Conrad, Madach et Calderon

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Canadian Slavonic Papers Conrad, Madach et Calderon Author(s): Gerald Morgan Source: Études Slaves et Est-Européennes / Slavic and East-European Studies, Vol. 6, No. 3/4 (Automne-Hiver/Autumn-Winter 1961), pp. 196-209 Published by: Canadian Association of Slavists Stable URL: http://www.jstor.org/stable/23212481 . Accessed: 24/06/2014 20:16 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Canadian Association of Slavists and Canadian Slavonic Papers are collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Études Slaves et Est-Européennes / Slavic and East-European Studies. http://www.jstor.org This content downloaded from 185.44.77.28 on Tue, 24 Jun 2014 20:16:14 PM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

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Canadian Slavonic Papers

Conrad, Madach et CalderonAuthor(s): Gerald MorganSource: Études Slaves et Est-Européennes / Slavic and East-European Studies, Vol. 6, No. 3/4(Automne-Hiver/Autumn-Winter 1961), pp. 196-209Published by: Canadian Association of SlavistsStable URL: http://www.jstor.org/stable/23212481 .

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Conrad, Madack et Calderon

par

Gerald Morgan

11—i L'existentialiste baroque

A la date actuelle (octobre I960), il y a soixante-dix années précisé

ment que Joseph Conrad Korzeniowslri a quitté le Congo, gravement

malade, et portant dans ses bagages le manuscrit inachevé de son premier

roman, La Folie Almayer \

Lorsqu'il publia Ie roman, cinq ans plus tard, il le dédia à la mémoire

de son oncle décédé Taddeusz Bobrowski. II n'avait aucune intention

consciente d'adopter une carrière Iittéraire. II était marin, àgé de trente

neuf ans ; il était capitaine au long cours. II a eu le commandement de

la barque OTAGO dans Ies mers australes.

Mais, avec un deuxième roman qu ii publia en 1896 Conrad Korze

niowski est déjà engagé dans une carrière d'écrivain. II a choisi la Iangue

anglaise, et il porta le nom de piume « Joseph Conrad ».

Et déjà sur ce deuxième roman, Le Paria des lies, Conrad a posé une épigraphe en espagnol : El mayor delito del hombre es haber nacito,

c'est-à-dire : le plus grand défaut de I'homme est d'ètre né 2. Ces paroles sont prises de la pièce de Calderon de la Barca intitulée La Vida es

Sueno ou, La Vie est un Songe 3. Cette pièce est Ihistoire d'un prince

polonais, Sigismond, qui est mis à Iépreuve à la cour de Varsovie. Son

pére, le roi Basile, lui présente son état royal comme si celui-ci était

entièrement illusoire.

Sigismond échoue à I épreuve. II Jiésite •— comme le prince danois

de Shakespeare entre la réalité et le mirage, et pour son « Etre ou

non-ètre » il déclare que nul crime humain ne peut égaler celui d exister.

On pourrait se demander pourquoi cette pièce de Calderon se situe

en Pologne. Mais ici nous Iaissons de coté ce genre de problème, tei que le pourquoi de la pièce No hay ser padre siendo Rey que Rojas Zorrilla a située dans la Pologne, ou le pourquoi de la pièce El amor constante

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que Guillén de Castro a située dans la Hongrie 4. Signalons seulement

qu on a employé le mème procédé de dépaysement tout récemment dans

le roman politique Les Inquisiteurs que I'auteur polonais a situé dans

IEspagne du temps de I lnquisition 5.

Dans le roman de Conrad, les paroles de Sigismond s appliquent

au traìtre qui s est rendu indigne, en manquant à la solidarité Kumaine ;

pour lui, enfin, il serait mieux de n ètre pas né. Ce motif est développé

le plus énergiquement par Conrad dans les romans Le Negre du

Narcisse et Lord Jim. Tous les deux sont des liistoires de fidélité et de

trakison, où les personnages héroiques sont marins 6.

Le Negre du Narcisse était le troisième roman de Conrad, dans

Iequel il a montré pour la première fois sa pleine maitrise. On trouve ici

une répétition, dans un milieu nautique, du tkème de son roman Coeur

de Ténèbres situé dans les jungles du Congo. Les matelots de la barque

NARCISSE nous sont présentés, tour à tour, comme des « images »r

et comme « des somnambules furieux » 8. lis sont à la merci d'un rève

impitoyable, « un rève sans merci », fouettés à travailler « dans une

atmospkère de fiamme ou de giace » 9.

Nous pourrons discerner ici, en plus du motif du songe, un autre

écho de Calderon ; les mots « fiamme » et « giace » se trouvent ensemble

aussi dans la pièce La Vie est un Songe 10. Et nous pourrons discerner

encore davantage. Avec cette juxtaposition typique de la fiamme et de

la giace, Conrad nous rappelle le mariage des opposés, si cher aux

auteurs romantiques, si cber aux esprits baroques, si clier aux mystiques — soit poètes, soit pbilosopkes •—> qui ont inauguré la Renaissance.

Parmi ces derniers, c'est le cardinal Nicholas de Cues, précurseur de Copernic 11, qui a renouvelé au quinzième siècle le principe de la

coincidentia oppositorum. Derrière Conrad nous apercevons non seule

ment I ombre de Calderon mais aussi I'humeur du cardinal ; et cette

dernière devient plus claire si nous remarquons la tendance, de Conrad

et du cardinal, à rejeter la Iogique comme instrument du savoir. Et ils

ont le méme but. C'était pour indiquer la route au cceur de I'existence

Kumaine, que le cardinal Nicholas a écrit son Iivre Sur l'ignorance Savante 12.

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Ainsi nous voyons une autre dimension de I'image caldéronesque

qui se dévoile dans F oeuvre de Conrad. Le cardinal est bien connu comme

un précurseur de Hegel13 ; on peut dire qu ii a exercé sur la Renaissance

et le Baroque une influence telle que Hegel a exercée sur I'époque roman

tique. Parmi les confrères spirituels de Hegel, qui savait si bien récon

cilier les contraires, nous trouvons Schlegel, Novalis et Schelling. C'est

Schlegel qui a proclamò au monde romantique que le drame caldéro

nesque a résolu I'énigme de Iunivers 14. Novalis, à son tour, a fourni

I'épigraphe pour le roman Lord Jim de Conrad. Schelling nous attend

un peu plus loin.

Indépendamment de ces liens nous avons la déclaration de Conrad

au journaliste Dombrowski : « La plus grande influence sur mon oeuvre

c'est Slowaclri » 15. Il est à remarquer que Slowacki, dans son Ksiadz

Marek et son Sen Srebny Salomei, a imité la pièce El principe constante

de Calderon 16. II est aussi à remarquer que le courant de pensée anti

rationaliste a circulé fortement dans les ceuvres de Mickiewicz 17

et de

Slowacki18, qui sont les maitres polonais de Conrad. Et si nous remontons

ce courant de pensée antirationaliste, en passant par le quinzième siècle

nous ne pouvons pas éviter le cardinal Nicholas.

Remontons plus haut, jusqu'au douzième siècle. Nous trouvons là un

mystique — c est-à-dire un antirationaliste r— qui ne proclame pas une

doctrine de I Ignorance Savante mais qui dirige toutes les espèces du

savoir, contradictoire ou non, vers Ie centre du soi. C'est Hugues de

Saint-Victor19, dont Ie conseil nous rappelle celui de Conrad: quii faut que I on descende aux profondeurs de son ètre. Ce conseil, Conrad

nous l a donné dans la preface du roman Le Negre du NARCISSE. Ne

semble-t-il pas se rapprocher, un peu, de I existentialisme du soi et de la

phil osophie personnaliste de nos jours ? Si c'est ainsi, ce n est pas sans

raison. L'existentialisme de Gabriel Marcel, antirationaliste, est fondé

directement sur la via interior de Hugues de Saint-Victor. Marcel, drama

turge de la pièce à thèse, a commencé son oeuvre par une étude de I'in

fluence sur Coleridge du philosophe Schelling, sur Iaquelle étude il a

mis une épigraphe empruntée de Hugues de Saint-Victor 20

; et Schelling est déjà mentionné ci-haut à coté des maitres de Conrad.

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Entre Conrad21 et Marcel22 il y a un rapport étroit d idées. lis

s'accordent premièrement, sur la nécessité de s'évader de tout système

catégorique du savoir ou du vivre ; deuxièmement, sur la nécessité d une

fidélité sans borne, d'une fidélité créatrice ; troisièmement, sur le mys

tère magique de I'univers sensible ; quatrièmement, sur la nécessité

d'agir d'une fa9on absolument individuelle, pour sauver le soi face à

I'existence. lis s'accordent, enfin, sur la nécessité d'éckapper à une exis

tence illusoire —< disons baroque i—* par le moyen d'une Ignorance Savante

qui dévoile aux àmes réfléckies une via interior vers le coeur des ténèbres.

II faut cependant distinguer entre Ies attitudes adoptées par ces

deux écrivains. Pour Marcel, le mystère de I'existence exige un engage ment total ; pour Conrad, I'abnégation « dédaigneuse » du soi2S.

L'existence, pour Conrad, c'est le voyage du NARCISSE à travers

la mer ; sa barque est un symbole de l'ego exalté qui flotte, et qui se

reflète dans le miroir de I'Infini. Et cette idée d'une barque kumaine

supportée par une mer, abstraction faite des symboles conradiens, nous

rappelle encore la conception de Hugues de Saint-Victor : l ame qui flotte sur l'océan du monde, semblable à I'arcke de Noè sur Ies eatix du

déluge 2*.

Pour Marcel, I'komme est jeté sur la scène d'un tkéàtre cosmique, où il doit jouer un ròle sans le connaitre et sans le répéter d'avance ; il

improvise, tout comme l'acteur italien d'une commedia dell'arte 2\ (II est

à noter que cette idée indique non seulement la métkode du tkéàtre de

Marcel, mais aussi la métkode de son enquète métapkysique) 26.

Cette plainte est déjà portée par Ies caractères de la pièce religieuse de Calderon, El Gran Teatro del M.undo 27, dont le titre est anticipé par Ies paroles du prince Sigismond dans son rève 28. Et l'idée d un mystère,

accompli sur la scène d'un tempie cosmique, se trouve dans la correspon dence personnelle de Conrad 29.

Est-ce que Conrad emprunte ici à Calderon ? Peut-ètre emprunte t-il d'un autre Espagnol, ou de Skakespeare. Où sont Ies Iimites de I'em

prunt ? Est-ce qu'un komme de génie, affronté par I'univers, tend à

s'accorder avec Ies esprits de son rang ? On peut se demander Iaquelle, vision ou réflexion, est la plus déterminée ; Ies miroirs kumains ne sont

que des miroirs.

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Nous avons trouvé que, si I on regarcle Conrad en se pla^ant du

coté du passé, il a I air d un romantique ou d un mystique spéculatif. Si

I on regarde Conrad en se plagant du coté de I'avenir, il a l'air d'un

existentialiste. Nous savons aussi qu'un courant de pensée peut avoir

des appellations variées selon ses étendues successives. Ce qu on appelait

romantisme a déjà été mysticisme spéculatif, et continue de I étre d une

fa£on séculière, mème sii est devenu existentialisme de nos jours. Pour

la suite, on ne sait pas.

Si nous prenons la fagon baroque de mèler Ies contraires ; si nous

employons I'appareil des rèves, des miroirs, des ombres, des illusions, des

portraits de I artiste dans F ambiance de Ieurs sujets, tout I'appareil que

le baroque a Iégué au romantisme 30

; si, pour tout cela, nous fournissons

Ies idéals de Gabriel Marcel, nous trouvons devant nous une esquisse

moderne de I'essentiel de Iestbétique de Conrad.

Le roman le plus énigmatique de Conrad, Lord Jim 31, peut ètre

done considéré comme une kistoire existentialiste racontée par un Calderon

romantique. Le kéros est un réveur qui ne sait pas jouer son ròle ; il nous

rappelle le Homo Viator par Iequel Marcel a symbolisé I exil métapky

sique de notre époque 32.

Jim est un traitre malgré lui, comme sera Razumov dans le roman

politique de Conrad Sous les yeux de l'Occident33. II a abandonné son

navire le PATNA, au moment où le navire et ses 800 passagers ont du

couler incessamment au fond de la mer. Cependant la menace, comme

la sécurité, se montre illusoire. Jim s'est rendu indigne, en manquant à

la solidarité bumaine ; cette solidarité qui, Conrad nous l a dit aupara

vant 3\ est attesté par Ies rèves et par Ies illusions bumaines.

Conrad ne manque pas à nous dire, dans Lord Jim, que le mot

« illusion » n est qu un autre nom pour « vision » ; pbrase qui nous

rappelle le compatriote mythique de Calderon, Don Quixote de la Man

cba. Conrad Iui-mème a été nommé « un Don Quicbotte incorrigible »

Iorsqu'il a montré à I'àge de quinze ans sa détermination inflexible de

devenir marin 35. Ce « Don Quicbotte » est parti néanmoins pour com

mencer une vie maritime (dans Iaquelle il porta un écusson toujours

immaculé) ; pour jouer un ròle improvisé selon son rève. Quarante ans

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après, il écrivit à John Galsworthy : « En 1874 je suis monté dans un

train à Cracovie en route pour la mer, comme un homme pourrait entrer

dans un rève. Et voici que le rève se prolonge encore » 3S.

Lord Jim est Ihistoire d un homme qui a momentanément manqué

de suivre le rève pour Iequel il est né. Dans le chapitre axial du roman,

Conrad nous donne un sommaire de sa doctrine du rève caldéronesque,

prononcée par un allemand qu ii appelle « un romantique ». Dans les

paroles de Stein, Conrad nous dit que tout homme qui est né tombe dans

un rève, comme s il avait tombé dans la mer (autrement dite : le miroir

de I Infini). Celui qui essaie de se sauver est bientót fatigué, puis noyé ;

celui qui sait s immerger dans « Iélément destructif » est soutenu par la mer. La seule fa^on d exister c est de se soumettre au rève, et de le

suivre, usque ad finem 37.

Le vapeur PATNA, que Jim a abandonné, a été nommé par Conrad d après la cité de Patna, qui était autrefois un port de charge

pour les voiliers d'opium 38

; voiliers chargés de rèves, de bonheur illu

soire, comme le vapeur PATNA a été chargé des pèlerins visionnaires.

Le saut de Jirri, qui l a réveillé à sa faiblesse en le portant hors du code

de bord, a fait de lui un paria qui veut se cacher à tout prix d'un spectre d un rève. Pour lui aussi, il serait mieux de n'étre pas né.

Jim a done trahi la patrie idéale de la population flottante de la

mer, le monde humain errant sur le miroir de I lnfini ; disons qu ii a

quitté l'arche de Noè dont a parlé Hugues de Saint-Victor. Son sort

oblige tout homme autour de lui de prendre conscience de soi, et d affir

mer une fidélité irréfléchie ; la fidélité du marin, de F artiste, de I'àme

humaine qui rève dans ses fonds au-delà des sciences et des doctrines

illusoires. Le jeune marin devient, pour ses témoins, un miroir universel.

Dans quelle mesure Jim était-il un miroir de son auteur ?

On dit que Conrad a contessè symboliquement, par le saut de Jim

qui quitta le PATNA, d avoir Iui-méme abandonné sa patrie39. Le

moindre savoir nautique suffit, cependant, pour démolir cette hypothèse,

qui consiste en des analogies attributives et non proportionnelles et qui d ailleurs dépend de la présomption d un complexe de faute. Les défi

nitions nautiques qui abondent dans Lord Jim opposent une défense

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absolue contre toute attribution nationaliste. Plus de raison a-t-il peut

étre, qui a suggéré que, si Conrad se sentait coupable, c'est d'avoir aban

donné sa vie maritime pour Iaquelle il a quitté la Pologne à Iàge de

seize ans 40. Disons que, si Conrad se sentait coupable en adoptant une

carrière Iittéraire, il y avait <—• pour nous <—< une felix culpa. Au moins, il

n'a pas traili la solidarité bumaine en quittant la mer. II a travaillé

constamment, malgré Ies pires souffrances physiques et morales, à sonder

le rève perpétuel de I'homme, à pénétrer au coeur ténébreux du mystère

Kumain, qui s'est dévoilé devant lui pour la première fois pendant le

voyage au Congo. Et Conrad croyait toujours, comme le prince polonais

de Calderon, que n'importe quel rève nous a appelés, il faut surtout

agir bien : obrar bien es lo que importa 41.

II — La tragedie de l'homme : Adam existentialiste

Je demanderais d'avance I'indulgence de mes Iecteurs si mon projet leur semblait trop téméraire : ce projet de traiter d'un poète bongrois sans

savoir la Iangue bongroise. Cependant, j'ai confiance que, dans le cadre

de mon étude, le génie de Madacb est absolument résistant aux faiblesses

de la traduction42. D'ailleurs, il me semblait bon de signaler le cente

naire du cbef-d'ceuvre de Madacb, à I'étude duquel je fus amené, il y a

quelques années, par mon ami et collègue, feu le docteur Emile Walter.

On a déjà remarqué que le génie créateur, comme celui du mysti

cisme, nous semble avoir partout Ies mèmes efforts Iittéraires. C'est-à

dire, que Ies auteurs qui possèdent le génie créateur au plus baut degré tendent à s'exprimer de la méme fagon. On a remarqué, par exemple, comment le romancier anglais d origine polonaise, Conrad Korzeniowsld,

peut étre placé à coté des existentialistes du vingtième siècle ou à coté des

mystiques spéculatifs du treizième siècle, grace à son adaptation d'un

tbème qu'il trouva dans le drame de Calderon de la Barca du dix

septième siècle.

Maintenant, considérons s ii n'y a pas là un signe d'une limite du

génie créateur. Evidemment, le fait que Conrad nous a dit la mème cbose

que son inspirateur Calderon peut ètre regardé comme témoin des Iimites

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de Conrad ; et le fait que Ies existentialistes nous disent la mème chose

que Conrad nous indique Ies Iimites des existentialistes. Mais nous pou vons nous demander si ces Iimites données appartiennent aux individus,

ou si elles appartiennent à la nature mème du genie créateur. Est-ce qu ii

reste encore quelque vérité dont ces auteurs ont manqué de nous parler ?

Nous pourrons éclairer la chose, en regardant un chef-d oeuvre qui ne doit rien, apparemment, à Calderon, et qui est complètement ignoré

de Conrad. C'est La tragedie de l'homme, l'oeuvre que Imre Madach a

terminée vers la fin de 1861.

II n'y avait point de lien direct entre le poète hongrois et Conrad, qui

naquit en 1857. Mais il y a assez d éléments communs dans Ies oeuvres

de Madach et Conrad, ces deux enfants du romantisme est-européen. De plus, le drame poétique La tragèdie de l'homme nous semiale porter

plus loin le thème du drame de Calderon La vie est un songe. Dans le

drame de Calderon, le songe est la vie d'un prince polonais ; dans

celui de Madach, le songe est I'histoire totale de la race humaine. C'est

le réve que Lucifer permet à Adam, Iorsque ce dernier se voit tanni du

paradis. Après le rève prolongé Adam s'incline vers I'acte de suicide.

II agit comme s ii était un des personnages des romans de Conrad, qui sont brusquement réveillés de Ieurs rèves par le destin.

Le rève d'Adam est un voyage à travers Ies siècles de l'ère humaine,

où le voyageur est l'homme primordial, originateur de tout homme qui vit dans I illusion. Adam et sa femme Eve sont montrés dans Ieurs incar

nations successives aux époques diverses du passé et de I'avenir : en

Egypte, à Athènes, à Rome, à Constantinople, à Prague, à Paris, à Londres

et dans des régions anonymes. Ce voyage nous rappelle la Iégende de

Prométhée, bien que la suite nous rappelle le Iivre de Jot dans la Bitle.

Et pourquoi pas ? C est le principe hegelien de la négation, que Madach

a présenté dans le personnage de Lucifer, ce révolté qui prétend d'avoir

obligé Dieu à créer la matière. Et c'est à cause de sa prétention dédai

gneuse, que Lucifer veut provoquer Adam à se tuer, à abolir la race

exilée en lui.

Adam devait-il se tuer ? II a commencé son voyage dans le désir

de créer son propre destin, et d'élargir son ètre le plus possible. Nous

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pouvons voir ici un exemplaire strictement ortkodoxe de la tkéorie

romantiste et révolutionnaire, telle que fournie aujourdkui par Ies existen

tialistes et Ies artistes modernes. Comme Albert Camus a remarqué,

Une révolution est faite toujours contre les dieux — commen^ant avec celle de Prométhée. C'est une réclamation de l'homme contre son destin ".

Et, ses liens avec Dieu une fois rompus, Adam est obligé, tei qu'un

personnage moderne, à vouloir créer son propre destin sans autre aide.

A la fin de son rève Adam connaìt Lien ses Iimites. Lucifer lui a enseigné

que la situation pkysique et morale de I homme ne lui permet aucun

espoir. L'assaut au niveau supérieur de l existence est voué à I'insuccès.

Les idéaux successifs de I komme ne sont que ses illusions. Adam se

demande s ii ne doit pas se tuer immédiatement.

Si Adam s'était suicidé, aurait-il réalisé un acte contre Dieu ?

Madack nous dit que Lucifer Iui-mème ne pouvait pas agir vraiment

contre Dieu. Est-ce que Adam, suicidé, aurait pu ckanger le sort

kumain ? Madack n'en dit rien ; il nous dit tout simplement qu'Adam a engendré un enfant avant le commencement de son exil et de son rève.

Done, Adam accepte de Iutter sans espoir pendant Ies siècles.

Pour lui, la Iutte sans espoir est assez noble, en elle -mème, pour ne pas demander une victoire justifiante. C'est une réponse ironique avec Ia

quelle Camus ou Conrad peuvent facilement s'accorder ; et c'est une

réponse prévue dans Ies mots de Calderon, « la ckose importante est

d'agir bien » **. Conrad n'a jamais cessé d'informer son public anglais

que la Iutte sans espoir, telle que vue dans I'kistoire polonaise, est la

Iutte la plus digne de I'komme.

Adam devait-il se tuer ? Madack ne répond pas à la question ; il

nous rappelle seulement qu'Adam enfin n'a pas voulu se tuer. Mais

notons bien que Madack a soulevé la question du suicide, qui est un

sujet traité de plus en plus fréquemment dans la Iittérature de l'ère

moderne, c'est-à-dire pendant Ies siècles de la Renaissance, et qui sera

aboli de nos jours par Ies derniers des romantistes (selon Jacques Bar

zun), Ies artistes modernes 4\ Sans traiter in extenso ici I'kistoire de la

question du suicide dans la civilisation européenne depuis I'an 1500, il

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nous suffira de rappeler Ies suicidés nombreux dans Ies romans de Conrad,

et de rappeler Ies mots désespérés du prince dans le drame de Calderon :

« Ie plus grand défaut de Ikomme est d'ètre né » 46.

Jusqu'ici nous avons établi un parallèle entre Madack et Conrad,

et un autre parallèle entre Madack et Calderon, sans constater une

affiliation directe ni d'un coté ni de I'autre. Notre progrès a été facilité,

cependant, par le fait que Madack et Conrad appartiennent tous Ies

deux au romantisme est-européen, et le fait qu'ils appartiennent, comme

Calderon, à I ère moderne. Les faits, comme I'unité de tkème que nous

trouvons parmi ces trois auteurs, nous ramènent à notre question initiale

à propos du génie créateur. Est-ce que le génie créateur d'une époque culturelle subit Ies limites définissables, de sorte que, donné le tkème de

Calderon, on aurait pu prédire Ies motifs Iittéraires de Camus ?

Est-ce qu'on peut construire un génie-robot ? Nous avons déjà une

mackine à lire, une mackine à tradurre, une mackine à calculer ; nous

avons aussi, grace à Jean Tinguely, une mackine à peindre 47. Pourquoi ne pourrions-nous pas avoir une mackine à produire Ies ckefs-d oeuvre

Iittéraires à venir ? Après quoi Adam pourra déléguer à la mackine la

tàcke de créer le destin kumain, et il pourra tranquillement se tuer.

Conrad a déjà suggéré que le destin est fait par une mackine à tricoter 4S.

Sans doute la question est prématurée. Des limites au génie créateur

semblent exister ; mais de quel genre sont-elles ? Nous devons procéder à une définition, parce que définir c'est Iimiter. Nous pouvons définir

I expression Iittéraire comme I'effort kumain à créer des signes verbaux

pour la totalité globale et non kumaine de I'existence. Cette définition

comporte des limites de Iangue, des limites de la nature kumaine, et des

limites de la nature non kumaine. Les limites de la Iangue sont très

claires ; elles nous sont rappelées très fréquemment par Ies Iinguistes et par Ies kommes de Iettres. Cependant Ies limites de la nature kumaine ne

sont pas tellement claires, Iorsque Ies limites possibles du non-kumain

sont tout à fait inconcevables done inexprimables. («Inscrutable» et

« impénétrable » seraient Ies mots préférés de Conrad).

Essayons d'analyser le génie créateur. L'komme se sait un ètre

limité qui subit I'illusion et la mort. Il peut considérer sa condition

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comme un role dans une Comédie Divine, avec Dante ; ou dans une

Comédie non divine, avec Krasinski, ou dans une Tragedie de l'homme,

avec Madàck. II ne peut imaginer le non-kumain, et surtout le divin,

que sous des aspects Iimités. II s'imagine ; et il juxtapose son image de soi

contre son image du divin ou du non-divin. Ce qu ii appelle son « destin »

reflète I'liarmonie ou la discordance qu ii trouve entre ces deux projec tions de son imagination. Aussi peut-il imaginer qu'un Dieu réel, encore

inscrutable par l'imagination, se rit de I'effort kumain de saisir son destin

par Ie moyen des images et des mots. Tout Komme qui arrive à cette

situation a Ie ckoix entre deux fagons d'agir. II peut imaginer que Ies

rires divins sont bienveillants ; ainsi il accepte la plaisanterie, comme Ie

kéros du roman de Chesterton, l'homme qui était Jeudi. (A propos, Ckesterton a commenté profondément La Comédie non divine de Kra

sinski) 49. D'autre part, I'komme peut imaginer que Ies rires divins sont

moqueurs ; ainsi il répond à la plaisanterie par ses propres rires amers,

comme un existentialiste qui pergoit I'absurde, ou par des rires dédai

gneux comme un romantique révolté.

Mais voici une limite de la nature kumaine. L'komme comment

peut-il s'imaginer un révolté ? II ne peut se révolter que contre son image d'un ètre inimaginable, son image qu ii érige pour éviter de se révolter

contre soi, c'est-à-dire de se révolter contre sa révolté. Madack nous

semble conscient de cette faiblesse de Prométkée. Dans sa Tragedie de

Ihomme Adam commence son exil avec une déclaration d indépendance

prométkéenne digne de Lucifer Iui-mème ; mais, après dix scènes des

quinze, c'est Adam qui se moque de Lucifer en disant : « Satan est un

romantique ».

AHons plus loin. Pourquoi I'komme veut-il s'imaginer un révolté ?

Parce qu'ainsi il n est pas dans la nécessité d'admettre une limite à

son imagination, qui crée done un « destin » pour lui. Le révolté imagi naire remplace I'objet inscrutable, par la projection de sa propre cons

truction abstraite ; comme s ii pouvait contróler le non-kumain de fagon

magique. Cependant I'auteur qui possède le génie créateur en pleine mesure n oublie jamais qu il est Iui-mème le faiseur du masque verbal

porté par son objet impénétrable. Bien qu ii joue à la révolté dans Ies

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temps révolutionnaires, il ne se prend pas toujours au sérieux. La vie

est un songe.

L'komme ne peut jamais s'évader de sa subjectivité. Sa personnalité

mème, nous dit Conrad, est une illusion50. Le prisonnier a le ckoix

d'accepter ses Iimites ou de s'offenser de ses Iimites. S ii accepte, en

regardant le non-kumain comme bienveillant pour lui, il peut décrire

un drame immense de création et de rédemption, une Comédie Divine.

Sii s offense de ses Iimites, son effort pour se dérober le confirmera dans

son sentiment du défi tragique. Et dans notre culture occidentale la

tragèdie de l égo semble produire tous Ies effets d une chose réelle dans

Ies domaines aussi divers que la psycbiatrie et la politique. Ainsi nous

pouvons constater deux Iimites au génie créateur, distinguées selon la

volonté de celui qui le possède.

Passons maintenant à l'application de la tkéorie. Est-ce que Madack

est un révolté ? C est-à-dire, sa Tragèdie de l'homme est-elle une tragèdie finale de l égo occidental ? Son Adam rejette une image initiale de Dieu ;

son avenir projeté se moque de son image de soi ; son univers se moque de sa condition mortelle. Evidemment, c'est une tragèdie.

Le rève d'Adam, est-il vision ou est-il illusion ? Dieu se tait. La

condition Kumaine, est-elle tragique ou est-elle comique ? Madack nous

Iaisse le libre ckoix, malgré son titre La tragèdie de l'homme. Nous

sommes Iibres de continuer I'effort imaginatif de Madack, avec ou sans

sa prescription kegelienne.

Conrad Korzeniowski est-il un révolté ? Le kéros conradien lui aussi

doit faire la traversée de ses illusions usque ad finem ; il se voit banni

sur la terre, et moqué de I'univers non kumain. II réclame la mort comme

une fiancée, en contredéfi à la moquerie des pouvoirs inscrutables. Evi

demment, c'est une tragèdie.

Mais c est précisément ce plongeon dans la mort que Conrad appelle une victoire. Dans le lieu classique, son roman intitulé Victoire, ce n'est

pas une victoire de I égo mais, au contraire, c'est une victoire de l'amour.

Pour Conrad I égo, derrière la facade de la personnalité, n'est que I in

connu ; la vie est un songe. Quel est done l'amour ? C'est la partie visible du sentiment cacké de communion entre I komme et toute créature

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inconnue. Est-ce que cette communauté universelle de F existence com

porte la comédie ou la tragèdie ? Conrad nous Iaisse enfin le libre choix ;

nous sommes litres de continuer son effort imaginatif, avec ou sans son

exaltation romantiste.

Le génie créateur, alors, n est pas limite, mème s il définit la nature

subjective de la condition Kumaine. Celui qui possède le génie créateur

en pleine mesure est libre d unir la plus grande tragèdie avec la plus

profonde comédie sur la mème médaille ; parce que le mème destin

illusoire créé par I homme emprunte le masque de la tragèdie de I égoiste

et le masque de la comédie de l'altruiste.

Revenons aux questions principales. Adam devait-il se tuer ? En

tant qu égoi'ste, il le devait ; mais tout de suite il aurait perdu la Iiberté

du génie créateur. Peut-on se révolter vraiment contre Dieu ? Seulement

dans la mesure où son dieu est son Soi. Peut-on construire un génie-robot ?

Mais celui-là ne serait peut-ètre, qu'une autre illusion.

NOTES

1. Almayer's Folly, Dent Collected Edition of the Works of Joseph Conrad, tome I. Pour la vie de Conrad, voir G. J. Aubry, Joseph Conrad, Life and Letters (London, 1927) 2 t. ; et G. T. Keating, A Conrad Memorial Library (New York, 1929).

2. Conrad, An Outcast of the Islands, Collected Edition, t. 2. 3. Calderon, La vida es Sueno, Jornada Frimera, Escena II ; edition Angel del Rio,

Antologia General de la Literatura Espanda (Nueva York, 1954), t. I. 4. A propos de cette dernière, voir Henry W. Hoge, "Notes on Lope de Vega's 'El

principe despenado' PMLA, LXV (1950), p. 836, note 49. 5. Jerzy Andrzejwski, Inquisitors, translated by Konrad Syrop (London, 1960). 6. Sur le róle symbolique des marins conradiens voir G. Morgan,

" Captain Korzeniowski's

'Prince Roman'", Etudes Slaves et Est-Européennes (1959). 7. Conrad, The Nigger of the NARCISSUS, Collected Edition, t. 3, ch. 3. 8. Ibid., ch. 4. 9. Ibid., ch.4.

10. "Immovil bulto soy de fuego y hielo " — Jornada Primera, Escena I.

11. R. Klibansky, The Continuity of the Platonic Tradition during the Middle Ages (London, 1950), p. 29.

12. E. Gilson, History of Christian Philosophy in the Middle Ages (New York, 1955), pp. 534-540.

13. Ibid., p. 536. 14. Angel del Rio, Historia de la Literatura Espanola (New York, 1948), I, p. 329.

Voir aussi Werner P. Freidrich, Outline of Comparative Literature (Chapel Hill, 1954), pp. 122, 287, 323.

15. M. Dabrowsky, "Rozmowa z J. Conradem, "

dans Tygodnik llustratowany, 18, iv. 1914, nr. 16 ; repr. par Maria Dabrowska,

" Polski wywiad z Conradem,

" Polska, 1960, nr. 4

(68), p. 27. 16. Roman Dybowski, "Polish Literature," Encycl. Britannica (1952), XVIII, p. 164 ;

voir aussi Freidrich, op. cit., p. 123. 17. Voir Manfred Kridl, "Two Champions of a New Christianity : Lamennais and

Mickiewicz, "

Comparative Literature, IV (1952), pp. 239*267.

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18. W. Lednicki, "Goethe and the Russian and Polish Romantics," C. L., IV (1952), pp. 23-43.

19. E. Gilson, La Philosophie au Moyen Age (Paris, 1947), pp. 303-306. 20. P. Colin, dans Existentialisme Chretien : Gabriel Marcel (Paris, 1947), p. 15. 21. Collected Edition of the Works of Joseph Conrad. London : J. M. Dent & Sons,

1946-1950. 29 tomes. 22. E.g. Etre et Avoir (Paris, 1947), Homo Viator (Paris, 1944), Journal Métaphysique

(Paris, 1947) ; The Mystery of Being (London, 1950-1951), 2 t. 23. Voir R. Las Vergnas, Joseph Conrad, Romancier de I'exil (Lyon, 1959), pp. 158-164. 24. Hugues de Saint-Victor, De Sacramentis, I ; paraphrase par E. Gilson, La Philosophie

au Moyen Age, p. 305. 25. G. Marcel, Reflection and Mystery, t. I des Conferences Gifford données par Marcel

à Aberdeen, 1949-1950, p. 173. 26. Voir J. Chenu, Le Theatre de Gabriel Marcel et sa signification métaphysique

(Paris, 1948). 27. "Como sin ensayar la comedia se ha de hacer ?" — El Gran Teatro del Mundo,

escena, III. Edition del Rio, Antologia . . . 28. "La anchurosa plaza del gran teatro del mundo" — La Vida es Sueno, Jornada, III,

Escena, XVIII. 29. E.g. Lettre du 29/8/1908 ; dans Aubry, op. cit., t. II, p. 83. 30. Voir Albert Béguin, L'Ame Romantique et le Rive (Paris, 1946) ; cf. Mario Praz,

The Romantic Agony (London, 1951), The Flaming Heart (New York, 1958). 31. Conrad, Collected Edition, t. 5. 32. Marcel, Homo Viator (Paris, 1944). 33. Conrad, Collected Edition, t. 14. 34. Conrad,

" Préface du Negre du NARCISSE 35. Conrad, Collected Edition, t. 15, eh. II. 36. Lettre citée par M. D. Zabel, The Portable Conrad (New York, 1947), p. 57. 37. Lord Jim, eh. XX. 38. Voir B. Lubbock, The China Clippers (Glasgow, 194-6), eh. I ; cf. D. R. MacGregor,

The Tea Clippers (London, 1952), eh. I. 39. G. Morf, The Polish Heritage of Joseph Conrad (London, 1930), passim. 40. Las Vergnas, op. cit., p. 130. 41. La Vida es Sueno, Jornada, III, Escena 4 ; cf. Conrad, Le Negre du NARCISSE,

eh. IV et passim. 42. On se sert ici de la traduction anglaise de M. Sanger, publiée par la renommée

Virginia Woolf et ses collaborateurs, du drame Az ember tragoediaja : Imre Madach, The

Tragedy of Man (London : Hogarth Press, 1933. Editions Pannonia, Sydney, 1955). 43. Albert Camus, "From a Writer's Notebook," trad, du frangais par A. Hartley,

Encounter, vol. XVII, No. 4 (Oct. 1961), p. 18. 44. Caldéron, La Vida es Sueno, Jornada, III, Escena, 4 ; edition A. del Rio. 45. Jacques Barzun, "Romanticism Today," Encounter, vol. XVII, No. 3 (Sept. 1961),

pp. 26-32. 46. Caldéron, op. cit., Jornada, I, Escena, 2. 47. J. Barzun, op. cit., p. 28. 48. Conrad, lettre du 20/12/1897, dans Aubry, Life and Letters, 1.1, pp. 215-216. 49. Cité par Mieczyslaw Giergielewicz,

" Krasinski in the English-speaking World",

The Polish Reviezo, vol. V, No. 4 (Automne 1960), pp. 80-87. 50. Conrad, lettre du 23/9/1896, dans Aubry, op. cit., 1.1, p. 186.

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