Copy party en bibliothèque pourquoi cela fait sens (Strasbourg)

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Copy Party en bibliothèque : De quel droit et pourquoi cela fait sens ? Par Calimaq Copies. Par Thomas Hawk. CC-BY-NC

Transcript of Copy party en bibliothèque pourquoi cela fait sens (Strasbourg)

C’mon Brothers ! We Have A Copy Party Today !

Source : Bibliogobelin

Un évènement qui ne va

pas de soi…

« Tu ne copieras point ! »

Une période de répression

Lady Justice. Par Scott*. CC-BY-NC-SA

La copie non autorisée est

constitutive d’un

délit de contrefaçon,

théoriquement puni en

France de 3 ans de prison et

300 000 euros d’amende.

Source : Internet & Moi.

Et si on appliquait vraiment

de telles peines ?

Cory Doctorow.

Pirate Cinema

Copier n’est pas un acte anodin…

A l’origine, les bibliothèques étaient autant

des lieux destinés à la copie qu’à la lecture.P

ar

-W-.

CC

-BY

-NC

-ND

.

« La constitution du fonds s'opéra essentiellement par

achat, mais également par saisie ou ruse : Ptolémée

aurait ainsi demandé à tous les navires qui faisaient

escale à Alexandrie de permettre que les livres

contenus à bord soient recopiés et traduits ; la copie

était remise au navire, et l'original conservé par la

bibliothèque ». Source Wikipedia.

Le rôle de la copie (forcée) dans la

constitution de la mythique

Bibliothèque d’Alexandrie.

Héritier : le dépôt légal du web

« Bruno Blasselle raconte qu’au Moyen Âge, la

naissance des universités avait conduit à un

accroissement de la demande de copies de

textes, reliés sous forme de codex. Ceci

conduisit au développement d’ateliers de copie

à l’extérieur des monastères, avec des artisans

spécialisés : copistes, relieurs, enlumineurs.

Cette multiplication des copies entraîna une

multiplication des erreurs, inévitable puisque

les textes étaient souvent des copies de

copies. Pour prévenir de telles erreurs, des

dépôts furent créés, où une copie fiable de

référence était stockée : l’exemplar.

Cependant, l’exemplar n’était pas relié comme

un codex : il demeurait divisé en folios ou en

cahiers. Pourquoi ? A cette époque, il ne

s’agissait pas d’empêcher les copies d’être

réalisées, mais au contraire de les encourager.

Mais la copie était un processus long et

complexe. Pour accélérer la production de

copies, des folios séparés pouvaient être

prêtés à différents copistes en même temps :

tandis que l’on recopiait le premier folio, les

autres pouvaient copier d’autres parties du

texte. » Philippe Aigrain. Sharing.

Longtemps, les livres étaient conçus pour être copiés

Système de la pecia

Source : Wikimedia Commons

Et la figure de

l’auteur apparaît

Et avec elle, la copie devient

problématique…

« Malheur à toi, voleur du travail et du talent d’autrui. Garde-toi de poser ta main téméraire sur cette oeuvre.

Ne sais-tu pas ce que le très glorieux Empereur Romain Maximilien nous a accordé ? – que personne ne soit autorisé à imprimer à nouveau ces images à

partir de faux bois, ni à les vendre sur tout le territoire de l’Empire. Et si tu fais cela, par dépit ou par 

convoitise, sache que non seulement tes biens seraient confisqués, mais tu te mettrais également toi-même en grand danger. » (texte inséré dans un recueil

de gravures en 1511)

Monogrammes de Dürer. Wikimedia Commons.

Wikimedia Commons

Procès intenté par Dürer au graveur Marcantonio Raimondi

L’imprimerie introduit une

rupture fondamentale

La copie devient beaucoup plus

simple et l’ancêtre du droit d’auteur apparaît, sous la forme

des privilèges d’imprimeur.

Le droit d’auteur proprement dit

apparaît plus tard en Angleterre (Statute of Anne 1710)

En France, première

consécration du droit d’auteur à la fin de

l’Ancien Régime (Beaumarchais) et consécration dans la loi

à la Révolution (Loi Le Chapelier 1791)

Au cœur de la question,

le droit d’auteur

RERO Copy My Right

Banksy

Le droit d’auteur saisit essentiellement la copie à travers la notion de reproduction.

Avec la représentation, il s’agit d’un des droits patrimoniaux des auteurs et de

leurs ayants droit, pour lequel ils disposent d’un monopole.

La reproduction est définie comme «  la fixation matérielle de l’œuvre par tous 

procédés  qui permettent de la communiquer au public de manière indirecte» (Art. L.122-3 )

En principe, toute reproduction d’une œuvre protégée doit faire l’objet d’une

autorisation, sous peine de constituer une contrefaçon.

A lire : Droit d’auteur,

qu’est-ce que la reproduction ?

Les techniques de copies et de diffusion

progressent, mais le droit d’auteur

s’adapte…

Le cas limite du magnétoscope…

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A lire : EFF. The Betamax case / Comparaison

avec jugements contre Napster, Grokster…

Tensions et actions en justice contre cette

technologie, mais compromis trouvé autour

de l’exception de copie privée et d’une

rémunération associée.

Le numérique introduit une rupture radicale et

nous précipite dans la culture de la copie

Will Lion. Copy Culture. CC-BY-NC-NC

Internet est une immense machine à copier

et toute diffusion d’une œuvre implique une copie

Un des premiers cas de contrefaçon en ligne

« Affaire Queneau » : TGI Paris 5/05/1997(…) la numérisation d’une oeuvre, technique consistant à traduire le signal analogique qu’elle 

constitue en un mode numérique ou, binaire qui représentera l’information dans un symbole à 

deux valeurs 0 et 1 dont l’unité est le Bit, constitue une reproduction de l’oeuvre qui requiert

en tant que telle lorsqu’il s’agit d’une oeuvre originale, l’autorisation préalable de l’auteur ou

de ses ayants droits

http://100000000000000poems.atspace.com/

Le droit d’auteur prend très vite pied sur le web : pas de flou juridique

La génération du copier-coller

A lire : L’œuvre d’art à l’ère de son

appropriabilité numérique. André Gunthert

L’ère du remix et du mashup

Plus ou moins de libertés avec le numérique ?

Beaucoup d’actions parfaitement légales dans

l’environnement physique deviennent illégales

dans l’environnement numérique

Book Crossing

Little Free Library

Dead Drops

Pirate Box

Depuis 1996 (Traité OMPI sur le droit d’auteur), le système cherche à retrouver un équilibre autour de la notion de DRM

=Deus Ex Machina

DMCA aux Etats-Unis (1998), Directive européenne

de 2001,Loi DADVSI en France en 2006

+ Loi Hadopi et riposte graduée en 2009Par Freefotouk. CC-BY-NC.

DRM, à quel prix ?

En 2009, Amazon supprime des

livres numériques légitiment

achetés des comptes d’utilisateurs

de Kindle, pour des raisons de

droits (et recommence en 2012)

A lire ! « Le DRM, c’est l’acceptation

d’un Droit de Regard de la Machine »

O. Ertzschied.

Vers l’a-copie ?

« L'acopie ce serait alors l'antonyme de la

copie. Un terme désignant la mystification

visant à abolir, au travers d'un transfert des

opérations de stockage et d'hébergement

liées à la dématérialisation d'un bien, la

possibilité de la jouissance dudit bien et ce

dans son caractère transmissible, en en

abolissant toute possibilité d'utilisation ou

de réutilisation réellement privative »

O. Ertzscheid.

A lire : Apple veut rendre les vidéos réellement incopiables

Google Glasses,

impression 3D…

Le progrès technologique démultiplie

les enjeux de la copie et entraîne

toujours plus de frictions juridiques…

Copier, c’est tricher ?

Copier, c’est voler ?

Copier, c’est aimer ?

Copier, c’est partager ?

Copier, c’est s’exprimer ?

Copier, c’est créer ?

Plusieurs conceptions de la copie

Copier, c’est tricher ?

Chrisjohnbeckett. CC-BY-NC-ND

L’assimilation de la copie à

la tricherie renvoie en fait à

la question du plagiat.

A lire : Qu’est-ce que le plagiat ? (formation vidéo)

« Dans ce lieu destiné à la construction

collective des connaissances, il est sans doute

aussi nécessaire d’adapter la pédagogie pour

apprendre à bien copier, c’est-à-dire à le faire

de façon intelligente et (re)créative. Plutôt que

de vilipender des élèves « tricheurs », peut-être

les enseignants pourraient-ils prendre

l’habitude de montrer la fabrique d’un cours,

autrement dit expliquer qu’ils s’inspirent eux

aussi de documents divers : manuels, livres du

professeur, ouvrages scientifiques,

encyclopédies, sites internet, cours en ligne….

Peut-être pourraient-ils initier les élèves à des

démarches similaires : rechercher, trier, relier,

traiter, partager les informations. Certains CDI

ont d’ores et déjà lancé des « copy parties »,

pour éduquer les élèves tout à la fois aux joies

des connaissances partagées et aux exigences

de la propriété intellectuelle. »

Café pédagogique.

Spot vidéo dans les DVD

Copier, c’est voler ?

« Une étude

britannique sur les

industries créatives

démontre que le

piratage ne nuit pas à

la santé économique

du secteur. Au

contraire il encourage

la consommation de

biens culturels. »

Source : L’Express.

Copier, c’est partager ?http://w

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142455033/

A lire : Le piratage, hyperlien social ?

«Aujourd’hui, il y a vraiment deux 

catégories de partage de

contenu culturel, analyse Thierry

Pénard, chercheur au sein de

M@rsoin. Il y a d’un côté la 

pratique anonyme sur le Net, que

ce soit sur les réseaux P2P ou

en téléchargement direct comme

sur Mega, et de l’autre, la logique 

sociale, que ce soit entre amis,

par des systèmes de stockages

physiques ou en ligne, comme

Dropbox, ou dans des

communautés en ligne

structurées et fermées.

Il y aura toujours un partage

social, communautaire et

désintéressé, on ne peut pas

l’empêcher, souligne Thierry

Pénard. On prête les livres

qu’on a aimés et personne n’a

jamais trouvé ça dangereux. »

Copier, c’est créer ? C’est s’exprimer ?

Question des usages transformatifs :

mashup, remix, fanfictions,

détournements

D’autres façons de voir les choses : les licences libres

The gentle Path To The Beyond. Par Trey Radcliffe. CC-BY-NC-SA.

Le Cosmonaute, un film

« produit » par plus de 2000

personnes collaborativement,

par le biais du crowdfunding.

Un film partageable, diffusé sous

licence Creative Commons.

D’autres façons de voir les choses : les licences libres

D’autres façons de voir les choses : Le domaine public

Copy

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Extension du domaine

de la copie

Source : SketchLex.

Une seule de ces deux images est vraiment dans le domaine public…

D’autres façons de voir les choses : Le domaine public

Le problème du copyfraud…

Alors pourquoi la Copy Party ?

Le site de la Copy Party

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Le système du droit d’auteur est normalement équilibré par des exceptions

Copyright = Tous droits réservés

Tout usage nécessite en principe une autorisation

préalable

Copies privées

Analyses et courtes citations

Parodies, pastiches, caricatures

Revues de presse

Représentations privées et gratuites

Sauf si on se trouve dans le cadre d’une exception législative…

Copies privées

• « Les copies ou reproductions strictement réservées à l'usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective »

• + Critère ajouté par les juges de la possession de l’appareil de copie

Nin

ja M

. CC

-BY-N

C-SA

Mais quelle application dans

l’environnement numérique ?

34

Mettre des fichiers en ligne sur un

réseau P2P (« uploader ») et partager

ses fichiers constituent pour les juges

français des actes de contrefaçon ;

Mais avant 2006, aucun internaute

n’a jamais été condamné pour avoir

simplement téléchargé des fichiers ;

Question non tranchée : assimilation

du téléchargement à un acte de copie

privée et incidence de la licéité de la

source.

Pendant longtemps, les titulaires de

droits ont fait entrer les préjudices liés

au piratage dans la rémunération pour

copie privée. En Suisse ou en Espagne, le simple téléchargement constitue un acte légal

sur la base de la copie privée

Et si la copie privée était applicable au téléchargement…

http://www.flickr.com/photos/delicakes/5574342003/

Le déclencheur : la réforme de décembre 2011

Depuis décembre 2011, le législateur a ajouté comme

condition de la copie privée que les reproductions soient faites à partir

de « sources licites »

Or les bibliothèques sont par

excellence un moyen de se

procurer des « sources licites »

http

://ww

w.ap

artmen

ttherap

y.com

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elving-sto

rage/bo

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ho

use-b

edsid

e-bo

oksh

elves-b

y-david

-restorick-0

45

18

2

Ouvre la voie à

la copie

personnelle en

bibliothèque

Et pourquoi pas, à des

Copy Party ?

Copy Party, les conditions

A lire : Le cadre juridique de la Copy Party

==> A QUELLES CONDITIONS PEUT-ON PARTICIPER A UNE

COPY-PARTY ?

- Ces copies doivent être réservées pour votre usage personnel

- Chaque personne doit faire ses propres copies avec son

propre matériel de reproduction (appareil photo, téléphone

portable, etc.)

- Elles doivent être réalisées à partir des documents originaux

consultés dans une bibliothèque

- L’acte de copie ne doit pas briser une mesure de protection

technique (DRM)

Le sens de la Copy Party

« Demain, des honnêtes gens vont

entrer dans des bibliothèques pour y

faire des copies, sans aucun sentiment

de culpabilité, en pleine lumière, pour le

plaisir gourmand et fécond d’y appliquer

simplement et légitimement l’un de leurs

droits. Nul n’est censé ignorer la loi. Nul

n’est surtout censé ignorer ses droits. »

Olivier Ertzscheid

Revenir à une conception

positive de la copie et des usages

Copy PArty. CC-BY-SA

Une interprétation confirmée par la Cour de Justice de l’Union Européenne

Par Cory Doctorow. CC-BY-SA.

Septembre 2014 : la CJUE confirme la possibilité pour les bibliothèques de numériser leurs collections sur la base d’une exception au droit d’auteur figurant dans la directive européenne

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C-N

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Confirmation indirecte que les collections

des bibliothèques constituent bien des

“sources licites” à partir desquelles des

copies privées peuvent être réalisées

Et le financement de la création ?

La copie privée fait l’objet d’une redevance payée à

l’achat de supports vierges et d’appareils de copie qui

rapporte chaque année plus de 200 millions d’euros.