, t. III, Trait du mariage et de la sparation de corps, 6e d., A. Durand et al., t. I, 1880, no 243, p. 384), cest--dire celui-l mme toujours cit comme tant lorigine dune pseudo thorie organiciste, dite classique , des nullits. On aurait donc intrt cesser denseigner, ainsi quon le fait depuis Eugne GAUDEMET et Ren JAPIOT, que la thorie des nullits sarticulerait historiquement entre une priode classique qui aurait couru jusqu eux et qui aurait expliqu la summa divisio de la matire par une improbable analogie faite avec ltat dun enfant mort-n ou n simplement malade, et une priode ultrieure, dite moderne, qui la fonderait leur suite sur lintrt protg par la rgle dictant la nullit. DEMOLOMBE, ainsi dsign par JAPIOT, ne faisait quuser dune image banale une poque de rvolution mdicale (v. en particulier le clbre article de Rmy DE GOURMONT, Le Joujou patriotisme , Mercure de France, mars 1891, reprod. in Le Joujou patriotisme et autres textes, Belle Page, 1927, puis Mille et une nuits, 2001, qui fit scandale en comparant la France et lAllemagne aux deux lobes dun mme cerveau europen). Il ne sest jamais agi que dillustrer par l la distinction et aucunement de fonder la thorie sur elle. Sil est donc un fondement classique, cest bien celui de lintrt protg, et sil doit y avoir une modernit, elle consisterait plutt, devant limprcision et linsuffisance de ce premier critre (sur quoi v. par ex. J. CHEVALLIER, Rapport gnral , in Inexistence, nullit et annulabilit des actes juridiques, Trav. Assoc. H. Capitant, Turin, 4-7 juin 1962, t. XIV, Dalloz, 1965, pp. 513-520, spc. p. 515), lui substituer, prsent que sest labore la thorie des vices du consentement, le critre pris de lobjet vici selon quil est question du contrat constitu ou du consentement constitutif (v. infra, no 10, in fine). Si la thse de JAPIOT (op. cit., supra, note 9) marque par ailleurs une rupture, ce nest pas sur le fondement mais sur la nature de la nullit, lauteur proposant dy voir un droit de critique plutt quun vice du contrat, ainsi que sur le caractre bipartite de la thorie, tirant de cette requalification largument pour en atomiser le rgime en une dizaine dactions diffrentes (op. cit., pp. 536-634). Or, ce tournant-l na jamais t pris par le droit.

  • 2 INTRODUCTION 5

    la mme poque, si lon y avait vu un intrt, pour sortir linexistence de lombre jete par

    la nullit.

    Cest de cette faon que jusquau XIXe sicle (14), lide dinexistence fut entirement

    confondue celle de nullit absolue (15), et que cette confusion se laisse voir encore parfois

    jusque dans le droit positif (16). Cest toujours elle qui se manifeste en effet travers le

    remploi dexpressions archaques dsignant le contrat comme nul et non avenu (17), lorsque (14) V. toutefois P.-T. DURAND DE MAILLANE, Dictionnaire de droit canonique et de pratique bnficiale, J.-B. Bauche, Paris, 1761, t. II, p. 325, qui proposait dj de distinguer nullits relatives, absolues et radicales, ces dernires naissant dun vice essentiel tel que le dfaut de pouvoir. (15) V. par ex. J. DOMAT, Les loix civiles dans leur ordre naturel, Coignard, Paris, 1689-1697, nouv. d., Le Clerc, Paris, 1777, 1re part., liv. Ier, tit. I, sect. V, I, p. 30 : Les conventions nulles sont celles qui, manquant de quelque caractre essentiel, nont pas la nature dune convention ; R.-J. POTHIER, Trait du contrat de mariage, J. Debure, Paris, et Vve Rouzeau-Montaut, Orlans, 1772, no 3, t. I, p. 4, in uvres de Pothier, par J. Bugnet, t. VI, Paris, 1846, p. 2 : un mariage, o lon naurait pas observ quelquune des formalits que les lois requirent pour sa validit, ou qui aurait t contract entre des personnes que les lois rendent inhabiles, nest pas un vritable mariage ; G.-J. FAVART, rapp. Trib., 13 pluv. an XII (in P. A. Fenet, op. cit. (supra, note 12), t. XIII, p. 319, art. 1131 1133, et J.-G. Locr, op. cit. (supra, ibid.), t. XII, pp. 429-430, no 27) : Ainsi il faut bien se pntrer du principe adopt par le projet : il divise les engagements dune manire carter toute difficult dans lapplication ; il nen distingue que de deux sortes ; savoir : les engagements auxquels la loi refuse toute existence qui puisse produire un effet, et ceux qui sont seulement susceptibles dtre rescinds. ; A.-P. JAUBERT, rapp. Trib., 14 pluv. an XII (in P. A. Fenet, op. cit., t. XIII, pp. 393-394, art. 1338, et J.-G. Locr, op. cit., t. XII, pp. 523-524, no 24) : il fallait disserter sur les nullits, distinguer ce qui tait nul radicalement, ou ce qui tait simplement nul ; ce qui tait nul absolument ou ce qui ne ltait que relativement [] Une ide vraie et simple, cest quon ne peut confirmer que ce qui a rellement exist, quoique manquant de force par quelque vice. De l il rsulte : 1. Quon ne peut en aucune manire confirmer ni ratifier de prtendues conventions dont la loi na jamais reconnu lexistence [] La loi a dclar quil ne pouvait y avoir de convention sans objet ou sans cause licite. Dans ce cas il ne peut donc y avoir lieu ratification. , et Th.-L. MOURICAULT, discours Corps lg., 17 pluv. an XII (in P. A. Fenet, op. cit., t. XIII, pp. 444-445, art. 1338, et J.-G. Locr, op. cit., t. XII, p. 585-586, no 52) : A lgard de la confirmation ou ratification, elle ne peut jamais valider les conventions dont la loi ne reconnat pas lexistence, et qui, en consquence, ne lient personne : telles sont (ainsi quil est ais de le conclure des diverses dispositions combines du projet) les conventions qui ont pour objet une chose mise hors du commerce ; celles qui nont point de cause, ou qui nen ont quune fausse, ou qui nen ont quune illicite. Si bien que lorsque le Premier consul imposa aux juristes alentour de distinguer, au cours de la discussion en Conseil dtat de larticle 4 du chapitre IV du titre Du Mariage, devenu larticle 146 du Code, les cas o il ny a pas de mariage et les cas o le mariage peut tre cass. (sance du 26 fruct. an IX, in P. A. Fenet, op. cit., t. IX, p. 16, et J.-G. Locr, op. cit., t. IV, p. 327, no 17), il ntait aucune raison pour eux de considrer quil fit autre chose que de procder intuitivement la division bipartite que connaissait la thorie dj classique des nullits. De ces travaux prparatoires, il rsulte donc que, contrairement ce que lon a voulu leur faire dire, on ne peut dduire de la lettre des articles 146, 1587 et 1592 du Code civil la volont des rdacteurs de consacrer une thorie de linexistence distincte de la nullit de plein droit. Comp. ainsi les termes de larticle 1592 avec le rapport de FAURE au Tribunat, 12 vent. an XII (in P. A. Fenet, op. cit., t. XIV, p. 158, et J.-G. Locr, op. cit., t. XIV, p. 198, no 23) : Le prix de la vente doit tre certain ; il est dtermin par les contractans. Les parties, au lieu den convenir elles-mmes, peuvent, la vrit, convenir quun tiers larbitrera ; mais il est ncessaire que ce tiers soit bien indiqu, et quil fasse larbitrage. Sil refuse de la faire, ou sil meurt avant de lavoir fait, la vente est nulle, moins que les parties ne saccordent sur une autre personne. Ajoutons que cest prcisment parce que la nullit absolue se qualifiait encore dinexistence que les exgtes eux-mmes purent la soustraire la lettre, pourtant gnrale, de larticle 1304 du Code civil pour lui appliquer le dlai de prescription de droit commun pos larticle 2262. (16) Pour la persistance de lassimilation de linexistence la nullit absolue, v. par ex. 1re civ., 20 oct. 1981, Bull., I, no 301 (D. 1983, p. 73, note. Ch. Larroumet ; RTD civ. 1983, p. 171, obs. J. Patarin), qui dcide que laction en nullit dune vente dpourvue de prix srieux ntant pas prescrite, la cour dappel avait souverainement estim que [] lacte tait inexistant ; 1re civ., 12 dc. 1984, pourvoi no 83-13350, Olagnon c. Soc. Engelbel Siemephone, jugeant quune cession convenue pour un prix de zro franc ne peut tre considre comme inexistante en raison dune nullit absolue ds lors que le cessionnaire se chargeait du passif ; ou encore 8 dc. 1998, Bull., I, no 353, qui rejette le pourvoi pour cette raison que la cour dappel ayant dcid que la vente tait nulle pour dfaut de prix srieux, cet acte na plus dexistence . (17) Lexpression, faussement tautologique, avait lorigine pour unique objet de distinguer la nullit absolue de la nullit relative, une poque o la terminologie tait encore mal fixe. V. par ex. J. BOUHIER, loc. cit. (supra, note 13), qui note que les nullits absolues peuvent tre opposes par toutes sortes de personnes, et quelles

    (suite p. suiv.)

  • 6 LINEXISTENCE DU CONTRAT 2

    lon parle d inexistence lgale ou juridique (18) au lieu de nullit (19), ou lorsque lon anantissent lActe essentiellement, & radicalement, en sorte quon le regarde comme non fait, & non avenu . Elle est reste pourtant constamment utilise depuis lors. On la trouve en particulier dans toutes les dcisions du Conseil dtat prononant la nullit dun acte administratif. Cest galement le sens que lui donne larticle L. 523-15 du Code de commerce en dclarant que Sont considres comme nulles et non avenues toutes conventions contraires aux dispositions du prsent chapitre , relatif au warrant htelier. Mais lorsquon la relve dans les textes de procdure, la mme expression ne parat plus dsigner quune simple caducit des jugements concerns. V. ainsi C. proc. civ., art. 1419, propos de linjonction de payer suivie dune absence des deux parties laudience ; ou encore C. pn., art. 132-35, 132-39 et 132-52, lesquels rputant la condamnation non avenue ne font en ralit que la priver dexcution, sans mme en carter tous ses effets puisquelle sert encore comme premier terme de la qualification de rcidive (avis C. cass., 26 janv. 2009). (18) Comp. cep. pour le droit administratif, o cette expression viserait une inexistence vritable, infra, no 6, spc. note 110. (19) V. dj J.-B. PERRIN, Trait des nullits de droit en matire civile, G. Neveu, Lons-le-Saulnier, 1816, p. 37 : La nullit dun acte est la non existence de cet acte aux yeux de la loi ; V. MARCAD, Explication thorique et pratique du Code Napolon, 5e d., Cotillon, t. IV, 1854, no 871, pp. 651-652 : Nous avons dj dit quil faut avoir grand soin de distinguer lacte rigoureusement nul, cest--dire sans existence lgale, de lacte nul dans le sens impropre de ce mot, cest--dire soumis une cause qui peut le faire annuler ; en dautres termes, lacte nul, de lacte annulable. Or, cest seulement des obligations annulables, et non des obligations proprement nulles et inexistantes, que soccupe notre section ; A.-M. DEMANTE, Programme du Cours de droit civil franais fait la Facult de droit de Paris, A. Gobelet, t. II, 1831, no 774, p. 360, puis Cours analytique de Code civil, 2e d., par E. Colmet de Santerre, Plon, t. V, 1883, no 262, p. 477 : Lacte nul est un simple fait qui na point dexistence lgale ; F. LAURENT, Principes de droit civil, 3e d., A. Marescq an, Paris, 1878, t. I, no 71, p. 106 : Ce mot [nul] a donc deux significations : dordinaire il indique un acte annulable, et parfois un acte qui na pas dexistence juridique. Il y a des auteurs qui appellent ce dernier non existant ou inexistant ; le terme est plus expressif, mais il nest pas franais ; R. SALEILLES, De la dclaration de volont Contribution ltude de lacte juridique dans le Code civil allemand, F. Pichon, 1901, art. 125, no 3, p. 79 : Dans tous les cas, lorsque la loi impose une solennit de ce genre, il va de soi quelle na pas en vue seulement la preuve de lacte, mais son existence juridique. Si donc la forme fait dfaut, lacte est nul ; et encore G. MARTY et P. RAYNAUD, Droit civil Les obligations, 2e d., t. II, Le rgime, collab. Ph. Jestaz, Sirey, 1989, no 191, p. 174 : Lobligation nulle na pas dexistence juridique . AUBRY et RAU eux-mmes nchappent pas cette tendance. V. ainsi Cours de droit civil, 4e d., Marchal et Billard, Paris, t. IV, 1871, 344, p. 319-320 : Les faits contraires la loi, lordre public, ou aux bonnes murs, ne peuvent former lobjet dune convention ayant une existence lgale. Cest ainsi quon doit considrer comme non existant aux yeux de la loi, les traits ayant pour objet une entreprise de succs dramatiques, et les conventions de socit formes pour lexploitation dune maison de jeu, ou pour des oprations de contrebande lintrieur. Lexpression est l encore rcurrente en jurisprudence, o lon observe quelle semploie plus particulirement lorsque les juges entendent condamner de la faon la plus ferme les actes soumis leur examen. V. not. les nombreuses dcisions relatives aux pactes sur succession future, dont Req., 19 fvr. 1929, DH 1929, p. 162 : Attendu que cette convention [] tait nulle de plein droit et par suite dpourvue de toute existence lgale . Et au sujet de la pratique qui consistait pour les pres conclure le contrat de mariage au nom de leur fille : Req., 6 avril 1858, DP 1858, I, p. 224 ; S. 1959, I, col. 17, qui relve que le contrat de mariage de la fille Vaysse a t pass en labsence de celle-ci et seulement en prsence de son pre qui sest port fort pour elle ; que cette absence de la future pouse [] constitue une nullit radicale et dordre public qui enlve au prtendu contrat de mariage son existence lgale ; puis Civ., 6 nov. 1895, S. 1896, I, p. 5, note Ch. Lyon-Caen ; DP 1897, I, p. 25, en mme sens ; et encore Trib. civ. Yvetot, 23 mars 1952, D. 1952, p. 503 : Attendu quil est de doctrine et de jurisprudence constante que le contrat de mariage rdig en labsence de lun des futurs poux, ou pass par un incapable, est entach dune nullit absolue et dordre public ; que comme consquence de son annulation, le contrat de mariage est rput n'avoir jamais exist ; que les poux se trouvent dans la mme situation que sils staient maris sans contrat [] ; que, par voie de consquence ncessaire, les donations renfermes dans le contrat de mariage inexistant sont inexistantes . V. gal. Civ., 16 nov. 1932 (DH 1933, p. 4 ; S. 1934, I, p. 1, note P. Esmein), qui constate linexistence lgale dune vente atteinte de nullit absolue pour dfaut de prix srieux ; Civ., 4 aot 1952, Bull., I, no 260, jugeant l acte dpourvu dexistence lgale et frapp de nullit absolue , pour la mme cause ; Civ., 1re sect., 17 dc. 1959, Bull., I, no 546 ; D. 1960, p. 294, qui en fait son principe liminaire : Attendu que la vente nulle pour dfaut de prix, acte dpourvu dexistence lgale, nest susceptible ni de confirmation ni de ratification ; Crim., 13 nov. 1968, Bull., no 294, qui estime que la cour dappel ntait pas dans la ncessit de prononcer elle-mme la nullit dune pice, dont linexistence lgale avait dj t affirme par la Cour de cassation ; Com., 30 nov. 1983, Bull., IV, no 333 (Gaz. Pal. 1984, II, p. 675, note J. Calvo), qui se fend de ce principe : vu les articles 1129 et 1338 du Code civil, attendu que la vente nulle pour dfaut de prix, acte dpourvu dexistence lgale, nest susceptible ni de confirmation, ni de ratification ; 28 avril 1987, pourvoi no 86-16084 (RTD civ. 1987, p. 746, obs. J. Mestre), qui, visant larticle 1304, alina 1er, du Code civil, proclame son tour : Attendu que les actes dont la nullit est absolue tant dpourvus dexistence lgale ne sont susceptibles ni de prescription ni de confirmation . On la trouve encore dans la

    (suite p. suiv.)

  • 2 INTRODUCTION 7

    affirme que ce qui est nul est rput navoir jamais exist (20). Car ce qui est nul nest pas

    prcisment non avenu : il est bien cens y avoir eu un contrat, mme en droit, mais

    simplement priv de ses effets. Pour la mme raison, il faudrait tout autant se dprendre de

    lhabitude de rputer non crites des clauses dont on ne fait que constater la nullit, cette

    autre sanction suffisant justifier la suppression sans quil soit besoin de feindre

    linexistence (21).

    jurisprudence du Conseil dtat et dans celle de la Cour de justice de lUnion europenne (v. infra, no 6, in medio et note 132). Dans le meilleur des cas, cette sanction dinexistence lgale ou juridique soppose chez certains auteurs celle dinexistence naturelle ou matrielle, ou encore factuelle, de faon distinguer alors la nullit absolue de linexistence vritable. V. not. en ce sens A. TISSIER, note sous Req., 30 dc. 1902, S. 1903, I, p. 259, 3, in fine, qui suggre de limiter la thorie de linexistence aux seuls cas dinexistence de fait. Rappr. C. BUFNOIR, Proprit et contrat, A. Rousseau, 1900, XLVIIe leon, p. 649 : Il peut se faire dailleurs quil ny ait mme pas de contrat existant en fait, et alors il ny a pas demander la nullit ; on na pas faire proclamer lannulation de ce qui nexiste pas en fait. Si, au contraire, les lments de fait ncessaires la formation du contrat se trouvent runis, le contrat a une existence de fait, mais il sera inexistant en droit . Mais mme alors, la distinction nest pas exempte de critique. V. ainsi G. COHENDY, Des intrts de la distinction entre linexistence et les nullits dordre public , RTD civ. 1914, pp. 33-68, spc. p. 38 : Les auteurs voudraient-ils insister, disant que linexistence est lgale ? Mais son origine, sa raison dtre indiquent suffisamment quelle ne peut tre que naturelle : toute inexistence artificielle verse dans la catgorie des nullits ; J. HAUSER, Objectivisme et subjectivisme dans l'acte juridique, th. Paris, 1969, LGDJ, Bibl. dr. priv, t. 117, 1971, no 73, p. 109 : Il est bien vident quen passant de linexistence naturelle et absolument ncessaire des cas dinexistence lgale sans rapport avec lide dorigine on sengageait dans une voie sans issue ; L. MAYER, Actes du procs et thorie de lacte juridique, th. Paris I, 2007, IRJS, Inst. A. Tunc, t. 20, 2009, no 306, p. 337 : partir du moment o lacte existe matriellement, il existe galement juridiquement, et ce, quelle que soit la gravit du vice qui lentache. ; puis no 317, p. 349 : Linexistence, en droit, ne peut dsigner que labsence dintgration dun objet matriel dans une catgorie juridique ; ce ne peut tre quune inexistence au sens figur, une inexistence juridique. Linexistence dite matrielle ne peut donc dsigner au mieux quune catgorie des cas dans lesquels il est envisageable de constater une inexistence juridique. (20) V. dj Ch. TOULLIER, Le droit civil franais suivant lordre du Code, 5e d., J. Renouard et al., t. VII, 1830, no 518, p. 614 : Tout acte qui ne contient pas les formalits indispensables pour remplir le but de son institution, le but que la loi sest propos, est imparfait et nul, il doit tre considr comme sil n'avait pas exist. ; puis t. VIII, no 321, pp. 475-476 : Nul signifie proprement ce qui nexiste pas ; F. MOURLON, Rptitions crites sur le Code civil, 7e d., t. II, 1866, no 1481, p. 833 : Nullit est le mot dont on se sert pour exprimer linexistence dun contrat qui a paru se former, mais qui, en ralit, nexiste point . Et encore H., L. et J. MAZEAUD et F. CHABAS, Leons de droit civil, t. II, vol. 1, Obligations, 9e d., par F. Chabas, Montchrestien, 1998, no 295-2, p. 299 : ce qui va tre opposable tous est, dans un cas, que lacte (annul) na pas dexistence ; Ch. LARROUMET, Droit civil, t. III, Les obligations Le contrat, 1re part., Conditions de formation, 6e d., Economica, 2007, no 532, p. 541 : Ce qui nest pas valable est inexistant. , puis ce qui est nul est considr comme nayant jamais exist. La jurisprudence est peu prs aussi explicite. V. ainsi CA Toulouse, 21 janv. 1885, DP 1886, II, p. 73, note E. Glasson : la nullit rsultant du dfaut de consentement ne doit par tre confondue avec le vice du consentement ; dans le premier cas, le contrat est nul de plein droit, rput inexistant, tandis que, dans le second, il est seulement annulable ; Soc., 7 nov. 1995, Bull., V, no 292 : un contrat atteint de nullit tant rput navoir jamais eu dexistence, les choses doivent [] tre remises dans ltat dans lequel elles se trouvaient avant cette excution ; 1re civ., 15 mai 2001, Bull., I, no 133 (D. 2001, SC, p. 3086, obs. J. Penneau), qui en vient viser le principe selon lequel ce qui est nul est rput navoir jamais exist pour exercer sa censure. Jusqu sa conscration en toutes lettres dans lAvant-projet de rforme du droit des obligations, dir. P. Catala, Doc. fr., 2006, art. 1130-3, al. 1er : La convention nulle est cense navoir jamais exist. Le droit allemand chappe pour sa part cet autre travers. V. sur ce point C. WITZ, Droit priv allemand 1. Actes juridiques, droits subjectifs, Litec, 1992, no 403, p. 319 : Il nen demeure pas moins que lacte juridique frapp de nullit a vu le jour. La nullit ne signifie pas que cet acte est un nullum , un acte inexistant ; S. GAUDEMET, La clause rpute non crite, th. Paris II, 2004, Economica, Rech. jur., vol. 13, 2006, no 139, p. 79 : Les auteurs allemands semploient dailleurs souligner que lacte nul de plein droit nest pas un nant juridique ; il est un acte auquel le droit positif refuse de reconnatre force obligatoire . (21) Si la lettre de larticle 900 du Code civil sexpliquait encore par lpoque dans laquelle elle sest inscrite, il est plus problmatique de la retrouver larticle 1244-3 du mme Code (rdact. L. 91-650 du 9 juill. 1991), ou de lire encore entre autres exemples larticle 1446 du Code de procdure civile que Lorsquelle est nulle, la clause compromissoire est rpute non crite. (dcr. 81-500 du 12 mai 1981). On peut difficilement, dans ces conditions, reprocher la Cour de cassation de juger quune clause rpute non crite [est] cense navoir jamais exist : 3e civ., 9 mars 1988, Bull., III, no 54 ; D. 1989, p. 143, note Ch. Atias ; JCP 1989, II, 21248, note G. V.

    (suite p. suiv.)

  • 8 LINEXISTENCE DU CONTRAT 3

    La pesanteur de cet amalgame historique accablera durablement les tentatives

    autonomistes qui devaient poindre ds les premiers commentaires du Code civil (22).

    3 . Une notion mal ne Probablement inspirs par une rapide et incertaine allusion de ZACHARI (23), AUBRY et RAU laborrent les premiers la thorie de linexistence (24).

    Envisage dabord dans ltude gnrale des actes juridiques, linexistence pouvait encore

    ny valoir classiquement que par assimilation la nullit de plein droit (25). Mais au chapitre

    du mariage, la notion accde nettement, et pour la premire fois, son autonomie.

    Pourtant, les raisons qui la firent natre prcipitrent aussi son dclin. Demble en effet,

    la thorie fut afflige dune logique fonctionnelle : outrepasser les limites de la nullit de

    plein droit, dans ses causes comme dans son rgime (26).

    4 . Linexistence outre la nullit textuelle Comme toujours, la thorie ne fut appele que pour rpondre un besoin : on le trouva dans le principe Pas de nullit sans

    texte. Il assez symptomatique cet gard que la thorie de linexistence soit ne l o lon

    crut voir rgner ce principe, de faon admettre encore la nullit dans le silence de la loi (27).

    Sur la notion, v. rcemment S. GAUDEMET, La clause rpute non crite, prc. (supra, note prc.). Et sur son rapport avec linexistence, v. infra, no 143, in medio, spc. note 289. (22) Pour nvoquer que les thses de doctorat, il faudra attendre le dbut du XXe sicle pour que linexistence y soit vise en tant que concept propre. Comp. ainsi Ph. BOURGEON, Distinction de linexistence et de lannulabilit des actes juridiques, th. Dijon, 1885 ; E. HARTEMANN, tude sur la distinction des actes inexistants et des actes annulables, th. Nancy, 1889 ; J. PIZE, Essai dune thorie gnrale sur la distinction de linexistence et de lannulabilit des contrats, th. Lyon, 1897, qui, tous occups un examen historique de la notion, nvoquent jamais derrire le mot que la nullit de plein droit. La premire tude traiter finalement du sujet en propre est celle de Jules LOYER, Les actes inexistants, th. Rennes, 1908, et il faudra attendre presque aussi longtemps pour quune nouvelle et ultime thse sy consacre son tour : v. G. TAORMINA, Contribution ltude de lapparence et de linexistence en matire contractuelle, th. Paris XII, 1991. Deux thses en deux sicles : voici donc, en tout et pour tout, quoi se rsume, en droit priv, la contribution doctorale la thorie de linexistence. (23) K. S. ZACHARI, Handbuch des franzsichen Civilrechts, E. Mohr, Heidelberg, 1808, 4e d., 1837, t. III, 451, p. 13 (trad., rev. et augm. par Ch. Aubry et Ch. Rau, Cours de droit civil franais, F. Lagier, Strasbourg, 1839). Comp. 5e d., par A. Anschtz, Heidelberg, 1853, trad., annot. et rtabli suivant lordre du Code par G. Mass et Ch. Verg, Le Droit civil franais par K.-S. Zachari, A. Durand, Paris, t. I, 1854, 108, p. 166, note 3. (24) Mme si lide tait dans lair : v. ainsi la plaidoirie de lavocat HENNEQUIN expose au cours de laffaire Martin c. Juliot qui provoquera le premier des arrts que la Cour de cassation eut rendre sur la question du caractre littral des nullits du mariage (v. infra, note 35), cite par Ph.-A. MERLIN, Rpertoire universel et raisonn de jurisprudence, 5e d., Garnery & Roret, t. X, 1827, vo Mariage, Sect. VI, II, art. 184, quest. 6, p. 689 : lart. 25 [du Code civil] ntablit pas une nullit de Mariage, mais il soppose ce quil puisse se former un Mariage, mme apparent, avec lindividu frapp de mort civile. Ainsi, dans lhypothse de cet article, il ny a pas de Mariage faire annuler, puisquil ny a pas de lien, pas de contrat, rien enfin qui puisse devenir lobjet dune action en nullit. Il ne sagit que de rapporter la condamnation pour constater que le Mariage na jamais exist . (25) Ch. AUBRY et Ch. RAU, op. cit. (supra, note 23), t. I, 37, pp. 66-67, et t. II, passim, not. 306, p. 312. Adde, leur suite, G. MASS et Ch. VERG, op. cit. (ibid.), t. I, 35, p. 45, et t. III, 579, pp. 469-470, puis 613, p. 552, et note 1. La plupart de ces dveloppements sont absents du manuel de ZACHARI. (26) Sur ce constat, v. par ex. G. TAORMINA, op. cit. (supra, note 22), qui introduit ainsi son sujet : La thorie de linexistence difie au XIXe sicle partir du postulat tir de la maxime pas de nullit sans texte , doit finalement sa faillite une cause unique et gnrale que lon peut ainsi rsumer : la recherche systmatique et sans concession de loriginalit en marge de la thorie gnrale des nullits. (27) V. Ch. AUBRY et Ch. RAU, op. cit. (supra, note 23), t. III, 1839, 450, p. 211 : La distinction que nous avons toujours cherch maintenir entre les conditions essentielles lexistence dun acte juridique et les conditions simplement ncessaires sa validit, prsente, non-seulement pour la thorie, mais encore au point de vue pratique, une importance toute particulire dans la matire qui nous occupe, raison du principe que le juge ne peut, en fait de mariage,

    (suite p. suiv.)

  • 4 INTRODUCTION 9

    Or, si linexistence mritait son accession, le prtexte avanc tait tout fait spcieux, aussi

    vrai que la proscription des nullits virtuelles na jamais eu le rle exacerb quont voulu lui

    prter les partisans de linexistence.

    Cette rgle, selon laquelle les nullits ne se supplent point, procde dune double

    prohibition : linterdiction faite au juge, dune part, de dcouvrir des conditions nouvelles

    de validit au-del des textes et, dautre part, de frapper de nullit une prescription que la

    loi aurait impose sans mention de cette sanction ds lors quune autre aurait t

    envisageable, voire spcialement envisage. Tels furent les deux moyens employs par le

    droit canonique lorigine de cette prohibition pour assurer la prsance de lglise sur

    lacte fondateur du mariage : accaparer linstitution en rejetant tout empchement ne

    relevant pas du droit canonique, et moraliser sa formation en graduant la valeur des vices

    pouvant laffecter (28). Au premier chef, elle multiplia les empchements dirimants, causes de

    nullit ; au second, elle les distingua des empchements simplement prohibitifs, autrement

    sanctionns. Spcialement, on posa la prsomption selon laquelle un empchement au

    mariage, dans le silence gard par les textes sur la nature de sa sanction, devait tre

    considr comme simplement prohibitif plutt que dirimant (29).

    Mais les historiens ont assez relev que le principe des nullits textuelles, sous quelque

    forme quil prt, neut jamais un caractre absolu en ce domaine (30), les auteurs, et plus

    encore les juges, ayant toujours admis des causes de nullits, dites substantielles ,

    naturelles , ou encore rationnelles , au-del des textes (31). Ce pseudo-principe avait

    seulement pour objet de limiter autant que possible luvre cratrice des juges en leur

    imposant en particulier de relever en quoi la condition ignore tait particulirement

    ncessaire lacte, malgr le silence des textes.

    admettre que des nullits littrales, et que le droit de proposer une nullit de mariage, nappartient quaux personnes auxquelles la loi ouvre une action cet effet. (28) Sous ces deux aspects, le principe de prohibition des nullits virtuelles esquisse ses linaments en droit canonique ds le Ve sicle, avant de spanouir la fin du XIe sicle dans luvre thorique dYves de Chartres, puis de stablir dfinitivement partir du XIIIe sicle. Sur cette volution, v. A. ESMEIN, Le mariage en droit canonique, 2e d., par R. Gnestal et J. Dauvillier, Sirey, 1929-1935, passim ; A. VILLIEN, Lempchement de mariage. Sa notion juridique daprs lhistoire , Canon. contemp. 1903, 1re part., pp. 420-433 ; P.-H. BERTON, La conception de la nullit de mariage en droit civil franais et en droit canonique moderne, th. Lille, Sirey, 1938, pp. 15-19 ; P. PETOT, Le mariage et ses effets civils, DES Histoire du droit priv, Les Cours de droit, Paris, 1953-1954, p. 19, reprod. in Histoire du droit priv franais La famille, Loysel, 1992, p. 255 ; J. GAUDEMET, Le mariage en Occident, Le Cerf, 1987, pp. 195-222. (29) Sur quoi v. A. ESMEIN, op. cit. (supra, note prc.), t. I, par R. Gnestal, Sirey, 1929, p. 81. (30) V. par ex. A. VILLIEN, art. prc. (supra, note 28), 3e part., pp. 638-647, spc. pp. 644-645, qui relve lexistence dempchements dirimants de source coutumire, sagissant en particulier de la disparit de cultes. V. gal. Ch. LEFEBVRE, Cours de doctorat sur lhistoire du droit matrimonial franais Le lien de mariage, 2nd fasc., Sirey, 1923, p. 237. (31) V. P.-H. BERTON, op. cit. (supra, note 28), pp. 25-26, et les autorits thologiennes cites par lauteur. Ce nest quavec la codification du 27 mai 1917 (CIC 1917, can. 1038 1041) que le principe de la nullit textuelle saffirma pour la premire fois, avant dtre confirm par le nouveau code de droit canonique promulgu le 25 janvier 1983 (CIC 1983, can. 1075 et 1076). Mais mme alors, on a pu constater, pour y suppler, que le Codex na rien spcifi lendroit du dfaut de consentement par suite de folie. Il va de soi que le mariage est nul. : J. DAUVILLIER, in A. Esmein, op. cit. (supra, note 28), t. II, 1935, p. 440.

  • 10 LINEXISTENCE DU CONTRAT 4

    son tour, lautorit royale, se saisissant de lenjeu matrimonial, entreprit de reprendre

    son compte la thorie des empchements canoniques pour circonscrire ceux-ci aux seuls

    empchements de droit civil ainsi composs (32). La thorie canonique passe en droit civil,

    celui-ci adopta cette mme prohibition des nullits virtuelles de faon assurer lexclusivit

    du pouvoir sculier sur linstitution du mariage et mettre en particulier un terme la

    jurisprudence des parlements qui continuaient sanctionner de nullit le mariage affect

    dune interdiction de pur droit canonique. La Rvolution paracheva cette prise de

    possession (33).

    On peut donc affirmer avec certitude que lintention des codificateurs fut bien dexclure

    tout autre empchement au mariage que procdant du droit civil, et en dduire leur volont

    de circonscrire ses causes de nullit celles tires du Code. Mais rien, sauf un culte

    rvolutionnaire de la loi confin au temps qui la vu prosprer, ne pouvait autoriser croire

    que ces causes dussent tre trouves dans sa lettre plutt que dans son esprit (34).

    Pour lenvisager nanmoins dans le silence des textes, il fallut se satisfaire dun paradoxe :

    se dtacher de la lettre muette du Code pour dcouvrir chez les rdacteurs lintention de sy

    tenir absolument (35). Du reste, un tel raisonnement navait plus voir avec le seul mariage

    (32) V. not. ord. Henri III, Paris, mai 1579, dite Ordonnance de Blois, imposant dans son article 40 la prsence du cur la clbration du mariage aprs que le Concile de Trente en eut dlibr mme fin (dcr. De clandestinis, dit Tametsi, 11 nov. 1563) ; et dit Henri IV, Paris, dc. 1606, art. 12, prcisant que toute contravention larticle 40 de lOrdonnance de Blois serait sanctionne par la nullit du mariage. (33) Const. 3 sept. 1791, tit. II, art. 7 : La loi ne considre le mariage que comme contrat civil. Le Pouvoir lgislatif tablira pour tous les habitants, sans distinction, le mode par lequel les naissances, mariages et dcs seront constats ; et il dsignera les officiers publics qui en recevront et conserveront les actes. Ce quil fera par la loi du 20 septembre 1792, dont le titre IV rglemente le mariage. (34) Restriction qui devait devenir dautant moins supportable lorsque, au jour de labolition du divorce (L. 8 mai 1816), aucun autre moyen de sparation que celui tir de la nullit du mariage ne fut plus ouvert aux poux malheureux. Cest du reste cette mme prohibition du divorce qui explique la profusion historique des causes de nullit du mariage chrtien. (35) Procde ainsi de ce paralogisme largument prtendument exgtique daprs lequel la rdaction dun chapitre spcialement ddi aux demandes en nullit de mariage impliquerait la volont des rdacteurs de limiter les causes de nullit celles textuellement prononces au sein de ce chapitre. Usant de cet argument, v. par ex. F. LAURENT, op. cit. (supra, note 19), t. II, nos 430 432, pp. 551-554 et nos 440 447, pp. 562-572 ; Th. HUC, Commentaire thorique et pratique du Code civil, F. Pichon, t. II, 1892, no 124, pp. 147-149 ; G. BAUDRY-LACANTINERIE et M. HOUQUES-FOURCADE, Trait thorique et pratique de droit civil, dir. G. Baudry-Lacantinerie, 3e d., L. Larose et L. Tenin, t. III, Des personnes, t. III, 1908, no 1683, pp. 307-308, et no 1700, pp. 322-323 ; L. JOSSERAND, Cours de droit civil positif franais, 3e d., Sirey, t. I, 1937, no 787, p. 436. Contra, rappelant que lintention des rdacteurs fut plus vraisemblablement et plus modestement de se contenter de restreindre la qualit agir en nullit du mariage, v. J. LOYER, op. cit. (supra, note 22), pp. 47-48 ; P.-H. BERTON, op. cit. (supra, note 28), p. 27 ; M. PLANIOL, op. cit. (supra, note 9), no 995, p. 329 ; A. ROUAST, in Trait pratique de droit civil franais, dir. G. Ripert, 2e d., LGDJ, t. II, La famille, 1952, no 246, pp. 196-197. De fait, nulle part les travaux prparatoires nvoquent une restriction littrale des causes de nullits. sen tenir largument exgtique, lintitul du chapitre IV tait pourtant assez explicite : il ne sagit ni des causes de nullits, ni des nullits elles-mmes, mais bien des demandes en nullits. En ce sens, v. encore J. LOYER, loc. cit. ; A. ROUAST, loc. cit. ; G. MARTY et P. RAYNAUD, Droit civil Les personnes, 3e d., par P. Raynaud, Sirey, 1976, no 110, p. 135 ; H., L. et J. MAZEAUD et F. CHABAS, Leons de droit civil, t. I, vol. 3, La famille, 7e d., par L. Leveneur, Montchrestien, 1995, no 790, p. 156 ; Ph. MALAURIE et H. FULCHIRON, Droit civil La famille, 3e d., Defrnois, 2009, no 254, p. 136. Des trois dcisions toujours cites comme ayant consacr le principe de la nullit littrale, aucune nest loquente, la premire parce quelle ne se rfre nulle part cette rgle, et les deux autres parce que largument y est invoqu de faon tout fait incidente, surrogeant celui, principal, pris de la limitation du nombre de titulaires de laction en nullit au chapitre consacr : Req., 9 janv. 1821, S. 1821, I, 127, et nouv.

    (suite p. suiv.)

  • 4 INTRODUCTION 11

    mais avec lensemble des dispositions du Code civil, et lon na jamais srieusement

    prtendu sous lempire de celui-ci que tout acte juridique ne pourrait tre annul qu

    condition que la lettre de la loi fulmint expressment cette sanction (36). Seule une dvote

    passion prouve pour toute forme de rgle crite a pu persuader de lexistence dun

    principe de nullit littrale en ce domaine.

    Cest dire que, historiquement, en droit civil comme en droit canonique, les nullits du

    mariage ont toujours pu tre aussi bien virtuelles que textuelles. Le juge sous le Code ne

    peut certes plus crer de cause de nullit nouvelle hors la loi, mais il peut toujours linfrer

    juridiquement du texte lui-mme, pris dans son esprit, au-del de sa lettre (37). Et si la condition

    coll., t. VI, 1819-1821, I, 359 ; 12 nov. 1839, S. 1839, I, 826 ; 12 nov. 1844, DP 1845, I, p. 98, et S. 1845, I, p. 246, note L.-M. Devilleneuve. Il a fallu laffaire des maris de Montrouge, pour que, en pure opportunit, la Cour de cassation vise le principe pour seul motif de dcision : Civ., 7 aot 1883, DP 1884, I, p. 5, concl. Barbier, et note Th. Ducrocq ; S. 1884, I, p. 5, note J.-E. Labb. Quant aux dcisions contraires, elles sont innombrables : v. infra, note 37. (36) Le projet de livre prliminaire rdig par PORTALIS portait ce principe (tit. IV, art. 9) : Les lois prohibitives emportent peine de nullit, quoique cette peine ny soit pas formellement exprime. La disposition a t carte avec le reste du livre pour avoir t juge inutile, pchant par vidence. V. dj dans le mme sens J. DOMAT, op. cit. (supra, note 15), liv. prl., tit. I, sect. I, XX, p. 4 : Si une loi dfend, ou en gnral toutes personnes, ou en particulier quelque sorte de personnes, de certaines conventions, de certains commerces, ou quelle fasse dautres dfenses quelles quelles soient, tout ce qui sera fait contre ses dfenses avec toutes ses suites, sera ou annul ou rprim selon la qualit des dfenses, & celle de la contravention, quand mme la loi nexprimeroit pas la peine de nullit, & quelle laisserait les autres peines indtermines. (37) En ce sens, avant Aubry et Rau, v. A. BIRET, Trait des nullits de tous genres, A. Bertrand, Paris, 1821, t. I, pp. 100-101, qui crit propos de labsence de signature des poux : La loi ne prononce pas, il est vrai, la nullit ; mais ne sort-elle pas de la nature des choses mmes ? ; C.-E. DELVINCOURT, Cours de Code civil, Delestre-Boulage, 1824, t. I, Notes et explications, Page 65 , note 4, pp. 125-127, et Page 74 , note 2, p. 143 ; Ch. TOULLIER, op. cit. (supra, note 20), t. I, 1830, nos 553 et 554, pp. 464-465, qui nglige suffisamment quelque principe de nullit littrale pour voir, sans texte, et sans discussion, une cause de nullit de mariage dans labsence dautorisation du roi lunion du prince, ou dans la mort civile de lpoux consentant ; F. A. VAZEILLE, Trait du mariage, de la puissance maritale et de la puissance paternelle, Nve, t. I, 1825, no 240, pp. 372-374. Et aprs lexpos des deux auteurs strasbourgeois, v. encore, estimant que certaines causes de nullit, souvent qualifies de substantielles, chappent toujours au prtendu principe de nullit textuelle, A.-M. DEMANTE, Cours analytique de Code civil, 1re d., G. Thorel, t. I, 1849, nos 259 260 bis, VI, pp. 353-355 ; D. et A. DALLOZ, Jurisprudence gnrale Rpertoire mthodique et alphabtique, 2e d., t. XXXI, 1854, vo Mariage, no 441, pp. 282-283, et no 445, p. 284 ; L. BOULY DE LESDAIN, Des nullits de mariage en droit romain et en droit franais, th. Paris, 1890, pp. 281-282, qui prne des nullits de bon sens ; R. JAPIOT, op. cit. (supra, note 9), pp. 41-42, note 3 ; J. LOYER, op. cit. (supra, note 22), pp. 207-208 : point ntait besoin dinventer la thorie de linexistence, pour luder la difficult que les auteurs staient cre eux-mmes en tablissant le principe dinterprtation stricte du chapitre IV du titre du mariage. Ne valait-il pas mieux ne pas dresser cette inutile barrire ? ; A. COLIN et H. CAPITANT, op. cit. (supra, note 9), no 166, pp. 187-189 ; Ch. BEUDANT, Cours de droit civil franais, publ. R. Beudant et P. Lerebours-Pigeonnire, 2e d., A. Rousseau, t. II, Ltat et la capacit des personnes, collab. H. Batiffol, 1936, nos 599 601, pp. 482-485, spc. no 599, p. 483 : Une interprtation restrictive ne peut pas exclure une interprtation raisonnable. ; P.-H. BERTON, op. cit. (supra, note 28), pp. 30-33 ; A. ROUAST, op. cit. (supra, note 35), no 247, p. 197 : il faut examiner daprs tous les procds dinterprtation si la nullit doit tre admise bien que non expressment formule. Linterprte doit, lexemple du lgislateur lui-mme nadmettre que trs difficilement la nullit. ; G. MARTY et P. RAYNAUD, Les personnes, prc. (supra, note 35), loc. cit. : On peut admettre des nullits virtuelles mais seulement pour des raisons vraiment imprieuses. ; F. TERR et D. FENOUILLET, Droit civil Les personnes. La famille. Les incapacits, Dalloz, 7e d., 2005, no 417, p. 369. Chez les tenants mme de la nullit littrale, on admet le caractre relatif de la rgle. V. ainsi L. JOSSERAND, op. cit. (supra, note 35), no 788, p. 437 : il sagit seulement dune direction gnrale qui cde parfois devant des ncessits plus fortes quelles . Quant la jurisprudence, la Cour de cassation a pu considrer que le mariage du mort civil devait tre sanctionn de nullit au fondement de larticle 25 du Code civil de 1804 (Civ., 16 mai 1808, S. 1808, I, 297, et nouv. coll., t. VI, an XIII-1808, I, p. 528), alors que ni cette disposition ni le Chapitre IV du Titre Du mariage nnonaient expressment cette sanction ; ou que devait tre annul le mariage contract ltranger en violation des formes exiges au lieu de clbration, procdant pour ce faire une interprtation a contrario de

    (suite p. suiv.)

  • 12 LINEXISTENCE DU CONTRAT 4

    est pose par un texte, qui nindiquerait aucune sanction de nullit, le juge sera seulement

    invit envisager dabord la disposition comme simplement prohibitive avant dy voir un

    empchement dirimant (38), plus forte raison si le texte dicte dj une autre sanction (39).

    Fictif en matire de mariage, le principe de prohibition des nullits non crites se

    dcouvre sous un autre jour en procdure civile. On lui trouve traditionnellement ici une

    origine dans la grande ordonnance de Colbert de 1667 rformant la procdure civile.

    La lecture de ses dispositions veille pourtant le doute : si ce code a nettement entendu

    rendre obligatoires les nullits quil ordonnait, et mettre fin de cette faon la pratique des

    nullits dites comminatoires, abandonnes la discrtion des juges sous couvert dquit,

    nulle part il na prtendu leur interdire de relever linverse dautres causes de nullits que

    celles expressment dclares (40). Le