La Perspective future : essai de clarification des ...

33
1 La Perspective future : essai de clarification des construits et utilisations possibles en comportement du consommateur. Auteurs : Ziad MALAS 1 Doctorant, allocataire de recherche, laboratoire GERME, ESA, Université de Lille 2. Adresse : 2 rue de Crimée, 59000 Lille. Adresse de courriel : [email protected] Denis GUIOT Professeur des Universités, Université Paris Dauphine, centre de recherche DRM-DMSP. Adresse : Place du Maréchal de Lattre de Tassigny, 75775 Paris Cedex 16. Adresse de courriel : [email protected] 1 Cet auteur tient à remercier la FNEGE pour son soutien ayant permis un séjour de recherche au département de psychologie de l’Université du Québec à Trois Rivières, séjour à l’origine de la communication.

Transcript of La Perspective future : essai de clarification des ...

Page 1: La Perspective future : essai de clarification des ...

1

La Perspective future : essai de clarification des construits et utilisations

possibles en comportement du consommateur.

Auteurs : Ziad MALAS1 Doctorant, allocataire de recherche, laboratoire GERME, ESA, Université de Lille 2. Adresse : 2 rue de Crimée, 59000 Lille. Adresse de courriel : [email protected] Denis GUIOT Professeur des Universités, Université Paris Dauphine, centre de recherche DRM-DMSP. Adresse : Place du Maréchal de Lattre de Tassigny, 75775 Paris Cedex 16. Adresse de courriel : [email protected]

1 Cet auteur tient à remercier la FNEGE pour son soutien ayant permis un séjour de recherche au département de psychologie de l’Université du Québec à Trois Rivières, séjour à l’origine de la communication.

Page 2: La Perspective future : essai de clarification des ...

2

La Perspective future : essai de clarification des construits et utilisations possibles en comportement du consommateur.

Résumé : Si le rôle du temps dans le comportement du consommateur a été mis en évidence dans de nombreuses recherches, les approches demeurent très variées et le seul construit « temps » paraît large voire nébuleux. Nous nous intéressons ici au temps perspective « celui où l’individu situe son action » et plus particulièrement à celui concernant les évènements à venir. Nous proposons une possible classification qui permet de distinguer et de lier entre eux les nombreux construits utilisés dans la littérature sur la perspective future. L’intérêt managérial et méthodologique de cette classification et des différents concepts mobilisés est montré par un rappel des effets connus sur le comportement du consommateur. Mots clefs : temps, perspective future, orientation temporelle, planification, processus motivationnel. Future Time Perspective: an attempt at clarification of the constructs and

their possible uses in Consumer Research. Abstract: The role of time in consumer behaviour has been displayed in many researches. However, approaches vary a lot and “time” as a construct seems wide if not nebulous. In this paper we focus on “Time Perspective’’, the time ‘‘on which one locates his or her actions’’ and more particularly on the one which refers to forthcoming events. We will try to develop a classification which may enable to make out and link the numerous constructs used in Time Perspective literature. Managerial interest of the different variables evoked is shown by summing up results about their behavioural effects. Key words: time, future time perspective, motivational process, planning, temporal orientation. ____________________________________________________

Page 3: La Perspective future : essai de clarification des ...

3

La Perspective future : essai de clarification des construits et utilisations possibles en comportement du consommateur.

INTRODUCTION

Le temps est un objet de recherche reconnu en sciences de gestion et plus particulièrement en marketing, première discipline de gestion à s’y être intéressé (Tarondeau et Naccache, 2001). Mais le rôle qu’il joue paraît de prime abord difficile à cerner tant l’étendue des phénomènes qu’il recouvre paraît vaste : Il est en effet question de temps lorsque l’on parle de dynamique organisationnelle ou individuelle, d’une ressource nécessaire à l’innovation, la production ou la consommation ou encore de la perception d’une durée, attribut expérientiel plus ou moins valorisé…

Dans le seul domaine du comportement du consommateur, cette étendue des notions

liées au temps peut-être illustrée par la diversité des thèmes de recherches, comme le montre le tableau suivant (Tableau [1] ) :

Tableau [1] : Les phénomènes liés au temps étudiés en recherches sur le comportement

du consommateur.

Type de phénomène lié au temps :

Exemples de recherches :

Perception d’une durée. Durées perçues d’un « vécu » : attentes (Oakes, 2003, Durrande-Moreau et Usunier, 1999), passage d’une publicité (Mantel et Kellaris, 2003).

Effets du passage du

temps sur les besoins et le comportement du consommateur.

Effet du vieillissement sur le comportement d’achat de la personne âgée (Lambert-Pandraud, 2000 ; Guiot, 2006a).

Effet spécifique de l’âge sur la structure de la

consommation (Bodier, 1999).

Le temps comme ressource consacrée à différentes activités.

Explication du temps d’exposition aux différents médias (Hornik et Schlinger, 1981).

Etude de l’effet de l’information sur l’allocation du

temps faite par l’individu sur la façon dont elle va être jugée par des tiers. (Schroeder, 1989).

Explication du temps consacré au magasinage (Mc

Donald, 1994). Comparaison du rôle de la distance temporelle vs.

géographique dans le choix d’un point de vente (Kang et al., 2003).

Page 4: La Perspective future : essai de clarification des ...

4

Effet de la polychronie sur le magasinage des femmes

(Lindquist et Kaufman-Scarborough, 2004). Intérêt de la pression temporelle perçue (Time

pressure) comme base de segmentation parmi les clients d’un détaillant (Van Kenhove et De Wulf, 2000).

Durée du processus

décisionnel.

Etude de la Procrastination (Darpy, 1999), compréhension du déclenchement de l’Achat impulsif (Rook, 1987; Bonnefont et Giraud, 2007).

Le temps perspective dans

le quel le consommateur se projette.

Mise en évidence des différences individuelles quant au rapport au temps-perspective et à ses effets sur les choix de consommation (Bergadaà, 1987, 1988, 1989).

Utilisation de l’attitude à l’égard du passé pour prédire les préférences en matière de produits culturels (Holbrook et Schindler, 1994).

Effet des différences de « style temporel » sur

l’utilisation des téléphones portables en France et en Allemagne. (Valette-Florence et al., 2001).

Impact de l’orientation temporelle sur la perception de la retraite (Tamaro-Hans et Darpy, 2006).

Face à cette variété d’approches du temps, différentes grandes catégorisations existent.

Une des plus anciennes et des plus répandues est sans doutes celle entre un temps naturel et le temps social (notamment, Lauer, 1981 ; Adam, 1988). Le premier étant un temps objectif, correspondant plus à une approche métrique tandis que le second serait un temps bien plus subjectif. Bergadaà (1987), elle, va considérer, d’une part, une dichotomie entre temps externe imposé à l’individu et un temps interne et, d’autre part, une seconde distinction entre un temps fonctionnel et un temps perspective. Le temps fonctionnel désigne le temps conçu à des fins d’analyse ou d’attribution des activités (comme une ressource), le temps perspective désigne le temps « sur lequel on considère les évènements », et permet de comprendre « l’essence d’un événement…ce qui l’a motivé ou le détermine ».

Cette dernière distinction s’avère d’autant plus intéressante en marketing que Davies

(1994) suggère un lien logique entre ces deux pôles : le temps perspective relate du mode d’appréhension, de construction du temps par l’individu, temps qui pourra ensuite faire l’objet de décisions d’allocation ou d’éventuelle planification, nous somme alors dans le temps fonctionnel. Ce lien logique explique que de nombreux travaux sur le temps en marketing ont suivi une approche intégrant à la fois des variables relatives au temps perspective et au temps fonctionnel. On parle souvent dans ces travaux de « styles temporels ».

Page 5: La Perspective future : essai de clarification des ...

5

L’objet de notre communication va porter principalement sur la partie future du temps perspective (la « Perspective Future », ci-après désignée PF) et dans la mesure où elles en découlent directement, sur des variables portant sur l’organisation du temps par l’individu.

Nous essaierons de présenter et de classifier les différents construits relatifs à la PF en

montrant des exemples intéressants de résultats obtenus sur les comportements de consommation. L’exposé comportera 4 parties ordonnées dans une logique de conditionnalité :

_ Présentation des construits permettant à un individu de donner sens à la perspective future. _ Développements sur les attitudes face à l’avenir et l’orientation future qui en découle. _ Synthèse sur les caractéristiques descriptives et motivationnelles de la PF. _ Synthèse sur les variables évaluant la tendance à la planification.

POUVOIR DONNER SENS A LA PERSPECTIVE FUTURE Parler de perspective future fait référence à la notion de « perspective temporelle »

définie par Lewin en 1951 comme étant « à un moment donné, la totalité des vues qu’à l’individu de son futur et de son passé »2. Même si Karniol et Ross (1996) ont montré l’interdépendance qu’il y a entre la représentation du passé et les buts que l’on se fixe pour le futur, les deux zones temporelles ne sont pas symétriques. Si le passé renvoie à ce qui a existé, et à la mémoire, le futur renvoie d’abord à l’imaginaire. Aussi, certaines notions liées au passé, tel le regret qui se définit par sa postériorité à l’acte dont il est l’objet (Delacroix, 2003), ne peuvent avoir d’équivalent dans le futur. La différenciation entre le présent et le futur est en revanche plus ardue, plus exactement, il demeure difficile de séparer le présent d’un futur proche ou du moins d’un futur immédiat pour lequel l’individu se voit obligé d’agir (De Volder, 1979).

La PF constitue un construit assez large relatant des pensées de l’individu vers ce qui

n’existe pas encore. Ici surgit une première interrogation sur la définition de la perspective future: Qu’est-ce qui la distingue de l’imaginaire « pure » ou plus largement de toute image mentale?

La réponse tient dans l’adjectif possessif utilisé dans la définition de Lewin : « son futur ». Il s’agit d’une projection de la personne dans le temps.

L’anticipation comme capacité biologique.

Or cette capacité à se projeter semble spécifique à l’espèce humaine. Si d’autres espèces

sont capables de générer des représentations mentales, la capacité à se projeter dans ces représentations serait spécifique à l’espèce humaine (Roberts, 2002 ; Dortier, 2004). Encore que la capacité à anticiper ne soit pas littéralement innée : Piaget (1958) a ainsi montré que l’aptitude à comprendre que des évènements sont liés entre eux dans le temps et qu’il devenait alors possible d’agir afin de les influencer, constituait une faculté qui se développait progressivement au cours de l’enfance. Atance et Meltoff (2005) montrent notamment une nette évolution entre 3 et 5 ans de la capacité des enfants à se projeter dans le temps et à relier entre eux des éléments 2 The totality of individual views of his psychological future and psychological past existing at a given time.

Page 6: La Perspective future : essai de clarification des ...

6

de récits se suivant dans le temps. Il est à noter que si la capacité se développe au cours de l’enfance, ce n’est qu’à l’adolescence que le futur prend tout son sens aux yeux de l’individu. Piaget (1958) cité par Kestenbaum (1961) déclare ainsi « l’adolescent diffère de l’enfant avant tout en ce qu’il pense au-delà du présent ».

Kastenbaum (1961) parle alors de « perspective future cognitive » pour distinguer la

capacité de l’individu à raisonner dans le futur de la tendance à penser aux événements futurs. Il avait notamment montré qu’il n’y avait pas en matière de capacité cognitive de différences entre les jeunes adultes et les personnes âgées. Néanmoins, certains psychologues travaillant sur le vieillissement3 rappellent que les personnes ayant des défaillances de mémoire ne sont plus aptes à développer une perspective temporelle cohérente dans la mesure où les repères temporels ne sont plus correctement ordonnés.

On constate donc qu’on a un préalable biologique à la constitution d’une PF. La

connaissance de ce préalable peut s’avérer utile en matière de communication à l’égard des tous jeunes enfants, notamment si l’on songe à des messages axés sur les bénéfices attendus de la consommation (du type « consommer A pour devenir B »).

Un sens du futur formé par la culture.

Le sens qu’un individu peut donner à la perspective future, ne vient pas seulement de

l’aptitude que ne venons d’évoquer. Il provient aussi de sa conception même du temps et de la façon dont il se perçoit à un moment donné par rapport au spectre temporel qu’il considère.

La décomposition du temps perspective selon une progression allant du passé vers le

futur n’est pas toujours considérée comme universelle. Plus précisément, Graham (1981) avance que la perception du temps est très liée à la culture et cite l’exemple de langues amérindiennes dont la grammaire est dépourvue de temps. Plus près de nous, on notera que le finnois ou l’estonien n’ont pas de temps futur. Graham perçoit, au moins 3 conceptions du temps: une linéaire-séparable (typique des anglo-saxons), deux conceptions « traditionnelles », l’une circulaire (présente notamment dans les cultures hispaniques) et l’autre procédurale (typique des cultures confucéennes). Gentry et al. (1991) rappellent que différents auteurs lient ces différentes conceptions à des tendances à valoriser certaines zones du spectre temporel: si la conception traditionnelle circulaire valoriserait le présent et la conception traditionnelle procédurale le passé, la conception linaire valoriserait le futur et surtout, serait à l’origine du temps comme ressource susceptible d’être échangée comme un bien marchand (Graham, 1981).

Il est ici intéressant de noter que le fait de vivre dans un temps circulaire marqué par

l’importance de routines permettrait de réduire l’incertitude et l’anxiété liées au futur selon Hazan (1980), auteur qui suppose la prédominance de ce mode de perception temporelle chez les personnes âgées. On se rapproche alors de la thèse de Karl Popper développée dans Misères de l’Historicisme (1956) selon laquelle, du fait de l’incertitude inhérente à l’avenir, les hommes sont attirés par des théories susceptibles de prédire les évolutions historiques et au premier rang desquelles les théories cycliques de l’Histoire.

3 Les professeurs Dubé et Lapierre du laboratoire de gérontologie de l’Université de Québec à Trois-Rivières.

Page 7: La Perspective future : essai de clarification des ...

7

Ainsi, ce mode d’appréhension du temps relève du culturel. Mais indépendamment de tout aspect collectif, un individu va se situer sur la trajectoire de sa vie, entre sa naissance et sa mort.

L’âge d’avoir l’avenir devant soi…

La façon dont l’individu va ainsi se situer est appréhendée par deux principales approches théoriques :

_ Se situer par rapport à la naissance ou par rapport à la mort : certains travaux en

psychologie traitant du rapport à l’avenir des personnes âgées ont mis en évidence que ces derniers pouvaient se distinguer du reste de la population par le repère temporel utilisé. Rakowski (1979) a montré que la plupart des personnes âgées passaient d’une situation où elles se situaient par rapport au temps vécu depuis la naissance à une situation où elles se situent par rapport au temps restant à vivre. Il en résulte une plus difficile projection dans l’avenir. Carstensen ( 1991) distingue quant à elle, un horizon ouvert par opposition à un horizon limité et montre que selon la nature de l’horizon, les objectifs de l’individu diffèrent. Dans le premier cas, les individus vont s’orienter vers des objectifs « instrumentaux », ce qui les rend plus disposés à nouer de nouvelles relations et à s’engager dans des processus d’apprentissage. Dans le second cas, la régulation émotionnelle va être privilégiée notamment en recherchant les contacts avec les proches. S’appuyant sur cette théorie, Drolet et Williams (2005) montrent par des expériences que l’âge et la nature limitée ou ouverte de l’horizon temporel (mesuré par la Future Time Perspective Scale de Carstensen et Lang, 1996) influencent la réceptivité aux messages publicitaires. L’accent mis sur la finitude de la vie et l’âge constituent des conditions favorables à une attitude positive envers des messages jouant sur les émotions et à un taux de rappel élevé de ces mêmes messages. Réciproquement, l’accent mis sur l’étendu du temps restant à vivre et la jeunesse des sujets constituent des conditions favorables à une attitude positive envers des messages fondés sur la rationalité des arguments avancés et à un taux de rappel élevé.

Si Carstensen et al. (1999) supposent un lien entre un horizon limité et le fait de

privilégier les satisfactions immédiates et de vivre dans l’instant présent (« orientation Présent »), le construit qu’ils traitent paraît être en amont, dans la proximité perçue par l’individu de sa fin de vie.

_ Une façon plus-traditionnelle et plus identitaire d’évaluer la position perçue de

l’individu sur son cycle de vie est de considérer l’âge qu’il se donne. De nombreux travaux relient l’importance accordée par l’individu au passé, au présent et à l’avenir, à l’âge chronologique (Schroeder et al., 2001). Dans le même temps, il a été reconnu que cet âge « objectif » ne reflétait qu’imparfaitement la perception qu’a l’individu de son état de vieillissement. Aussi, en marketing, différents travaux se sont focalisés sur l’âge cognitif, "âge qu'une personne estime avoir au fond d'elle-même à partir d'un cadre personnel de référence défini en termes d'apparence physique, d'activités, de sentiments et de centres d'intérêts" (Barak et Schiffman, 1981) et sur l’écart entre cet âge cognitif et l’âge chronologique (appelé «tendance d’âge subjectif »). Guiot et al. (2006a, 2006b ; 2007) montrent que cette tendance permet de segmenter les personnes âgées et les adolescents, et suggèrent qu’une tendance similaire avec l’âge idéal pourrait également mieux expliquer que l’âge chronologique l’importance accordée par l’individu au passé, au présent et à l’avenir.

Page 8: La Perspective future : essai de clarification des ...

8

A l’issue de cette première partie, nous avons mis en évidence qu’un individu ne peut développer une perspective future qu’en fonction d’une capacité cognitive acquise pendant l’enfance. Cette perspective future aura une signification et des limites différentes selon que l’individu considère le temps comme cyclique ou linéaire et selon qu’il percevra sa fin de vie comme étant proche ou non. Mais d’une façon plus générale, il ne suffit pas de donner sens à son futur pour développer une perspective future, il faut aussi avoir envie de penser à son avenir. Il convient donc d’apprécier comment un individu est amené à construire une perspective future par ses pensées.

ATTITUDE(S) VIS A VIS DE L’AVENIR ET ORIENTATION FUTURE DES PENSEES : VOULOIR CONSTRUIRE UNE PERSPECTIVE FUTURE

Si chez certains auteurs, l’attitude à l’égard de l’avenir et l’orientation future sont parfois

confondues avec la perspective future ou classées au rang de dimensions de cette dernière, Nuttin (1985) et Shirai (1996a) les distinguent toutes trois et les mettent à un même niveau. Nous avons suivi ces auteurs car nous défendrons l’idée que l’attitude envers l’avenir influence l’orientation future. Les auteurs définissent ces construits de façons très différentes, aussi nous devons en préalable indiquer les définitions ici choisies des notions d’attitude vis à vis de l’avenir et d’orientation future :

_ L’attitude sera ici définie suivant Eagly et Chaiken (1993) comme étant une tendance

psychologique qui se manifeste par l’évaluation positive ou négative d’une entité, l’entité ici retenue étant l’avenir de la personne. Certains auteurs (Regeth, 1996 ; Thiébaut, 2000) parlent d’affectivité de la perspective future au sujet de l’attitude envers l’avenir.

_ L’orientation temporelle peut-être définie en reprenant la définition du Focus de Settle et al. (1978) à savoir « la persistance à diriger ses pensées et ses sentiments vers une zone temporelle » (Traduction de B. Urien dans sa thèse en 1999) ou celle de Thibaut (1998) pour qui elle désigne « la prédominance avec laquelle le passé, le présent ou le futur occupent l’esprit du sujet ». L’orientation future est alors l’orientation temporelle associée à la zone temporelle constituée par le futur.

Les différentes approches de l’attitude à l’égard de l’avenir.

Sarabia-Sanchez (2005) relie la notion d’attitude à l’égard de l’avenir à deux courants de

recherches très distincts: L’un se situe dans une lignée de travaux économiques sur la confiance en l’avenir et s’appuie sur des outils tels que les indices de confiance ou d’attentes des consommateurs4 (Kinsey et Collins, 2004). L’autre se situe dans une lignée psychologique reliée aux travaux sur l’orientation future que nous traitons dans ce document. Se référer à l’une ou l’autre lignée peut aboutir à des suppositions diamétralement opposées : Ainsi, dans la lignée économique, l’attitude positive envers le futur étant liée à une anticipation d’une amélioration de la situation économique, devrait conduire à réduire l’épargne et augmenter la consommation (Sarabia-Sanchez, 2005) alors que comme nous le verrons, dans la conception liée à l’orientation temporelle, l’hypothèse opposée serait plus facilement avancée.

4 Index of Consumer Expectations.

Page 9: La Perspective future : essai de clarification des ...

9

Plus largement, plusieurs construits se chevauchent autour de l’attitude à l’égard du futur :

De prime abord, l’approche économique que l’on retrouve aussi en finance, est assez

proche de la notion psychologique d’optimisme: il s’agit d’évaluer une anticipation au regard d’une situation personnelle. Ainsi Tourani-Rad et Kirby (2005) parlent d’optimisme de l’investisseur au sujet d’un investisseur qui croit que ses placements s‘avéreront plus rentables que le marché. Nous ne sommes pas là loin de la définition de l’optimisme des psychologues Scheier et Carver (1985), à savoir une tendance générale à anticiper des résultats positifs ou négatifs. Définition qui selon Chang et al. (1997) est la définition de l’optimisme (et du pessimisme) la plus reconnue. On remarque néanmoins que la définition de Scheier et Carver est plus générale quant à la nature de l’objet anticipé, et surtout, l’optimisme est considéré comme un trait stable de la personne, alors que l’optimisme au sens économique correspond plus à une évaluation conjoncturelle. Une autre définition assez connue en psychologie de l’optimisme est donné par Dember et al.(1989) pour lesquels optimisme et pessimisme se réfèrent à une vision positive ou négative de la vie en général. Ici l’optimisme n’implique plus une anticipation, alors que l’optimisme tel que définir par Scheier et Carver est selon Lennings (2000) liée à une orientation vers le futur des pensées et à la tendance à planifier.

Les différences entre construits relèvent aussi de l’intensité et de la présence ou non d’un

aspect motivationnel (absent dans la définition de l’optimisme de Scheier et Carver par exemple). Ainsi certains auteurs (Beck et al., 1974) parlent de désespoir (« hopelessness ») pour évoquer un état de pessimisme élevé (Chang et al., 1994). Pour autant d’après Bruininks et Malle (2005), les principales différences entre l’optimisme / pessimisme et l’espoir / désespoir ne relèvent pas de l’intensité. Le concept d’espoir est défini de deux façons selon les auteurs (et des définitions découlent des échelles de mesure différentes), dans les deux cas on perçoit une différence avec l’optimisme :

_ Averill et al. (1990) mettent l’accent sur l’espoir comme émotion peu contrôlable et positive à l’égard des aléas de la vie. Zaleski rapproche d’ailleurs la notion d’espoir de ce que Weinstein (1980) appelle un « optimisme irréaliste ». Selon Bruininks et Malle (2005) cette première approche qui correspond le plus au sens commun du terme « espoir » (hope) s’approche du souhait et ne fait pas référence à l’anticipation.

_ Snyder et. al. (1996) définissent eux l’espoir comme un état de détermination à poursuivre un but (‘‘willpower’’) et à trouver les moyens de l’atteindre (‘‘waypower’’)5. Cette conception intègre, elle, une forte dimension motivationnelle que l’on retrouvera avec la perspective future.

La notion d’espoir ne semble donc pas vraiment relever de l’attitude contrairement à

l’optimisme au sens de Scheier et Carver. Dans les travaux liés à la perspective future, en psychologie ou en marketing, l’attitude correspond plus en général à un construit affectif alors qu’au sujet de l’optimisme, Scheier et Carver insistent plus sur une forme cognitive d’évaluation. Mais alors que dans certains travaux l’attitude est considérée comme autonome et mesurable isolément tout comme l’optimisme, dans d’autres, elle a été directement intégrée à l’orientation future.

5 Ces deux aspects correspondent aux deux dimensions de l’échelle développée par les auteurs dont existent une version destinée aux enfants (1997).

Page 10: La Perspective future : essai de clarification des ...

10

Dans le premier cas (attitude étudiée de façon autonome), l’attitude peut être considérée

de façon générale ou spécifique, au travers de la notion d’anxiété. Quand on considère l’attitude face à l’avenir de façon générale, elle peut être soit

mesurée par des items de type Lickert (Nurmi, 1991 ; Thiébaut, 2000) soit de façon plus élaborée en demandant aux sujets de lister un certain nombre d’événements et de les classer dans le passé, le présent ou le futur (Lomranz et al., 1985) ou comme plaisants ou désagréables (Henik et Domino, 1975 ; Sundberg, 1983). Quelque soit l’instrument de mesure, l’attitude évaluée porte essentiellement sur la composante affective.

Plus spécifiquement, l’anxiété face à l’avenir est une notion très proche de l’attitude

négative face à l’avenir (Urien, 2000). Selon Zaleski (1997), traduit par Urien (2000), il s’agit d’ « un état émotionnel négatif lié à la pensée ou l'imagination d'événements ou de résultats futurs négatifs, qui peuvent affecter l'individu » (l’anxiété correspondrait alors à une variable moins stable que l’attitude). Urien (2000) a adapté l’échelle de Zaleski en français pour évaluer ce construit. Urien (1998) a montré que l’anxiété face à l’avenir avait une influence négative sur les comportements exploratoires du consommateur (innovativité, prise de risque, recherche de variété).

Une forme particulière d’anxiété face à l’avenir est l’anxiété face à la mort. Les limites de

ce construit ne sont pas bien délimitées (Fortner et Neimeyer, 1999) mais nous pouvons ici retenir la définition d’Urien (2003) : « un ensemble de réactions affectives négatives, d’intensité variable, provoqué par des idées conscientes et non conscientes relatives à la disparition de soi ». L’anxiété face à la mort semble limiter l’orientation future par un mécanisme de défense, mais toutes les recherches n’aboutissent pas à cette conclusion (Martz et Livneh, 2003). En matière d’implications marketing, Guiot et Urien (2001) relient l’anxiété à la mort à l’objectif de transmission patrimoniale chez les personnes âgées et Urien (2005) trouve chez les jeunes hommes un effet de cette anxiété sur la prédisposition à payer plus cher pour avoir des produits ayant des attributs écologiques.

Une attitude qui encourage le développement des pensées tournées vers l’avenir.

Dans le second cas, celui où l’attitude est directement intégrée à l’orientation temporelle,

on va associer à une zone de la flèche du temps (passé, présent ou futur) une attitude. Cela peut s’expliquer par le fait que différentes recherches suggèrent un lien fort entre les deux. Ainsi Shirai (1996b) cherche à voir quelle zone temporelle est la plus valorisée par les individus et à comprendre ce choix. Il distingue alors notamment une Positive Future Orientation (satisfaction dans la situation présente), une Negative Present Orientation (futur craint et dévalorisé expliquant la focalisation sur le présent) et une Négative Future Orientation (insatisfaction dans le présent et espoir d’un avenir meilleur). Plus généralement Regeth (1996), à l’issue d’une revue de la littérature, indique qu’une personne percevant le futur comme attractif aura tendance à focaliser son attention sur le futur, à être « orienté futur ». Plus récemment, Tonn et al. (2006) trouvent un lien fort entre l’optimisme, le fait de penser au futur et d’en avoir une image claire. S’intéressant plus spécifiquement aux personnes âgées, Schroeder et al. (2001) indiquent que de par la nature peu attrayante des évènements qui les attendent, il est normal que certaines personnes âgées évitent de penser à l’avenir.

Page 11: La Perspective future : essai de clarification des ...

11

Nous avons ici défini l’orientation future par une prédominance des pensées envers le futur, mais il existe aussi une définition plus large. Ainsi de Volder (1979) définit l’orientation temporelle comme un degré d’implication (envers le passé, le présent ou le futur) pouvant être soi au niveau de la pensée, soit au niveau de l’action, et il précise qu’en pratique les recherches ont toujours été réalisées au niveau des pensées. Dans la mesure où l’implication est un construit dont les définitions varient selon les auteurs (Ben Miled-Chérif, 2001) et où nombre d’auteurs parlent d’orientation temporelle sans faire référence à une forme ou une autre d’implication, nous avons considéré que la tendance à penser à l’avenir suffisait à définir l’orientation future.

On retrouve d’ailleurs dans les deux échelles francophones de styles temporels, des

dimensions « futurs » insistant sur l’attrait du futur (Bergadaà, 1991) et sur les pensées concernant le futur (Usunier et Valette-Florence,1994). Chez ces deux auteurs, ces dimensions se distinguent nettement de dimensions liées à la planification et /ou au degré de volonté investie dans les buts fixés. Cela permet nous semble-t-il de séparer de l’orientation future des phénomènes liées aux motivations et aux croyances qu’à l’individu quant à sa capacité à agir sur son avenir. L’orientation future ainsi réduite à un processus cognitif devient la variable qui explique la construction de la perspective future comme représentation cognitive, indépendamment de la question du réalisme ou du but à atteindre (Thiébaut, 2000).

Dans cette acception limitée, surtout présente dans la recherche francophone,

l’orientation future est souvent utilisée pour décrire des segments auxquels vont être associés des comportements de consommation particuliers.

_ En matière de moyens de paiement et de services financiers, Bergadaà (1991) relie (notamment) la dimension « Futur Affectif » à la non possession de carte de crédit (carte de paiement différé) et une à tendance à gérer ses finances en demandant conseils à des tiers. Usunier cité par Usunier et Valette-Florence (1994) trouve un résultat similaire dans une étude réalisée pour une banque.

_Concernant les canaux de distribution, Djelassi et Ferrandi (2002) relient eux la dimension future à une faible tendance à acheter par correspondance, les profils des personnes orientées vers le futur correspondent par ailleurs aux individus les plus patients (ceux qui ne recherchent pas de gratification immédiate). Bergadaà et Coraux (2004) trouvent quant à eux que le profil des individus orientés vers le futur et croyant « en leur bonne étoile » correspond à des consommateurs percevant Internet comme étant avant tout un outil commercial et sont de bons clients de logiciels et de produits de voyages en ligne.

_ Portant spécifiquement sur les retraités, Tamaro-Hans et Darpy (2006) observent que l’orientation future caractérise les retraités actifs (retraite « nouvelle vie ») qui sont les plus portés sur les voyages et les sorties.

_Dans un contexte cette fois inter-culturel (France et Allemagne), Valette-Florence et al. (2001) trouvent que l’orientation vers le futur est la seule qui explique l’attitude à l’égard du téléphone mobile pour les trois segments d’utilisateurs mis en évidence. De plus les segments les plus favorables au téléphone mobile sont ceux pour qui l’orientation future est la plus significative.

Dans la littérature anglo-saxonne, quelques recherches (notamment, Venkatesen et al.,

1997; Schroeder et al., 2001) utilisent aussi des conceptions de l’orientation temporelle fondées sur les pensées et sur l’attitude à l’égard du passé, du présent et du futur. Néanmoins les résultats sont essentiellement descriptifs et portent sur des comparaisons inter-culturelles.

Page 12: La Perspective future : essai de clarification des ...

12

Ainsi, une attitude positive envers le futur prédisposerait une tendance à penser à

l’avenir, car ces pensées généreraient des émotions positives. Ces phénomènes ont des effets comportementaux intéressants pour le marketing. Surtout, cette orientation des pensées vers le futur va permettre la constitution d’une « perspective future » qui de par ses implications motivationnelles constitue l’élément central dans la compréhension du rapport à l’avenir chez le consommateur. LA PERSPECTIVE FUTURE : ENTRE REPRESENTATION ET MOTIVATIONS.

La notion de perspective semble d’abord se référer à une technique de représentation

graphique, de sorte qu’on pourrait dire qu’une personne orientée vers le futur, est d’abord quelqu’un qui aime laisser son imagination créer des images de son avenir…mais la littérature va s’éloigner de ces considérations visuelles et mettre en avant l’aspect motivationnel. D’ailleurs de nombreux auteurs soulignent la force du lien entre le fait de penser à l’avenir et les motivations à l’action :

_ Pour Fraisse (1963, page174), cité par Lens (1993) : « Il n’y pas de futur sans en même temps un désir de quelque chose d’autre et la croyance en la possibilité de le réaliser ».

_ Selon les modèles de la psychologie cognitive, l’élaboration de buts implique une représentation de l’avenir (Nurmi, 1993).

On pourrait en conséquence tendre vers une équivalence entre « but » et « perspective future ». Mais une telle conclusion serait critiquable à plusieurs égards:

_ Sur la nature des buts, Raynor (1982) et Nuttin (1984) admettent qu’un but ne consiste pas toujours en un souhait de changement : on peut vouloir le satu quo.

_ Thiébaut (2000) souligne que les contenus de la perspective future ne sont pas tous liés à des buts ou à des craintes et peuvent relever de la seule imagination. Oettingen (1997) va plus loin en montrant que les pensées fantaisistes peuvent annihiler l’effet motivateur des pensées liées aux buts si l’individu ne compare pas les premières aux secondes. En outre, Fromage 1991, 1994) observe que chez de nombreuses personnes âgées en fin de vie, s’il existe encore un imaginaire, il n’a y a plus en revanche de buts ou de finalité.

_ Bergadaà (1987) montre que les motivations des individus ne proviennent pas toujours de buts fixés à l’avance car certaines personnes sont plus de natures à prendre des décisions en réagissant face à une situation donnée. A ce sujet, Bandura (1993) détaille les trois types des motivations selon la théorie social-cognitive. Or parmi eux, deux n’impliquent pas de nécessaire anticipation d’un but (la motivation peut être engendrée en réaction à un inconfort physiologique ou au jugement des tiers) et la troisième, d’ordre cognitif n’a d’effet motivationnel qu’en fonction de la probabilité perçue d’atteindre le résultat escompté.

Nous considérerons donc à la lumière de ces différents points de vue, que la perspective

future est constituée par un ensemble de représentations du futur, désirées, craintes ou même à vocation distractive. Ces pensées constituent une source majeure de motivations à agir mais non la seule.

Décrire la Perspective future comme une image.

La perspective future va alors avoir des attributs qui vont décrire ce qu’elle est en tant

qu’ensemble de représentations et sera généralement étudiée en rapport avec ses effets

Page 13: La Perspective future : essai de clarification des ...

13

motivationnels supposés. En tant qu’ensemble de représentations, les attributs les plus souvent évoqués dans la littérature sont :

_ La densité correspondant au nombre de différents éléments occupant les pensées liées au futur, _ La netteté, c. a. d. Les ‘‘objets’’ varient en netteté selon qu’ils sont plus ou moins précisément représentés, c'est-à-dire, en partie selon qu’ils semblent plus ou moins probables, connus et différenciés les uns des autres » (Thiébaut, 2000), _ La cohérence ou degré d’organisation des évènements au sein de la perspective future, _ Le réalisme: Certains individus vont penser à un avenir qui leur paraît possible d’autres seront plus dans le rêve. On peut aussi citer l’orientation sociale qui n’est pas évoquée en psychologie mais se

retrouve en marketing : il s’agit de voir si les activités projetées impliquent des tiers. Cet attribut influence notamment la nature des loisirs et le comportement de magasinage des individus; l’orientation sociale diminuerait avec l’âge (Cotte et Ratneshwar, 2003).

Plus largement, Bouffard (1993) parle de « contenu de la PF » par opposition à la structure et à l’extension, caractéristiques qui ont une forte dimension motivationnelle. Plusieurs courants de recherches se sont intéressés à ce contenu en étudiant les thèmes des objets représentés dans la PF plutôt que les dimensions précitées. Ainsi, Markus et Naurius (1986) ont initié les recherches sur les « sois possibles ». Cette approche consiste essentiellement à comparer les adjectifs qu’utilisent les individus pour se décrire dans le présent avec ceux auxquels ils pensent lorsqu’il s’agit d’envisager leur avenir (craint ou désiré). Dans cette optique Markus et Ruvolo (1989) indiquent que des sois possibles craints réduisent l’efficacité de l’action de l’individu.

En marketing, les utilisations possibles du concept ont été mises en évidence par Morgan

(1993). Patrick et al. (2002) observent dans une recherche exploratoire que les femmes comptent plus que les hommes sur la consommation pour atteindre /éviter les sois possibles désirés /craints, en outre les femmes paraissent relativement plus préoccupés par leur situation familiale et leur physique alors que les hommes se préoccupent plus que les femmes de l’évolution de leur situation économique. De façon générale, la plupart des recherches sur les contenus de la PF se sont intéressées à l’évolution des thèmes avec l’âge. L’adolescence (Nurmi, 1989, 1991, 1993 ; Seginer et Schlesinger, 1998) et le vieillissement (Ryff, 1991 ; Bouffard et Bastin, 1993; Frazier et al., 2000 ; Timmer et al., 2003) ont été plus particulièrement étudiés. A titre d’exemple, Nurmi (1989) trouve qu’entre 10 et 15 ans les aspirations des adolescents concernent de façon croissante l’éducation, la famille et la possession tandis que les projets concernant les loisirs diminuent. Expliquer comment la PF agit sur le processus décisionnel.

Cependant, les attributs de la PF qui ont suscité le plus de travaux ne relèvent pas du

contenu mais de la structure et plus encore de l’extension, attributs liés à la motivation. Une présentation simple expliquant les enjeux associés à ces attributs nous est fournie par Lens (1993): cet auteur expose le lien entre la PF et le comportement en se référant à la théorie de l’action volontaire (Heckausen et Kuhl, 1985). La PF influencerait le comportement par deux moyens :

Page 14: La Perspective future : essai de clarification des ...

14

_ « L’extension » qui désigne le fait que les éléments constitutifs de la PF (qui sont supposées être des buts dans ce courant de la littérature) sont plus ou moins éloignés du présent (dans 1 semaine, dans 3 mois, dans 10 ans…). Or selon Lens: « plus, elle est étendue, plus la valeur accordée aux buts éloignés est élevée et plus l’utilité perçue du moyen choisi est grande ». L’extension aurait un rôle à la fois dans le processus de motivation et dans celui de volition (engagement personnel aboutissant à l’intention).

_ La « structure » (ou structure moyen-fin) qui décrit les relations entre les différents buts (par exemple pour un adolescent: trouver un emploi pour l’été <= se constituer un pécule <= avoir une moto <= devenir un leader au sein du groupe de pairs.). En reliant des buts éloignés à des objectifs plus proches du présent et plus concrets, cette caractéristique est supposée agir sur le processus de volition.

Cette dichotomie entre ces deux attributs de la PF se retrouve chez plusieurs auteurs

dont les premiers sont probablement De Volder et Lens (1982) qui distinguèrent un aspect cognitif et un aspect dynamique. L’aspect dynamique renvoie à la valeur accordée aux événements futurs, en fonction de leur distance temporelle. L’aspect cognitif renvoie à la capacité de l’individu à situer ses buts, ses projets et les conséquences de ses actions présentes dans un futur plus ou moins lointain.

Mais l’idée que l’extension de la PF serait une caractéristique de la personne est remise

en cause par Thiébaut (1998, 2000) qui y voit plus une caractéristique de la tâche (i.e. que certains types d’ « objets » tendent à être situés dans un proche avenir et d’autre dans un avenir plus lointain). Il est vrai que l’extension a toujours été mesurée par des instruments à réponses libres (Regeth, 1996 ; Thiébaut, 1998) et que la tentative de Thiébaut de l’évaluer avec une échelle fermée indique que ce serait au mieux une conséquence d’autres attributs de la PF. Bouffard, interrogé par l’auteur en 2006 indique que si l’extension caractérise la tâche, les différences individuelles sont stables et tendent à accréditer la thèse qu’il y’a une prédisposition psychologique à se fixer des buts plus ou moins distants, en moyenne. Mais, cette stabilité et la nature du lien entre extension et motivation ne vaudraient que pour un âge déterminé puisque Thiébaut (1998), à la vue de littérature, conclue que le passage de l’enfance à l’adolescence se traduit par une réduction de l’extension temporelle liée à un plus grand réalisme dans les aspirations. De plus, Bouffard et al. (1983) ont montré que des échecs personnels engendrant des situations de frustrations réduisaient l’extension de la PF. L’extension de la PF en tant que caractéristique de l’individu n’aurait donc qu’une stabilité relative.

De plus, il semble difficile d’isoler l’extension de la nature des buts, ainsi concernant les

décisions d’épargne, pour Arrondel et al. (2003) : « l’altruisme peut être considéré comme le cas limite d’un horizon temporel long, celui où l’horizon dépasse le cycle de vie individuel,... L’horizon est donc long; mais il est aussi « large»»6. Ces économistes suggèrent en effet que la préoccupation à l’égard de la situation financière des descendants implique une PF étendue au-delà de la vie de l’individu. Une autre façon de considérer une extension de la PF sur des contenus allant au-delà de la vie de l’individu est proposée par Boyd et Zimbardo (1997) qui s’intéressent à l’effet des croyances en une existence post-mortem. Ils parlent à ce sujet de « Perspective future transcendantale » et défendent l’idée qu’elle pourrait expliquer nombre de comportements individuels.

6 Les auteurs parlent d’un horizon « large » car il serait lié à une solidarité non envers un « moi future » mais vers autrui.

Page 15: La Perspective future : essai de clarification des ...

15

Un moyen d’échapper à ces débats portant la signification de l’extension de la PF serait

d’évaluer l’aspect dynamique de la PF, non pas au-travers de l’extension temporelle mais par la « valence » de la PF. En effet, Shell et Hussman (2001), reprenant la conception de la PF de De Volder et Lens (1982) ont développé une échelle (en cours de traduction par les auteurs) évaluant la « valence de la PF », à savoir la prédisposition à accorder une grande valeur aux buts personnels dans le futur. Leur échelle permet également d’évaluer la « connectness » (aussi appelée Utilité ou Instrumentalité) qui correspond à la dimension cognitive de la PF et est assez proche de la structure moyen-fin. Surtout, leur travail a permis d’éclairer les liens entre la PF et d’autres variables plus « traditionnelles » : le lieu de contrôle et le sentiment d’efficacité personnelle (self-efficacy parfois traduite par « efficacité de soi » ; Bandura, 1977). Le lieu de contrôle (Rotter, 1966) désigne le fait que l’individu attribue ses succès et ses échecs à des facteurs dépendant de son propre contrôle ou non. En ce sens, il est assez proche de la dimension « Destinée » de l’échelle temporelle de Bergadaà (1991). Or le Lieu de contrôle serait corrélé à la fois à la valence et à la « connectedness » de la PF : les individus qui pensent le plus que les évènements qui affectent leur vie dépendent d’eux, valorisent plus les buts futurs et anticipent plus les conséquences futures de leurs actions actuelles. Le sentiment d’efficacité personnelle (la croyance qu’on est capable d’agir efficacement) serait elle liée uniquement à la « connectness ». Le lieu de contrôle et l’efficacité de soi pourraient donc conditionner l’effet de la PF sur le comportement.

D’autre part, deux théories peuvent expliquer les liens entre ces différentes

caractéristiques de la PF : _ Un lien entre l’extension de la PF et à la fois la structure et les caractéristiques de la PF

comme image (netteté et réalisme) nous est donnée par la Temporal Construal Theory (Liberman et Trope, 1998): Selon cette théorie (et des résultats expérimentaux obtenus par ses initiateurs), plus les faits sont éloignés dans le temps, plus ils sont représentés de façon abstraite, et les contraintes y sont moins prises en compte. Il en résulte que les décisions concernant le long terme sont principalement prises en fonction de la désirabilité du résultat et non de sa faisabilité; il en découlerait un excès d’optimisme.

_ La théorie de l’auto-détermination (Self-Determination Theory) de Deci et Ryan (1985) permet de distinguer l’efficacité motivationnelle de la PF selon son contenu. En effet, Simons et al. (2004) concluent à la suite de multiples recherches que les buts intrinsèques (exp. : appartenance à un groupe, santé, relations familiales) ont un effet motivationnel nettement plus efficace que les buts extrinsèques (exp. : statut social, situation financière, attractivité physique).

Nous comprenons maintenant que le passage de la Perspective Future comme ensemble

de représentations à une PF comme variable motivationnelle, d’une part, dépend du contenu et de la distance temporelle des objets qui la constituent, et d’autre part, implique que l’individu se considère comme responsable des évènements de son existence tout en ayant une certaine confiance en sa capacité d’action. La prise en compte de ces éléments permet alors de comprendre les différences de conceptualisation entre les orientations et attitudes temporelles précédemment vue et d’autres formes d’« orientations futures » intégrant des dimensions intentionnelles ou comportementales. On notera d’ailleurs qu’en marketing, Gibbs (1998) évoque en plus de la PF, l’importance de la confiance en soi du client et du fatalisme comme variables explicatives des achats de placements financiers.

Page 16: La Perspective future : essai de clarification des ...

16

LA PF et ses effets sur le comportement Mais en marketing (tout comme en psychologie) les problèmes de délimitations et de

définitions des variables demeurent. Ainsi, de nombreux auteurs parlent d’orientation future pour évoquer une variable qui décrit à la fois une attitude et une préférence pour le futur évaluée au travers d’intentions et /ou de comportements. Hors de France, les échelles utilisées sont diverses et les démarches qualitatives sont les plus répandues, ce qui limite les comparaisons possibles entre les différentes recherches. Dans le champ francophone en revanche, la référence aux échelles d’Usinier et Valette-Florence (1994) et dans une moindre mesure de Bergadaà (1991) est assez fréquente. En outre, ces échelles permettent de distinguer les dimensions liées à l’orientation des pensées et à l’attitude des dimensions liées à la motivation et à la planification. Ainsi, 3 dimensions chez ces deux auteurs peuvent être liées à la motivation :

_ Dans l’échelle de Bergadaà (1991), la dimension « fatalité » dont nous avons déjà évoqué la proximité avec la notion de lieu de contrôle. Elle peut être rapprochée de la dimension «origine du contrôle » de Bouder-pailler et Le Deuff (2000), dimension qui expliquerait la fréquence d’abonnement à des spectacles vivants (les clients pensant avoir un contrôle sur les événements sont plus enclins à souscrire à des abonnements).

_ Dans l’échelle d’Usinier et Valette-Florence, la ténacité et la préférence pour la gratification immédiate. Il s’agit en fait de deux sous-dimensions d’une même dimension qui évalue la quantité d’efforts qu’on met en œuvre dans la poursuite d’un même but. On peut les rapprocher de la variable « délais de gratification » (Mischel, 1981), variable liée à la valence de PF selon Simons et al. (2004)7. On doit également rapprocher ces deux dimensions de la dimension « persévérance pour atteindre les buts fixés » Bouder-Pailler et Le Deuff (2000). L’influence de ces dimensions a notamment été mise en évidence par Prime et al. (2000) qui trouvent que les consommateurs français les moins tenaces sont ceux qui ont l’attitude la plus favorable envers la téléphonie mobile, alors que chez les allemands la dimension qui ressort est la préférence pour la gratification immédiate qui expliquerait aussi une attitude positive à l’égard de la téléphone mobile Les deux résultats paraissent assez proches compte-tenu du lien entre les deux dimensions, ils permettent surtout de montrer que l’orientation future des pensées (liée à une attitude favorable à l’égard de la téléphonie mobile) se distingue bien par ses effets d’autres dimensions liées au rapport à l’avenir et incluant un aspect motivationnel tel que la ténacité (Valette-Florence et al., 2001).

Hors des pays francophones, il semble que les recherches aient surtout cherché à

expliquer par l’orientation future l’utilisation des moyens de paiement, le rapport à la dépense et dans une moindre mesure le magasinage. Sur ce dernier point, Gentry et al. (1991) observent que l’attitude envers le magasinage est négativement liée à une conception assez large de l’orientation future, Sarabia-Sanchez (2005) trouve un résultat similaire bien que non significatif. Enfin, Mc Donald (1994) mesure l’effet de la ténacité (appelée persistence) sur le temps consacré aux courses mais ne trouve pas de relation significative.

7 En fait la sous-dimension « préférence pour une gratification immédiate» semble bien évoquer l’extension de la PF et donc la valence de la PF mais la sous-dimension « ténacité » serait plus liée à la détermination mise en œuvre dans la poursuite du but. Une difficulté pour établire le lien entre les deux sous-dimensions vient de ce qu’elles soient opposées dans leur construction.

Page 17: La Perspective future : essai de clarification des ...

17

Parmi les recherches sur les moyens des paiements on notera notamment celle de Mendoza et Pracejus (1997) qui trouvent auprès d’un échantillon d’étudiants une relation positive entre l’utilisation des cartes de crédit et une forme d’orientation future (construit mêlant notamment l’importance perçue du futur et le délai de gratification), ce résultat est contraire à celui de Sarabia-Sanchez (2005) qui développe une échelle8 mêlant des items correspondant à l’orientation future des pensées et d’autres évoquant la valence de la PF : il trouve une relation négative entre cette forme d’orientation future et l’achat à crédit. Ce dernier résultat est plus conforme à celui d’Amyx et Mowen (1995) qui ayant également développé une échelle d’orientation temporelle, au sens large, appliquée aux comportements de consommation, trouvent que les clients orientés vers le futur acceptent plus souvent de payer immédiatement plutôt que dans deux mois dans le cas d’un achat de voiture.

Des résultats relatifs à l’orientation future en psychologie et en économie sont également

susceptibles d’avoir un intérêt managérial, nous en avons ici retenus deux qui nous ont paru exemplaires :

_Milfont et Gouveia (2006) trouvent un lien positif l’entre l’orientation future (évaluée

par l’échelle de Zimbardo, 1999, échelle dont la dimension « Future » correspond à la fois à l’aspect dynamique et à l’aspect cognitif de la PF) et l’attitude à l’égard de la préservation de l’environnement, en revanche le fatalisme lui est négativement corrélé. Les auteurs indiquent que ces résultats confirment d’autres recherchent sur le même thème.

_ En économie, où la question de l’orientation future est généralement posée en termes

d’arbitrage monétaire et où une riche littérature liée à la psychologie expérimentale s’est développée (à titre d’exemple, sur le prix des biens durables: Liebermann et Ungar, 2002), un travail plus particulièrement intéressant a retenu notre attention car il permet de retrouver des résultats avancés en psychologie sur le lien entre l’âge et les variables liées à la PF: Read et Read (2004) ne trouvent pas de préférence pour le présent sur des choix monétaires à moins de 3 ans et ce quelque soit l’âge, au-delà ils constatent une relation curvilinéaire : la préférence pour le présent est minimale chez les 40-50 ans.

Ces différents résultent montrent l’effet de la PF sur les comportements au travers de

construits intégrant une composante motivationnelle. Ils illustrent également la multiplicité d’outils utilisés et les difficultés associées dans la comparaison des résultats entre recherches. Néanmoins, ils attestent bien de l’influence que peut avoir la PF sur les comportements, or la PF peut être aussi modifiée à son tour par le comportement individuel : pour mieux accroître les chances de réalisation de leurs objectifs, les individus peuvent décider de mettre en œuvre une planification de leurs activités et ainsi contribuer à enrichir la PF en se fixant des repères supplémentaires et en s’appuyant sur des instruments pour y parvenir :

8 L’échelle est présentée comme étant bidimensionnelle mais d’une part son développement n’a pas suivi le paradigme de Churchill (les 8 items ont été directement utilisés) et d’autre part les deux dimensions correspondent aux 4 items formulés « à l’endroit » d’un côté et 4 items formulés « à l’envers » de l’autre.

Page 18: La Perspective future : essai de clarification des ...

18

LA TENDANCE A PLANIFIER : TRADUCTION FONCTIONNELLE DE L’ORIENTATION FUTURE.

Selon Dubé et al. (2005), « La planification est un exercice mental qui prépare l’action et

s’avère une condition sine qua non de la réalisation du but.». De fait, la planification est considérée par différents auteurs (Nuttin, 1984 ; Nurmi, 1989) comme le processus psychologique succédant à la motivation et facilitant sa réalisation. Lens (1993) quant à lui décrit certaines caractéristiques de la structure moyens-fins de la PF en des termes très proches de la planification, ce qui rappelle que la planification influence la structure la PF (Dubé et al., 2005), à moins qu’elle n’en soit une émanation. On notera toutefois qu’une planification même fréquente et précise n’est pas synonyme d’une prédominance des pensées concernant l’avenir (et donc d’orientation future), une planification répétitive de court terme peut même renforcer l’orientation Présent de l’individu.

Au-delà de la relation théorique, le lien de la planification avec l’orientation future et

avec la PF semble démontré par des recherches en marketing : Dans des recherches quantitatives, Sarabia-Sanchez (2005) trouve que les consommateurs

les plus orientés vers le futur tendent à plus planifier leurs achats quand ils font des courses, Bergadaà (1991) trouve une corrélation positive (0,18) entre l’orientation des pensées vers le futur et la dimension « Futur Projets » de son échelle, correspondant à la planification, dimension encore plus fortement corrélée (-0,30) à la dimension Destinée.

De façon indirecte, on retrouve le lien entre l’orientation future à la tendance à planifier par le concept de temps monochronique avancé par Hall (1959) : selon cet auteur, la culture influence une perception de la ressource temps comme étant à usage unique ou à usage multiple. Les individus « monochroniques » auraient notamment tendance à suivre un emploi du temps prédéterminé. Or Gentry et al. (1991) observent une forte relation entre monochronie et orientation future.

Dans les recherches qualitatives, Walsh et Spiggle (1994) trouvent une forte relation entre

l’orientation future et la planification des achats. Walsh (1995) va relier ces résultats à la théorie économique de l’auto-contrôle (Economic Theory of Self-control de Thaler et Shefrin, 1981) en observant que les orientés futur arbitrent entre présente et avenir lorsqu’ils effectuent des dépenses tandis que les orientés Présent ne pensent pas à l’avenir dans ces situations, ce qui peux en conduire certains à rechercher des contrôles externes pour épargner et limiter leurs dépenses.

D’un point de vue managérial, on retrouve là un résultat de Bergadaà selon qui les orientés « Futur affectif » tendent à être détenteurs de Comptes Epargne Logement (CEL) plutôt que de Plans Epargne Logement (PEL), or le PEL est associé à un mécanisme de versement automatique, ce qui expliquerait que les clients peu orientés vers le futur ressentent plus le besoin d’adhérer à un mécanisme d’épargne contrainte.

D’un point de vue théorique, on retrouve la conception des arbitrages inter temporels décrite par la théorie de la comptabilité mentale (Brendl et al., 2000). En effet, cette théorie montre notamment9 que pour protéger les buts de long terme de ceux de court terme, les individus bloquent des ressources sur le compte mental « revenus futurs » en souscrivant à des

9 Nous n’abordons ici qu’un aspect particulier de cette théorie.

Page 19: La Perspective future : essai de clarification des ...

19

mécanismes d’épargne par prélèvement automatique ou de comptes bloqués. Cet exemple est particulièrement intéressant pour comprendre l’attitude à l’égard des actifs patrimoniaux car il montre un inconvénient possible de la liquidité d’un actif, alors que la littérature économique en fait un avantage.

La question de la régulation des dépenses, se retrouve aussi dans l’opposition entre

acheteurs impulsifs et consommateurs planificateurs. Plusieurs recherches ont en effet mis en évidence une opposition entre les deux types d’individus et ses liens avec l’orientation future (Sarabia-Sanchez, 2005 ; Piron, 1993 ; Lyer et Alhawat, 1987). Néanmoins, l’explication des comportements restrictifs, impulsifs voire compulsifs relève également voire principalement d’enjeux (patho-)psychologiques liés à la relation de l’individu aux objets (Adès, 2006).

Enfin sur la question du lien entre planification et dépenses / épargne, il faut noter que

de nombreux économistes ont évalué sous différentes formes une tendance à planifier qui s’est avérée positivement corrélée à l’établissement de budget de dépenses et à l’accumulation patrimoniale (Ameriks et al., 2003 ; Arrondel et al, 2003; Lusardi, 2004).

Outre le lien avec l’épargne et la dépense, l’effet de la tendance à planifier a été relié à

d’autres types de comportements de consommation, notamment : _ Tamaro-Hans et Darpy (2005) observe que la planification caractérise deux profils de retraités : les « nouvelle vie » (qui sont également orientés futur) et les « retraite continuité » qui malgré le passage à la retraite gardent les mêmes centres d’intérêt et le même type d’activités. _ Bouder-Pailler et le Doeuff (2000) trouvent parmi les dimensions qui expliquent l’abonnement aux spectacles vivants la « maîtrise et la planification du temps ». _ Mc Donald (1994) trouve que la dimension « structured routine » (issue de l’échelle de la structure temporelle de Bond et Feather10, 1988) est négativement liée au temps consacré aux achats et au temps consacré à la préparation des achats (recherche d’informations, discussions avec des amis, lèche-vitrines...). Si d’après cette dernière recherche, les gens qui planifient leurs activités semblent

consacrer moins de temps aux achats, il ne faudrait pas en déduire que la cause en serait l’activité de planification elle-même, en effet, Buehler et Griffin (2003), montrent dans le cas des achats de Noël, que la planification (en demandant aux sujets de l’expérience de décrire le planning des achats qu’ils vont réaliser au cours de la période de Noël) accroît le biais d’optimisme dans la prédiction des temps de réalisation des tâches prévues (ceux qui ont réalisé l’exercice de planification, ont plus largement sous-estimé le temps mis pour réaliser leurs achats que les autres) sans réduire le temps passé pour faire leurs courses de Noël.

L’absence de lien peut être également constituer un résultat intéressant en soi, ainsi, dans

le domaine du comportement d’achat, Djelassi et Ferrandi (2000), ne trouvent pas d’influence de la dimension Linéarité et « économicité » du temps11 sur le comportement d’achat par catalogue.

10 La dimension en question est très proche de la dimension « temps économique » de l’échelle d’Usunier et Valette-Florence (1994) car ces derniers se sont (entre autres) appuyés sur l’échelle de Bond et Faether pour construire leur outil. 11 Cette dimension se décompose en deux sous-dimensions opposées: temps économique, temps non organisé.

Page 20: La Perspective future : essai de clarification des ...

20

Enfin, il paraît utile de distinguer la planification comme « exercice mental » ou prédisposition psychologique qui est celle généralement évaluée, des comportements de gestion de la ressource temps, ainsi Venkatesan et al. (1997) s’intéressent à la possession et à l’utilisation des montres et des « planners » (agendas, emplois du temps…) et trouvent que dans un pays tel le Koweït, l’évolution des individus vers un rapport au temps plus occidental ne se traduit pas encore par des pratiques de gestion du temps correspondantes.

CONCLUSION Le champ de recherche lié au temps en marketing est reconnu comme vaste, et au sein de

ce champ, notre travail tend à montrer que la perspective future constitue une variable centrale au sein d’un ensemble complexe et étendu. Nous avons par ailleurs vu que les variables de ce champ intervenaient dans des enjeux variés couvant à la fois la communication, le rapport à l’argent des consommateurs, la fidélisation comportementale et les préférences en matière de canaux de distribution et de produits.

En même temps, il apparaît que du fait même de l’étendue et de la complexité du domaine, les recherches en marketing ont multiplié les modes d’approche du champ lié à la Perspective Future sans que les différences de construits aient été toujours claires. A titre illustratif, on se rend compte que l’échelle d’orientation future de Ko et Gentry (1991) couvre des aspects très variés du rapport à l’avenir12 tout en ayant été développée comme un instrument unidimensionnel, or cette échelle ne s’est pas avérée valide : elle présente un alpha de Chronbach de 0,55 pour la population américaine et de 0,38 pour la population coréenne.

Aussi, il nous paraît nécessaire de pouvoir distinguer au moins 4 ou 5 catégories de

variables traitant du rapport de l’individu à l’avenir. Il s’agit d’abord de variables nécessaires à la signification de la PF pour l’individu : ces variables expliquent la position perçue de l’individu dans le spectre temporel et traduisent sa conception culturelle du temps. Ensuite, il s’agit de distinguer ce qui relève de la pensée (attitude, sentiments, effort d’imagination) de qui va relever d’une prédisposition comportementale à agir pour des buts futurs. Enfin, il s’agira de considérer des comportements de planification et d’organisation de l’action dans le temps.

Reprenant la démarche que nous avons ici suivie, nous avons établi une « carte » (figure 1) situant les différents concepts liés à la PF. Cette carte réduit la complexité de la relation entre certaines variables (par exemple en ce qui concerne l’attitude, on pourrait très bien modéliser des relations directes avec des variables liées aux comportements). Si elle n’est pas exhaustive au regard de construits étudiés et des différentes relations supposées, elle permet de proposer une première représentation synthétique explicative des liens à partir de la littérature existante. Elle permet aussi de situer à côté des construits théoriques souvent issus de la psychologie, les dimensions mises en évidence par les principales échelles francophones traitant de la PF. Comme nous avons pu le montrer dans ce papier, le résultat obtenu permet d’aboutir à une typologie des manifestations ou des corrélats de la PF qui se prête à des implications autant théoriques que managériales. Nous proposons d’ailleurs en complément un tableau de synthèse que voici [tableau 2] :

12 Les items de cette échelle évoquent à la fois la planification comme pratique, l’attrait pour la science-fiction, l’importance accordée aux buts futurs, et l’aspect cognitif de la PF.

Page 21: La Perspective future : essai de clarification des ...

21

Tableau 2 : Tableau de synthèse des construits relatifs à la Perspective Future.

Catégorie de variables Concepts et auteurs liés.

Capacité à donner sens au futur

Emergence des capacités d’anticipation et de représentation => Théorie du développement de (Piaget, 1958). => Dimension cognitive de la PF chez Kastenbaum (1961) Conception culturelle du temps => Graham (1981)

Perception de Soi par rapport au spectre temporel

Sentiment d’avoir la vie devant soi : => Horizon ouvert/fermé (Castensten, 1991) => Se situer par rapport à sa naissance ou à sa mort (Rakowski, 1979). Age cognitif (Barak, et Schiffman, 1981)

Attitude par rapport à l’avenir

Optimisme (Scheier et Carver, 1985), Anxiétés face à l’avenir (Zaleski, 1993) et face à la mort (Fortner et Neimeyer, 1999), Espoir (Averill et ak., 1990) et Désespoir (Beck et al., 1974), Postalgie (Yberma, 2004).

Représentations situées dans le futur

Orientation future : construction des représentations par la pensée. => Focus Future de Settle et al. (1978) Dimensions « descriptives » de la PF (Thiébaut, 1996, 1998): Cohérence Réalisme Densité Netteté Orientation sociale (Cotte et Ratneshwar, 2003) Approche par thèmes des contenus de la PF : => Sois Possibles (Markus et Nurius, 1986)

Motivations liées à des buts futurs.

Dimension dynamique de la PF ( De Volder et Lens, 1982) Extension de la PF (Bouffard et al., 1983). Délai de gratification (Mischel, 1981).

Dimension cognitive ou « connecteness » de la PTF (De Volder et Lens, 1982) Structure de PF (Raynor, 1982).

« Achievement-orientation » (Kastenbaum, 1961)

Variables affectant le lien entre la PF et la motivation.

Sentiment d’efficacité personnelle ou Self-efficacy (Bandura, 1977)

Page 22: La Perspective future : essai de clarification des ...

22

Lieu de contrôle (Rotter, 1966)

Poursuite et planification des buts futurs.

Ténacité (chez Usunier et Valette-Florence, 1994) Mise en place de mécanisme mentaux de régulation protégeant les buts futurs (Brendl et al., 2000) Planification (Nuttin, 1984).

Nous voyons dans la « carte » les liens possibles entre ces différents construits :

Au-delà de cette tentative de cette synthèse, l’intérêt de l’étude du rapport individuel à

l’avenir en marketing semble d’autant plus grand que nous avons ici volontairement mis de côté certaines problématiques. Il convient notamment de rappeler que le rapport à l’avenir inclut nécessairement un rapport à l’incertitude (Grossetti, 2004), rapport que nous n’avons qu’ici effleuré. D’autre part, nous nous sommes intéressés à une perspective future déterminée par des variables essentiellement liées aux caractéristiques individuelles, or certains travaux mettent en

Figure 1 : La Perspective Future (PF) et les construits reliés : Proposition de Carte situant les différents concepts

Capacité cognitive d’anticipation de l’individu

L.O.C.

Position perçue de l’individu sur le spectre temporel

Conception linéaire ou circulaire du temps

Age de l’individu

Culture

Attitude à l’égard de l’avenir

Orientation Future des pensées, sentiments

Perspective Future (représentations)

Volonté d’agir pour les buts futurs Planification

Ténacité

Lien établi dans la littérature Lien suggéré par des résultats issus de la littérature

Confiance en soi, efficacité de soi

Contenu de la PF

Dimension dynamique de la PF

Dimension cognitive de la PF

Lien suggéré sans appui sur des résultats

« Futur Projets »

temps économique, planification du temps

Régulation inter temporelle des buts / impulsivité

Comportements de consommation et d’épargne

Attitudes spécifiques (exp.: risque; environnement)

Structure de la PF

Extension de la PF

Dimension d’une échelle francophone en marketing : en violet

Proximité entre construits

Légende :

destinée, origine du contrôle

Anxiété face à l’avenir / la mort

délai de gratification

Optimisme stable/ conjoncturel

âge cognitif

Page 23: La Perspective future : essai de clarification des ...

23

avant l’effet de variables économiques (l’inflation, Gong, 2006), d’événements politiques comme la chute du communisme (Shlapentokh, 2005), voire la musique utilisée par Hepburn et al., (2006) pour influencer la PF.

Ainsi, l’étude du rôle du rapport des individus à l’avenir offre de nombreuses perspectives pour les recherches futures… A titre d’exemples, citons 3 questions :

_ Les biens durables : leur achat impliquerait que l’individu se projette dans l’avenir, mais est-ce toujours le cas ? (Pensons aux personnes anxieuses face à la mort ou qui évitent d’envisager leur avenir).

_ Les biens dont les bénéfices d’usage nécessitent un apprentissage : leur consommation serait-elle freinée par un faible sentiment d’efficacité personnelle ou bien par un horizon temporel pas assez étendu ?

_ Le lien entre PF et comportements éthiques : si comme le disent Arrondel et al. (2003) : « L’horizon est donc long; mais il est aussi large », ce qui signifie qu’il inclurait autrui, alors l’attitude à l’égard de l’avenir pourrait expliquer des comportements d’achat éthiques.

Bibliographie: Adam B. (1988), Social versus natural times: a traditional distinction re-examined, in Michael

Young and Tom Shuller (eds), The rythms of society, New York, 198-226. Adès J. (2006), Psychopathologies des relations aux objets, Séminaire international Acheter ou

louer les biens de consommation ? ESCP-EAP, 26 et 27 janvier 2006. Amyx D., Mowen J.C. (1995), Advancing Versus Delaying Payments and Consumer Time

Orientation: A Personal Selling Experiment, Psychology and Marketing, 12, 4, 243-264 Arrondel L., Masson, A. et Verger, D. (2003). Comportements face au risque et à l’avenir et

accumulation patrimoniale : Bilan d’une expérimentation, INSEE, Série des Documents de travail, No C0201.

Atance C.M., Meltzoff A.N. (2005), My future self: Young children’s ability to anticipate and

explain future states, Cognitive Development, 20, 341–361. Averill, J. R. Catlin, G, et Chon, K. K. (1990), Rules of hope. New York: Springer-Verlag. Bandura A. (1977), Self-efficacy: Toward a unifying theory of behavioral change,

Psychological Review, 84, 191–215. Banister E.N. et Hogg M.K (2003), Possible selves? Identifying dimensions for exploring the

dialectic between positive and negative selves in Consumer behavior, extended abstract, Advances in Consumer Research, 30, 149-150.

Page 24: La Perspective future : essai de clarification des ...

24

Barak, B. et Schiffman L.G. (1981), Cognitive Age: A Nonchronological Age Variable, Advances in Consumer Research, 8, 602-606.

Beck A. T., Weissman A., Lester D. et Trexler L. (1974), The measurement of pessimism: The

Hopelessness Scale, Journal of Consulting and Clinical Psychology, 42, 861-865. Ben Miled-Chérif, H. (2001), L’implication du consommateur et ses perspectives

stratégiques. Recherche et Application en Marketing, 16, 1, 65-85. Bergadaà M. (1987), Le rôle du temps dans l’action du consommateur, Thèse de Doctorat,

Université du Québec. Bergadaa M. (1988), Le temps dans le comportement de l’individu, 1ère partie, Recherche et

Applications en Marketing, 3, 4, 37-55. Bergadaa M. (1989), Le temps dans le comportement de l’individu, 2nde partie, Recherche et

Applications en Marketing, 4, 1, 57-72. Bergadaà M. (1991), Cognitive temporal system of the consumer : structures and

organizations. Cahiers CERESSEC. DR n°91023. Bergadaà M. et Coraux G. (2004), Attitude à l’Egard d’Internet : Recherche Exploratoire de

ses Dimensions et du Comportement induit de l’Internaute, 3ème Journée de Recherche Nantaise sur le e-marketing, 10 septembre 2004, Université de Nantes, France.

Bodier M. (1999). Les effets d’âge et de génération sur le niveau et la structure de la

consommation. Economie et Statistique. N° 324-325, 163-180. Bond M.J. et Feather N.T. (1988), Some correlates of structure and purpose in the use of time,

Journal of Personality and Social Psychology, 55, 2, 321-329.

Bonnefont A. et Giraud . (2007), Réflexion sur le lien entre achat impulsif et modèle de communication, 6th International Congress Marketing Trends, Paris.

Bouffard L., Lens W. et Nuttin J.R. (1983), Extension de la perspective temporelle future en

relation avec la frustration, International Journal of Psychology, 18, 429-442. Bouffard L. (1993), Présentation : Buts et Perspective future, Revue québécoise de psychologie,

14, 1, 61-68. Bouffard L. , Bastin E. (1993), Les hauts et les bas des perspectives d’avenir au cours de la

vie. Revue québécoise de psychologie, 4, 3, 53-76. Bouffard L., Lapierre S. et Bastin, E. (1989). Extension temporelle des projets au cours de la

vieillesse, International Journal of Psychology, 24, 265-291.

Page 25: La Perspective future : essai de clarification des ...

25

Bouder-Pailler D. et Le Doeuff C. (2000), Conception individuelle du temps et souscription d'abonnement de spectacles vivants : mesure de l'influence, Actes du 16eme Congrès International de l’AFM, Montréal.

Boyd et Zimbardo (1997). Constructing time after death : The transcendental future-time

perspective. Time and Society. Brendl C.M., Markman A.B., Higgins E.T. (2000), La comptabilité mentale comme

autorégulation : représentativité pour les catégories dirigées par un but, Recherche et Applications en Marketing 15, 1, 81-96.

Bruininks P. et Malle B.F. (2005), Distinguishing Hope from Optimism and Related Affective

States, Motivation and Emotion, 29, 4,327-355. Buehler R. et Griffin, D. (2003), Planning, personality, and prediction: The role of future

focus in optimistic time predictions, Organizational Behavior and Human Decision Processes, 92, 80–90.

Carstensen, L. L. (1991). Selectivity theory: Social activity in life-span context. Annual Review

of Gerontology and Geriatrics, 11, 195–217. Carstensen L. L. et Lang, F. R. (1996), Future Time Perspective Scale, Unpublished manuscript.

Stanford University. Carstensen, L.L., Isaacowitz, D., Charles, S.T. (1999), Taking time seriously: A Theory of

Socioemotional Selectivity. American Psychologist, 54(3), 165-181.

Chang E.C., D'Zurilla T.J. et Maydeu-Olivares A. (1994), Assessing the dimensionality pf optimism and pessimism using a multimeasure approach, Cognitive Therapy and Research, 18, 2, 143-160.

Chang E.C., Maydeu-Olivares A. et D'Zurilla T.J. (1997), Optimism and pessimism as partially independent constructs: Relationship to positive and negative affectivity and psychological well-being, Personality and Individual Differences, 23, 3, 433-440.

Cotte J. et Ratneshwar S. (2003), Choosing Leisure Services: The Effect of Consumer

Timestyle, Journal of Services Marketing, 17, 6, 558-572. Darpy D. (1999), La procrastination du consommateur : une contribution à l'explication du report

d'achat, Thèse de doctorat, Université Paris-Dauphine. Davies, G. (1994), What should time be?, European Journal of Marketing, 28, 8/9, 100-13. Deci E. L., et Ryan R. M. (1985), Intrinsic Motivation and Self-Determination in Human Behavior,

Plenum, New York.

Page 26: La Perspective future : essai de clarification des ...

26

Dember W. N., Martin S., Hummer, M. K., Howe S. et Melton, R. (1989), The measurement of optimism and pessimism, Current Psychology: Research and Reviews, 8, 102-l 19.

Delacroix E. (2003), La tendance à regretter du consommateur, Université Paris-Dauphine. De Volder M. M. (1979), Time orientation: A review. Psychologica Belgica, 19, 61-79.

De Volder, M.L. et Lens, W., (1982), Academic achievement and future time perspective as a cognitive-motivational concept, Journal of Personality and Social Psychology, 42, 3, 566–571.

Djelassi S. et Ferrandi J-M. (2002), Un premier test du rôle de la perception du temps et des valeurs en matière de comportement d’achat par catalogue, 16èmes Journées Nationales des IAE, Paris, Septembre 2002

Dortier, J-F. (2004), L'homme, cet étrange animal..., Sciences Humaines Eds.

Drolet A. et Williams P. (2005), Age-Related Differences in Responses to Emotional Advertisements, Journal of Consumer Research, 32, 343–354.

Dubé M., Bouffard L. et Lapierre S. (2005), La santé mentale par la gestion des projets

personnels: une intervention auprès de jeunes retraités, Santé mentale au Québec, 30, 2, pp. 321-344.

Durrande-Moreau A., Usunier J-C. (1999), Time Styles and the Waiting Experience, Journal of

Service Research, 2 (2), 173-86. Eagly A. et Chaiken S. (1993), The Nature of Attitudes, The psychology of Attitudes, Harcourt

Brace Jovanovitch College Publishers, 1993, 1-21. Fortner B.V. et Neimeyer R.A. (1999), Death anxiety in older adults: A quantitative review,

Death studies, 23, 387-411. Frazier L. D., Hooker K., Johnson P. M., et Kaus C. R. (2000),Continuity and change in

possible selves in later life: A 5-year longitudinal study, Basic & Applied Social Psychology, 22, 237–243.

Fromage, B. (1991). Le temps et la personne âgée. Thèse de Doctorat en Psychologie, Université

de Caen. Gentry J.W., Ko G. et Stoltman J.J. (1991), Measures of Personal Time Orientation,

VIIth John-Labatt Marketing Research Seminar, Montréal, Québec. Gibbs P.T. (1998), Time, Temporality and Consumer Behaviour: A Review of the Literature

and Implications for Certain Financial Services, European Journal of Marketing, 32, 11/12, 993-1007.

Page 27: La Perspective future : essai de clarification des ...

27

Gong L. (2006), Endogenous Time Preference, Inflation and Capital Accumulation, Journal of Economics, 87, 3, 241-255

Graham R.T. (1981), The role of perception of time in consumer research, Journal of Consumer

Research, 7, 335-342. Grossetti M. (2004), Sociologie de l’imprévisible. Dynamiques de l’activité et des formes sociales,

Presses Universitaires de France. Guiot D. (2006a), Un cadre d’analyse du processus de vieillissement et de son influence sur

le comportement d’achat du consommateur âgé, Recherche et Applications en Marketing, 21, 1, 57-79.

Guiot D., B. Barak, K. Lee, Y. Zhang et S. Gould (2006b), L’âge subjectif par-delà les

frontières : une étude cross culturelle dans le secteur de la mode, Décisions Marketing, n°43-44, juillet-décembre, 55-65.

Guiot D. et Urien, B. (2001). Le temps, de nouvelles variables explicatives du comportement

des seniors en matière de services financiers, Management des Services, pp.173-188, Presses de l'Université d'Angers.

Guy B.S., Rittenburg, T.L., Hawes, D.K. (1994), "Dimensions and characteristics of time

perceptions and perspectives among older consumers", Psychology and Marketing, Vol. 11 No.1, pp.35-66.

Hall E.T. (1959), The silent language, Gardern city, NY: Double day & Company, Inc. Hans-Tamaro, A. (2005), Incidence des événements de vie sur les activités et la consommation :

application au départ à la retraite, Thèse de doctorat en sciences de gestion. Université Paris Dauphine.

Hazan, H. (1980). The limbo people: A study of the constitution of the time universe among the aged.

London: Routledge & Kegan Paul. Heckausen H. et Kuhl J. (1985), From wishes to actions: The dead ends and short cuts on the

long way to action. In M. Frese & J. Sabini (eds.),Goal-directed Behavior: The concept of action in psychology. Erlbaum. N.J.

Henik W. et Domino G. (1979), Alterations in future time perspective in heroin addicts,

Journal of clinical psychology, 31, 557-664. Hepburn S.R. , Barnhofer T.J. et Williams M.G. (2006), Effects of mood on how future events

are generated and perceived, Personality and Individual Differences, 41, 801–811. Holbrook M.B. et Schindler R.M. (1994), Age, Sex, and Attitude Toward the Past as

Predictors of Consumer’s Aesthetic Tastes for Cultural Products, Journal of Marketing Research, 31, 412-422.

Page 28: La Perspective future : essai de clarification des ...

28

Hornik, J. et Schlinger, M.J. (1981), Allocation of time to the mass media, Journal of

Consumer Research, 7, 343-355. Kang, Y.S., Herr P.M., Page C.M. (2003), Time and Distance: Asymmetries in Consumer Trip

Knowledge and Judgments, Journal of Consumer Research, 30, 420-429. Karniol, R. et Ross, M. (1996), The motivational impact of temporal focus: Thinking about the

future and the past, Annual Review of Psychology, 47, 593-620. Kastenbaum, R. (1961), The dimensions of future time perspective, an experimental analysis,

The Journal of General Psychology, 65, 203-218. Kinsey J. et Collins M. I. (1994), Index of consumer expectations: Food price effects and

durable goods expenditures, The Journal of Consumer Affairs, 28(2), 255-277. Ko G. et Gentry J. W. (1991), The development of time orientation measures for use in cross-

cultural research', Advances in Consumer Research, 18, 135-142. Lambert-Pandraud, R. (2000). Le rachat de la marque précédente par les consommateurs

âgés : une synthèse des recherches en marketing, en psychologie sociale et cognitive, et en gérontologie. . Recherche et Application en Marketing, vol. 15. n°4. pp. 21-42.

Lang, F.R. et Carstensen, L.L.(2002). Time Counts: Future Time Perspective, Goals, and

Social Relationships. Psychology and Aging. 17-1. 125–139. Lauer R.H. (1981), Temporal man: The meaning and uses of social rime, New York: Praeger Press. Lennings C. J. (2000), Optimism satisfaction, and time perspective in the elderly. International

Journal of Aging and Human Development, 51, 167-181. Lens, W. (1993). La signification motivationnelle de la perspective future. Revue québécoise de

psychologie. Vol.14-1. Pp. 69-83. Lewin K. (1951), Field theory in social science; selected theoretical papers, D. Cartwright (ed.),

New York: Harper & Row. Liberman, N. et Trope, Y. (1998), The Role of Feasibility and Desirability Considerations in

Near and Distant Future Decisions: A Test of Temporal Construal Theory, Journal of Personality and Social Psychology 75, 1, 5-18.

Liebermann Y. et Ungar M. (2002), Efficiency of consumer intertemporal choice under life

cycle cost conditions, Journal of Economic Psychology, 23, 729–748. Lindquist J. D. et Kaufman-Scarborough C. F. (2004), Polychronic tendency analysis: a new

approach to understanding women's shopping behaviors, Journal of Consumer Marketing, 21 (5), 332-342.

Page 29: La Perspective future : essai de clarification des ...

29

Lomranz J., Shmothkin D., Zechovoy A. et Rosenberg E. (1985), Time orientation in nazi

concentration camp survivors: forty years after, American journal of orthopsychiatry, 55, 2, 230-236.

Lusardi A. (2004), Saving and the Effectiveness of Financial Education, in Pension Design and

Structure: New Lessons from Behavioral Finance, édité par O. Mitchell et S. Utkus. Lyer E. S. et Ahlawat S. S. (1987), Deviations from a shopping plan: When and why do

consumers not buy as planned, Advances in Consumer Research, 14, 246-250. McDonald, W. J. (1994), Time Use in Shopping: The Role of Personal

Characteristics, Journal of Retailing, 70, 4, 345-365. Mantel S. P. et Kellaris J.J. (2003), Cognitive Determinants of Consumers’ Time Perceptions:

The Impact of Resources Required and Available, Journal of Consumer Research, 29, 531-38. Markus H. et Nurius P.(1986) .Possible Selves. American Psychologist, 41, 9, 954-969. Markus, H. et Ruvolo, A. (1989). Possible Selves: personnalized representations of goals. In

Pervin, L.A. (Ed.), Goal Concepts in Personnality and Social Psychology, Hillsdale, N.J., Earlbaum. Pp. 211-241.

Martz E. et Livneh H. (2003), Death anxiety as a predictor of future time orientation among

individuals with spinal cord injuries, Disability And Rehabilitation, 25, 18, 1024–1032. Mendoza, N. A. et Pracejus J. W. (1997), Buy now, pay later: Does a future temporal

orientation affect credit overuse?, Advances in Consumer Research, 24, 499-503. Milfont T.L. et Gouveia V.V. (2006), Time perspective and values: An exploratory study of

their relations to environmental attitudes, Journal of Environmental Psychology, In press. Mischel W. (1981). Objective and subjective rules for delay of gratification. In G.d’Ydewalle

and W. Lens (Eds), Cognition in human motivation and learning. Leuven and Hillsdale, NJ, Leuven University Press &Erlbaum. Pp. 33-58.

Nurmi, J-E. (1989), Adolescent’ Orientation to the Future. Development of Interests and Plans,

and Related Attributions and Affects, in the Life-Span Context. The Finnish Society of Sciences and Letters, Commentationes Scientarium Socialium 39, Helsinki.

Nurmi, J.-E. (1992), Age differences in adult life-goals, concerns and their temporal

extension : A life course approach to future-oriented motivation. International Journal of Behavioral Development, 15, 487-508.

Nurmi, J.-E. (1993), Adolescent development in an age-graded context : The role of personal

beliefs, goals, and strategies in the tackling of developmental tasks and standards. International Journal of Behavioral Development, 16, 169-189.

Page 30: La Perspective future : essai de clarification des ...

30

Nuttin J.R. (1984), Motivation, Planning and Action, : A Relational Theory of Behavior Dynamics,

Leuven: Leuven University Press and Lawrence Erlbaum . Nuttin J. R. (1985). Théorie de la motivation humaine. Paris : P.U.F. Oakes S. (2003), Music Tempo and Waiting Perceptions, Psychology and Marketing, 20, 8, 685-

705. Oettingen G. (1997), Culture and future thought. Culture & Psychology, 3, 353-381. Piaget J. (1958), Logic and Psychology. New York: Basic Books, Inc. Piron F. (1993), A comparison of emotional reactions experienced by planned, unplanned

and impulse purchasers, Advances in Consumer Research, 20, 341-344. Popper K. (1956), Misère de l'historicisme (The Poverty of Historicism). Paris, Plon, 1956.

Réédition : Presses Pocket, 1988. Prime N., Valette-Florence P., Ferrandi, J-M. et Usunier J-C., (2000) Linking personal values,

Actes de la 1e Conférence sur les tendances du marketing en Europe, Venise, 24-25 novembre 2000, CD-Rom.

Raynor J.O. (1982), A theory of personality functioning and change', in J. O. Raynor. and E.

E. Entin (eds.), Motivation, Career Striving and Aging, Washington, D.C., Hemisphre, 249-302.

Rakowski, W. (1979), Future time perspective in late adulthood: Review and research

directions. Experimental Aging Research, 5, 1, 43-88. Regeth R. A. (1996). A measurement of future time perspective. XXVI International Congress

of Psychology, Montréal, Canada. Roberts, W. A. (2002). Are animals stuck in time? Psychological Bulletin, 128, 473–489. Rook D. (1987), The buying impulse, Journal of Consumer Research, 14, 189-199. Rotter J. (1966), Generalized expectancies for internal versus external control of

reinforcement, Psychological Monographs, 8 (Whole No. 609).

Ryff, C.D. (1991). Possible selves in adulthood and old age : a tale of shifting horizons. Psychology and Aging. Vol.6-2. Pp. 286-295.

Sarabia-Sanchez F-J. (2005), Consumer attitudes towards the future and some purchase patterns, Journal of Consumer Behaviour, 4, 6, 407-419.

Page 31: La Perspective future : essai de clarification des ...

31

Settle R.B., Alreck P. et Glasheen J.W. (1978), Individual Time Orientation and Consumer Life Style, Advances in Consumer Research, 5, 315-319.

Scheier M. F. et Carver C. S. (1985), Optimism, coping, and health: Assessment and

implications of generalized outcome expectancies, Health Psychology, 4, 3, 219–247. Schroeder J.E. (1989), What time means to others: expectations of behaviour based on time

use information, Advances in consumer Research, 16, 354-58. Schroeder J.E., Balazs, A.L., Venkatesan, M., Anderson B.B. (2001), Time perception and age:

a croos-cultural perspective, in Time and management, D. Caseby, (ed), Palermo: ISIDA, 435-446.

Shell D. F. et Hussman J. (2001),The Multivariate Dimensionality of Personal Control and

Future Time Perspective Beliefs in Achievement and Self-Regulation, Contemporary Educational Psychology, 26, 481–506.

Shirai T. (1996a), Terminology of Time Perspective and its measurement, XIVth biennal ISSBD

conference, Quebec city, 15-16 august 1996. Shirai T. (1996b), The meaning of being predominantly present oriented in Middle Age and

in Non western context, XIVth biennal ISSBD conference, Quebec city, 15-16 august 1996. Shlapentokh V. (2005), The short time horizon in the Russian mind, Communist and Post-

Communist Studies ,38, 1-24. Shmotkin D. et Eyal N. (2003), Psychological Time in Later Life: Implications for Counseling.

Journal of Counseling and Development. 81-3. 259-267. Simons J, Vansteenkiste M., Lens W. et Lacante M. (2004), Placing Motivation and Future

Time Perspective Theory in a Temporal Perspective, Educational Psychology Review, 16, 2, 121-139.

Snyder, C. R. Sympson S. C., Ybasco F. C., Borders T. F., Babyak, M. A., et Higgins, R.L.

(1996), Development and validation of the State Hope Scale, Journal of Personality and Social Psychology, 2, 321-335.

Sundberg N.D. (1983), Adolescents’ expectations of future events – a cross-cultural study of

Australians, Americans and Indians, International Journal of Psychology, 18, 451-427. Tamaro-Hans A. et Darpy D. (2006), L’influence de la perception temporelle sur le vécu d’un

événement : le départ à la retraite, 5emes Journées Normandes de recherche "Sociétés et Consommations", les 23 et 24 mars 2006.

Tarondeau J.C., Naccache P. (2001), Introduction, dossier le temps en gestion, Revue française

de gestion, 132, 58-62.

Page 32: La Perspective future : essai de clarification des ...

32

Thaler R.H. and Shefrin H.M. (1981), An Economic Theory of Self-Control, Journal of Political Economics, 89 (2), 392- 406.

Thiébaut E. (1998), la perspective temporelle, un concept à la recherche d’une définition

opérationnelle, L’année psychologique, 98, 101-125. Thiébaut E. (2000), Perspective Future, stratégies d’adaptation et planification: un modèle de

mesure, Revue européenne de psychologie appliquée, 50, 205-216. Timmer, E., Steverink,, N., Stevens, N., Dittmann-Kohli, F. (2003). Personal concepts of

stability in the second half of life. Journal of Aging Studies, 17, 427–443 Tonn B., Hemrick A. et Conrad F. (2006), Cognitive representations of the future: Survey

results, Futures, 38, 810–829. Tourani-Rad A. et Kirkby S. (2005), Investigation of Investors' Overconfidence, Familiarity

and Socialization, Accounting and Finance, 45, 2, 283-300. Urien, B. (1999), Tentative d'interprétation temporelle du comportement exploratoire de

consommateur, Thèse de doctorat. Université de Rennes. Urien, B. (2005), Comment gérer le rapport intime à la mort chez les seniors ? Colloque sur le

temps. IUTC de Lille, 31 mars 2005. Urien, B. (2005), Une situation de saillance de mort encourage t-elle les consommateurs à

adopter un comportement écologique ? Une analyse au regard de la théorie du management de la terreur. Actes du XXIème Congrès AFM – 18-20 mai 2005.

Usinier, J-C., Valette-Florence, P. (1994), Perceptual Times patterns (‘time styles’), A

psychometric scale, Time and Society., 3, 2, 219-241. Valette-Florence P., Ferrandi J.M., Usunier J.C. (2001), Le temps des consommateurs : le cas

du téléphone portable, Revue Française de Gestion, 132, 112-118.

Van Kenhove P. et De Wulf K. (2000), Income and time pressure: a person-situation grocery retail typology. International Review of Retail, Distribution and Consumer Research, 10, 149-166

Venkatesan, M., Schroeder, J. E., et Al-Weqaiyan, A. (1997), Time and consumer behavior in

different cultures, In Dawn Caseby (ed.), Between Tradition and Innovation: Time in a Managerial Perspective (pp. 27-43) ISIDA: Palermo, Italy.

Weinstein N. (1980), Unrealistic optimism about future life events, Journal of Personality and

Social Psychology , 39, 806–820. Walsh P.A. et Spiggle S. (1994), Consumer Spending Decisions: Dimensions and

Dichotomies, Advances in Consumer Research, 21.

Page 33: La Perspective future : essai de clarification des ...

33

Yberma S. (2004), Managerial postalgia: projecting a golden future, Journal of Managerial Psychology, 19, 8, 825-841.

Zaleski, Z (1993). Attitudes face à l'avenir, espoir et anxiété. Revue québécoise de Psychologie.

Vol 14-1. Pp 85 – 111. Zaleski Z. (1997), Uncertainty of personal future and social influence strategies in work

settings, in E. Santos et M. Paixao (eds.), Counseling theory, research and practice, Coimbra, Coimbra University Press.

Zimbardo, P.G., Boyd, J.N. (1999).Putting time in perspective: a variable, reliable individual-

differences metric. Journal of Personality and Social Psychology. Vol. 77-6. Pp. 1271-1288.