— P915914 — mai 2018 — N° 39 Publication ... e/family-business N° 39 › mai 2018 ‹ Trends...

7
www.trends.be — P915914 — mai 2018 — N° 39 Publication mensuelle PRÉPAREZ VOS ENFANTS À REPRENDRE VOTRE BOÎTE DOSSIER AVEC LA COLLABORATION DE :

Transcript of — P915914 — mai 2018 — N° 39 Publication ... e/family-business N° 39 › mai 2018 ‹ Trends...

Page 1: — P915914 — mai 2018 — N° 39 Publication ... e/family-business N° 39 › mai 2018 ‹ Trends Family Business 5 D O S S I ER 4 Trends Family Business › mai 2018 ‹ N° 39

www.trends.be — P915914 — mai 2018 — N° 39 — Publication mensuelle

PRÉPAREZ VOS ENFANTS À REPRENDRE

VOTRE BOÎTE

DOSSIER

AVEC LA COLLABORATION DE :

Page 2: — P915914 — mai 2018 — N° 39 Publication ... e/family-business N° 39 › mai 2018 ‹ Trends Family Business 5 D O S S I ER 4 Trends Family Business › mai 2018 ‹ N° 39

la voix de Sandra Lennertz,ponctuée régulièrementpar celle de son mari,Bruno Thysebaert, on per-çoit que le moment est dé-licat. Le couple est à la têtede Bio-Life, une PME qui

développe et fabrique des compléments ali-mentaires, et qu’ils ont lancée ensemble en1991. Comme 40 % des entrepreneurs, Sandra Lennertz et Bruno Thysebaert ontplus de 50 ans et envisagent peu à peu detransmettre leur entreprise à Damien, unde leur deux fils, qui travaille depuis cinqans dans l’entreprise familiale. Un momentimportant pour leur famille et pour la tren-taine d’employés de cette entreprise baséeà Isnes, entre Namur et Gembloux.Mais ce processus prend du temps : il fautcompter une dizaine d’années, en moyenne.Tout dépend de la taille de l’entreprise, del’histoire familiale, de la réactivité des géné-rations, des conflits qui peuvent surgir, etc.Pour Johan Hatert, partner en charge desfusions et acquisitions chez BDO, beaucoupd’entreprises ne préparent pas suffisammentce passage de témoin.

DIALOGUE PERMANENTDamien Thysebaert n’est pas le seul à vou-loir s’impliquer dans l’entreprise familiale.

Valérie Denis, directrice de la chaire Familles en entreprises à l’Ichec, a interrogéplus de 300 jeunes concernés par une entre-prise familiale entre 2011 et 2015. Sur basede cette étude, et avec l’aide de ManuelaHollanders, elle a coécrit le livre Dans lesyeux de la Next Gen : « 70 % d’entre eux sont,a priori, intéressés par jouer un rôle dansl’entreprise familiale », explique-t-elle. Dèslors, comment préparer au mieux la trans-mission de son entreprise à un membre desa famille ?« La première chose, c’est d’informer lessuccesseurs de l’état de l’entreprise. Où enest la société ? Qui sont les actionnaires ? A-t-elle encore du potentiel ? », poursuit Valérie Denis. Ce principe est importantpour Martine Reynaers, CEO de Reynaers Aluminium, à la tête du groupe familial depuis 1986. Les actionnaires actuels infor-ment chaque année leurs enfants sur l’étatde l’entreprise, dès leur 14e anniversaire. « Nous nous voyons deux à trois fois par an.Nous montrons les résultats de la société.Nous parlons des développements, des in-vestissements importants, etc. », explique-t-elle. Les stages, les rencontres avec les em-ployés, les visites des filiales à l’étranger,etc., peuvent également donner un bonaperçu de l’activité et de l’état de l’entrepriseaux futurs gestionnaires.

N° 39 › mai 2018 ‹ Trends Family Business www.trends.be/family-business 3

PHOTO DE COUVERTURE : ISTOCk A

Trends Family Business › mai 2018 ‹ N° 39 www.trends.be/family-business2

aujourd’hui, 70 % des entreprises sur le marché belge sont des entreprises familiales. quasi la moitié de ces entreprises sont aux mains de la première génération d’entrepreneurs et doivent être transmises dans les cinq à 10 ans à venir. quarantepour cent d’entre elles n’ont pas encore structuré leur transmission,selon bruno soetaert, « customer journey expert » chez ingbelgique. dès lors, comment préparer les nouvelles générations à reprendre les rênes de l’entreprise familiale ? BASTIEN PECHON

Société éditrice : ROULARTA MEDIA GROUPSiège social : Meiboomlaan 33, 8800 RoeselarePrésident : Rik De NolfAdministrateur délégué : Xavier BouckaertEditeur responsable : Sophie Van IseghemMeiboomlaan 33, 8800 RoeselareDirecteur magazines : Jos GrobbenDirecteur magazines francophones : Amid FaljaouiRédacteur en chef : Amid FaljaouiCoordinateur : Christophe CharlotRédaction finale : Anne-Sophie Chevalier,François Hubert, Joëlle Simon.Maquette et graphisme : Marc Deby, Pascale Lintermans, Hans Robberechts.Ont collaboré à ce numéro : BastienPechon, Anne Boulord, Guy Van denNoortgate.Régie publicitaire nationaleRoularta Media, Z.1 Researchpark, 1201731 Zellik (Bruxelles) - 02 467 56 11www.roulartamedia.beGeneral Manager : Philippe [email protected] annuel (10 n°) 125,00 € TTCService AbonnementsB.P.700 Bruxelles 14 - 1140 BruxellesTél : 078 35 33 03 - Fax : 078 35 33 [email protected] lettre d’information est protégée par le droit d’auteur. Reproduction, scan ou stockage électronique interdits. Des questions ? Contactez Ann Soete : 051 266 570.©2018.

BusinBusineessssFamily

ENTREPRISES FAMILIALES

OBJECTIF: CHANGEMENTDE GÉNÉRATION

DO

SSIE

R

sa digitalisation, par exemple.Cependant, avoir un projet ne suffit pas. En-core faut-il avoir les compétences pour le me-ner à bien. Vérifier ces compétences est in-dispensable pour s’assurer que le successeurait toutes les chances de son côté pour arriveraux objectifs fixés, mais également pour qu’ilsoit légitime aux yeux des autres employés.C’est particulièrement important dans le casde postes clés. « Si nos enfants veulent travail-ler en tant que directeur, il y a une procédurespécifique à respecter », explique MartineReynaers, CEO de Reynaers Aluminium. Descritères d’autant plus difficiles à remplir quela société est importante. Martine Reynaersest à la tête d’un groupe qui compte 2.200 em-ployés, est actif dans une septentaine de payset a réalisé 430 millions d’euros de chiffre d’af-faires en 2017. « Les gens me demandent sou-vent lequel de nos enfants va prendre la têtede l’entreprise après moi, poursuit MartineReynaers. Ce n’est pas sûr que nous ayons,aujourd’hui, dans la famille, les talents et l’ex-périence qu’il faille pour diriger la société. La famille peut aussi diriger au niveau duconseil d’administration et pas forcément au niveau de la direction générale. »

CHARTE FAMILIALECes conditions d’accès aux différents postesde l’entreprise peuvent être inscrites dans

Echanger fait sens mais, en réalité, la discus-sion n’est pas toujours ouverte entre les dif-férents membres de la famille. Or, cette com-munication permet de cerner la motivation,l’attitude par rapport aux valeurs et à la culturede l’entreprise, et les compétences des suc-cesseurs potentiels. Elle permet aussi demieux cerner les projets de chacun, deconstruire une vision et une stratégie com-mune, et de cerner le type de dirigeant dontl’entreprise a besoin. Mais ce dialogue autourdes questions de succession et de gestionn’est pas toujours simple. Dans une entreprisefamiliale, la frontière entre vie professionnelleet vie privée est ténue. « Comme c’est notrefils, nous avons peur des conflits. Cette proxi-mité empêche souvent, de notre part, un francparler », confie Sandra Lennertz, cogérantede Bio-Life.

VALIDER LES COMPÉTENCESEn parlant de projet, cédants comme succes-seurs doivent garder à l’esprit que ce qui estimportant, c’est la société. « Ce ne sont pasles besoins de la famille qui prévalent, ce sontceux de l’entreprise », poursuit Valérie Denis.La transmission, c’est finalement une renais-sance, une nouvelle étape entrepreneuriale.Chaque successeur qui souhaite s’investirdans l’entreprise familiale doit avoir un projet,apporter sa contribution : comme accroître m

SOMMAIRE�02�DOSSIER : entreprises familiales :

Une transmission

progressive poUr Une

sUccession sans à-coUp

�07�PAROLE D’EXPERTpas de contrat jUridiqUe

sans contrat psychologiqUe

�08�PORTRAIT : le magasin

de joUets serneels,

Pourvoyeurs de bonheur enfantin

�10�PORTRAIT : tilmanLe spécialiste des plantes

�12�PAROLE D’EXPERTUn conseil consUltatif…

pas Un babysitter !

Page 3: — P915914 — mai 2018 — N° 39 Publication ... e/family-business N° 39 › mai 2018 ‹ Trends Family Business 5 D O S S I ER 4 Trends Family Business › mai 2018 ‹ N° 39

N° 39 › mai 2018 ‹ Trends Family Business www.trends.be/family-business 5

DO

SSIE

R

Trends Family Business › mai 2018 ‹ N° 39 www.trends.be/family-business4

fants, les intérêts du crédit de reprise sont fis-calement déductibles. », précise Bruno Soe-taert.Une fois la recette de la vente perçue, les pa-rents peuvent faire don d’une partie de cetterecette à leurs enfants. Les cédants gardentainsi un pécule pour leur pension. « Il est pos-sible d’effectuer une donation d’argent liquidesans la faire enregistrer (elle ne donne donclieu à aucun frais, Ndlr), en procédant à unsimple virement bancaire, mais cela pré-

Plusieurs tables sont disposées dans la cuisinepour permettre aux clients de profiter de cettechorégraphie tout en dégustant leurs plats.C’est là que nous rejoignons Laurence Wy-nants, arrière-petite-fille du fondateur histo-rique, et épouse de Lionel Rigolet. Le fouetd’un des cuisiniers ponctue régulièrement laconversation.Début des années 1990, après des études àl’école hôtelière de Namur où elle rencontreson futur mari, Laurence Wynants revient tra-vailler dans le restaurant familial. Son père,Pierre Wynants, propose alors à Lionel Rigoletde travailler quelques mois dans sa cuisineavant d’entamer son service militaire. « C’estcomme ça que l’aventure a commencé », raconte Laurence Wynants. Après son devoirnational, le futur chef travaille quelques années à l’étranger. Il ne retrouve les cuisinesdu Comme chez soi que trois jours avant sonmariage, en 1994. « A partir de là, il a fait letour de la cuisine en occupant, peu à peu, tousles postes », poursuit-elle. Le second en placeà cette époque décide finalement de partir, libérant la place pour Lionel Rigolet. « Papa a ensuite commencé à s’absenter progressi-vement. » En 2007, le maître des lieux quittedéfinitivement sa cuisine. Lionel Rigolet de-vient alors officiellement le nouveau chef du Comme chez soi.

TROUVER LA COMBINAISON GAGNANTELà où cela se complique dans beaucoup d’en-treprises familiales, c’est au moment de latransmission des titres de la société : commenttransmettre les parts de son entreprise à sessuccesseurs ? Pour répondre à cette question,nous avons fait appel à Bruno Soetaert, custo-mer journey expert chez ING Belgique et Jean-Philippe Weicker, legal advisor chez BDO.Une multitude de combinaisons sont évidem-ment possibles, mais elles sont généralementrassemblées dans deux scénarios : la venteou la donation de son entreprise.Dans le cas de la vente, les enfants constituentsouvent une nouvelle société et financentl’achat de l’entreprise de leurs parents grâceà un crédit, voire à l’intervention d’investis-seurs extérieurs, avec le risque, malgré tout,de perdre une partie de cet ADN familial. «Dans ce scénario, les parents qui vendent l’en-treprise familiale encaissent la totalité de lacontre-valeur de leurs actions, y compris desréserves constituées par la société, sans payerde taxe. Pour la nouvelle entreprise des en-

membres du personnel les règles établies ausein de la famille, en toute transparence, aideégalement à renforcer cette légitimité.

UNE SUCCESSION PROGRESSIVEAttendre qu’un poste se libère avant de l’at-tribuer à un membre de la famille est égale-ment un trait de bonne gouvernance. C’estun principe qu’ont suivi Guerric, Valérie,Anne-Sophie et Nadège Quatacker. Proprié-taire de l’hôtel Bedford, un établissementfondé dans les années 1950 à Bruxelles, la fa-mille Quatacker en est sa troisième généra-tion. Guerric, Valérie, Anne-Sophie et NadègeQuatacker occupent différents postes au seinde l’entreprise familiale, dont celui d’hotel ma-nager pour ce qui concerne Guerric Qua-tacker. « A la base, des personnes externes àla famille étaient à ces postes. Au fur et à me-sure, dès que ces employés partaient, nousavons repris leur place. Cela s’est fait petit àpetit, dès qu’il y avait des opportunités », ra-conte le manager.Cette succession progressive a été égalementdéterminante dans la transmission d’un autreétablissement, le restaurant étoilé Commechez soi. Ce midi-là, dans la cuisine, une bri-gade de toques et de tabliers s’affaire. Parmieux, le chef Lionel Rigolet. Situé depuis 1936place Rouppe, à Bruxelles, le Comme chezsoi est devenu une institution au fil des quatregénérations de cette famille de restaurateurs,dont Lionel Rigolet est membre par alliance.

une charte familiale. Tout comme la vision,les valeurs, la culture entrepreneuriale, lesrôles de chacun, etc. Des critères qui doiventêtre identiques à ceux requis pour tout nou-veau collaborateur extérieur à la famille. Queltype d’expérience et de compétences sont né-cessaires pour ce poste ? Cela se compliquelorsque plusieurs membres de la famille peu-vent prétendre à la place ouverte dans l’entre-prise.« Admettons que l’on ait plusieurs cousins etcousines qui rencontrent les critères, poursuitValérie Denis. On va donc créer un comité desélection – et ce sera noté dans la charte –constitué d’experts non familiaux qui vien-dront évaluer le meilleur candidat. » Une sé-lection ouverte également, si nécessaire, auxpersonnes extérieures. Quitte à préciser danscette charte qu’à compétences égales, unmembre de la famille sera toujours privilégiépar rapport à un candidat extérieur. Et si la fa-mille ne possède pas les compétences re-quises pour le poste en question, pourquoi nepas l’attribuer à ce talent extérieur ?Suite à une série de conflits, certaines famillesinterdisent même à leurs membres d’occuperun poste managérial pour ne se concentrerqu’à leur rôle au sein du conseil d’administra-tion. Elles l’inscrivent donc dans leur chartefamiliale. Objectiver l’attribution d’un postepermet d’éviter les jalousies, de répondre auxbesoins de l’entreprise et ainsi, d’augmenterla légitimité du nouveau collaborateur familialaux yeux des salariés. Communiquer aux

«LES GENS ME DEMANDENT SOUVENT LEqUEL DE NOS ENFANTS VAPRENDRE LA TêTE DEL’ENTREPRISE APRèSMOI. CE N’EST PAS SûRqUE NOUS AyONS,AUJOURD’HUI, DANS LA FAMILLE, LES TALENTSET L’EXPéRIENCE qU’ILFAUT POUR DIRIGER LA SOCIéTé.»

CEO DE REYNAERS ALUMINIUMMARTINE REYNAERS,

«CE NE SONT PAS LES BESOINS DE LAFAMILLE qUI PRéVALENT,CE SONT CEUX DE L’ENTREPRISE.»

DIRECTRICE DE LA CHAIREVALÉRIE DENIS,

À L’ICHECFAMILLES EN ENTREPRISES

m

Page 4: — P915914 — mai 2018 — N° 39 Publication ... e/family-business N° 39 › mai 2018 ‹ Trends Family Business 5 D O S S I ER 4 Trends Family Business › mai 2018 ‹ N° 39

Trends Family Business › mai 2018 ‹ N° 39 www.trends.be/family-business6

respecter plusieurs conditions qui varientd’une région à l’autre. Notons cependant que les bénéficiaires de cette donation doiventse soumettre à certaines règles après la donation pour continuer à bénéficier de ce taux de 0 %. En Wallonie, cette périodedure cinq ans contre trois à Bruxelles. Cependant, « le donateur supporte un grosinconvénient : il ne reçoit rien en échange de l’entreprise qu’il a développée pendant desannées », nuance Bruno Soetaert. « Il est toutefois possible d’assortir la donation d’une charge, telle qu’une rente viagère à charge des enfants, ou de réserver l’usufruitdes actions au donateur, ce qui lui permettrade continuer à percevoir les dividendes quiseraient distribués », poursuit Jean-PhilippeWeicker.Transmettre son entreprise à un membre desa famille n’est pas simple et impose unelongue préparation. Au bout de cette trans-mission, il est important de « marquer lecoup ». « Il faut prendre le temps du rituel »,clame Valérie Denis. Transmettre son entre-prise, c’est clôturer un chapitre pour en ouvrirun autre. Il faut donc prendre le temps de re-mercier ses anciens collaborateurs, d’accueil-lir les nouveaux gestionnaires et de leur sou-haiter le meilleur pour la suite, désormais, deleur entreprise.

sente un risque si le donateur décède dansles trois ans qui suivent l’opération », expliqueJean-Philippe Weicker. Dans ce cas, cette do-nation fait l’objet de droits de succession. Pouréviter une taxation trop lourde en cas de décès,il est possible de l’enregistrer moyennant untaux de 3,3 % en Wallonie ou de 3 % à Bruxellespour les donations en ligne directe (entre pa-rents et enfants, comme c’est le cas dans cetexemple, Ndlr), de 5,5 % en Wallonie ou de 7 %à Bruxelles pour les donations à des per-sonnes plus éloignées, par exemple des cou-sins. Il faut cependant noter que la perspectivede recevoir une somme d’argent via une do-nation après la vente de l’entreprise n’est pasune condition pour obtenir un crédit pour fi-nancer cette opération.Néanmoins, plus la société est importante, plus les successeurs éprouveront des difficultés à racheter l’entreprise. « Dans ce cas,le vendeur peut accorder des délais de paiementvia un vendor loan (un crédit vendeur, Ndlr),ajoute Bruno Soetaert. Les successeurs doiventêtre non seulement capables d’acquérir la société familiale, mais aussi d’investir dans sa croissance, une fois qu’ils en sont propriétaires. Autre solution : les cédants peuvent aussi envisager de donner leur entreprise à un taux de 0 %. Pour profiter de ce taux, les deux parties doivent

DO

SSIE

R

«COMME C’EST NOTREFILS, NOUS AVONSPEUR DES CONFLITS.CETTE PROXIMITéEMPêCHE SOUVENT, DE NOTRE PART, UN FRANC-PARLER.»

SANDRA LENNERTZ,COGÉRANTE DE BIO-LIFE

N° 39 › mai 2018 ‹ Trends Family Businesswww.trends.be/family-business 7

Le temps n’est plus où le pater familiasdétermi-nait souverainement la carrière de la nouvellegénération au sein de l’entreprise familiale. Denos jours, la nouvelle génération exige d’avoirvoix au chapitre et l’entrée en scène de nouveauxrejetons est un événement participatif. Cela si-gnifie aussi que la transition vers une nouvellegénération est bien plus qu’une formalité. Au-trefois, l’accent était nettement mis sur les as-pects purement technico-juridiques de l’affaire.Aujourd’hui, la dimension psychologique et af-fective est devenue au moins aussi importante.Une famille ne passe plus de contrat juridiquesans qu’il y ait unanimité sur le contrat psycho-logique. Cela implique deprévoir d’entrée de jeu undroit de regard sur l’organi-sation future de l’entreprisefamiliale. Ce n’est pas seule-ment dans l’intérêt des suc-cesseurs, c’est sans douteaussi un processus crucialdans un contexte de pressionéconomique et concurren-tielle accrue sur les entre-prises familiales. Parler detemps à autre ne suffit pas,toutefois, pour élaborer unbon contrat psychologique.

LA FAMILLE DOIT RÉPONDRE À UN BESOINIl est essentiel que les entre-tiens concernant la succes-sion commencent in temporenon suspecto. Discutez desambitions qu’ont – ou n’ont pas – les successeursà cette date. Tirez au clair ce qui va être néces-saire pour réaliser ces ambitions. Vous posezainsi un cadre qui permettra que la relève sepasse bien, même si vous savez que ces ambi-tions peuvent encore changer. Il peut s’agir, parexemple, d’évaluations mettant en évidence lespoints forts et les points faibles des plus jeunes.On remarque que la nouvelle génération est ou-verte à ce genre de choses.Outre les ambitions, la famille peut déjà débattred’une vision commune quant à l’avenir de l’en-treprise. Souvent, cette démarche exploratoire

neutre révèle déjà quelques dynamiques fami-liales intéressantes.

SUIVEZ LES CHOSES DE PRÈSIl est important que la famille surveille réguliè-rement l’évolution des attentes. Les ambitionspeuvent changer. La plus jeune fille compte étu-dier et ne sait pas encore si elle entrera un jourdans l’entreprise, comme ses frères ? Cela n’ex-clut pas que la famille imagine déjà une construc-tion permettant à la jeune femme de rester im-pliquée. On peut définir dans la charte familialede quelle manière elle devra être tenue informéeet participera à la réflexion sur les investisse-

ments importants, par exemple.

TRAVAILLEZ DANS LA DURÉEEtablissez une feuille de routeet voyez comment mener leschoses à bonne fin. Il peut êtreutile de demander à un conseil-ler externe d’accompagner leprocessus. Partez avec l’idéequ’un processus de successionsuit rarement une ligne droite.Même si on l’entame ensemble,en tant que famille, il est possi-ble que des tensions survien-nent entre les générations. Est-ce que tout le monde reçoit lamême chose ? La complexitédes discussions est proportion-nelle à la ramification de la pro-priété au sein de la famille.

OBJECTIVEZQuelle que puisse être l’importance du contratpsychologique, à un moment donné, on estobligé de coucher des règles du jeu par écrit.Une charte familiale s’impose. Le besoin s’enfait souvent sentir quand la famille a besoin d’élé-ments objectivables. Cela permet au débat dese dérouler de la manière la plus correcte pos-sible. En tout état de cause, procédez à cette for-malisation avant de passer effectivement le flam-beau à la nouvelle génération. Faites le pas etréfléchissez aussi aux moyens pour la famillede respecter les accords convenus et de corrigerle cap, le cas échéant.

PAS DE CONTRAT JURIDIQUE SANS CONTRAT PSYCHOLOGIQUE

TRASNSMISSION

KAREN KEULEERS

Associée chez BDO Legal

[email protected]

PAROLES D’EXPERTS

IL PEUT ÊTRE UTILE

DE DEMANDER À UN CONSEILLER

EXTERNE D’ACCOMPAGNER LE PROCESSUS.

PARTEZ AVEC L’IDÉE

QU’UN PROCESSUS DE SUCCESSION SUIT RAREMENT

UNE LIGNE DROITE.

Page 5: — P915914 — mai 2018 — N° 39 Publication ... e/family-business N° 39 › mai 2018 ‹ Trends Family Business 5 D O S S I ER 4 Trends Family Business › mai 2018 ‹ N° 39

SER

NEE

LS

n° 39 › mai 2018 ‹ Trends Family Business www.trends.be/family-business 9

pectent le territoire de chacun,se stimulent l’un l’autre. Maisles travaux de l’avenue de la Toi-son d’Or les poussent à quitterleur magasin (actuel emplace-ment de la boutique Apple,Ndlr) : l’heure du choix a sonné.

BABAR, TINTIN & CIE

Brigitte Serneels se souvient : «Lorsqu’on a appris que nous de-vions quitter la Toison d’Or,nous nous sommes demandé s’il valait mieuxdéménager d’un bloc ou dédoubler le maga-sin en petites unités. A l’époque, c’était la folieBabar et Tintin, et l’arrivée des produits dé-rivés. » Ils choisissent de collaborer avec unfabricant textile et ouvrent une boutique dé-diée aux deux personnages dans la galeriede la Toison d’Or. Mais le stock s’avèreénorme et doit être écoulé : suit alors undeuxième point de vente à Waterloo, puis untroisième au Zoute. « Je me suis retrouvéeseule dans une boutique, séparée de monfrère… et malheureuse ! On travaillait nuitet jour, gérant le personnel de trois adressesdont une (au Zoute) qui ne fonctionnait quecinq mois par an. Cela a été un gouffre finan-cier : on a fermé les trois boutiques et cherchéune nouvelle adresse pour revenir à notreADN, le jouet ».C’est au pied du Steigenberger Hotel, avenueLouise, qu’ils trouvent leur nouvel emplace-ment, un vrai pari à l’époque car ils y sont lespremiers commerçants. « Ce déménagementnous a coûté 30 % de chiffre d’affaires, ça aété vraiment dur. Nous avons dû nous séparerde notre personnel et tout reconstruire àdeux», raconte Brigitte. Alain précise : « ave-nue de la Toison d’Or nous n’avions que troismètres de vitrines et 300 m2 à l’intérieur. Icic’est l’inverse : sept vitrines et moins d’espacede vente. Et le quartier est en souffrance :

en plus de la crise de 2008, puis des attentatsqui ont fait baisser la fréquentation, les tun-nels fermés sont un mauvais signal pour laclientèle, surtout internationale. Et les Belgesne viennent plus jusqu’à Bruxelles pour sebalader et faire du lèche-vitrine. Il y reste des maisons d’exception, membres du BEL (Brussels Exclusive Labels, Ndlr) comme nous,qui subsistent. Mais jusque quand ? » Un en-vironnement incertain que Louis et Charlotte,les enfants de Brigitte, abordent avec un mé-lange d’inquiétude et d’excitation.

NÉGOCIER L’AVENIR EN PRÉSERVANT L’ADNLouis et Charlotte, d’abord sollici-tés pendant les périodes de rushau magasin, sont à leur tour piquéspar le virus du jouet et collaborentà temps plein depuis une poignéed’années. Ex-éducatrice spéciali-sée, Charlotte a suivi une forma-tion complémentaire en scienceset techniques du jeu alors queLouis se positionne sur le terrain

numérique. Ils suivent désormais leur mèresur les salons internationaux et se font la main :« Je les emmène pour les présenter aux fabri-cants et leur apprendre à reconnaître la qualitéque nous cherchons à l’œil et au toucher. Jepense que l’an prochain, ils pourront y allerseuls. » Et les enfants d’enchaîner sur les cri-tères qui leur sont chers: écologie, durabilité,recyclage, éthique des conditions de fabrica-tion… doublés du challenge digital et écono-mique qui les attend. Louis : « Je suis de la gé-nération digitale, j’ai une bonne intuition ence qui concerne l’évolution numérique et j’aisuivi un cursus en e-business et gestion pouraccompagner Serneels dans cette mutation,la création éventuelle d’un webshop, l’animationet la stratégie des réseaux sociaux. Nous de-vons vraiment développer cette visibilité in-ternationale car le retour des touristes est vrai-ment excellent. Aujourd’hui, l’affaire marchebien mais d’ici cinq ans, le concept du magasinphysique perdra en vitesse et il est évident quedans 15 ou 20 ans, notre modèle économiqueaura complètement basculé. Soit vers la dé-matérialisation générale du commerce, soitvers un retour aux fondamentaux, au circuitcourt, au contact humain. Nous sommes làpour anticiper et négocier ce virage. » La dead-line ? Le renouvellement de leur bail en 2021,qui confirmera la maison avenue Louise ou laverra déménager, une fois de plus.

une BAiSSe De 30 % Du CA

A Suivi Le DéménAgement

De L’Avenue De LA toiSon

D’or verS L’Avenue LouiSe.

«NOS 25 BEST-SELLERS DES DÉBUTSSONT ENCORE LÀAUJOURD’HUI.NOUSPERPÉTUONSLA QUALITÉ,C’EST LAPHILOSOPHIEDE LA MAISON. »ALAIN SERNEELS

orsque le jeune Edmond perdson père, il découvre du mêmecoup que contrairement à sessix frères et sœurs, il nepourra pas mener les étudesuniversitaires qu’il briguait.Son âme d’artiste et son inté-rêt pour les jouets le mènent

alors à travailler au rayon Jeux du quincaillierMarkt jusqu’à la Seconde Guerre mondiale.En 1945, il entre chez Bois Manufacturé etprend la tête du département Jouets. En 1950,il accompagne une mission économique àNew York, où il rencontre deux hommes auxnoms désormais mythiques : messieurs Fisher et Price !Fasciné par leur gamme de jouets en boissculpté et coloré, il leur propose d’en devenirl’importateur pour la Belgique et discute long-temps avec eux, animés par la même passion.Séduits par ce real toyman, les Américains luiaccordent le brevet d’importation, signantainsi l’arrivée de Fisher-Price en Europe. En1959, devenu expert en son domaine, EdmondSerneels sait gérer un stock, sentir les ten-dances et dessiner des modèles de jouets ori-ginaux : il est prêt à ouvrir sa propre enseigne,qu’il tiendra avec son épouse avant de la lais-ser à deux de leurs enfants, Brigitte et Alain.

UN SEUL MOT D’ORDRE : EXCELLENCES’ils ont mordu au métier assez vite, ils sesouviennent n’avoir subi aucune pression dela part de leurs parents, hormis celle de l’ex-

cellence. « Faites ce que vous souhaitez faire,mais quel que soit votre choix, soyez les meil-leurs ! » Début 1980, Alain rejoint l’entreprisefamiliale qu’il renforce de sa compétence, lagestion financière, en introduisant l’informa-tique dans les comptes que sa mère faisait àla main. « C’est en m’emmenant sur les salonsque mon père m’a communiqué sa passion,se souvient-il. C’était plus un artiste qu’uncommerçant, mais pour avoir dessiné long-temps des jouets, il avait l’œil pour reconnaî-tre ceux de meilleure facture. Partout où ilarrivait, il était connu et reconnu. Il faisaitréférence. Son choix pour l’excellence guidaitses achats : on ne prenait que les marquesleaders dans leur domaine, le numéro un enjouets en bois, en poupées, en peluches, etc.Nous avons choisi de conserver et de faireperdurer cette philosophie. » La période estcharnière : plusieurs fabricants de jouets quiofficient encore en Belgique et travaillent àfaçon pour Edmond Serneels d’après ses des-sins, peu enclins à s’ouvrir au marché euro-péen, disparaissent les uns après les autres.C’est au moment où le père décide d’arrêterde travailler qu’Alain appelle sa sœur Bri-gitte : « nos compétences, Alain à la compta-bilité et moi plus créative (elle est alors ar-chitecte d’intérieur, Ndlr), faisaient de nousun tandem très complémentaire. C’est lecœur qui a fait le reste : une affaire familiale,ça ne s’abandonne pas comme ça. Alors ona foncé ! » D’autant que de l’aveu du duo, ilss’entendent comme larrons en foire, pren-nent toutes leurs décisions de concert, res-

Magasin de jouetsmythique du hautde Bruxelles, la maison a été fondée par EdmondSerneels en 1959. Une histoire aux débuts dignesd’un conte pour enfants…

ANNE BOULORD

Trends Family Business › mai 2018 ‹ n° 39 www.trends.be/family-business8

PORTRAIT

L

LE MAGASIN DE JOUETS SERNEELS

POURVOYEURS DE BONHEUR ENFANTINP

G /

SE

RG

E A

NT

ON

AprèS une repriSe à Son Apogée en 2007,

Le BiLAn A eSSuyé LA CriSe De 2008,

puiS LeS AttentAtS, pour Se StABiLiSer

à 1,2 miLLion en 2017.

PG

Deux générations Serneels : Charlotte, Alain, Louis et Brigitte.

Page 6: — P915914 — mai 2018 — N° 39 Publication ... e/family-business N° 39 › mai 2018 ‹ Trends Family Business 5 D O S S I ER 4 Trends Family Business › mai 2018 ‹ N° 39

N° 39 › mai 2018 ‹ Trends Family Business www.trends.be/family-business 11

chés étant l’Algérie, le Maroc et l’Arabie saou-dite, grâce à de bons partenaires locaux. La France n’est actuellement que quatrièmemais l’objectif dans les prochaines années estde s’imposer sur le marché hexagonal à l’instarde la Belgique où l’entreprise est leader. «L’objectif que nous avons fixé pour 2030 estd’inverser les pourcentages et de réaliser 80 %à l’export et 20 % en Belgique.»Malgré sa forte progression – elle emploie au-jourd’hui 180 collaborateurs contre une petitetrentaine quand elle s’est installée à Baillon-ville –, Tilman a conservé un esprit familial. C’est,avec une organisation simple et des rapports di-rects entre les personnes, une des clés du succèsde l’entreprise, selon Jean-Noël Tilman : «Je faisconfiance au personnel. Tout comme mon pèrem’avait laissé carte blanche pour développer lelaboratoire. La confiance favorise l’autonomieet l’implication. C’est un facteur important denon-stress. Le turnover et l’absentéisme sontparticulièrement faibles au sein de notre entre-prise. Avec le respect et la responsabilité socié-tale, la confiance est l’une des trois valeurs deTilman.» Une philosophie qui, outre la qualitéde ses produits, explique, pour une large part,

les bons résultats engrangés depuis des annéespar Tilman et qui lui ont valu en 2013 d’être dé-signée Entreprise de l’Année.

NOUVELLE GÉNÉRATIONJean-Noël a cinq enfants. Les trois premiers filssont en âge de rejoindre l’entreprise et deuxl’ont fait. Les deux derniers, une fille et un gar-çon, sont encore trop jeunes. «L’aîné, Manoël(32 ans) a fait ses études à l’Ihecs qu’il a com-plétées par les sciences politiques (relationsinternationales) à l’UCL. Il a ensuite acquis autravers de stages à l’étranger une précieuse ex-périence à l’international ainsi qu’une excellenteconnaissance des langues (espagnol, anglaiset néerlandais). Le deuxième, Mikaël (30 ans),est pharmacien et a toujours souhaité travaillerchez Tilman. Le troisième, Brice (28 ans), a no-tamment travaillé dans la coopération au Viet-nam et est diplômé en agronomie forestière.»Les deux premiers ont rejoint l’entreprise en2016 pour épauler leur paternel. Manoël, fortde ses connaissances dans la langue de Cer-vantes, a en charge le développement de l’Amé-rique latine où l’entreprise entrevoit de bellesperspectives de croissance. Pour sa part, Mikaëla repris la pharmacie de Bomal qui a réintégréla société.«Mes fils sont mieux formés et armés que je nel’étais quand j’ai rejoint l’entreprise familiale,souligne Jean-Noël Tilman. Ainsi, Mikaël a suiviun master complémentaire à HEC-Liège aprèsses études de pharmacie. Si j’avais suivi un cur-sus similaire à l’époque, j’aurais sans doute mismoins de temps à découvrir ce que lui a comprisen un an.» Né en 1959, Jean-Noël Tilman envi-sage de passer le relais aux alentours de 2025.Mais il faudra que ce le soit à la meilleure ouaux meilleures personnes. L’important ayanttoujours été pour Jean-Noël Tilman que l’en-treprise conserve ses valeurs familiales. Uneligne de conduite à laquelle il n’a jamais dérogédurant ces 30 dernières années marquées parla croissance. Une croissance qui est plus quejamais à l’ordre du jour avec les ambitions eu-ropéennes que Tilman affiche pour la prochainedécennie. Avec comme premier objectif laFrance où il compte d’ici un à deux ans mettresur pied une filiale commerciale, avant de ré-péter le même modus operandi dans d’autrespays. Pour ce faire, il compte bien sûr sur sesdeux fils ainsi que sur l’ensemble des collabo-rateurs qui contribuent au succès du petit la-boratoire familial devenu en un quart de siècleun acteur de premier plan dans le domaine dela phytothérapie.

est au sortir de la Se-conde Guerre mondialeque Lucien Tilman,père de l’actuel adminis-trateur délégué, Jean-Noël, et pharmacien àBomal - sur -Our the

(Durbuy), compose la Tisane du Vieil Arden-nais. Cette dernière va rapidement rencontrerle succès. Il va alors étoffer progressivement lagamme qui comptera au total une vingtaine detisanes médicinales et fonder en 1956 la sociétéTilman. «Le plus amusant est qu’il ne croyaitpas aux tisanes, il n’en a d’ailleurs jamais pristout au long de sa vie, sourit Jean-Noël Tilman.Mais c’était un entrepreneur dans l’âme et il a développé différentes affaires sans jamaisavoir emprunté un seul franc.» Le laboratoirecontinuera à fonctionner artisanalement à côtéde la pharmacie jusqu’à l’arrivée de Jean-NoëlTilman en 1984. Egalement pharmacien, sonpère songeait à lui confier l’officine mais sonfils préférait reprendre l’activité de productionde tisanes. Il va développer et moderniser la production à laquelle il va progressivementadjoindre d’autres produits (gélules, compri-

més, sirops, crèmes, sprays, etc.) en restanttoujours dans le domaine de la phytothérapie.Il va ainsi industrialiser les processus de fabri-cation, scellant notamment un partenariat avecLipton pour conditionner ses tisanes sous formed’infusettes.

CROISSANCE RÉGULIÈREEn 1998, le laboratoire quitte Bomal pourBaillonville, à un jet de pierre de Marche-en-Famenne. Ce déménagement va permettre àTilman de prendre son essor et connaître unecroissance régulière de 15 % par an. «En 1995,nous avions scindé la société en deux, poursuitJean-Noël Tilman. Une de mes sœurs, Pascale,a repris avec son mari la pharmacie et j’ai reprisle laboratoire. Mon autre sœur, Françoise, aégalement reçu sa part. Nous nous entendonstrès bien et personne n’a été lésé. Elles sontd’ailleurs très heureuses de la réussite de Til-man.» D’année en année, Tilman va grandir na-turellement et croître tant au niveau nationalqu’international. Actuellement, l’export repré-sente quelque 25 % du chiffre d’affaires (33 mil-lions d’euros en 2017) et concerne une trentainede pays à travers le monde. Ses premiers mar-

Fondée en 1956 par Lucien Tilman, la société Tilman est devenue au fil des années le premier laboratoire de phytothérapie en Belgique.Entreprise plus que jamais familiale, elle intègre aujourd’hui la nouvellegénération afin de poursuivre sa croissance et nourrir ses ambitionsinternationales. GUY VAN DEN NOORTGATE

Trends Family Business › mai 2018 ‹ N° 39 www.trends.be/family-business10

PORTRAIT

TILMAN

LE SPÉCIALISTE DES PLANTES

C’

TILM

AN

TILMAN COMPTE D’ICI UN À DEUX ANS

METTRE SUR PIED UNE FILIALE

COMMERCIALE EN FRANCE, AVANT

DE RÉPÉTER LE MÊME MODUS OPERANDI

DANS D’AUTRES PAYS.

PG

BE

LGA

IM

AG

E

Page 7: — P915914 — mai 2018 — N° 39 Publication ... e/family-business N° 39 › mai 2018 ‹ Trends Family Business 5 D O S S I ER 4 Trends Family Business › mai 2018 ‹ N° 39

Trends Family Business › avril 2018 ‹ N° 39 www.tendances.be/familybusiness12

PAROLES D’EXPERTS Envoyez vos questions à [email protected]

La préparation du changement de génération ausein de l’entreprise familiale est un sujet qui adéjà fait couler beaucoup d’encre. Et à juste titrecar dans la pratique, il s’avère que les entreprisesfamiliales ne respectent encore que rarement leprincipal conseil qui leur est donné dans cecontexte, à savoir s’y prendre à temps. Bien qu’en-viron 65 % des entreprises familiales soient encoreaux mains de la première génération et que pourbeaucoup, le changement de génération s’imposedans un avenir proche, une enquête confirmeque seule une minorité d’entre elles a déjà prisla peine de réfléchir à la mise en œuvre concrètede ce passage de témoin. Il est vrai qu’il n’est pas toujours aisé de transmettre quelque choseque l’on a créé de ses mains.Dans le cadre du passage deflambeau à la nouvelle géné-ration, il y a lieu de tenircompte d’un certain nombred’aspects qui ne se règlent pasdu jour au lendemain. Est-cevraiment le bon moment, pourl’entreprise, de procéder autransfert ? Y a-t-il suffisam-ment de stabilité ? La situationfinancière le permet-elle ? Lechangement a-t-il été prévusur le plan juridique ? L’an-cienne génération est-elleprête ? Souhaite-elle encorejouer un rôle dans l’entre-prise ? Est-il question d’une maladie ou d’un décèsimminent ? La jeune génération est-elle prête ?A-t-elle suivi les études adéquates ? Jouit-elle desuffisamment d’expérience et de crédibilité ? Et évidemment, la famille est-elle prête ? Des mesures ont-elles été prises pour consacrerles valeurs familiales ? Les conséquences de lafragmentation de l’actionnariat ont-elles été anticipées ? En bref, une période de quatre à sept ans ne paraît pas superflue afin de tranchertoutes ces questions.

BONNE GESTIONSi le changement de génération représente unvéritable défi à relever, il est également sourced’opportunités à saisir. C’est ainsi que ce moment

peut être mis à profit pour apporter d’éventuellesadaptations à la structure du groupe. Il s’agit, dureste, de l’occasion idéale pour améliorer sa ges-tion. Par exemple, un changement générationnelva souvent de pair avec l’ambition d’évoluer, decroître. Mais qui dit croissance, dit aussi innova-tion, exportation, informatisation, financementadapté… Et il se peut que l’entreprise n’ait pasun cadre adéquat ou une expérience suffisantepour faire face à ces nouveaux challenges.La nouvelle génération a peut-être intérêt à acquérir cette expérience en attirant un ou desadministrateur(s) externe(s), ou en créant unconseil consultatif. Le principal avantage de cessolutions, c’est que l’aide proposée ne se limite

pas à un conseil ponctuel aumoment du transfert. La fa-mille s’offre ainsi les servicesd’une assistance structurelledans le cadre de la mise en œu-vre d’une vision stratégique etde l’organisation de la crois-sance. Si l’entreprise a déjà re-couru à une aide externe par lepassé, le transfert à venir serapeut-être l’occasion d’évaluersi ces compétences externesconcordent toujours avec lesprojets et le profil de la nou-velle génération. En outre, l’objectivité des conseillers externes présente l’avantage

de faire tampon entre les intérêts de la famille et ceux de l’exploitation.Soyons clairs, un conseil consultatif n’est pas làpour faire du babysitting ! Profitez donc de la pé-riode précédant le changement de générationpour développer autant que possible votre proprevision et accumuler vous-même de l’expérience.Divers éléments peuvent vous inspirer afin dedévelopper votre vision : il va de soi que rien nevaut les précieux conseils de l’ancienne généra-tion combinés à ceux des conseillers spécialisésde vos partenaires financiers et autres. Enfin,précisons qu’il est vivement recommandé de suivre des formations consacrées aux matièresque vous aurez à traiter dans le cadre du chan-gement de génération.

UN CONSEIL CONSULTATIF… PAS UN BABYSITTER !

TRANSMISSION

JEROEN BRULS

Private banking, Wealth analysis and planning,

Legal/Tax expert chez ING Belgium

[email protected]

PROFITEZ DE LA PÉRIODE PRÉCÉDANT

LE CHANGEMENT DE GÉNÉRATION

POUR DÉVELOPPER AUTANT QUE

POSSIBLE VOTRE PROPRE VISION ET ACCUMULER VOUS-MÊME

DE L’EXPÉRIENCE.

PG