L’Education par les his toires chez la Comtesse de...

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République Algérienne Démocratique et Populaire Université Abou-Bakr Belkaid Tlemcen Faculté des Lettres et des Langues Etrangères Département de Français Ecole Doctorale Algéro-Française Mémoire de Magistère Thème : L’Education par les histoires chez la Comtesse de Ségur Essai de recherches en littérature enfantine Option : Science des textes littéraires Présenté par : Mme BOUGHAZI Fatima Zohra née DALI YOUCEF Soutenu le 22-11-2011 Jury de soutenance : Prof. DERRAGUI Zoubir Université de Tlemcen Président Dr. HADJADJ Aoul Mohammed (MC’A’) Université de Tlemcen Rapporteur Prof. MOSTEFAOUI Abdeldjelil Université de Tlemcen Examinateur Dr. MEHADJI Rahmouna (MC’A’) Université d’Oran Examinatrice Dr. SARI Ali Hikmet (MC’A’) Université de Tlemcen Examinateur Année universitaire 2010/2011

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République Algérienne Démocratique et Populaire

Université Abou-Bakr Belkaid

Tlemcen

Faculté des Lettres et des Langues Etrangères

Département de Français

Ecole Doctorale Algéro-Française

Mémoire de Magistère

Thème :

L’Education par les histoires chez la Comtesse de Ségur

Essai de recherches en littérature enfantine

Option : Science des textes littéraires

Présenté par :

Mme BOUGHAZI Fatima Zohra née DALI YOUCEF

Soutenu le 22-11-2011

Jury de soutenance :

Prof. DERRAGUI Zoubir Université de Tlemcen Président

Dr. HADJADJ Aoul Mohammed (MC’A’) Université de Tlemcen Rapporteur

Prof. MOSTEFAOUI Abdeldjelil Université de Tlemcen Examinateur

Dr. MEHADJI Rahmouna (MC’A’) Université d’Oran Examinatrice

Dr. SARI Ali Hikmet (MC’A’) Université de Tlemcen Examinateur

Année universitaire 2010/2011

RReemmeerrcciieemmeennttss

- Mes remerciements et ma reconnaissance sont adressés à mon

directeur de recherche Mr Hadjadj Aoul Mohammed pour son

aide, ses conseils et surtout pour son infinie patience.

- Je tiens également à exprimer ma très haute considératon aux

membres du jury pour l’évaluation de ce mémoire.

- J’exprime ma gratitude et ma reconnaissance à ma tendre mère

qui m’a aidée et soutenue dans les pires moments de ma vie.

- A mon cher père à qui je dois la force et le raisonnement, qu’il

trouve ici, l’expression de mon profond respect.

- A mon mari Karim qui m’a encouragée en se tenant à mes

côtés.

- Enfin, à ma sœur Lamia et son époux Adel et à mes frères

Salim et Mohammed que j’adore.

Merci à tous

DDééddiiccaacceess

A mes très chers enfants : Imed et Iness.

IInnttrroodduuccttiioonn

Introduction

2

travers l'histoire des genres littéraires, il nous semble

très important de mettre l'accent sur un genre qui a

marqué le domaine littéraire et qui est : la littérature

enfantine.

On distingue d'abord d'une façon générale sous l'appellation

un peu vieillie en français « littérature enfantine » ou « pour

enfants » une catégorie d'ouvrages destinés à un public d’enfants,

c'est souvent en même temps, une littérature qui traite de

l'enfance, laquelle, comme on le verra plus loin, n'est pas

toujours destinée à la lecture enfantine.

Diverses dénominations apparaissent dans certains

domaines, pour désigner une production littéraire destinée à la

jeunesse, sans qu'il soit toujours précisé, si elle s'adresse plutôt

aux enfants, aux adolescents, ou aux deux.

La catégorie de littérature pour enfants englobe une variété

importante, le roman d'enfance où pour enfants du XIX ème siècle a

un autre registre en France, une intention pédagogique plus

ou moins délibérée, affichée ou effective que l'on retrouvera

jusque chez la Comtesse de Ségur.

Ses romans sont fortement moralisateurs où l'on trouve

que le juste s'oppose à l'injuste, l’écrivain propose des exemples

de ce qu'il faut faire, et ce qu'il ne faut pas faire. C’est ainsi que

l'éducation reste un facteur déterminant dans l'évolution de

l'individu.

AA

Introduction

3

Mélange de reconnaissance et d'intemporalité, un classique

pour enfants est perçu comme un patrimoine commun à plusieurs

générations. Ainsi le livre pour enfants est d'abord pensé dans la

continuité d'une surveillance interne, d'une « éducation directe »

où le plaisir n'est qu'un prétexte pour transmettre une morale.

Les romans de la Comtesse de Ségur sont des récits

d'enfance, où la fiction puise dans la réalité quotidienne de

l'enfance. Ses œuvres retracent les aventures d'enfants héros, qui

sont actifs, jouent et font des bêtises.

L’auteur s’avère être une parfaite pédagogue, patiente, qui

avait bien observé le caractère de ces filles avant de le retranscrire

dans ses œuvres.

Ses œuvres occupent une place majeure dans la littérature

française pour enfants, non seulement par son ampleur, car on

lui compte près d’une vingtaine de romans, et plusieurs contes et

comédies, mais surtout par son étonnante pérennité.

Composée il y a près d’un siècle et demi, l’œuvre de la

Comtesse enchante encore, toujours disponible dans sa collection

d’origine, la fameuse « Bibliothèque rose » dont elle n’a jamais

quitté le catalogue. La Comtesse de Ségur continue de tenir

auprès des jeunes enfants, comme elle le faisait si bien auprès de

ses propres petites-filles, son rôle sociologique de grand-mère.

Ses œuvres sont teintées de la complicité qui unit grands-

parents et petits-enfants, autour de principes fondateurs comme

Introduction

4

l’enfance, la dévotion, l’amour qui conduisent sur les méandres

de la morale et de la pédagogie.

Aussi, faut-il apprécier pleinement ses romans, tout en les

plaçant dans leur contexte, la société aristocratique du second

Empire. Les héros ont des caractères simplifiés et évoluent dans

un monde où bons et méchants sont immédiatement identifiables

et les premiers l’emportent tôt ou tard sur les seconds. Quoi de

plus salutaire et de plus rassurant pour les jeunes ?

Le roman des Petites filles modèles est notamment un

espace d’éducation qui trouve son régime dans les accidents, les

bêtises, les erreurs qui ne demandent qu’à être rectifiées. Il n’y a

de littérature enfantine qu’à partir d’une intention moralisatrice,

or quels que soient les enfants, leurs âges, leurs origines ou

même le siècle dans lequel ils vivent, jeux et bêtises restent les

éléments de leur quotidien, pour cela notre réflexion tentera de

répondre aux interrogations suivantes :

Comment la Comtesse réussit-elle à transmettre aux enfants

une éducation sous forme d’histoires ?

Proposer une enfance comme modèle réussira-t-il à faire

passer des valeurs tout en les inculquant aux enfants ?

Quel type de modèle est-ce ?

Existe-t-il une recette miracle pour une bonne éducation ?

Au terme de ce travail nous espérons mettre en évidence une

étude approfondie de la littérature enfantine tout en mettant

Introduction

5

l’accent sur l’éducation chez la Comtesse de Ségur dans

Les Petites filles modèles.

Notre choix a porté sur la Comtesse de Ségur, pour sa place

primordiale dans la vie des enfants, celle de passer pour être le

premier auteur, qui a écrit des romans pour les enfants.

Notre objectif est notamment, de montrer que l’éducation

des enfants est un large et important facteur, chez tous les

parents, que ces derniers aspirent à un moyen pour bien faire,

pour s’en acquitter convenablement, bref pour éviter de faillir.

Voilà ce qui a justifié essentiellement notre choix.

Nous avons préféré dans la première partie, aborder l’œuvre

ségurienne en rapport avec l’éducation et d’accorder toute notre

attention à l’éclairage de l’œuvre en passant par la biographie de

l’auteur puisque l’éducation a un rapport avec sa propre vie, sans

omettre d’évoquer l’œuvre classique d’éducation pour enfants.

Dans la deuxième partie, nous avons tenté de montrer le

rapport de l’éducation avec la littérature enfantine, par l’étude du

contexte de l’œuvre romanesque de Ségur.

Pour finir, nous avons opté pour l’étude de la littérature

enfantine tout en mettant en exergue la valeur spécifique de

l’éducation.

Introduction

6

Nous révélons donc l’intérêt de notre recherche, qui sera, de

mettre en évidence l’aspect stimulant de la lecture, qui apparaît

tout simplement telle une zone sombre dans notre système

éducatif actuel.

PPP aaa rrr ttt iii eee III

LL’’OOeeuuvvrree sséégguurriieennnnee

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ll’’éédduuccaattiioonn

CChhaappiittrree II

ÉÉccllaaiirraaggee ssuurr ll’’OOeeuuvvrree sséégguurriieennnnee

1. Biographie de l’auteur.

2. Présentation globale du roman Les Petites filles modèles.

3. A propos du choix du thème « petites filles » dans la

littérature française.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre I

9

I.1 Biographie de l’auteur :

Sophie Rostopchine, troisième de cinq enfants, naquit le 1er

août 1799 à Saint-Pétersbourg au Palais de l’Ermitage, où était

logé son père Fiodor Rostopchine, favori du Tsar Paul 1er, qui

l’avait anobli et avait accepté d’être le parrain de sa fille. Elle

passa toute son enfance en Russie où son père fut lieutenant

général puis ministre des affaires étrangères.

Quand Paul 1er, devenu fou, fut assassiné en 1801, avec la

complicité de son fils Alexandre 1er, le comte Rostopchine se retira

dans ses terres de Voronovo, à 60 verstes (1) de Moscou. Rentré en

faveur à nouveau, il fut nommé par Alexandre 1er, en 1812,

gouverneur de Moscou, après avoir été grand Chambellan.

Quelques mois plus tard, il décida d’incendier la ville, le

surlendemain de l’installation de Napoléon 1er au Kremlin.

Sophie fut très impressionnée par cet incendie et l’exode qui

s’en suivit. On retrouvera d’ailleurs, plusieurs épisodes

d’incendies dans son œuvre romancée. La situation de son père

devint si inconfortable qu’il préféra en 1814 s’exiler en Pologne,

puis en Allemagne, en Italie et enfin en France en 1817.

C’est dans le salon de Madame Swetchine, Russe convertie

au catholicisme, que les Rostopchine connurent Madame de

Staël, Juliette Récaimier, Chateaubriand et Benjamin Constant.

Madame Swetchine qui avant connu les Ségur en Russie,

(1)

La verste (en russe : versta, верста) est une ancienne mesure de longueur utilisée en Russie, valant 1 066,8

mètres, Dictionnaire des œuvres, Laffont, 1988.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre I

10

présenta Eugène de Ségur à Sophie. Il en résulta un mariage de

raison le quatorze Juillet 1819, les Rostopchine apportaient la

richesse et les Ségur la noblesse.

Le jeune couple s’installa à l’hôtel de Ségur, 48 rue de

Varenne où la mésentente régna vite entre belle-mère et belle-fille,

doublement étrangère, d’où leur départ pour un hôtel particulier,

rue des Capucines, où Sophie prit son indépendance. La jeune

Comtesse s’ennuie dans le milieu aristocratique du Faubourg

Saint-Germain et entre en conflit avec son mari volage,

désargenté et désœuvré ; il ne deviendra en effet pair de France

qu’en 1830, avec l’avènement de Louis-Philippe.

Sophie mit au monde huit enfants, d’abord quatre garçons

puis quatre filles.

Pour ses petits-enfants, elle s’amuse à écrire des romans

moraux, composés de saynètes, inspirés de la vie quotidienne.

Polyglotte, puisque elle parle cinq langues, Sophie

Rostopchine a souvent présenté un comportement hystérique

avec crise de nerfs suivie de longues périodes d’aphasie,

l’obligeant à communiquer avec son entourage à l’aide de sa

célèbre ardoise.

En 1872, Sophie vend le château des Nouettes (2), que son

père lui offrit, qui après plusieurs changements de propriétaires,

(2) Le château est situé à Aube en Normandie, il a été habité par la comtesse pendant près de 50 ans (de 1821 à

1872).Elle y a élevé ses 8 enfants et y a écrit tous ces romans en s’inspirant des histoires et des personnages de

ce village. Le château est devenu maintenant Institut Médico-pédagogique

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre I

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deviendra un centre pour handicapés. Elle se retire à Paris, rue

Casimir Perier, où elle mourut en 1874 à 75ans. Elle fut enterrée

dans le Morbihan, à Pluneret, au côté de son avant-dernière fille

Henriette.

I.1.a L’Oeuvre romanesque :

L’auteur consacre aux petites filles trois contes : «Blondine»

qui, perdue dans les bois, est retrouvée par le chat Beau Minou,

«La Princesse Rosette» qui vient au bal à la Cour et fait la

conquête du prince gracieux et «la Petite souris grise», la fée

détestable qui a donné à Rosalie un gros défaut, la curiosité.

Les cinq premiers romans (1857-1862) ont pour

personnages les enfants et petits-enfants de l'auteur :

Les Malheurs de Sophie (1858) relatent les mésaventures de

Sophie curieuse, désobéissante, gourmande, coléreuse et

menteuse. Les Petites filles modèles (1857) constituent la suite du

précédent roman, Sophie est orpheline de mère, persécutée par

sa marâtre, et élevée par la mère de ses deux petites amies. Cinq

pièces en deux actes complètent ce riche inventaire romancier.

Ses œuvres sont regroupées en contes, qu’elle racontait à ses

petits-enfants, pour donner naissance à ce qu’on appelle

aujourd’hui « les nouveau contes de fée ». Ces contes ont été

publiés entre 1857 et 1872, dans la « Bibliothèque rose » et

illustrée chez Hachette. Parce que très présentes, l’éducation et la

morale dominent dans ces histoires.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre I

12

Ces romans traitent des notions d’environnement, de

fréquentation, mais aussi, la dualité entre ce qu’il faut faire et ce

qu’il ne faut pas faire. L’éducation morale des enfants commence

dès la plus jeune enfance, et chaque événement est propice à une

leçon.

Les châtiments corporels sont souvent relatés par la

Comtesse dans Un bon petit diable (1865), dans Le Général

Dourakine (1863), et dans Les Malheurs de Sophie (1858), et qui

sont l’image même d’une éducation sévère.

Même si nous sommes loin aujourd’hui du vouvoiement des

parents, du rôle des domestiques, des traitements médicaux, il

n’empêche que certaines notions d’éducation perturbent les

parents et ont su traverser le temps.

En revanche, dans d’autres cas, ce sont les parents qui

gâtent, qui ne punissent jamais leurs enfants, ou qui prennent

systématiquement leur défense, quel que soit leur comportement,

comme c’est le cas de Jules dans Pauvre Blaise (1861) ou de

Grisèle dans Quel amour d’enfant ! (1867).

D’autres romans nécessitent d’être évoqués comme Mémoire

d’un âne (1860) deux ans après La Sœur de Gribouville (1862),

Les Bons enfants (1862), Les Deux Nigauds (1863), François le

bossu (1864), et l’apparition d’un ensemble de Comédies et

proverbes (1866) qui est un recueil de nouvelles ; enfin le dernier

roman qui s’intitule Après la pluie le beau temps (1871).

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre I

13

L’œuvre de la Comtesse peut être considérée comme un

patrimoine, et le tableau d’une époque, un échantillon de type

psychologique et social.

I.1.b Les personnages :

Ce sont en majorité des enfants mais il y a, également, bon

nombre d'adultes, sans omettre les animaux qui font figure eux

aussi, de personnages.

Dans le petit monde des enfants, ce sont les bonnes

natures qui forment le plus grand nombre (la pauvre Blaise

martyrisée par le fils de son employeur, François le Bossu,

Juliette l'aveugle et les enfants modèles) mais aussi on trouve des

enfants terribles, le plus souvent rebelles. Ainsi les mauvaises

natures qui sont des ambitieux, des vaniteux, des jaloux, des

tricheurs, des menteurs et des voleurs, ils s’identifient dans les

pères.

Quant au monde des adultes, il faut dire que les enfants

devenus adultes s'améliorent, le plus souvent, mais parfois

s'aggravent. Aussi y a-t-il des bons et des moins bons parents ; des

marâtres détestables ; jamais de grand-père et une seule grand-

mère dans Les Bons enfants, par contre beaucoup d'oncles et de

tantes ; beaucoup d'amis de la famille, et souvent des étrangers,

des institutrices à domicile sévères ou très douces. Le collège

négligé par l'auteur ; les bonnes à tout faire jouant un rôle de

confidentes ; des valets de chambre souvent attendrissants ; des

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre I

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jardiniers amis des enfants et des fermiers en général très liés à

leurs propriétaires ; des commerçants et des artisans pour lesquels

la Comtesse a beaucoup de respect ; des notables du village, du

curé au maire, du médecin à l'instituteur et au notaire, des

gendarmes et enfin des pauvres sauvés par la générosité des nantis.

Le monde animal quant à lui tient une grande place dans les

romans : les ânes, rois des animaux parce qu'ils sont amis des

enfants ; les chevaux plus disciplinés mais pouvant créer des

accidents graves ; les chiens attendrissants, amis des enfants ; les

chats par contre qui ne plaisent pas à la Comtesse ; les ours,

féroces, et les loups, terreurs des enfants, souvenir de Russie ; les

grenouilles sont des fées bienfaisantes et les crapauds des fées

malfaisantes. Les perroquets, bouvreuils, rouges-gorges, alouettes

et autruches apparaissent également dans certains romans.

Comme chez les humains on note l'opposition des bons et des

mauvais animaux.

La Comtesse évoque ses propres enfants et petits enfants

comme personnages de ses romans. Sophie, d’abord son propre

prénom, l’écrivain s’identifie beaucoup à son personnage, nous

citons donc la préface des Malheurs de Sophie, dédié à sa petite-fille

Elisabeth Fresneau :

« Chère enfant, tu me dis souvent : Oh ! Grand-mère, que je vous aime ! Vous êtes si bonne !

Grand-mère n’a pas toujours été bonne et il y’a bien des enfants qui ont été méchants comme elle et qui se sont corrigés comme elle. Voici

des histoires vraies d’une petite fille que grand-mère a beaucoup connu dans son

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre I

15

enfance, elle était colère, elle est devenue douce [...], enfin elle était méchante, elle est

devenue bonne. Grand-mère a tâché de faire de même. Faites comme elle, […] à vous qui n’avez

pas le défaut de Sophie » (3)

On a aussi le personnage du baron Paul de Malarat qui est

son gendre, et donc le père des petites filles modèles. Un autre

personnage également ; Elisabeth de Fresneau, sa petite-fille.

Dans le roman des Petites filles modèles, la mère madame de

Fleurville est la fille de la Comtesse Natalie de Malarat, la mère de

Camille et Madeleine, ses propres petites-filles.

Il y a encore madame de Rosbourg qui est Olga de Pitray, sa

fille, c’est à dire la mère de Marguerite. Donc tous ces personnages

sont issus de la vie réelle, comme l’écrit madame de Ségur à la

préface des Petites filles modèles.

«Mes Petites filles modèles ne sont pas une création, elles existent bien réellement : ce sont

des portraits ; la preuve en est dans leurs imperfections mêmes. Elles ont des défauts,

des ombres légères qui font ressortir le charme du portrait et attestent l’existence du modèle. Camille et madeleine ce sont une réalité dont

peut s’assurer toute personne qui connait l’auteur». (4)

En réalité Sophie est le personnage central du deuxième

ouvrage, où, l’auteur qui répondait au même prénom, narre les

anecdotes et les incidents de sa petite enfance, seul le décor a

changé. A cinquante neuf ans, elle se souvient qu’elle a été une

(3)

Les petites filles modèles [et] Les Malheurs de Sophie p : 257 (4)

Les Petites filles modèles p : 13

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre I

16

petite fille, assez turbulente, qui, en dépit de son prénom, n’a pas

toujours été modèle de sagesse.

I.1.c L’écrivain : Les débuts de l’écrivain commencent quand ses petits-

enfants naîtront, comme beaucoup de grand-mères, elle leur

raconta des histoires et quand Camille et Madeleine (ses propres

petites filles) devront partir à Londres où leur papa est nommé,

elle commencera à écrire toutes les histoires qu’elle a racontées.

C’est comme cela que Sophie de Ségur devint écrivain à plus de

cinquante ans.

Au fil de son œuvre, la Comtesse s'avère à la fois aussi

psychologue que moraliste. Elle crée des personnages de

confidentes (surtout les bonnes), de raisonneuses et de bouffons,

les portraits d'enfants sont particulièrement réussis. Par contre les

portraits d'adultes sont humoristiques, cruels ou caricaturaux.

L'auteur réalise une véritable fresque de la société du second

Empire (5). Elle a le goût de la fête et nous décrit les noces de la

campagne, les dîners, les visites des châtelains voisins, les goûters,

les parties de pêche et les courses sur un dos d’âne.

Elle est d’autre part moraliste quand il s’agit de prôner une

morale chrétienne (la charité, la foi en Dieu omniprésent,

l'espérance en un monde meilleur, l'obéissance aux

commandements de Dieu), d'où le souci de l'éducation des enfants

(5 )

Période qui va de décembre 1852 à septembre 1870, suite à la révolution de 1848 (Napoléon III), Le Robert,

1991.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre I

17

sans rigueur exagérée et sans contrainte, en obtenant leur

adhésion.

L’écrivain, entré très tardivement dans le monde de la

littérature, prend rang parmi les très bons écrivains français de son

siècle. Au début conteuse, elle devient fabuliste, nouvelliste,

romancière aux facettes variées (roman anecdotique, exotique,

éducation sociale) et enfin dramaturge (fréquence des dialogues et

des coups de théâtre). Le style s’annonce simple et naturel,

accessible aux enfants ; la présentation variée ne lasse pas le

lecteur. François Bluche dans « Le Petit monde de la Comtesse de

Ségur» (1988) a bien décrit cet univers comme Hortense Dufour

dans la biographie qu’il donna en 1990.

La Comtesse, en trouvant en Louis Hachette un grand

éditeur, est à la tête des meilleurs auteurs de la fameuse

Bibliothèque Rose. De grands dessinateurs et graveurs illustrèrent

avec talent ses ouvrages, le plus connu étant le célèbre Gustave

Doré (6). C'est Balzac qui nous fait penser le plus à l'ensemble des

écrits de la Comtesse de Ségur. La Comédie humaine fut le titre

choisi par lui pour désigner l'ensemble de son œuvre romanesque,

à la première édition de ses œuvres complètes en 1815. On

pourrait donc considérer l'œuvre romanesque de la Comtesse

comme une «Comédie humaine des enfants». D'autres liens

(6)

Peintre, graveur et dessinateur français de renom (1832 – 1883).Il s’est distingué par ses illustrations des

grandes œuvres, de Dante à Charles Perrault, de Rabelais à Cervantès et Balzac pour ne citer que ces auteurs,

Dictionnaire des personnages, Laffont,1983

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre I

18

unissent les deux auteurs, dont on a fêté en 1999 le bicentenaire

de leur naissance.

I.1.d La personnalité de Sophie de Ségur :

Slave d'origine mongole, comme en témoignait son regard

exprimant la liberté, elle est d'abord une indomptable et une

révoltée contre une mère méchante et tyrannique, qui lui refusait

vêtements chauds et nourriture suffisante, alors que les autres

enfants paraissaient mieux traités. A l’inverse, le père adorait sa

fille qui le lui rendait bien. Révoltée, elle le fut aussi contre son

mari volage qui ne l'aime pas et contre la société aristocratique

française, d'abord celle de la Restauration avant tout revancharde,

après tant d'années d'émigration et une vie difficile et ensuite celle

du second Empire qui ne songe qu'aux affaires et à l'argent.

Sophie fait preuve d'une énergie à toute épreuve, véritable

chef de clan gérant son domaine normand, elle enseigne elle-même

ses filles, et les aidant ensuite dans leur vie de mères de famille.

C'est aussi une femme d'affaires, discutant pied à pied avec ses

éditeurs, d'abord Louis Hachette, puis son gendre et successeur

Emile Templier, elle réclamait des avances d'argent pour chaque

nouveau livre, et obtenait des augmentations de plus en plus

substantielles.

Elle a besoin d'argent pour assurer son train de vie et

réussira à obtenir son émancipation financière, chose rare à

l'époque. Ces rapports avec ses éditeurs ne sont pas seulement

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre I

19

d’ordres financiers, en effet, elle doit lutter pour que ses écrits ne

soient pas dénaturés, refusant d'adoucir certains passages qui ne

reflètent, pour elle, que l'image de la vie. Elle ne réussit pas

toujours : c'est ainsi qu’elle a dû situer en Angleterre le Bon petit

diable, car le climat des pensionnats n'était pas «politiquement

correct» pour la maison Hachette.

I.1.e En conclusion :

On retrouve parmi les descendants de la Comtesse un certain

nombre d'écrivains. Le fils aîné, le plus cher de ses enfants,

Gaston, Monseigneur de Ségur et Anatole, le troisième fils, ont

rédigé chacun une biographie de leur mère. Gaston a également

édité un manuel de cantiques tiré à un million d'exemplaires et

traduit en dix langues, dont le bantou en fait parti, tandis

qu'Anatole laissa des fables et des chansons pour Gounod. La

benjamine, Olga de Pitray a écrit : Nia chère maman et aussi, un

bon roman Des Enfants des Tuileries.

A la génération suivante, l'historien et académicien Pierre de

Ségur, fils d'Anatole a écrit entre autres ouvrages, un livre sur son

grand-père maternel, le Comte Rostopchine. Enfin Ariette de

Pitray, arrière petite-fille de Sophie a édité en 1919 Sophie

Rostopchine, Comtesse de Ségur. Les dix-huit romans, tous édités

dans la Bibliothèque Rose, connurent un constant succès en

librairie et furent traduits en quatorze langues.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre I

20

Le Théâtre du petit monde à Paris a joué des pièces tirées des

Petites filles modèles, des Deux nigauds et du Bon petit diable.

Au septième art et en France, Jean-Claude Brialy a mis en

film Les Malheurs de Sophie en 1980 et Un bon petit diable en

1983. Le premier roman, Les Malheurs de Sophie, a connu une

autre version en 1945. C’est une version assez modifiée de

Jacqueline Audry. En 1976, Alexis et Gotlib mirent en bande

dessinée Les Malheurs de Sophie, elle est assez cruelle et en

dessins animés sous la direction de Bernard Devriès.

Une Canadienne, Marie Desjardins, a fait paraître en janvier

1999, au Québec, une critique littéraire originale, « Des yeux de la

Comtesse », sous la forme de «flash» accompagnés de photos des

lieux de vie de l'écrivain. Elle a écrit une biographie de son auteur

préférée. «je crains que la Comtesse de Ségur n'évoque plus rien à

nos petits enfants, lecteurs de BD, et friands de CD et autres K7. Ils

ne connaîtront donc jamais Charles, le bon petit diable, la tante

Mac-Miche et Cadichon qui resteront à jamais gravés dans nos

mémoires», comme l’avait écrit François Mauriac :

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre I

21

« Al’ heure du sommeil le cortège des petites filles modèles et du bon petit diable me suivent dans ma

chambre et peuplent mon sommeil. »

Ce bicentenaire (7) risque donc, de passer inaperçu. Ce

modeste travail n'a pour but que de célébrer, à notre façon, cet

évènement culturel.

(7)

Voir la page 17.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre I

22

I.2 Présentation globale du roman Les Petites filles modèles :

Le roman Les Petites filles modèles de la Comtesse de Ségur,

est depuis toujours un grand classique de la littérature enfantine.

Il raconte le quotidien de quatre petites filles, les sœurs

Camille et Madeleine, Marguerite qui suit, enfin Sophie Fichini

qui se joint à elles.

Ces petites filles-là, sont-elles vraiment modèles et

innocentes ?

Comme tous les enfants, elles font des bêtises, sont très

espiègles, mais restent solidaires quand il le faut.

C’est un roman d’enfance où la fiction puise dans la réalité

quotidienne du monde de l’enfance. Sans cette atmosphère légère

et bon enfant, on ne peut savoir si quelqu’un aurait volé des

poires : « les poires volées » (8), si Jeannette avait dérobé la poupée

de Marguerite : « Jeannette la voleuse » (9), si Sophie n’avait pas

mangé trop de fruits, « Sophie mange du cassis ;

ce qui en résulte » (10), tout un programme plein de surprises et

d’aventures en tous genres !

(8)

- Les Petites filles modèles, p : 67. (9)

- Ibid, p : 89. (10)

- Ibid, p : 117.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre I

23

Les péripéties de ces fillettes donneront le sourire à

n’importe qui et risqueront de donner des idées aux autres

enfants !

Les petites filles sont bien sûr surveillées par des adultes et

sont punies parfois. Mais elles restent attachées l’une à

l’autre, elles sont drôles et généreuses à l’image de la mère de

Camille et Madeleine, qui est toujours prête, à secourir la veuve

madame de Rosbourg et l’orpheline Marguerite et Elisa, leur

gentille bonne.

Les deux fillettes Camille et Madeleine, selon les termes de

l’auteur sont des bonnes filles, gentilles et aimables. Camille a

huit ans, Madeleine en a sept, c'est-à-dire qu’elles sont à un âge

où l’enfant a acquit une certaine autonomie tout en évoluant vers

les débuts d’une personnalité.

Plus tard entre en scène deux autres enfants, Marguerite de

Rosbourg, qui a quatre ans, dans des circonstances qui auraient

pu être tragiques ; et puis Sophie qui a six ans, enfant martyre

entre les mains de sa marâtre madame Fichini.

Marguerite va vite se plier aux règles de la maison, grâce

surtout à l’influence de ses « petites mamans », Camille et

Madeleine. Elle n’est pas méchante, mais elle commet parfois des

sottises dues à son très jeune âge : elle cueille les fleurs destinées

à faire un bouquet pour la maman, elle laisse sa poupée dehors,

et se la fait voler par la méchante Jeannette.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre I

24

Ce sera plus difficile avec Sophie, qui est facilement

coléreuse, désobéissante et habituée à mentir pour échapper aux

punitions corporelles de sa belle-mère.

On cite ici un exemple de Sophie qui a sali sa robe en

tombant dans la mare où étaient les hérissons. Madame Fichini

la fouette avec une extrême vigueur ; cette punition aussi injuste

que « barbare » est réprouvée non pas seulement par madame de

Fleurville et madame de Robgourg (les mamans de Camille,

Madeleine et Marguerite), mais aussi également par Elisa, la

bonne.

Heureusement pour Sophie, madame Fichini part en voyage

pour plusieurs mois, et la confie à ses voisins. L’enfant est

heureux, mais il lui faut un certain temps pour cesser de faire les

choses en cachette comme elle le faisait avant.

On comprend bien pourquoi ce livre a charmé et captivé les

générations : tous les enfants, aiment s’amuser et font parfois des

bêtises et ils se reconnaitront à coup sûr, dans ces personnages

animés pleinement d’idées et d’énergie !

L’ouvrage est divisé en vingt-huit chapitres, chacun annonce

un évènement heureux ou malheureux, voire tragique.

Grâce au style inimitable de la Comtesse, un style qui ne

vieillit jamais, il devient possible de faire découvrir aux plus

jeunes, à partir de huit ans, ces amies qui s’adorent et que même

s’il leur arrive de se disputer, aiment jouer et partager ensemble.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre I

25

La couverture rose nous rappelle l’ancienne édition de la

bibliothèque du même nom.

Le livre est aussi jalonné d’illustrations, ce qui finira de

plonger le jeune lecteur dans l’époque et le contexte d’alors. Une

chose est sûre : l’époque a peut-être changé, mais les enfants

n’ont pas changé pour autant. Ce livre n’a pas pris une ride !

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre I

26

I.3 A propos du choix du thème « petites filles » dans la

littérature enfantine :

Depuis 1870, on n’a jamais cessé d'écrire des récits

d'enfance, qu'ils soient ou non autobiographiques. En effet le

récit d'enfance accède à l'autonomie par rapport au récit de vie.

Cette émancipation résulte d'une révolution du roman de

formation dont les conséquences se font encore sentir

aujourd'hui : plaçant l'enfant au cœur de sa création, l'écrivain

mine la bonne conscience de la société des adultes et part à la

recherche de ses origines.

Ce changement radical et perspectif est à mettre en

relation, avec le développement de la psychologie, de la

psychiatrie, puis de la psychanalyse qui donne à l'investigation

sur l'enfance une caution et une légitimité scientifique.

Les petites filles qui ont une histoire deviennent un objet

d'intérêt, ce nouveau sujet qui traverse les classes et les trames ;

vers 1850 apparaissent des textes qui deviendront des classiques

de la littérature : Alice au pays des merveilles de Lewis Carroll

(1865) en Angleterre, Les Petites filles modèles (1858) en France,

Les Quatre filles du docteur March de Louisa May Alcott (1869)

en Amérique.

Un peu plus tard, Freud élabore une théorie de la séduction

prémisse du complexe d'Oedipe. Même l'Eglise s'intéresse aux

missions des petites filles pour en faire des bienheureuses.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre I

27

Un siècle plus tard, le mythe s'incarne en Lolita (11), une version

amère et désespérée de la femme fatale et de l'amour en Occident.

La petite fille a donc bien une histoire et on peut en suivre

les méandres dans la littérature, du modèle de la jeune fille

accomplie de la période prérévolutionnaire, en passant par l'âge

romantique, qui réévalue l'enfance et la femme jusqu'au triomphe

de la littérature enfantine, pour arriver au lendemain de la

Seconde guerre mondiale.

On peut suivre l'itinéraire de l'enfance féminine, chez

madame de Staël et Jane Austen, Percy et Mary Shelley, George

Sand, Victor Hugo, Marie Bonaparte, Vladimir Nabokov, ce sont

eux qui on valorisé les figures extralittéraires et qui ont eu prise

sur l'imaginaire.

Le roman Les Petites filles modèles évoque la fillette

maltraitée par sa mère et en proie à des vexations. Des

documents plus fiables font défaut, la méthode de la biographie

est discutable. L’analyse de l’univers de la fillette comme source

d’inspiration futur de l’écrivaine est intéressante, avec la forêt,

espace de l’enfance de Sophie Rostopchine.

C’est une première fois dans l’histoire de la littérature où la

petite fille apparaît comme une héroïne, et dans ce livre Les

Petites filles modèles, comme dans pratiquement toutes les

œuvres de La Comtesse, ce sont surtout les femmes et les petites

(11)

Roman (1955) de l’écrivain Nord-Américain d’origine russe Vladimir Nabokov (1899-1977).

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre I

28

filles qui font figure d’héroïnes, alors que les garçons et les pères

sont souvent singulièrement absents (comme l’était sans doute

aussi Eugène de Ségur).

29

CChhaappiittrree IIII

UUnn ccllaassssiiqquuee dd’’éédduuccaattiioonn ppoouurr eennffaannttss

1. Contraste et contradiction, comment Ségur voit l’enfant ?

2. Ségur le classique pour enfants est un modèle d’éducation.

3. L’éducation par les histoires dans Les Petites filles modèles.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

30

II.1 Contraste et contradiction, comment Ségur voit l'enfant ? :

La Comtesse de Ségur est restituée dans le contexte de

l'édition spécialisée du XIXème siècle, dans un environnement

thématique et moral qui n'exclut pas une originalité profonde et

paradoxale.

En effet, plusieurs principes élémentaires semblent

gouverner son œuvre : le féminin, le religieux, l'aristocratique.

Mais ces principes sont toujours illustrés d'une manière

équivoque.

Sa vie était difficile ; une femme délaissée, trompée, malade,

dépressive, mère d'une famille nombreuse qui tente de trouver la

sérénité auprès de ses enfants.

Récit détaillé d'une vie à travers l'étude des correspondances

et des mémoires de la famille, c’est l’évocation de la vie

quotidienne d'une famille aisée : éducation, instruction, hygiène,

santé, alimentation, domesticité, loisirs, mais l'ensemble est riche

en anecdotes.

Au delà des faits, nous tentons de comprendre comment

s'est produit l'univers littéraire de la Comtesse, les souffrances de

la femme et de la mère, devant autant de sources d'inspiration

pour l'écrivain, par exemple la maternité et l'éducation des

enfants : si la Comtesse impose à ses héros deux ou trois

naissances au maximum, si la présence active de la mère est

l'éthique même de l'œuvre ségurienne, c'est parce que l’écrivain a

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

31

souffert de ses grossesses répétées, et de l'impossibilité d'élever

elle-même ses garçons, que leur père confia dès le plus jeune âge

à des institutions religieuses.

De là, une incompréhension totale entre une mère choyant

sa progéniture aux Nouettes et un père mondain, réprouvant les

mœurs rurales de sa femme, et qui fit de son mieux pour sauver

ses enfants d'un univers rustique, déplorable à la longue et les

préparer à leurs futurs responsabilités.

Pour cela nous constatons une nette contradiction chez la

Comtesse de Ségur, celle qui oppose la manière dont elle a élevé

ses enfants, avec celle décrite dans Les Petites filles modèles et

qui indique comment la Comtesse compte mener l'éducation des

enfants.

La Comtesse de Ségur résiste donc aux analyses de contenu,

et son « message », quelques fois énigmatique, s'oppose même aux

engagements officiels de son entourage ultramontaniste.

L'ancrage aristocratique est toujours perturbé, mêlé à des

valeurs «bourgeoises», tandis que certains textes manifestent une

attirance pour la pauvreté, pauvreté de biens ou d'esprit. Là aussi

nous remarquons la contradiction et le contraste entre une riche

femme bourgeoise qui n'apprécie pas sa vie et celle qui veut

inculquer à ses enfants non la richesse des biens, mais celle de

l'esprit.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

32

Cette complexité, qui requiert une sorte d'humilité de la part

de tout lecteur averti, permet de comprendre, pourquoi ses livres,

ne s'adressent plus aux enfants d'une classe particulière, bien

qu’ils conservent aujourd'hui leur puissance d'attraction, et

pourquoi ils ont cessé de susciter un intérêt critique, quoiqu’il

reste formel de donner grâce à cet écrivain moderne, une

romancière qui apparaît comme le précurseur d'une nouvelle

forme de littérature.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

33

II.2 Ségur le classique pour enfants est un modèle d’éducation :

Donner ce qualificatif à une œuvre, c'est avant tout lui

reconnaître une certaine légitimité dans le monde de l'écriture

pour enfants, mais c'est aussi, avouons-le, assurer la

pérennisation de son auteur.

Mélange de reconnaissance et d'intemporalité, un classique

pour enfants est perçu comme un patrimoine commun à

plusieurs générations. Qu'en est-il des œuvres de la Comtesse de

Ségur ? Existe-t-il une " recette miracle " pour écrire pour les

enfants ?

La Comtesse de Ségur est une jeune femme intelligente et

cultivée, à l'éducation sévère et bien peu conformiste pour

l'époque. Fort instruite : elle parle plusieurs langues, elle est aussi

curieuse de tout.

Sa vie durant, la Comtesse s’est consacrée entièrement à

l'éducation de ses huit enfants et plus particulièrement à

l'instruction de ses filles. Malade et souffrante de maux de gorge

qui l'empêchent de parler et ce depuis plusieurs années, elle se

met à écrire dès 1856 les histoires qu'elle aimait tant raconter à

vive voix à ses petites-filles.

En dix-huit ans, la Comtesse publie vingt romans et trois

livres de morale chrétienne, tous à l'usage des enfants. Si la

Comtesse a, d'emblée, un tel succès auprès des enfants

(n'oublions pas que c'est le succès des romans de la Comtesse de

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

34

Ségur qui a incité Hachette à créer la fameuse " Bibliothèque rose"),

c'est qu'au siècle du roman populaire, elle crée un genre

nouveau : le roman pour enfants, à mi-chemin entre le conte et le

roman. Ses « récits d'enfance » vont connaître un réel succès dans

ce XIXème siècle, où l'enfant commence à avoir un statut : en tant

que lecteur potentiel tout d'abord, mais aussi en tant que

personnage de littérature. Si on parle aujourd'hui d'une

« littérature enfantine », il faut savoir que cette appellation tardive

n'est guère conçue avant 1950.

A l'époque de la Comtesse on parle encore « d'ouvrages

d'éducation ». Ainsi, le livre pour enfants est d'abord pensé dans

la continuité d'une surveillance interne, d'une « éducation

indirecte » dont parle Fénelon, où le plaisir n'est qu'un prétexte

pour transmettre une morale, puis, au cours du XXème siècle, un

savoir.

Revenons d'abord sur la définition même du "récit

d'enfance". Le récit d'enfance est un texte écrit, dans lequel un

écrivain adulte, par divers procédés littéraires, de narration ou

d'écriture, raconte l'histoire d'un enfant : il s'agit d'un récit

biographique réel ou fictif. Or, proposer une enfance en modèle,

modèle à rejeter, ou en témoignage de faits sociaux ou politiques,

n'est-ce pas un moyen de faire passer des valeurs et de les

inculquer à la jeunesse ?

Il faut dire aussi que la Comtesse n’est pas seule à élever

haut cet étendard. Nous pouvons citer Léon Tolstoï (1828-1910)

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

35

avec son Enfance (1852), Jules Valles (1833-1885) avec son

Enfant (1879), Alphonse Daudet (1840-1897) avec son Petit chose

(1868), et bien d’autres écrivains.

Les héros des récits d'enfance de la Comtesse de Ségur

véhiculent des modèles éducatifs à des fins d'édification morale,

sociale et civique. Or, le besoin d'exemplarité passe aussi par des

anti-modèles. Ainsi, la Comtesse met en scène, au fil de ses

œuvres, de jeunes enfants essentiellement dans leur milieu

familial ou leur environnement immédiat et dans leur

comportement quotidien, avec leurs qualités et leurs petits

défauts qu'ils apprendront à corriger.

Les Petites filles modèles (1857), qui est une œuvre au titre

tout aussi évocateur d'éducation et de bienséance : propose aux

jeunes lecteurs des " miroirs " de l'enfance bien élevée, bien

éduquée, de l'enfance bourgeoise ; certes, ces petites filles ont des

failles et des défauts, mais elles doivent les corriger et suivre des

principes moraux, afin de véhiculer un modèle pédagogique.

Car rappelons-le, si la Comtesse écrit pour ses petites-filles,

elle écrit également pour toutes les jeunes filles en général. Toute

son œuvre en témoigne : ses héroïnes passent la matinée et une

partie de l'après-midi à étudier. Puisque selon elle, sans

instruction, une fille reste une esclave, une bête, une vaincue tôt

mise à mort. Alors que la petite fille qui étudie devient un être

épanouie.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

36

La Comtesse de Ségur assume seule l'éducation de ses

enfants, sans le soutien du père qui est ou absent ou décédé. Par

conséquent, dans les œuvres séguriennes, peu de pères restent

attentifs à l'instruction de leurs filles.

Les romans de la Comtesse de Ségur sont tous des récits

d'enfance, où la fiction s’implique dans une réalité quotidienne de

l'enfance. En effet, empreintes de réalisme, ses œuvres retracent

les aventures d'enfants-héros qui ressemblent à ceux qu'elle

croise en vacances... mais aussi aux nôtres : ils sont actifs, jouent

et font, eux aussi, des bêtises.

La Comtesse s’érige comme une parfaite pédagogue. Patiente,

elle a bien observé le caractère de ses filles, avant de le

retranscrire dans ses œuvres. Dans le roman de Ségur, il y a à la

fois une révélation de la richesse psychologique de l'enfance, la

découverte de certains milieux sociaux et une volonté très

marquée d'édification morale et pédagogique.

Mais, si les histoires de la Comtesse de Ségur ravissaient les

enfants du XXème siècle, qui y retrouvaient à la fois leur goût des

contes, et la foi chrétienne dans laquelle ils étaient élevés, on se

demande si elles attirent encore les fillettes d’aujourd’hui.

Car, là est le danger : une œuvre écrite à une période

historiquement donnée, peut-elle être encore lue après avoir

traversé des époques ? Puisqu’ il est vrai, et on ne peut le nier, les

mœurs évoluent, et souvent perdent avec elles leurs

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

37

vraisemblances. Or, les œuvres de la Comtesse de Ségur semblent

survoler les générations. Ses œuvres peuvent être lues

différemment mais sont encore lues. Sur ce point, les romans de

la Comtesse peuvent être qualifiés de classiques pour enfants.

En effet, un bon livre est un livre qui continue encore à

maintenir l’intérêt du lecteur, à différents moments historiques.

C'est un texte qui offre encore matière à lire.

Alors quel est le secret de l'intemporalité des œuvres de

Ségur ? Car il faut le reconnaître, notre vie a évolué, loin du

modèle pédagogique décrit par la Comtesse où fessées et autres

punitions corporelles étaient encore de mise.

Les œuvres de la Comtesse sont des lieux d'éducation qui

trouvent leurs régimes dans des accidents, des bêtises, des

erreurs qui ne demandent qu'à être rectifiés. Il n'y a de littérature

enfantine qu'à partir d'une intention morale.

Or, quels que soient les enfants, leur âge, leurs origines où

même le siècle dans lequel ils vivent : jeux et bêtises restent les

éléments de leur quotidien, par ailleurs, l'éloignement dans le

temps, les décalages de tout ordre entre le monde représenté et le

monde de référence contribuent à renforcer le plaisir des enfants

et à permettre l'identification.

Si Ségur reste un classique pour enfants c'est parce qu'elle a

bâti son centre d’intérêt sur les émotions de l'enfance. Ce qui

touche un enfant, c'est quelque chose qui le rejoint, un sentiment

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

38

qu'il éprouve, une idée qu'il partage, même si un siècle et demi

sépare le quotidien de l'enfant-héros de Ségur, à celui du lecteur

d'aujourd'hui.

Il s'agit donc, de livres qui répondent aux goûts et aux

besoins de l'enfant, mais aussi à travers lesquels l'enfant se

retrouve, s’identifie. Cet état d'enfance qu’on trouve chez la

Comtesse, idéalise des personnages fictifs, qui passent ensuite

dans la légende, qui marquent profondément notre esprit d'enfant

car qu'aujourd'hui, quand on souhaite exprimer quelque chose

faire appel à ces personnages, et de se faire entendre par ses

semblables.

C'est le cas du personnage de Sophie, des Petites filles

modèles, où la simple évocation du prénom, suite à une

maladresse quelconque d'une jeune fille, fait sourire. Si la

Comtesse de Ségur survit encore, c'est par l'énergie, par la

passion, la violence et éventuellement un peu de sentimentalisme

et de moralisme.

Ce qui est à montrer, du fait que les œuvres de la Comtesse

ont vu préserver leurs qualités essentielles : simplicité et vivacité,

gentillesse et humour sont à la fois teintés de réalisme et de

sincérité, les livres de la Comtesse respirent la gaité. Ils

renferment comme il est nécessaire quand on dépeint la vie, des

incidents pénibles ; mais si leurs héros connaissent l'adversité ou

la persécution, tout finira par s'arranger.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

39

Et si parfois, certains de ses romans semblent diviser le

monde en "méchants " et " bons enfants ", en réalité, il n'en est

rien. Les personnages bons ou méchants évoluent, se

perfectionnent, deviennent meilleurs, sauf en de rares exceptions.

Le modèle ségurien présente la division de l'être, qui

provoque les " bêtises ", les erreurs, voire les fautes, dont certains

ne parviennent jamais à se relever. Certains méchants se

corrigent, d'autres non, pourtant tous sont confrontés aux mêmes

modèles de vertu. Dans tous les cas, la tranquillité chez Ségur est

une conquête, non une grâce native.

Il faut reconnaître à la Comtesse, une liberté de ton et

d'allure qui s'explique uniquement par un vécu des épisodes et

une " réalité " des personnages. En effet, la Comtesse, à travers

ses livres se révolte, critique violemment les punitions sévères en

démontrant l'horreur et la néfaste inutilité du fouet, ou même

encore, les diverses panoplies martyrisantes et sadiques dont " la

ceinture " imposée aux jeunes filles afin qu'elles améliorent leur

écriture.

La Comtesse a reçu une éducation équilibrée, pénétrée des

nouvelles idées de mérite, d'économie, de vertu et de vie familiale,

qualités bourgeoises sans marque de faiblesse ou de légèreté. Ce

sont ces qualités bourgeoises qu'elle tente d'enseigner à travers

ses personnages, tout d'abord à ses petites-filles, puis aux enfants

lecteurs.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

40

Cependant trop de fessées, même justifiées, dispensées dans

Les Petites filles modèles, accompagnées d’expressions d’invective

à l’adresse des enfants, contrebalancent infailliblement les

procédés plus doux en vigueur dans d’autres écrits de la

littérature enfantine.

Sur le chapitre rédaction, les absences de retenue de la

Comtesse de Ségur, s'expliquent par son habitude de donner libre

court à sa plume comme elle l’explique elle-même et dit : « Quand

j'écris, je fais vite et bien, ou lentement et mal. Mes meilleurs

livres ont été faits en moins d'un mois » (1). Ainsi, elle opte pour un

vocabulaire simple et clair, elle souhaite se mettre à la portée de

ses lecteurs. De plus, son style est direct ce qui rend les dialogues

plus vivants, et traduisant un bonheur de la conversation. Sans

oublier que dans tous ses romans, la Comtesse est narratrice, la

question de la voix narrative à une importance primordiale dans

le livre pour enfants.

C'est peut-être grâce à cette simplicité et à cette clarté que le

style des romans de la Comtesse n'a aucunement vieilli et

continue d'enchanter les enfants.

Ses romans sont remplies d’idéaux, d’énergie, ses

personnages sont épris de passion et de liberté. Les enfants de

France n’ont pas connu d’aussi grands écrivains ; la Comtesse de

Ségur en fait assurément partie. S’il est une chose qu’on peut

(1)

Le Petit monde de la Comtesse de Ségur, Bluche François, 1988.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

41

regretter, c’est que personne après elle, n’a eu ce brillant talent de

conteuse.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

42

II.3 L’Education par les histoires dans « Les Petites filles modèles »

Les Petites filles modèles reflètent l’histoire d’une famille

heureuse, la famille de madame de Rosbourg, et celle de leur

amie, madame de Fleurville, veuve depuis six ans, qui accueille

chez elle madame de Rosbourg sans nouvelles de son mari,

disparu en mer.

C’est un récit composé de plusieurs éléments essentiels,

dont notamment les personnages, c'est-à-dire ceux qui ont un

rôle à jouer. La narratrice s’intéresse surtout aux enfants, Camille

et Madeleine de Fleurville et puis Marguerite de Rosbourg.

A travers différentes aventures, les fillettes apprennent à

distinguer le bien du mal, surtout Marguerite la plus jeune,

pleine de bonnes intentions, mais qui a encore beaucoup de

chose à apprendre, pour ressembler aux « petites filles modèles »,

Camille et Madeleine.

Camille, l’ainée des deux fillettes exemplaires, a huit ans.

Elle aime les jeux bruyants, courir et chercher des papillons. Elle

aime aussi faire la charité « aux pauvres », cœur noble et

généreux, elle se laisse parfois accuser par les autres, « histoire

des poires volées ». Du haut de ses huit ans la gamine a presque

un raisonnement de prêcheuse.

Madeleine sept ans, sœur cadette de Camille, est une fille

calme, préfère se plonger dans ses livres, ou jouer à la poupée.

Très charitable, elle aussi aime donner son argent « aux

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

43

pauvres », un peu niaise, disons naïve, ses interventions semblent

n’être que pour mettre en valeur les explications des adultes.

Petite fille réservée, elle ne parle pas souvent, sauf pour

dispenser ses mots secrets, à ses petites camarades ou pour

penser aux pauvres. On a le sentiment qu’elle ferait une bonne

nonne. Jamais un mot plus haut que l’autre, jamais une bêtise,

une véritable femme à un âge avancé.

Ce sont des filles uniques en apparence, elles ont plus de

tempérament que les modèles de vertu.

Marguerite à quatre ans. Quand elle entre dans la vie des

deux bonnes sœurs, elle s’exprime déjà comme une grande. Elle

déborde de tendresse et d’affection pour les petites filles modèles.

Elle n’a de cesse que de leur ressembler. Vraie petite maline, elle

provoque souvent les punitions de Sophie.

Elles étaient toutes les trois parfaitement heureuses, et leurs

mamans les aimaient tendrement ; toutes personnes qui les

connaissaient les aimaient aussi et cherchaient à leur faire

plaisir.

Dans le septième chapitre apparaît un nouveau personnage

qui est, Sophie Fichini.

Sophie vient parfois avec sa belle maman, madame Fichini,

pour jouer dans le domaine de Fleurville. Elle n’est pas méchante,

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

44

mais Camille et Madeleine doivent faire preuve de patience, et de

compréhension, pour que l’atmosphère demeure calme.

Marguerite moins mûre, a plus de mal à aimer Sophie qui

est nerveuse, angoissée, et parfois malhonnête.

Sophie a six ans au début de l’histoire, c’est la seule qui

semble ne pas correspondre aux enfants du même âge et de son

époque. Elle est agressive, à la merci, par les agissements

coupables, d’une belle-mère tortionnaire, elle s’habitue à recevoir

des volées, à tel point que parfois, elle préfère se faire plaisir avec

une bêtise en se disant :

« Peu m’importe d’être battue j’en ai l’habitude ! ».(2)

Bon cœur, elle regrette certaines de ces colères envers les

autres petites filles, mais c’est trop tard, les mots sont déjà partis,

elle finit toujours par être punie.

Mais les trois filles finissent par comprendre, que l’anxiété,

la malhonnêteté et la gourmandise sont en grande partie causées

par sa peur de sa belle-maman, celle qui décrète implacablement

que :

(2)

Les Petites, filles modèles p : 59

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

45

« … Le fouet est le meilleur des maîtres […] je n’en connais pas d’autres » (3).

Le personnage de Sophie remet en question les certitudes

des trois petites filles gentilles et sans souci, que sont Camille,

Madeleine et Marguerite.

Ces personnages obligent les enfants lecteurs à réfléchir,

sur la nature du bien et du mal, sur les bonnes et les mauvaises

intentions, et les critères qui fondent un jugement moral.

Les face à face, entre Sophie et Marguerite de Rosbourg,

illustrent l’importance de l’éducation par l’exemple à savoir,

Marguerite se laisse souvent provoquer par Sophie.

Toutes les histoires se définissent comme un enchaînement

d’actions, prise en change par des acteurs, il y a un début

d’histoire et une fin ; on n’oublie pas surtout la rétrospection qui

existe dans toutes les nouvelles, il y a toujours un retour en

arrière.

Les enfants font souvent des bêtises sans le vouloir, alors il

faut une bonne orientation pour les éviter. Dans le chapitre V

Les Petites filles modèles, Marguerite voulait bien faire, en

nettoyant et balayant le petit jardin des petites filles, elle a cueilli

un beau bouquet de fleurs, qui a mis Camille et Madeleine en

colère.

(3)

Les Petites filles modèles, p : 65, chapitre VIII « Les Hérissons ».

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

46

Ici, madame de Fleurville et madame de Rosbourg ont trouvé

une solution qui a donné la joie à tout le monde, sans prendre la

peine de punir Marguerite.

L’éducation que préconise la Comtesse, n’est pas de donner

des coups à chaque reproche, mais d’éduquer les enfants en

punissant, c’est l’éducation directe et efficace où le plaisir du

texte n’est qu’un prétexte pour transmettre une morale.

Dans le chapitre « Camille est punie » des Petites filles

modèles, arrive Sophie Fichini, qui cause la colère de Camille,

celle-ci commence à crier, ce qui n’est pas dans ses habitudes.

Elle met en colère sa maman qui la punie pour la première fois de

sa vie en disant :

« Montez dans votre chambre, mademoiselle,

vous ne descendez que pour dîner, et vous

n’aurez ni dessert, ni plat sucré » (4)

Nous remarquons, que dans ce chapitre les filles ont montré

de la compassion pour leur sœur et amie Camille, en se privant

de leurs desserts, du plat sucré et d’être solidaires avec elle, geste

qui a étonné leurs mamans.

Chaque fin d’histoire est ponctuée d’une morale, pour

conclure ce qu’est le droit chemin et combien il est dans l’intérêt

de tous, d’être courageux, doux et sans mauvaises intentions.

(4)

Les Petites filles modèles, p : 47.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

47

Le cas pour Camille qui a évité de dire la vérité à propos des

poires volées, pour éviter à Sophie, d’être fouettée par sa belle-

maman, sa gourmandise et son égoïsme, l’ont poussé à voler et à

mentir. Ainsi doit-on s’adresser aux enfants, comme le fait

madame de Rosbourg :

« Ma petite Camille, ta conduite a été belle, généreuse, au-dessus de tout éloge. La tienne

Sophie, a été bien mauvaise au commencement, belle et noble à la fin… »(5).

Parler aux enfants, en leurs montrant leurs défauts, le juste

et l’injuste, pour qu’ils apprennent à travers leurs fautes, et

essayent de se corriger.

Pour la Comtesse de Ségur, l’éducation est un facteur

déterminant dans l’évolution de l’individu. Les mauvaises

influences, un environnement répressif peuvent pousser les

enfants à être méchants.

Trop de laxisme et d’indulgence, les rendent égoïstes et

vicieux, c’est le cas de la gourmandise de Sophie qui l’a poussée à

manger trop de cassis, en lui provoquant un mal atroce au

ventre. Camille, Madeleine et Marguerite se demandent alors

pourquoi cette gourmandise, Sophie leur fait comprendre, que sa

belle-mère la privait d’en manger, c’est pourquoi à chaque

occasion, elle ne s’arrête pas d’en prendre, madame de Fleurville

s’est chargé de le lui expliquer :

(5)

- Les Petites filles modèles, p : 78.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

48

« Ma chère, Sophie, tu as été gourmande, et le bon Dieu s’est chargé de ta punition en permettant cette indigestion qui te fait rester couchée jusqu’au dîner : elle te privera de la promenade que nous devons faire dans une heure pour aller manger des cerises chez madame de Vertel. Quant à être fouettée, tu peux te tranquilliser là-dessus : je ne fouette jamais ; et je suis bien sûre que, sans avoir été fouettée, tu ne recommenceras pas à te remplir l’estomac comme une gourmande, …, il faut en manger sagement, si l’on ne veut pas s’en trouver mal » (6).

Après cette discussion, Sophie eut honte, apprend les

dangers de la gourmandise, et se promit bien de ne jamais

recommencer.

A travers ces histoires, la Comtesse préfère montrer aux

enfants, le mal qu’ils font, tout en leur expliquant, et en leur

montrant le bon exemple, et la bonne stratégie pour vaincre leurs

bêtises.

Nous avons beaucoup apprécié le chapitre qui s’intitule « le

cabinet de pénitence », dans lequel Sophie s’était montrée aussi

orgueilleuse que méchante, en refusant d’offrir de la confiture à la

pauvre femme, et de se mettre en colère contre Marguerite comme

le raconte la Comtesse :

(6)

- Les Petites filles modèles, p : 126.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

49

« Pourquoi ne mange-t-elle pas du pain, des légumes et du beurre ? Je ne me donnerai

certainement- pas la peine de faire des confitures pour une pauvresse » (7).

Aussi madame de Fleurville décida-t-elle d’une punition

légère aux deux fillettes, qui consiste à écrire une prière. Mais

Sophie furieuse refuse encore. L’altérnative qui resta à madame

de Fleurville a consisté non pas à la battre mais de passer la

journée au cabinet de pénitence, une chambre où elle doit passer

la journée sans voir personne, et sans que personne ne la voit,

jusqu’à ce qu’elle se calme et reconnaisse ses fautes et demande

pardon à Dieu.

« Vous ne serez délivrée de votre prison que lorsque le repentir, un vrai repentir, sera entré dans votre cœur, lorsque vous aurez

demandé pardon au bon Dieu de votre dureté envers les pauvres, de votre gourmandise

égoïste, de votre emportement envers Marguerite, de votre esprit de colère et de

méchanceté qui vous a portée à déchirer tout ce que vous pouviez briser et déchirer, de votre esprit de révolte qui vous a excité à

résister à mes ordres. J’espérais vous trouver en bonne disposition pour vous ramener au repentir, pour faire votre paix avec Dieu et

avec moi» (8).

Malgré toutes ces fautes, madame de Fleurville demeurait

souple avec Sophie ; en effet lorsque cette dernière a demandé

pardon, elle lui disait après l’avoir embrassée :

(7)

- Les Petites filles modèles p : 130. (8)

- Ibid. p : 135.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

50

« Du fond du cœur, chère enfant, crois bien je ne conserve aucun mauvais sentiment contre toi,

demande pardon au bon Dieu comme tu viens de me demander pardon à moi-même» (9).

Après dit-elle :

« Ma chère enfant, le repentir expie bien des fautes. Tu as été très coupable envers le bon Dieu d’abord, envers moi ensuite; le regret sincère que tu en éprouves te méritera sans doute le pardon,

mais ne t’affranchit pas de la punition… » (10).

Cette méthode reste très rarement appliquée sur les enfants

de nos jours, tant les parents ne prennent plus la peine de punir

leurs enfants et leur expliquant la gravité de leurs fautes, et

combien il serait détestable de se mettre en colère.

La Comtesse de Ségur, dans ce chapitre a proposé un

modèle d’éducation assez développé, voire exemplaire, c’est

procéder avec la punition étape par étape, comme s’il s’agit d’une

planification.

Sévir avec rigueur à l’encontre d’un enfant nous éloigne de

l’éducation. Ce qui nous en rapproche c’est l’amener à prendre

conscience et à réfléchir sur la nature du bien et du mal, sur les

bonnes et les mauvaises intentions, sur les critères qui fondent

un jugement moral.

Battre Sophie sans pitié, comme le faisait sa belle-maman

madame Fichini, en présence des adultes, la ridiculiser pour sa

(9)

– Les petites filles modèles, p : 136. (10 )

- Ibid p : 136.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

51

coquetterie, sa gourmandise et autres défauts ont eu pour effet de

compliquer davantage les choses. En revanche, il est parfois trop

tard pour certains enfants, qui finissent par devenir plus

caractériels, et plus tard des adultes incapables de contrôler

l’éducation de leur propre progéniture et provoquent à leur tour la

déroute de leurs enfants.

Une leçon bien retenue pour Sophie, pour tous les autres

enfants ainsi que les lecteurs, est de bien éviter l’orgueil, la

méchanceté et la colère. Mais pour les enfants rien n’est

définitivement joué une fois soustraits à la brutalité de leur

environnement, ils pourront s’appuyer sur les modèles de leur

entourage pour s’améliorer.

Les parents constituent un exemple à suivre pour les

enfants, qui les imitent dans toutes leurs démarches. Les parents

inculquent des principes fondateurs dès l’enfance ; la dévotion,

l’amour qui conduisent aux sentiers de la morale. Or la

malchance de Sophie vient de ce qu’elle n’a reçu aucun de ces

principes, puisque orpheline dès le bas-âge, vivant sous la merci

d’une belle-mère sévère, qui ne fait que la fouetter constamment.

Sophie n’a jamais pratiqué de charité, ni senti le bonheur à

faire du bien. Mais dans le chapitre XXII « Sophie veut exercer la

charité » Sophie accompagnée de Marguerite, voulut bien faire

l’aumône à la pauvre femme, madame Toutain sans que cela ne

se sache.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

52

Hélas les choses ne se sont pas déroulées comme elles

espéraient puisque perdues dans la forêt, elles restèrent jusqu'à

la nuit, avant d’être sauvées par un homme qui s’appelait M.

Hurel qui s’étonna de leur présence la nuit, seules dans la forêt :

« Comment, ma petite demoiselle, vous êtes la fille de cette bonne dame de Rosbourg ; et votre maman vous laisse aller si loin toute

seule ? »(11).

L’interrogea-t-il.

D’ordinaire les enfants font des choses sans réfléchir aux

conséquences. C’est le cas de Marguerite qui s’éloigne en laissant

sa mère rongée d’inquiétude qui pourtant au lieu de la punir,

entreprend de lui montrer la gravité de partir sans dire où aller :

« Pourquoi vous seriez-vous exposées à un danger initial ? Ne sachant plus où vous

trouver, j’allais de maison en maison demander qu’on m’aidât dans mes

recherches »(12  ) .

Selon la Comtesse de Ségur, apprendre aux enfants à

remercier les gens, pour le bien qu’ils ont fait pour eux, est une

bonne éducation morale, pour cela elles sont parties chez M.

Hurel afin de s’acquitter de la dette qu’elle avait envers lui, en lui

offrant des présents en or car ces petites filles étaient en or.

Sophie finit par s’adapter et s’améliorer au fur et à mesure,

et devient une fille modèle.

(11)

- Les Petites filles modèles, p : 196. (12)

- Ibid, p : 205.

Partie I : L’Oeuvre ségurienne en rapport avec l’éducation Chapitre II

53

Les nouvelles des Petites filles modèles de la Comtesse de

Ségur, s’enchaîne l’une après l’autre, il y a une concordance

entres elles, c'est-à-dire à la fin de chaque histoire, se dégage une

morale, suivie d’une autre que les enfants ne sont pas prêts

d’oublier, ou de les évoquer dans d’autres histoires.

Ces nouvelles finissent par devenir des modèles

d’éducation, qui trouvent leurs régimes dans les accidents, les

bêtises, les erreurs qui ne demandent qu’à être rectifiées, il n’y a

de littérature enfantine qu’à partir d’une intention moralisatrice.

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LL’’EEdduuccaattiioonn eenn rraappppoorrtt

aavveecc llaa lliittttéérraattuurree

eennffaannttiinnee

CChhaappiittrree II

ÉÉttuuddee dduu ccoonntteexxttee cchheezz SSéégguurr 1. Contexte socioculturel de l’œuvre Ségurienne

2. Le sens de la famille chez la comtesse de Ségur

3. L’aventure dans le roman de la comtesse

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre I

56

I.1 Contexte socioculturel de la production de l’œuvre

ségurienne :

L’œuvre de la comtesse de Ségur occupe une place majeure

dans la littérature française pour enfants, non seulement en

raison de son ampleur, près d’une vingtaine de romans et

plusieurs contes et comédies, mais surtout de son étonnant

caractère.

Composée il ya près d’un siècle et demi, l’œuvre enchante

toujours, disponible dans sa collection d’origine, la Fameuse

« Bibliothèque rose » dont elle n’a jamais quitté le catalogue.

En outre, ce ne sont plus seulement les enfants qui la lisent,

les universitaires à leur tour, s’y intéressent avec autant de

sérieux que du plaisir, heureux certainement d’y retrouver un peu

de leur jeunesse, leurs travaux l’éclairent d’un jour nouveau.

L’œuvre en relève toute la richesse et l’originalité et nous permet

aussi de mieux cerner le secret de sa magie.

Les œuvres de la Comtesse s’attachent au contexte éditorial

de son époque, une société dit toujours quelque chose d’elle-

même.

Car à bien des égards, l’œuvre de la Comtesse peut être

considérée comme un témoignage et le tableau d’une époque.

Tout un échantillonnage de type non seulement psychologique

mais aussi social s’y déploie, et d’appréhender l’œuvre sous

l’angle du réel, dans ses rapports au monde social.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre I

57

L’œuvre représente les différentes catégories de la France du

second Empire, des plus aisées aux plus humbles, depuis

l’aristocratie jusqu’au petit peuple des villes et des campagnes, en

passant par toutes les nuances de la bourgeoisie et un certain

nombre de marginaux et d’exclus.

On reconnait sans peine aussi, certaines grandes

distinctions révélatrices de mentalités de l’époque : celle qui

oppose par exemple, maitres et domestiques, notamment Paris et

Province.

Même si la présentation de la société n’y constitue jamais

une fin en soi, le souci narratif prime toujours sur celui de la

description, il est certain qu’un sens aigu de l’observation sociale

s’y révèle. A son échelle, cette œuvre s’apparente étroitement aux

grands romans réalistes, dont elle a été contemporaine.

Nous avons relevé des motifs sociaux comme : la faim chez

Sophie ou des coups de bâton, de fouet, sottise… qui relèvent

d’un contenu fortement fantasmatique, angoisse de séparation,

d’abandon, de mort ou, à l’inverse, rêves compensateurs et qui

paraissent structurer l’ensemble de l’œuvre.

Dans cette œuvre, l’intention moralisatrice est pourtant

manifeste et nous posons la question suivante : Qu’elle est le sens

de la violence qui caractérise certains passages ou personnages ?

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre I

58

Pour répondre à la question précédente, et selon le point de

vue qu’on adopte, mais aussi le contexte où surgit cette violence

dans l’œuvre de la Comtesse de Ségur, examinons ce passage :

« […] Elle se précipita sur elle, la saisit par l’oreille, l’entraina dans la chambre à côté et, malgré les protestations et les pleurs de Sophie, elle se mit à la fouetter, à la battre jusqu’à ce que ses bras fussent fatigués […] Madame Fichini se retourna vers elle et lui

donna un dernier soufflet, qu’il l’a fit trébucher ; […] » (1).

Dans ce passage, ainsi se traduit l’agressivité et la violence

de madame Fichini, envers sa belle-fille, qui a prit son vin, s’étant

privée d’eau jusqu’au diner et un seul verre, elle bat Sophie sans

pitié et même en présence des adultes, se ridiculise par trop de

coquetterie, par sa gourmandise et par tous les défauts dont elle

aurait dû se débarrasser étant enfant, ici madame la Comtesse

sensibilise surtout les parents, parce que les mauvaises

influences et l’environnement répressif peuvent pousser les

enfants à être méchants.

Ailleurs dans un autre passage montrant la violence :

« […] Marguerite prit une grande poignée de cerises et les lança à la tête de Sophie, qui, déjà un peu en colère, […], elle s’élança sur

Marguerite et lui donna un coup de poing sur l’épaule » (2).

(1)

- Les Petites filles modèles .P : 104 – 105. (2)

- Ibib, p : 130.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre I

59

Où encore :

« Laisse-moi, criait-elle, laisse-moi lui donner autant de coups que j’ai reçu de cerises à la

tête ; lâche moi ou je te tape aussi » (3).

A travers ces deux citations, la Comtesse ne tente-t-elle pas

d’amener les enfants à mieux maitriser leurs nerfs, et que la

violence, les mène fatalement à des punitions inévitables?

Mais, on peut aussi rapprocher ces types de violence, à ceux

rencontrés dans les contes traditionnels et dont la Comtesse s’en

été inspirée en ses débuts. L’écrivain tente d’avertir l’enfant de

certains comportements, de dangers et de le libérer de ses

craintes.

Ou bien, dans une perspective encore plus nettement

psychanalytique, l’interpréter comme l’expression d’une histoire

personnelle : celle qu’a vécue la Comtesse de Ségur elle-même,

dans ses relations avec sa mère, la forte et austère Catherine

Rostopchine.

On sait, que leurs rapports furent souvent lourds de conflits

et de frustrations. De telles explications dénotent que la mère et

la fille ne sont pas compatibles. Et puis, elles témoignent au

contraire du pouvoir de rectification, qui est celui de toute

écriture, pour autant qu’elle soit véritable.

(3)

– Les Petites filles modèles, p : 131.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre I

60

Si une violence d’ordre pulsionnel effleure ou éclate ici où là,

dans l’œuvre ségurienne, ce n’est jamais à l’état brut. L’écrivain a

transformé ce livre en morale ou en rire.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre I

61

I.2 Le sens de la famille chez la Comtesse :

On est aussi en passe de poser la question du héros dans la

littérature enfantine. Quel modèle donc le héros des enfants doit-

il prendre dans cette littérature enfantine ou didactique ?

Dans la littérature fantastique du XVIIIème et XIXème siècle les

héros d’enfants ne sont pas vivants, ne parlent pas, ce sont des

silhouettes sans aucune personnalité marquée.

Ségur avait découvert l’enfant et réclamé pour lui un

traitement approprié à ses capacités et à ses besoins. Et pourtant

dans la littérature, pendant presque un siècle, l’enfant

n’apparaîtra pas. Pas plus d’ailleurs, dans les livres pour adultes

que dans les ouvrages composés à son intention.

La Comtesse à tout respecté, que se soit le corps ou

l’intelligence, elle a visé la sensibilité de l’enfant, mais sans le

rendre pour autant pathétique.

Donc l’enfant est susceptible pour vivre cette expérience en

donnant une vie à ses personnages, comme une réalité vivante et

que même les héros font des bêtises comme tout le monde, le cas

de Camille, la petite fille modèle qui ne commet pas de bêtises

comme en témoigne le chapitre « Camille est punie »

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre I

62

« [...] Toi si bonne, tu as donné un soufflet à Sophie, qui vient en visite chez toi ? » ( 4)

La maladroite Sophie, a fini par devenir une petite fille

« modèle » et bien élevée, évoluée avec la simplicité et la vraie

élégance de l’aristocratie.

La Comtesse incite l’enfant à mieux faire des efforts et moins

faire des sottises.

Le sens du vécu, reprend ses droits dans l’analyse des

rapports familiaux. Le foyer : voilà le vrai centre de la vie de

l’enfant, le point lumineux qui l’attire, dont il rêve quand il en est

privé.

Dans ces histoires, les parents deviennent des modèles

parfaits dont l’esprit compréhensif, n’exclut pas une certaine

sévérité.

Le chapitre XVI « le cabinet de pénitence » évoque Sophie qui

a été punie pour une faute commise et qu’elle n’a demandée, ni

pardon ni repentir. Mais elle reconnait sa faute un jour plus tard.

« Quand j’étais méchante et que ma belle-mère me punissait, je me sentais encore plus méchante après, je détestais ma belle-mère ; tandis que Mme de Fleurville, qui m’a punie je l’aime au contraire plus qu’avant et j’ai

envie d’être meilleure » (5).

(4 ) _ Les Petites filles modèles, p : 45. (5)

– Ibid. p : 138.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre I

63

Cependant, ce qui provoque les réactions des jeunes lecteurs

à l’égard de la lecture c’est qu’il n’y avait pas de « héros-enfants »,

et qu’on n’a pas dénoncé les erreurs ou les carences de

l’éducation.

Madeleine et Camille n’étaient pas des enfants malheureux,

elles étaient élèves d’une éducation développée, ce qui est toute

différente et encore seulement les enfants des classes privilégiées

ce qui n’est pas le cas de Sophie.

Elles jouissaient du contact avec la nature, leurs poumons

s’emplissaient d’air pur, leurs muscles s’endurcissaient sans

peine et elles bénéficiaient en outre de l’affection. Il est vrai de la

part des parents, qu’une simple surveillance envers leurs enfants.

Chez la Comtesse, on débouche toujours sur une morale,

c’est celle qui fait une humiliation aux méchants et aux vaniteux

parmi les « mauvais riches ». Les conflits des personnages,

apparemment fondés sur des principes moraux et illustrés par les

oppositions des caractères, proviennent en fait des différences

sociales.

C’est la morale de l’enfant sage, et cela d’autant plus

aisément que les petits héros sont issus du même milieu social.

C’est le cas de la raisonnable Camille aux prises avec la

turbulente Sophie que nous montrons dans la citation suivante :

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre I

64

« Aussitôt que Camille vit Marguerite à terre, elle s’élança sur Sophie et lui appliqua un

vigoureux soufflet » (6)

Ce sont en vérité les différentes façons d’éduquer qui font

souffrir et là c’est le rôle des parents qui entre jeux ; il ne faut pas

punir un enfant sans lui faire comprendre d’abord la gravité de sa

bêtise parce qu’enfin il finira par en saisir la portée.

Sophie s’est posé la question, tout en faisant la différence

entre les deux punitions, celle de sa belle-maman et celle de

madame de Fleurville.

« C’est que votre belle-mère qui vous punissait avec colère, et quelquefois par caprice,

tandis que Mme de Fleurville vous punit par devoir et pour votre bien » (7).

Il était évident et clair que Sophie aimât madame de

Fleurville malgré la punition infligée sur elle. A partir de là nous

remarquons que le rôle de la maman et de la famille dénote le

degré de son importance car la tendance chez Sophie bascula

vers le changement, ce qui commença à devenir une réalité.

Généralement le désir pour devenir meilleur est refoulé dans

les fantasmes enfantins. L’enfant adopte volontiers et se laisse

facilement adopter.

L’adoption, au sens le plus large et le plus général, est sans

doute le principal moteur psychologique de la littérature

(6 ) _ Les Petites filles modèles, p : 45. (7)

-Ibid p : 138.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre I

65

enfantine, et surtout des relations familiales. Cette adoption

permet de multiplier les échanges, les découvertes pleines de

surprise et d’émotion.

L’enfance répugne à ces sortes de séparations, c’est le cas de

Sophie. Elle ne tient pas du tout à faire l’expérience de la liberté.

Ainsi l’aventure, pour être acceptée sans réticence sur la

sensibilité enfantine doit-elle toujours déboucher sur son

contraire : l’aventure.

Pour entrer entièrement dans le monde de l’aventure, c'est-

à-dire de l’inconnu, il faut pouvoir au préalable oublier, serait-ce

pour un seul moment, son environnement immédiat et, enfin de

compte s’oublier soi-même.

Or, l’enfant veut toujours découvrir les choses, il tend à

définir ce qui l’entoure et de là, il veut tout simplement se voir. Il

ne saurait supporter l’idée de se perdre de vue. Aussi, ce qui

l’attache à cette littérature réaliste, c’est qu’elle le ramène

toujours au monde, dont il est le centre et qu’il peut toucher d’un

regard, c'est-à-dire à lui-même.

L’enfant lecteur aime à s’amuser en lisant sans rien laisser

passer ; madame de Ségur jouant de toutes les possibilités de

l’énumération, car il n’est pas question d’oublier une robe au

trousseau de « la poupée de Marguerite » (8). C’est le triomphe du

particulier sur le général et du nom propre sur le nom commun.

(8)

- Les Petites filles modèles, « La poupée Mouillée », p : 80.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre I

66

Cette minutie dont parle La Comtesse dans le chapitre cité

dessus paraît dans l’ouvrage de dame ce qu’on appel une

littérature de femmes et pour toutes les petites femmes, bien que

les personnages soient des enfants très ordinaires, et non des

créatures imaginaires.

Dans Les Petites filles modèles le cadre circonscris de la

maison, du jardin, du village est plein d’objets, de gestes banals

mais nécessaires. Même le temps du goûter de la matinée est cité,

comme si l’enfance va fuir, en faisant pour la dernière fois

l’inventaire de son domaine et de ses biens.

La petite fille construit sa maison de poupée avec de petits

meubles et installe les différents acteurs à chaque place, c’est une

imagination ou une vue d’une futur femme.

Madame de Ségur installe à la fin de chaque livre la maison

de poupée de l’avenir, la maman devant le berceau, le papa

fumant sa pipe et le chat au coin du feu.

L’enfant envisage son futur comme cela, une maison bien

ordonnée, où chaque personne est là où il faut.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre I

67

I.3 L’Aventure dans le roman de la Comtesse :

Le mot aventure, n’est-il pas une contradiction entre

la raison d’être et la nature de la littérature enfantine ?

En effet, à examiner de près, les titres des classiques

« le mythe de l’aventure paraît aussi vivace dans l’esprit

des enfants que dans celui des adultes : aventure des

petites filles surprenantes ou extraordinaires… » (9)

On est donc amené à dire que tout récit pour enfants

soulève en racontant des aventures, que c’est cela qu’ils

veulent lire, cela qu’on prétend leur donner.

Sans enquêter, le milieu enfantin relève clairement

toute sorte de décalage entre le mot et le concept.

La moindre conversation avec un enfant, montre à

quel point, il s’agit pour lui d’une notion vague et ambigüe.

L’idée que l’enfant se fait du livre d’aventures, varie

naturellement en fonction du sexe, du milieu social, et

surtout de l’âge, mais on peut dire, en général qu’il appelle

aventure toute histoire qui lui a plu, et qu’il a lue jusqu’au

bout, ou qu’il peut imiter.

Et en réfléchissant, quoi de plus normal que cette

difficulté à s’entendre sur une donnée aussi complexe ? Les

(9)

- « La littérature enfantine », Isabelle Jan, les éditions. P : 135.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre I

68

enfants ont raison d’avoir une aventure, aussi bien que

dans Les Petites filles modèles.

Tout se qui organise les fait et comporte une part du

mouvement produit une émotion qui abouti à faire naître

l’aventure, en passant par la sensibilité et la disposition

d’esprit.

Et on peut considérer, la perte de Sophie et

Marguerite (10) dans la forêt en exerçant la charité, aussi

bien une aventure qu’un « malheur ».

Pour bien saisir cette différence, il convient de se

placer, non plus du côté du lecteur, mais du côté de

l’écrivain.

L’écrivain est soit guidé par son personnage pour le

mener là où il veut, soit détaché suffisamment de lui. Ce

qui paraît évident pour les aventures de Sophie Fichini

dans les Petites filles modèles.

Quel que soit le caractère saugrenu des inventions de

Sophie, celles-ci sont toujours profondément enracinées

dans les mémoires.

Sophie émane d’un tissu de souvenirs, de

frustrations, de repentirs, et de regrets de madame de

Ségur.

(10)

- Les Petites filles modèles, chap. 22, p : 185.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre I

69

L’héroïne vit des expériences pour bizarres et

inattendues qu’elles soient, qu’elle n’est pas la projection

plus ou moins symbolique des désirs et des obsessions de

sa créatrice.

Elle impose sa présence et en même temps se trouve,

être prisonnière de ses actes inachevés.

« Malheurs » et « aventures » ont là, un pluriel de pure

forme. En fait, cette héroïne ne vit qu’une seule aventure,

et qu’un seul malheur qui est, dans les deux cas un échec :

faillir pour être punie.

Ce qui reste au lecteur, c’est de s’émerveiller d’une

imagination assez inventive, pour animer un seul motif,

répétitif, obsessionnel, avec une vivacité telle qu’elle efface

toute impression du déjà lu.

Et la littérature enfantine, celle des héros-enfants,

mais écrite par des adultes, est tout naturellement et de

façon privilégiée une littérature des réminiscences.

Il semble que madame de Ségur ait eu amplement la

faculté de choisir. Pour ce héros vigoureux et indépendant,

elle a décliné vers l’aventure.

Elle choisit de disposer les éléments du récit, afin

qu’ils paraissent dus au hasard. Et que les événements se

produisent ainsi, qu’ils se produiraient comme à l’ordinaire

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre I

70

dans une existence, normalement soumise aux multiples

surprises du futur, des aléas et des impondérables de la

vie.

Dans ce cas, la Comtesse est d’abord et avant tout

une technicienne, qui métrise son outil, capable de

s’oublier, d’orienter les requêtes de sa mémoire et son

domaine et qui sera non pas le passé mais l’avenir.

Aussi, c’est dans une imagination sans cesse

contrôlée que peut naître et se développer le roman

d’aventures.

Comme il lui faut d’abord retrouver la période vécue

avec toutes ses richesses et ses secrets, le romancier

d’aventure ne craint pas de d’écrire au temps, où chaque

jour ne fait qu’apporter la confirmation qu’on est, encore et

toujours un petit enfant.

La Comtesse a fait du roman d’aventures la

récupération présente d’un passé réel. La reconstitution de

la vie ne surgit pas de petits faits vrais de la minute, du

cadre, de l’accessoire, mais à travers l’élan continu, où, les

jours se succèdent sans jamais se ressembler.

Assurément, une des formes de prédilection de tout

roman d’aventures, repose-t-elle sur l’autobiographie.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre I

71

En définitive, du roman d’aventures, l’enfant a

seulement retenu un cadre, un thème, ou un personnage.

Le cadre, ce sont les grands espaces, c’est la forêt, mais

aussi et surtout la prairie. Le thème c’est l’éducation. Le

personnage quant à lui renvoie à des petites filles.

Il y aurait eu peu à dire du roman d’aventures pour

enfants, s’il n’y avait pas la Comtesse de Ségur, écrivain de

génie lu par les enfants qui soulèvent encore et toujours la

question suivante : quelle était donc son intention ?

Écrivait-elle vraiment pour ce type de public ? Et par qui

est elle lue en réalité ?

A cela on peut seulement répondre, que les visées

apparentes de madame de Ségur étaient de désigner du

doigt des astuces d’éducation aux adultes et de donner une

morale infinie aussi bien aux enfants, qu’au monde et à la

société, parce que tel était son bon plaisir.

L’écrivain est un grand créateur qui emploie un

langage que l’enfant surtout peut comprendre.

CChhaappiittrree IIII LLaa PPrroodduuccttiioonn cchheezz llaa CCoommtteessssee

1. Contexte de production

2. L’enfant chez la Comtesse de Ségur

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre II

73

II.1 Contexte de production :

L’analyse des pratiques d’écriture de plusieurs écrivains

pour jeunesse, traite d’une question qui est au cœur du discours

sur la littérature enfantine, qui est celle d’une littérature à part

entière et qui forge une relation entre contexte et production.

Les aventures des Petites filles modèles apparaissent en

France en 1858. La Comtesse s’amuse à écrire un roman moral,

composé de saynètes inspirées de la vie quotidienne, donc au

début c’était destiné juste à ses petits-enfants.

Louis Hachette crée une collection destinée à l’enfance, la

Bibliothèque rose, et cherche des auteurs de talent et la Comtesse

de Ségur accepte que soient publiés les récits destinés à ses

seules petites filles. Le succès est immédiat, elle ne cessa d’écrire.

Ses écrits pour les enfants sans finalité sont avant tout

éducatifs dans sa littérature pour jeunesse, elle s’est engagée à

plein-temps pour une production didactique à multiple facettes et

moralisante qui était considérée, comme un instrument

pédagogique de la plus haute importance à son époque.

Ses livres de lecture pour enfants apparaissaient alors

comme le médium par excellence, auquel pouvait être confiée la

diffusion des messages éducatifs et des contenus moraux.

L’ampleur de la foi, dans l’efficacité de la lecture des enfants est

largement attestée par le nombre de livres éducatifs en tout

genre , imprimés en France pendant la première moitié du XIXème

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre II

74

siècle, chargés de modèles et des valeurs qui devraient présider à

la constitution d’une identité collective.

Tout ouvrage qui, de près ou de loin renvoyait à une

intention éducative, était considéré comme un ouvrage pour la

jeunesse, les bonnes lectures devraient servir d’antidote, en leur

inspirant de bonne heure l’intention moralisatrice, se sont les

bienfaits des livres éducatifs.

La Comtesse avait le souci de transmettre des normes et des

modèles, si bien que les vicissitudes dans Les Petites filles

modèles valent par le côté moralisateur et pédagogique et qu’elles

servent de prétexte, pour introduire tantôt des leçons de choses et

tantôt des leçons de morale.

Nous remarquons que dans le chapitre « Sophie veut exercer

la charité » les deux filles s’égarent dans la forêt, permet à la

Comtesse de décrire minutieusement chaque détail, le bruit dans

la forêt, leur souffle, leurs pas et leur regret, tandis que là, nous

observons que Marguerite commence à regretter ce qu’elle a fait.

Dans le chapitre suivant « Les Récits » (1), c’est là que

commence la conversation de la maman avec autant de serment,

montrant la gravité de la chose avec une morale et la

bienfaisance :

(1)

- Les Petits filles modèles p : 201.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre II

75

« …Chère enfant ; vous faites véritablement une escapade ridicule. S’il se moque de vous, acceptez ses plaisanteries avec douceur et en

expiation de la faute que vous avez commise » (2).

Donc pour cela, la Comtesse a bien éveillé l’esprit critique du

jeune lecteur, en lui recommandant d’obéir en tout et pour tout à

ses parents et de se conformer aux usages et aux normes de la

société.

Toutes les critiques ont souligné l’importante dimension

idéologique de l’ouvrage, qui peut être considérée comme un

véritable manuel de bonne conduite à observer, de mythe à

cultiver et de valeurs à respecter, bref, un prototype du « modèle

intellectuel bourgeois qui tenta de s’affirmer en France » au XIXème

siècle .

(2)

- Les Petits filles modèles p : 206.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre II

76

II.2 L’Enfant chez la Comtesse de Ségur :

Tout d’abord, on commence avec la pédagogie, c'est-à-dire

une prise en compte de ce terme qui renvoie à cet être

énigmatique, pour l’explorer et le développer : l’enfant et son

enfance.

Les enfants dans l’œuvre ségurienne ce sont les petits

paysans, cavaliers, et les petites demoiselles. Mais on connaît

mieux l’enfance, rien que quand on prend conscience de ce

monde immense, que personne ne peut s’empêcher d’aimer.

Quand on aime l’enfance on favorise ses jeux, ses plaisirs et son

aimable instinct.

L’enfance, comme le bonheur, n’est pas le résultat d’une

observation sur des conditions ; mais bien au contraire, c’est une

prise de conscience individuelle. L’enfant ne sait pas s’exprimer

dans des termes clairs à dire mais par un geste ou une façon

sensible à dire.

L’enfance est enfouie en nous-mêmes, dans notre propre

mémoire, la Comtesse a bien vécu cette expérience, et l’a

communiquée aux autres.

Les lecteurs enfantins de la Comtesse, avaient contribué à

interposer entre le monde de la réalité extérieure et elle, un

monde imaginaire « peuplé d’êtres selon son cœur » (3), dans lequel

elle a vécu jusqu’à sa mort, elle s’est comblée, elle a tiré des (3)

–Francis Marcoin, La Comtesse de Ségur ou le bonheur immobile.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre II

77

jouissances, telles que personne avant elle n’en avait ressenti,

mais qui l’a rendu « la plus malheureuse des femmes », c’est la

coupure entre le réel et l’intégration au monde sensible de la

réalité.

Eduquer ses petites filles Les Petites filles modèles, c’est

affuter leurs sens et leurs faculté à percevoir, dans toute sa

réalité et dans les domaines de l’affectivité, comme dans celui de

la sensation, qui a éveillé chez Sophie des Petites filles modèles

que des sentiments qui correspondaient à des événements réels, à

des instants vécus.

A la fin du roman, elle commence déjà à penser à devenir

meilleure et d’en faire toujours autant, ce que nous montrons

dans le passage suivant :

« Sophie ne répliqua pas : dans son cœur elle se comparait à Camille ; elle reconnaissait son infériorité ; elle demandait au bon Dieu de la rendre bonne comme ses amies, et ses

réflexions devraient lui profiter pour l’avenir ». (4)

Il faut que l’homme se mette à vivre une vraie vie, et peu

imaginaire et pour cela, l’écarter des stimulants de l’imagination.

Au contraire, il ne faut lui permettre que des réactions à des

excitations réelles, concrètes et sensibles.

(4)

–Les Petites filles modèles chap. « La partie d’âne » p : 253-254.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre II

78

C’est à travers ces filles (Madeleine, Marguerite, Camille et

Sophie), qu’il y a une quête incessante de la réalité, une mise en

garde contre la rêverie qui, peu à peu, submergera l’existence de

Ségur elle-même. C’est dans cette volonté de défense de l’âme et

du corps que s’est formée la pédagogie ; c’est laissez mûrir

l’enfance chez les enfants.

Même si, apparemment, l’intelligence enfantine se manifeste

par la vivacité et la souplesse, ne pas prendre ces tendances,

pour les capacités formées, propre à dominer la pensée logique.

Autrement dit, l’enfant ne retient qu’une expérience, une

connaissance, une idée que lorsqu’elle peut être totalement

ressentie, comprise ou assimilée.

Enfin, ne jamais forcer son niveau de compréhension, ni ses

possibilités d’émotions et en position avec la sacralisation d’un

savoir universel, introduire une notion nouvelle et primordiale,

celle de l’utilité, relative à l’individu.

En particulier, en ce qui concerne l’éducation morale, celle

qui préfère absolument le néant à l’artifice et un être amoral, qui

se conduirait comme un animal, à un enfant docile obéissant

mécaniquement à des principes préétablis, car la conscience

enfantine encore endormie ne peut pas prendre les impératifs

moraux, qui pour l’écrivain ne correspondent à aucune

expérience réelle. Enfin l’éducation permet de ne pas créer chez

l’enfant des habitudes mentales toujours stérilisantes.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre II

79

Ce rapide aperçu de la pensée pédagogique de Ségur dans ce

qu’elle a de profondément original, permet de mieux comprendre

sa position, par rapport au livre. Assurément, l’instruction ne doit

jamais se faire à partir du livre mais juste le prendre comme un

modèle.

Comment comprendre et pratiquer le message de la

Comtesse ? On peut l’interpréter de façon absolue et appliquer

véritablement une éducation négative, ce qui est une

contradiction dans les termes et un paradoxe, ou bien retenir

certains aspects, pas toujours les meilleurs de la méthode, ouvrir

aux enfants le livre de la nature et apprendre tout le temps et à la

faveur de tout.

On est au meilleur éclat d’esprit, et de la démonstration.

Chaque saynète tend à un but précis et sa dramatisation doit

amener immanquablement pour l’enfant lecteur, une

connaissance de plus, la guérison d’un défaut, la punition d’une

action malencontreuse.

La forme du dialogue établi entre lecteur et enfant est une

relation mécanique : question – réponse. Enfin, elle oblige le héros

à être perpétuellement en scène, à jouer son rôle d’enfant

désobéissant, égoïste, autoritaire, le cas de Sophie Fichini.

La Comtesse à mis à jour l’âme enfantine. Eclair génial qui

n’illumina, ni ses contemporains ni ses successeurs. Pendant un

siècle, l’enfant continue à être mal compris, hors des consciences

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre II

80

et des sensibilités, seuls les pédagogues l’avaient fait parler, mais

dans un langage convenu, où les enfants ne pouvaient se

reconnaitre.

A cette manière typographique se mêle une image qui

raconte dans son langage propre, se faisant contrepoint,

explication ou prolongement du texte, et c’est donc une

promenade inattendue, que chaque album des Petites filles

modèles propose à l’enfant. La fin du roman annonce une autre

nouvelle ou un autre roman, la Comtesse déclare :

« Le bonheur des enfants dura deux mois, pendant lesquels il se passa tant

d’événements intéressants que ce même volume ne pourrait en contenir le récit. Mais

j’espère bien pouvoir vous les raconter un jour » (5)

C’est le roman qui vient après Les Petites filles modèles, dont parle la Comtesse, et qui s’intitule Les Vacances (1859).

Ainsi parvient-on à une lecture active, qui fait appelle non

seulement, aux mécanismes psychologiques mis en œuvre

habituellement, mais entre autres à l’observation, à l’initiative, à

l’imagination.

Ce qui touche cette fois à la technique du récit c’est de

s’appuyer de l’expérience vécue, concrète sans jamais faire appel

aux connaissances livresques (6) ou abstraites et par conséquent,

(5)

–Les Petites filles modèles p : 254. (6)

Adjectif, qui émane d’une connaissance essentiellement basée sur la théorie et non la pratique.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre II

81

se défier des allusions, des souvenirs imprécis, des comparaisons

littéraires, du discours direct, du terme général.

Au contraire, ce fait d’employer toujours à travers un style

direct, concret, le mot qui fait image. En ce qui concerne le

contenu, les petites filles présentent à l’enfant des thèmes qu’il

peut, et dont il peut dominer, ainsi s’emparer entièrement et qui,

étant toujours liés à la vie organique, à l’action dans ce qu’elle a

d’essentiel et de primordial (jouer, rire, agir, apprendre, épanouir

son corps), peuvent être considérés comme universels.

Donc, l’enfant lecteur aime se sentir rassuré

intellectuellement et content affectivement. Il aura entièrement

assimilé l’histoire sans avoir jamais été inquiété, ou agressé par

quelque excitation trop forte pour lui.

Les albums pour tous les petits, qui satisferont le besoin

d’activité, permettent d’arriver à une création qui aide l’enfant à

prendre conscience de son moi, à se reconnaître et à se comparer.

Les albums de nature à situer l’enfant dans un milieu où il

se retrouve, dans lequel il se reconnaît, en revanche, l’inquiétude

et le devenir sont des éléments essentiels qui manquent à

certains personnages.

Leur état d’enfance n’est jamais en péril, non seulement il

n’est pas question pour eux de grandir, mais il semble même

qu’ils n’en auront jamais la possibilité.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre II

82

Enfants, ils demeurent, et ils ressentiront la joie de l’être

pour un moment. Ainsi semble écarter apparemment, le désir que

tout enfant aspire à devenir adulte, désir qui s’accompagne de

crainte et d’angoisse. Car le besoin rempli de sécurité affective

qu’éprouve chaque enfant ne va pas sans un grand désir

d’émancipation.

La cellule familiale et la volonté de courir le monde sont des

impulsions qui caractérisent l’enfance. Cette dernière est

exprimée avec force dans le conte populaire dans le thème des

enfants égarés notamment.

Il est paradoxal de penser que l’effort des pédagogues n’a

pas abouti, à produire des œuvres en collaboration avec les

enfants. Des œuvres, auxquelles ils n’auraient pas participé en

tant que cobayes dociles ; mais qu’ils auraient bel et bien

élaborées eux-mêmes.

Le roman peut aussi prendre pour sujet, l’éducation

elle-même, c'est-à-dire la formation morale de l’enfant.

CChhaappiittrree IIIIII LLaa lliittttéérraattuurree eennffaannttiinnee

1. L’autre côté chez la Comtesse de Ségur (la santé).

2. Etude de la littérature enfantine

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre III

84

III.1 L’Autre côté chez la Comtesse de Ségur (la santé) :

Il est pour le moins surprenant de découvrir la

préoccupation de la Comtesse de Ségur pour tout ce qui

relève de la santé ; on compte parmi ses écrits un livre de

remède et de conseils d’hygiène à l’usage des nourrissons.

Elle le dit franchement dans l’une de ses lettres à sa fille :

« Je n’ai pas la présomption de vouloir faire un livre de médecine… »(1).

Elle veut faire profiter ses lecteurs et surtout ses

lectrices, aussi bien de son expérience de mère de huit

enfants, que de grand-mère.

A l’époque, un enfant sur trois mourait avant l’âge de

cinq ans. Elle-même avait perdu Renaud son deuxième né.

Sans doute ambitionne-t-elle de mettre en garde les mères

sur cet aspect de l’éducation. La Santé des enfants (1855)

ce titre représente toute une collection de recettes qui

s’appliquent à l’alimentation, le vestimentaire, les soins en

cas de blessures ou de maux plus graves.

Elle recommande le « café de glands », les soupes

grasses, l’eau rougie, dès dix-huit mois.

Elle recommande par exemple de proscrire les

confiseries qui sont « détestables », surtout entre les

(1)

Lettre à sa fille Vicomtesse de Pitray, Ségur.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre III

85

« repas », de ne donner des pâtisseries que « par exception,

c'est-à-dire une ou deux fois par mois ».

Elle défend autant que possible, les petits repas

médiocres entre les repas.

Chapitre concernant les vêtements, allant à l’encontre

de l’usage de l’époque, elle conseille d’éviter de serrer le

nourrisson dans les langes, mais de lui laisser les jambes

libres.

On retrouve dans ses autres œuvres cette

préoccupation, pour l’alimentation avec des

recommandations qui font sourire.

Dans Les Petites filles modèles, madame de Rosbourg

offre du vin à Marguerite (âgée de quatre ans) (2). Pour faire

passer son déjeuner, et tous les enfants demandèrent du

vin, et burent à la santé de leurs mamans.

C’est dans les soins proprement dit, que la Comtesse

donne les conseils, sinon les plus judicieux, du moins les

plus intéressants.

Pour guérir les écorchures : pommade de concombre.

Elle voulait même indiquer un remède contre la rage, mais

son éditeur a reculé devant l’indignation du corps médical.

Elle le donne tout de même dans les Petites filles modèles.

(2)

Les Petites filles modèles, Chap. 14.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre III

86

Marguerite a été mordue par un chien enragé et

madame de Fleurville lui déclare :

« Tous les jours matin et soir, tu tremperas ta main dans de l’eau salée pendant un quart d’heure, tous les jours tu mangeras deux fortes pincées de sel et une petite gousse

d’ail. Dans huit jours ce sera fini » (3).

Il serait intéressant de connaître la réaction sinon

l’avis de Louis Pasteur s’il avait lu La Comtesse de Ségur.

Au fil de ses œuvres, on voit cette préoccupation de la

Comtesse. Et là, elle ne s’adresse peut-être pas aux enfants

eux-mêmes, mais aux « lecteurs intermédiaires » qui, tout

en lisant les histoires aux enfants, sortaient enrichis par

ces leçons d’hygiène.

(3)

Les petites filles modèles P : 40

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre III

87

III.2 Etude de la littérature enfantine :

Au premier lieu, on commence par la question suivante : En

quoi consiste la littérature enfantine ? Question que chacun

d’entre nous ; enfants, parents, éducateurs ou « prescripteurs »

comme on dit maintenant, mais aussi producteurs, créateurs et

fabricants ou encore hommes et femmes de la rue et lecteurs

éventuels, sont libre de réponde ce qui lui convient, selon la

variété des termes de l’énoncé, selon le remplacement du terme

littérature par « livres » aussi enfants par « jeunes »…

Pour tenter de savoir, nous répondons qu’il n’y a pas que la

« bonne » littérature, loin d’être dépourvu de sens, mais comme de

dire qu’il n’y pas d’enfants, mais des lecteurs (ou des non-

lecteurs). Ce sont bien là des réponses à la seule condition

qu’elles ne soient pas péremptoires. Quelles se désignent bien

comme contingentes et non dogmatiques.

Une autre question s’impose: qu’est ce que « la littérature

enfantine » ? Tentons de donner des réponses ouvertes. Pour

analyser les termes historiquement et sociologiquement.

Nous tentons de répondre par la citation suivante: « La

littérature enfantine, encouragée par le Journal des enfants que

crée en 1833 Loève-Viemars, et qui commence dès ses premiers

numéros une des œuvre les plus populaire du genre : Jean-Paul

Choppart de Louis Desnoyers, suivi bientôt de Robert-Robert.

C’est pour les enfants que Jules Sandeau écrira la Roche aux

Nouettes, et Alexandre Dumas la Délicieuse histoire d’un casse-

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre III

88

noisettes. A partir de cette époque, chaque génération d’adulte

aura sa littérature pour enfants et adolescents, qui marquera sur

la génération suivante ». (4)

Le maître-mot ici est bien « enfance », ce terme est l’un des

plus importants de notre civilisation présente. L’interrogation sur

les rapports adultes-enfants est fondamentale aujourd’hui, au

point qu’une société se définit ou se présenter à travers son

image.

Il n’en n’a pas toujours été ainsi, comme a pu l’affirmer

Philippe Ariès : « l’idée même de l’enfance, donc sa présentation,

est un phénomène purement social et historiquement daté… » (5).

L’enfance n’a pas toujours été ressentie comme telle, ne l’est

toujours pas dans certaines civilisations. Il est évident, mais

aussi nécessaire de dire que l’existence d’une littérature pour

enfants est tributaire d’abord du monde de l’enfance.

Dans l’Europe médiévale, il y avait bien des enfants, ou

plutôt des individus n’ayant aucunement joui de leur statut

d’enfants auprès des adultes ; aux sentiments, aux désirs,

conditionnés par les obligations de leur catégorie sociale, à

l’intelligence et au savoir à peu près égaux à ceux des adultes,

amis de l’enfance, l’enfance telle que nous la ressentons

(4)

– Histoire de la littérature française, Albert Thibaudet P : 249. (5)

- Philippe Ariès, l’enfant et la vie familiales sous l’ancien régime, Paris le seuil, « Univers

historique », 1973.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre III

89

maintenant où est-elle ? Assurément, elle n’existait pas dans la

conscience des hommes.

Le fameux constat de Rousseau : « on ne connait pas

l’enfance », a eu l’effet d’un carillonnement à l’orée d’une ère

nouvelle comme s’il s’agissait d’une découverte d’un univers

caché qui se révélait soudain aux yeux émerveillés du philosophe.

Voici disait-on, une des plus importantes révolutions du siècle

une révolution aussi absolue et quasi-totale que la révolution des

peuples arabes d’aujourd’hui.

L’éducation dans son système d’organisation du monde, a

déjà accompli et compris que la société devrait tenir compte de la

relation adulte-enfant.

La réalité du livre pour enfants pourrait être déterminé par

la méthode proposée telle qu’elle est aujourd’hui, et à partir de

cette réalité, tenter une analyse afin de dégager un peu ce qui,

dans cette réalité peut se définir comme « littérature ». Puis d’en

examiner les étapes et les développements.

Il s’agit lit-on dans l’Histoire de la littérature française

« d’un genre dominateur, absorbant, qui crée un besoin, s’impose

aux lecteurs et au public, auquel se croiront obligés de sacrifier

jusqu’à Taine, Renan et Renouvier, et qui inaugure dans la

création littéraire presque un nouveau règne ». (6)

(6)

- Histoire de la littérature française, Albert Thibaudet 1981 P : 249.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre III

90

Dans les pays développés, ayant à peu près surmonté les

problèmes de l’alphabétisation et de la scolarisation, un

important secteur de la production du livre, est consacré aux

enfants.

D’abord on retrouve les livres de classe, les ouvrages de

vulgarisation périscolaire, l’album d’images et aujourd’hui, le

livre-jeu et le livre gadget en tissus…

Ces livres qui sont, ou ont été lus par les enfants, tout au

moins qui sont vendus comme tels, ne peuvent être rassemblés

sous un dénominateur commun.

En effet, en l’absence de tout instrument sérieux d’analyse,

on ne peut guère travailler, qu’à partir d’intuitions. Alors que la

production est depuis des années en croissance continue, que le

discours sur le livre d’enfant devient de plus en plus prégnant par

des rencontres, colloques, campagnes de sensibilisation.

Si on peut dire que les enfants lisent certains livres

d’aventures, il faudra conclure immédiatement à l’existence d’une

« littérature enfantine », dans les histoires générales rares sont les

auteurs pour enfants qui figurent à ce titre. Il faut être d’abord et

avant tout, des écrivains pour enfants soustraire par les

historiens de la littérature.

Jusqu’à présent en effet, ce sont d’abord les pédagogues,

puis à un moindre titre les sociologues, qui selon leurs

préoccupations et dans leur langage propre ont enquêté, on mit à

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre III

91

jour certaines des composantes de cette littérature et tenté d’en

proposer des analyses et d’en vérifier la place et la signification

dans la vie actuelle des enfants.

Des éditeurs ayant pignon sur rue, maintiennent encore à

leurs catalogues des collections de « chef-d’œuvre », condensés ou

réécrits à l’usage des enfants. La couverture cartonnée et illustrée

destiné à un public enfantin.

Ces ouvrages de littérature enfantine, ou pour enfants

surcroit, mieux. Les parents, les enseignants restent persuadés

que c’est bien là qui est la bonne lecture et qu’il n’existe pas

d’autre.

Une contradiction entre les intentions d’un auteur, et

l’interprétation de cet auteur par les adultes, selon qu’ils se

sentent ou non concernés par les problèmes de l’éducation, par

exemple : Jules Verne écrivait intentionnellement pour les

garçons de onze à quatorze ans, et Dickens, quant à lui ne

pensait aucunement à un tel public.

Restent les « classiques », quelle que soit l’œuvre d’un auteur

particulier, elle devient un phénomène rarissime en France, où le

modèle reste la Comtesse de Ségur, soit un livre ou quelques

livres qu’un écrivain un jour, par hasard, par caprice, aura écrit à

l’intention des enfants.

Naturellement, tous les enfants, ceux qui ne savent pas

encore lire et ceux qui ne le sauront jamais enfant d’hier et

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre III

92

d’aujourd’hui, qui sont ou ont été privés de livres, connaissent,

aussi bien que les autres, la joie d’être attaché, conquis.

La littérature est aussi orale et, plus que toute autre forme

d’expression, la littérature enfantine prend sa source dans le

folklore. Certaines formes folkloriques sont curieusement

enfantines à un moment donné comme les historiettes, les fables,

les récits sont reconnus comme enfantins dans le jugement de

l’adulte.

L’enfant suit et imite les héros de ses histoires avec une âme

innocente, aussi reçoit-il les instructions cachées. Cette imitation

nous la voyons dans la tristesse, dans l’abattement, tout comme

les héros ou l’héroïne du conte. D’autre part nous les voyons

pleurer pour leurs malheurs, et s’écrier de joie quand le temps de

leurs bonheurs arrive.

Contes, récits, histoires et surtout comptines participent au

divertissement des enfants. Ils excitent aussi l’émotion qui libère,

en un mot apportent l’émerveillement, l’incomparable plaisir de la

fiction.

La comptine est en soi un jeu verbal, mais aussi qui

introduit un autre jeu. Elle détermine et développe tout un

comportement ludique. Elle est donc outil de jeu, par exemple le

jeu (loup où es-tu ?)

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre III

93

En effet, tout jeu suppose une structure et un support,

même si ce support n’est qu’idéologique, à ce moment là le récit,

la randonnée sont bien des supports de jeu, donc des jouets.

Ils ne peuvent évidemment trouver une dimension spatiale

avant certains progrès techniques. On peut cependant voir des

traces de leur mise en forme avant la diffusion de l’imprimerie.

Aussi bien dans l’antiquité gréco-latine qu’à la renaissance, il

existait des images, des bestiaires en bois ou en os. Et les

alphabets étaient bien souvent, présentés de façon ambigüe.

Conçus pour apprendre à lire, ils offraient aussi de manière

amusante et appétissante, comme ces lettres-gâteaux que,

d’après Quintilien (7), qui déclare que les boulangers de Rome

fabriquaient pour les enfants. Si certains jouets sont millénaires,

contes, récits, comptines le sont également et devraient un beau

jour, s’accomplir tout naturellement dans le livre.

On peut se demander où, pourquoi, comment s’est imposé

la nécessité de faire passer ces récits d’imagination du stade oral,

au stade écrit, et de choisir parmi les volumes ainsi composés,

ceux qu’on allait préserver aux seuls enfants.

Cela ne pouvait se produire, que dans les pays développés

sur le plan économique et social parce que le public enfantin était

assez largement scolarisé pour savoir lire et assez libéré pour

(7 )

- Quintilien :(v.35-v.95) rhétoricien romain, né en Espagne, étudie à Rome. Il reste aujourd’hui célèbre pour

son chef-d’œuvre en douze volumes Instituto oratoria (Institution oratoire, v.95 après J.C). Dans les premiers

volumes, il aborde la question de l’éducation élémentaire telle qu’elle était menée à Rome. Il exerça une

influence considérable sue les théories humanistes en manière d’éducation pendant la renaissance.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre III

94

pouvoir consacrer une partie de son temps au plaisir gratuit de la

lecture.

Ainsi, normalement, devrait-on trouver une littérature pour

enfants, dans la plupart des pays européens, en Amérique du

Nord, et là, où l’Amérique latine est parvenue à constituer une

bourgeoisie, enfin dans les pays d’Extrême-Orient, aux très

anciennes traditions culturelles comme le Japon, la chine, la

Corée…

La Fontaine, bien que ses œuvres soient les plus difficiles à

lire par exemple Les Fables (8), mais aussi celui qu’on doit lire. Ses

écrits représentent la beauté mais, aussi la typographie et la

disposition des livres, c’est celui qui représente aux élèves

l’exercice de virtuosité.

Cependant, nous refusons de faire subir, à cette littérature

pour enfants, un découpage géographique : littérature française,

anglaise, allemande, etc.… ; ce qui serait, précisément, négliger

sa spécificité, pour s’attacher aux aspects pittoresques et donc

secondaires.

Les premiers alphabets, des recueils de pensées pieuses, de

rares curiosités, comme certains rouleaux japonais, dont les

(8)

– Jean de La Fontaine (1621-1695), écrivain des Fables, héritées de la tradition orale. Les premières fables proviennent de l’Orient avec le Panchatantra qui rassemble contes et fables de la péninsule indienne et de l’Occident avec les œuvres de Grec Esope, réunies par Phèdre. La Fontaine adapte les fables d’Esope et Phèdre en cherchant tout autant à plaire qu’à instruire.

Partie II : L’Education en rapport avec la littérature française Chapitre III

95

personnages sont des animaux humanisés, avec tant de

gentillesse.

Quelques récits du moyen âge où, apparaissent des figures

enfantines, tels furent, les premières livres conçus pour les

enfants.

En définitive, la littérature enfantine sert à fournir des

connaissances concrètes et déboucher sur une morale sans

inquiétude, il faut raconter aux enfants ce qu’il leur fait plaisir.

CCoonncclluussiioonn

Conclusion

92

CCoonncclluussiioonn

La Comtesse de Ségur, est une institutrice à ses enfants, qui

évoluent à l’intérieur d’une culture commune, et ingénument

partagée.

Une grande quantité de titres, de collections, de contes et de

romans n’étaient encore ni un enjeu, ni vraiment une marche,

mais plutôt une friche à la nécessité éducative, et à l’intérêt

économique non reconnus et, par conséquent, non orientés.

Ses œuvres existaient fortement et ce sont elles, encore

aujourd'hui, qui témoignent de la réalité d'une littérature

enfantine. Cerner dans le temps et l’espace, entièrement

dépendante à l’existence d’une société bourgeoise et lettrée, elle a

été une expression de la découverte, puis, la considérer

absolument digne du respect de l’enfance.

Ses œuvres sont dans toutes les mémoires, il suffit de sortir

du livre un ou deux titres, et on aura aussitôt les caractéristiques

de cette littérature, ainsi que ses contradictions.

Ce sont là, manifestement des œuvres singulières, parfois

même des chefs–d’œuvre écrits pour les enfants, et lus quasi

exclusivement par eux. La Comtesse s’est exercée de façon

d’autant plus heureuse, qu’elle a longtemps bénéficié une

agréable liberté.

Conclusion

93

De nos jours, les livres pour enfants sont une nécessité

évidente, absolue, au même titre que les matières de l’école

primaire : lecture, écriture, compte.

Aujourd’hui ,éducateurs ,parents ,chercheurs ,auteurs et

enfants eux même savent que, s’il faut apprendre à lire ,écrire et

compter, c’est pour découvrir, et aimer l’immense production

d’albums d’images, de récits , contes ,romans ,bandes dessinées

par genre, et selon les âges, du bébé au jeune adulte. Il n’y a plus

d’enfants, il n’y a que des tranches d’âge.

Les enfants modèles de la Comtesse de Ségur, étaient aussi

des enfants tout court, avec les caractéristiques de leur âge, état

transitoire et amendable, ainsi qu’en témoigne le fascinant

personnage qui est Sophie Fichini.

Pourtant, si les enfants de Mme de Ségur sont assurément

des enfants, tels qu’on pourrait les représenter aujourd’hui, les

grandes personnes chargées de les éduquer, ne sont pas des

adultes.

A première vue, elles sont des stéréotypes, bonne mère ou

marâtre, mais plus profondément, elles sont des joujoux entre les

mains de l’enfant, des doubles caricaturaux d’eux-mêmes.

La Comtesse, en choisissant l’enfance n’a pas supprimé les

grandes personnes, mais leur a retrié leur caractéristique

d’adulte. En son temps elle reste aussi exemplaire qu’isolée.

Conclusion

94

Parallèlement à ses enfants postulateurs, et plus en moins

pervers, l’âge d’or de la littérature enfantine à rêver sur un autre

enfant, ou plutôt sur une enfance, autre plaine d’imaginaire.

Là, il ne s’agit pas de devenir coupable, ou victime de

l’enfant, mais s’en faire le complice. D’être, précisément, un lieu

entre un temps purement adulte abstrait, puisqu’il ne peut plus

se concevoir sans souvenir, sans l’enfance, et cet état de grâce

transitoire est d’autant plus précieux.

Au terme de ce travail nous avons montré, que l’éducation

des enfants par les histoires est parmi la meilleure méthode

d’éducation, et le modèle que propose la Comtesse dans Les

Petites filles modèles est, de faire de l’enfant son complice, et

avec respect, donc le modèle à suivre est la compréhension

mutuelle entre parents – enfants.

La grande personne qui éloque à l’enfant est la littérature

personnifiée.

Nous nous demandons alors, maintenant qui lit quoi ? Et

que lisent les enfants de notre siècle ? La réponse à cette question

pourra être la problématique d’une autre recherche aussi

importante que profitable.

LLiissttee

BBiibblliiooggrraapphhiiqquuee

96

BBiibblliiooggrraapphhiiee

(I) Corpus :

La Comtesse de Ségur, les Petites filles modèles, Bookking

international, paris 1995.

(II) Œuvre de Ségur :

La Comtesse de Ségur, Les Malheurs de Sophie, Bookking

international, Paris 1995.

La Comtesse de Ségur, Le Général Dourakine, Robert Laffont, 1990.

La Comtesse de Ségur, Un bon petit Diable, Hachette, 1980.

La Comtesse de Ségur, Quel amour d’enfant, Hachette, 1989.

(III) Œuvre sur La Comtesse de Ségur :

Bluche François, Le Petit monde de La Comtesse de Ségur, Hachette,

1988.

Diesbasch Ghisbain, La Comtesse de Ségur née Rostopchine, 1799-

1874, Paris, Perrin, 1999.

Doray Rivages Marie France, La Comtesse de Ségur, une étrange

paroissienne, Rivages, 1990.

Duculot Luce Fillol, La Comtesse de Ségur, Hachette, 1981.

Dufour Horteuse, La comtesse de Ségur, Paris Flammarion, 1990.

Marcoin Francis, La Comtesse de Ségur ou le bonheur immobile, Press

Université, 1999.

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(IV) Œuvres générales :

Aries Philippe, L’enfant et la vie familiale sous l’ancien régime, Paris, le

Seuil, « Univers historique », 1973.

Barthe Roland ; Nadeau Maurice, Sur la littérature, Presse Université

de Grenoble, 1980.

Bergez Daniel (Dir), Précis de la littérature française, Nathan 2002.

Bergez Daniel, Introduction aux méthodes critiques pour l’analyse

littéraire, Dunod 1999.

Colin Mariela, La Littérature d’enfance et de jeunesse, en France au

XIX° siècle, Paris, Presse Universtaire de la Sobonne, Nouvelle, 1992.

Formilhage Catherine, Introduction à l’analyse stylistique, Nathan, éd

2002.

Gengembre Gérard, Les Grands courants de la critique littéraire,

Paris, seuil, 1996.

Hamon Philippe, Pour un statut sémiologique du personnage, Seuil,

coll. point, 1977.

Jan Isabelle, la Littérature enfantine, les éditions Ouvrières, Paris,

1984.

Jouvé Vincent, L’Effet personnage dans le roman, Fuf, coll., Ecriture,

1992.

La Garde, Michard, XX Siècle, Les Grands auteurs Français, Bordas,

Aout, 2005.

Maingueneau Dominique, Gilles philippe, Exercice linguistique pour le

texte littéraire, Nathan 2002.

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Maingueneau Dominique, Les termes clés de l’analyse du discours, éd

Seuil, 1996.

Mitterrand Henri, Le Discours du roman, Paris, Puf, 1980.

Pourchot Nicol, Lexique de figures de style, Armand Colin, Paris

2002.

Renonciat Annie, livre d’enfance, livre de France, Paris Hachette,

1998.

Renonciat Annie, L’Image pour enfants, La Licorne, 2003.

Sarfati Gearges Alia, Elément d’analyse du discours, Nathan, 1999.

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Réed, Delagarde, 2002.

Soriano Marc, Les Contes de Perrault, Gallimard, 1968.

Thibaudet Albert, Histoire de la littérature française, Marabout,

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(V) Usuels

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Béros Aline Armelia, Améliorer votre styles, T1, Hachette, Paris, 1978.

Dictionnaire des littératures de langue Française, Bordas, Paris,

volume III, 1984.

Dictionnaire biographique des Auteurs, Robert Laffont, 1983.

Dictionnaire des œuvres, Laffont, 1988.

Dictionnaire des littératures, Larousse, 1990.

Dictionnaire des personnages, Robert Laffont, 1983.

Dictionnaire le Robert, 1991.

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Dictionnaire des synonymes de la langue française, Ripert Pierre,

Maxi-Livre, Larousse, 1970.

Dictionnaire des synonymes, Larousse, 1970.

Hamon Philippe, Hoger Denis, Vasselin, Le Robert des grands écrivains

français de langue française, Robert, 2000.

Microsoft Encarta 2008.

(VI) Articles :

Dossier Comtesse de Ségur, Revue de livres pour enfants, n°131_132,

1990.

La Comtesse de Ségur et ses alentours, Cahier Robinson, n°09, 2001.

Lettre à sa fille Vicomtesse de Pitray née Ségur, éd Hachette, 1984.

L’Education des petites filles chez La Comtesse de Ségur, P U, Lyon,

1987.

Maingueneau Dominique « ces tendances françaises d’analyse du

discours », compte rendu de conférence donnée à l’université d’OSKA le

12 novembre 1998.

(VII) Guide de choix d’ouvrages :

Bron Claude ; Romanciers choisis pour l’enfance et l’adolescent,

Hatier Rageot, 1972.

Causse Rolande, Guide des meilleurs livres pour enfants, Calman-

Lévy, 1985.

Causse Rolande, Qui a lu petit lira grand, Plon, 2000.

100

Fano Daniel, Biblio junior, guide du livre pour petit et grands enfants,

Bruxelles, Le Cri, 1993.

Guide des livres documentaire pour la jeunesse, lire pour

comprendre, Septembre, 1995.

Guide de l’édition jeunesse, 2003.

TTaabblleess ddeess mmaattiièèrreess

Table des matières

102

TTAABBLLEE DDEESS MMAATTIIEERREESS

Sommaire

Introduction……………………………………………………………………………………………………… 02

PARTIE I : L’Oeuvre Ségurienne en rapport

avec l’éducation

Chapitre (I) : Eclairage sur l’œuvre ségurienne

I.1 Biographie de l’auteur…………………………………………………………......……

08

I.1.a L’œuvre romanesque …………………………………………………………......... 10

I.1.b Les personnages ………………………………………………………………........... 12

I.1.c L’écrivain……………………………………………………………………….…..….. 15

I.1.d Personnalité de Sophie de Ségur……………………………………............…… 17

I.1.e Epilogue………………………………………………………………….....…………... 18

I.2 Présentation globale de l’œuvre de la Comtesse de Ségur ………................... 20

I.3 A propos du thème « petites filles » dans la littérature française...................

Chapitre (II) : Un classique d’éducation pour enfants

24

II.1 Contraste et contradiction, comment Ségur voie l’enfant………...….................. 28

II.2 Ségur classique pour enfants, modèle d’éducation …............................................. 31

II.3 L’éducation par les histoires dans les petites filles modèles……..................….. 39

Table des matières

103

PARTIE II : L’Education en rapport avec la littérature enfantine

Chapitre (I) : Etude du contexte chez ségur

I.1 Contexte socio-culturel de la production de l’œuvre ségurienne…..................... 52

I.1.a Un sens à la chose…………………………………………..................................... 54

I.2 Le sens de la famille chez la Comtesse…………………....….............….........……… 57

I.3 L’aventure dans le roman de la comtesse…………………...............……..…………. 63

Chapitre (II) : La production chez la comtesse

I.1 Contexte de production ………………………………...........……..................................... 68

II.2 L’Enfant chez la comtesse de ségur ………………..................................................… 71

Chapitre (III) : La littérature enfantine

III.1 L’autre côté de la Comtesse (la santé) ……………...........................................…… 79

III.2 Etude de la littérature enfantine …………............................................……………… 82

Conclusion…………………………………………………………………........…........................

92

Liste Bibliographique ………………………………………….......………............................... 96

Table des matières……………………………………………………......................................... 102

TTaabblleess ddeess mmaattiièèrreess

Table des matières

107

TTAABBLLEE DDEESS MMAATTIIEERREESS

Introduction……………………………………………………………………………………………………… 02

PARTIE I : L’Oeuvre Ségurienne en rapport avec l’éducation

Chapitre (I) : Eclairage sur l’œuvre ségurienne

I.1 Biographie de l’auteur…………………………………………………………......……

09

I.1.a L’œuvre romanesque …………………………………………………………......... 11

I.1.b Les personnages ………………………………………………………………........... 13

I.1.c L’écrivain……………………………………………………………………….…..….. 16

I.1.d La personnalité de Sophie de Ségur………………………………............…… 18

I.1.e En conclusion…………………………………………………………….....…………... 19

I.2 Présentation globale du roman Les Petites filles modèles ………................... 21

I.3 A propos du choix du thème « petites filles » dans la littérature enfantine.........

Chapitre (II) : Un classique d’éducation pour enfants

25

II.1 Contraste et contradiction, comment Ségur voit l’enfant………...….................. 30

II.2 Ségur le classique pour enfants est un modèle d’éducation............................ 33

II.3 L’éducation par les histoires dans Les Petites filles modèles.................….. 42

Table des matières

108

PARTIE II : L’Education en rapport avec la littérature enfantine

Chapitre (I) : Etude du contexte chez Ségur

I.1 Contexte socio-culturel de la production de l’œuvre ségurienne…..................... 56

I.2 Le sens de la famille chez la Comtesse…………………....….............….........……… 61

I.3 L’aventure dans le roman de la Comtesse………………...............……..…………. 67

Chapitre (II) : La production chez la Comtesse

I.1 Contexte de production ………………………………...........……..................................... 73

II.2 L’Enfant chez la Comtesse de Ségur ………………..............................................… 76

Chapitre (III) : La littérature enfantine

III.1 L’autre côté chez la Comtesse (la santé) …………...........................................…… 84

III.2 Etude de la littérature enfantine …………............................................……………… 87

Conclusion…………………………………………………………………........…........................

97

Liste Bibliographique ………………………………………….......………............................... 101

Table des matières……………………………………………………......................................... 107

RRééssuumméé

La littérature enfantine est un genre destiné aux enfants de tout âge, a une

intention pédagogique et qui est fortement moralisatrice sous un facteur

déterminant dans l’évolution de l’individu. La Comtesse de Ségur est l’une des

écrivains qui a écrit pour les enfants ; son roman Les Petites Filles modèles est un

lieu d’éducation, un mélange d’accident de bêtises, d’erreurs mais qui ne

demandent qu’à être rectifiées avec une méthode plus ou moins compréhensive.

Mot clés : Enfant – Education – Instruction – Roman - Société – Pédagogie -

Littérature enfantine.

Summary

Children’s literature is a genre for children of all ages, has an educational

purpose and that is highly moralistic as a determining factor in the evolution of

individual.

Countess Segur is one of the writers who wrote for children, his work

Les Petites Filles modèles is a place of education, mixture of silly accident, errors

just waiting to be corrected by a method more or less comprehensive.

Key words: Cildren – Education – Instruction – Novel – Society -

Children’s literature.

ملخص

. عامل حاسه يف تطوز الفسدتنضوي حتت أخالقيةاألطفال من خمتلف األعناز، لى أهداف تسبوية ومن اآلداب اليت تعنى بهو الطفل أدب

و مزيج من للتعله هو مكان " منوذجيات صغريات فتيات"عنلوا للطفل، فواحدة من الكتاب الرين كتبوا وتعد الكونتيشة دي سكوز

. أكثس إدزاكا بطسيكة اليت ال تتطلب سوى تصحيحوااحلوادث الشخيفة واألخطاء

لالطفأدب - بيداغوجية – جمتنع – زواية – تعليه – تسبية –طفل :الكلنات املفتاحة