2006 06 - These professionnelle Cabanis
-
Upload
e-diote-du-village -
Category
Documents
-
view
215 -
download
0
Transcript of 2006 06 - These professionnelle Cabanis
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
1/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
1
Alexandre CABANIS
HEC, Majeure Management des Nouvelles Technologies 2005-2006
Directeur de thse : Julien Lvy
Tuteur dentreprise : Philippe Masseau, Business Interactif
THSE
PROFESSIONNELLE
Mdias traditionnels et acteurs du Web 2.0 :vers la cohabitation ou la convergence des
acteurs de linformation et du
divertissement ?
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
2/75
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
3/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
3
dsigner cette mouvance, Dale Dougherty, co-fondateur dOReilly Media, parle en 2003,
lors dun brainstorming avec Craig Cline de MediaLive, de Web 2.0 . Le rseau est
peru comme une plateforme et non comme un mdia de masse : linternaute participe
activement au processus de cration de contenu, ou plutt de co-cration de contenu
avec ses pairs, en utilisant les multiples outils de cette plateforme. Les internautesdisposent aujourdhui des moyens de partager et dvaluer les informations produites par
les mdias, mais ils peuvent galement produire aisment des contenus, au ct des
mdias.
Cette conception est plus que significative. Selon le Focus Mon Numrique de
Mdiamtrie paru en octobre 2006, huit internautes franais assidus sur dix, soit prs de
15 millions dindividus, seraient des contributeurs . Ils commentent des produits ou des
articles de blogs, participent des forums ou testent des nouveaux services en phase delancement, en phase bta . 17,5% dentre eux seraient crateurs : ils diffusent des
contenus audio et vido, crent des blogs ou des forums.
Il sagit ici de la vocation originelle du Web, tel que le voyait Tim Berners-Lee, o
chacun peut avoir un espace o crire (interview la BBC en aot 2005).
Internet est aujourdhui en train de muter, travers ce que lon vient de dcrire et
qui constitue la deuxime gnration - Web 2.0 -. Hier, simple relais, aujourdhui, plate-
forme dexpression et de cration pour des millions dinternautes. Les mdias
traditionnels, en raison du dveloppement de nouveaux outils, que nous serons amens
dcrire (sites, blogs, webradios, espaces communautaires) peuvent voir en Internet une
menace potentielle, cela dautant plus que ces nouveaux outils poursuivre les mmes
objectifs queux. La faiblesse des moyens financiers de chaque producteur de contenu est
compense par leur nombre, quasi illimit, qui reprsente autant de sources dinformation
potentielles.
Dans cette lutte qui se profile, avec comme enjeu de capter de lattention du public,
la qualit du contenu est dterminante. Le savoir-faire accumul par les mdias
traditionnels, en matire dorganisation, de relations et de dontologie, nest pas
immdiatement substituable. De prime abord, il semble plus ais, pour un journaliste, de
sadapter un nouveau support participatif, que de matriser le support sans connatre le
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
4/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
4
mtier. A moins que le journalisme, tel que nous le connaissons, disparaisse au profit
dun nouveau type de journalisme, le journalisme citoyen, avec ses nouveaux codes.
Mdias et acteurs du Web 2.0 co-existent aujourdhui, et poursuivent les mmes
objectifs, mais leurs moyens diffrent. Peuvent-ils durablement co-exister, en jouant deleurs complmentarits, ou vont-ils fusionner pour former une forme hybride, entre mdia
et plateforme ?
Telle est la rflexion que nous allons poursuivre : nous tudierons dabord la
menace potentielle que reprsente le Web 2.0 pour les mdias traditionnels, avant
dobserver comment le Web 2.0 se trouve dans lincapacit de se substituer en ltat aux
mdias de masse. Enfin, nous verrons que les remises en question de tous les acteurs de
linformation et du divertissement ne remettent pas en cause la co-existence des canauxmdiatiques.
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
5/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
5
PLAN
I. LE WEB 2.0 UN CHANGEMENT DE PARADIGME QUI MENACE LESMEDIAS TRADITIONNELS........................................................................................ 61. De nouveaux outils de cration et dchange de contenus ont amen denouvelles habitudes.............................................................................................. 8
a. Des outils de cration de contenus ............................................................. 8b. Des outils dchange de contenus ............................................................ 13
2. De nouveaux concepts, ouvrant le champ des possibles........................ 19a. Le user generated content.......................................................................... 19b. La longue trane........................................................................................... 22c. La folksonomy............................................................................................. 23
3. La remise en cause des modles traditionnels......................................... 25
a. Le partage des ressources......................................................................... 26b. Le bouleversement de la chronologie....................................................... 29c. Le pari du gratuit ......................................................................................... 30
II. LE WEB 2.0, AUJOURDHUI DANS LINCAPACITE DE SE SUBSTITUER AUXMEDIAS TRADITIONNELS, JOUE UN RLE COMPLMENTAIRE...................... 32
1. Les faiblesses conjoncturelles................................................................... 33a. Les business models .................................................................................. 33b. Linteroprabilit ......................................................................................... 35
2. Les faiblesses structurelles........................................................................ 37a. La dpendance des mdias traditionnels ................................................. 37b. Les problmes de droits dauteurs............................................................ 40
c. Les paradoxes communautaires................................................................ 423. La prsence multi supports comme voie de stabilit............................... 45
a. Vers la mobilit............................................................................................ 45b. La fin des supports traditionnels ?............................................................ 47
III. VERS UNE CONVERGENCE DES ACTEURS............................................. 491. Les dfis des mdias traditionnels relever en vue de la survie............ 50
a. La gratuit.................................................................................................... 50b. La spcialisation ......................................................................................... 53
2. Les risques du tout online .................................................................... 55a. La simple prsence en ligne....................................................................... 55b. La mise disposition de contenus payants sur Internet......................... 56c. La constitution dun relais gratuit des contenus en ligne ....................... 57d. La production de contenus numriques indits....................................... 58e. La migration totale vers le Web ................................................................. 60
3. Vers de nouveaux mdias traditionnels .............................................. 62a. Quand les mdias traditionnels apprennent du Web 2.0 ......................... 62b. Quand le Web 2.0 apprend des mdias traditionnels .............................. 65c. La convergence des acteurs et la cohabitation des canaux ................... 68
CONCLUSION La naissance dune dmocratie, sur et hors du Web .............. 73BIBLIOGRAPHIE..................................................................................................... 75
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
6/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
6
I. LE WEB 2.0 UN CHANGEMENT DE PARADIGME QUI
MENACE LES MEDIAS TRADITIONNELS
Avant de satteler dcrire les caractristiques du Web 2.0, ou de deuxime gnration,
tudions de prs le Web 1.0 . Le Web 2.0 se dfinit en creux vis--vis du Web de premire
gnration. Cela implique plusieurs choses :
Les contours du Web 2.0 slargissent avec lapparition de nouveaux services ;
La dfinition du Web de premire gnration fait lunanimit (contrairement celle du
Web deux, aux contours mouvants).
Si une tape a t franchie, dun point de vue technique mais aussi conceptuel, cela
nempche pas les deux gnrations dInternet de co-exister.
Le Web de premire gnration a t longuement dcrit dans un article par Tim OReilly,
spcialiste dInternet et diteurs douvrages informatiques, le 30 septembre 2005. Cet article
fondateur consacre le franchissement dune tape par de nombreux sites Web. Le premier
constat d OReilly est le suivant : la contribution des contenus dpend de plus en plus des
internautes eux-mmes, et non plus dun Webmaster unique par site, qui dcide de la ligne
ditoriale. Les sites de premire gnration dlivrent un message standard lensemble des
internautes, sans prendre en compte les besoins de chacun. Les internautes nont dautres
alternatives que de se conformer aux lignes ditoriales des sites. Ils rpondent une logique
top-down et non bottom-up , comme les sites 2.0.
Deuxime fait remarquable, les sites de premire gnration sont actualiss au gr de la
volont de quelques administrateurs. La frquence dactualisation est par consquent peu
leve, et ne peut coller prcis lactualit.
Enfin, les seuls changes possibles seffectuent entre internautes et Webmaster. Les
internautes sont isols les uns des autres, mis part les forums, souvent considrs comme
sections annexes de sites ditoriaux, bien quils portent en eux les germes dun Web
participatif.
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
7/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
7
Avec le Web 2.0, on sort de la logique one to many , du Webmaster vers les lecteurs, pour
entrer dans lre du many to many . Chaque internaute est la fois lecteur et contributeur.
Ce changement relve plus dune volution progressive, que dune rvolution. Cette volution
a dabord t technique avant de trouver une justification conceptuelle.
De nouvelles techniques de dveloppement ont rendu cette volution possible. Au premier
rang desquelles se trouvent lAjax, et le DHTML. LAjax (Asynchronous Javascript And XML,
combinaison de plusieurs langages de programmation) permet la modification de pages Web
sans rechargement de la page. Ainsi les actions de linternaute sont perues comme beaucoup
plus fluides, puisque le temps de rponse des internautes aux commandes est accru. Les
botes mail, comme Gmail ou Outlook en bnficient. Le DHTML ou HTML dynamique permet,
lui, la modification dlments de structure dune page. Il est ainsi possible de modifier
lapparence dune page en dplaant les diffrents lments qui la constituent. La combinaison
dAjax et du DHTML permet de modifier, la vole, lapparence dune page Web. Les pages
daccueil personnalisables, comme Netvibes ou My Google, en sont des exemples.
Ces avances, obtenues par la combinaison de technologies existantes, permettent dobtenir
de nouveaux types doutils de cration et de partage du contenu.
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
8/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
8
1. De nouveaux outils de cration et dchange de
contenus ont amen de nouvelles habitudes
Par souci de simplification, le Web 2.0 est souvent associ lensemble des applications
collaboratives, et aux sites communautaires . Pourtant, avant de pouvoir partager du
contenu, celui-ci doit tre produit. Le Web 2.0 se dfinit dabord par la possibilit offerte
linternaute de crer lui-mme du contenu.
a. Des outils de cration de contenus
Les outils du Web 2.0 permettent de crer, commenter, co-crer ou assembler du contenu, sur
des espaces ouverts tous.
Les blogs, outils dexpression individuelle :
Le terme de blog est le diminutif du terme Weblog , trouv par John Barger, le 17 dcembre
1997. Un log dsigne un journal dvnements sur un serveur. Le Web log quitte cet univers
strictement informatique pour pntrer celui de la communication, en prenant comme modle
les journaux de bord. Les blogs sont des sites simplifis lextrme et ddis lcriture, o
les entres apparaissent par ordre ante-chronologique (source : Wikipedia). Lanimation de
blogs reste dans un premier temps rserv aux technophiles capables de crer la structure de
leur blog et de le faire hberger sur un serveur.
En octobre 1998, lditeur amricain de blogs hbergs Open Diary voit le jour, donnant la
possibilit aux internautes dalimenter immdiatement un blog prconu et hberg sur un
serveur. Lide sous-jacente est de permettre tout un chacun de crer sur la toile un espace
personnel facilement administrable. Une avance supplmentaire tient au fait, que tout
internaute peut librement commenter chaque entre du blog, ou post . Contrairement aux
pages personnelles , les plateformes de blogs proposent un outil de publication dynamiquepermettant aisment de crer, puis darchiver du contenu. Ladministration de la structure est
automatise, relaye au second plan.
De nombreux types de plateformes ont depuis lors vus le jour. Il y a plus de 70 millions de
blogs en juillet 2006 dans le monde, selon The Blog Herald, mme si pour Technorati, environ
55% des blogs sont actifs. En novembre 2006, NetCraft annonce quil existe lgrement plus de
100 millions de sites dans le monde. Ceci donne limportance, quantitative du moins, de la
blogosphre , ou rseau de blogs.
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
9/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
9
Cette profusion despaces personnels est de nature disparate. On distingue les blogs par :
type de contenu (vido : les vlogs, photo : les photoblogs , liens les linklogs ) ;
outil de saisie (les blogs aliments par PDA ou tlphones sont appels moblogs ) ;
thme (les plateformes de blogs spcialiss se dveloppent : WineLog pour les
amateurs de vin, Motardblog pour les propritaires de deux roues, ParlonsChat pourles propritaires de chat ).
Cette htrognit apparente masque une dynamique commune. Les blogs se veulent
limage du Web, transparents. Cela ne concerne pas seulement les blogs gocentrs, ouvrant
de manire impudique un journal personnel. Cela concerne tous les blogs thmatiques, quils
traitent ou non de lactualit. De manire bien plus diffuse que le journalisme, des codes de
bonne conduite se sont rpandus au sein de la blogosphre. Un article corrig doit laisser sa
formulation originelle raye, ct de sa reformulation. Les sources doivent tre cites, et si
possible assorties dun lien. Laspect commercial dun blog ou dun article ne doit jamais tre
camoufl, faute de dclencher lire dinternautes se sentant flous. La firme Vichy en constitue
le plus clbre exemple. Une pratique en vogue, le bta testing , consistant offrir de
nouveaux produits des blogueurs influents, afin quils lancent le bouche--oreille, flirte avec
ce principe. Mme si les blogueurs prcisent quil sagit dun prsent, et se disent impartiaux
dans leur jugement, il nen va pas toujours ainsi dans la ralit.
La diffusion de ces rgles parmi les blogueurs ne leur permet pas de se comparer des
comits de rdaction, notamment en terme dactualisation ou de vrification des sources. 56%des blogueurs amricains vrifient leurs sources (Pew Internet & American Life Project, juillet
2006). Les blogs ne doivent toutefois pas tre tudis de manire isole, comme autant de
sources dinformations, mais comme un ensemble vivant. La blogosphre agit comme un filtre
capable de remettre en question lexactitude de tout article prsent autant dans la blogosphre
quen dehors. Les journalistes Dan Rather de CBS, et Jason Blair du New York Times en ont
fait les frais.
La blogosphre relve plus dune communaut que dune simple juxtaposition de blogs. Ceux-
ci sont constitus dun blogroll, une rubrique affichant des liens permanents, ou permalinks , vers dautres sites et blogs en affinit. Bien loin disoler les blogs par sous-
groupe dappartenance, ces liens relient entre eux lensemble des blogs par capillarit. De
plus, un systme de trackback , ou rtrolien , permet un autre blogueur, lorsquil cite tel
article de pointer vers sa source. Le premier blogueur acquiert du trafic supplmentaire et
connat automatiquement les blogs qui pointent vers lui. Les liens ont un rle prpondrant
pour les blogueurs : ils permettent damliorer leur rfrencement sur les moteurs de
recherche, de stimuler laudience de leur blog, et de dcouvrir dautres blogueurs partageant
les mmes sujets de prdilection. La blogosphre agit ainsi comme une caisse de
rsonance , pour reprendre les termes de Tim OReilly.
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
10/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
10
Cette communaut vit grce aux liens, passerelles poses entre chaque blog, mais aussi par
les commentaires laisss la suite de chaque post. Lusage a privilgi la modration des
commentaires posteriori, afin dallger leffort quotidien des blogueurs. Cela contribue
donner une impression de libert aux contributeurs.
Les avis, ou lextension de la blogosphre sur Internet :
Selon Catherine Nivez, journaliste Europe 1, sexprimant sur Kelblog, le blog de Pierre
Chappaz, fondateur de Kelkoo et co-prsident de Netvibes, la valeur de linformation sur
Internet ne provient pas des faits, donne de base accessible partout et gratuitement , mais
des dbats et commentaires suscits. La question pour le lecteur est de savoir sil partage ou
non les valeurs des autres contributeurs. Dans les mdias traditionnels, on distingue la
prsentation des faits, de leur analyse. Chacun peut contribuer celles-ci par des
commentaires. Ils permettent au lecteur de confronter son avis dautres points de vue. Ils
permettent au contributeur dventuellement redresser une inexactitude, ou dtablir un
dialogue, distance ou en diffr, avec dautres contributeurs. Enfin, pour le crateur, les
commentaires permettent dobtenir des retours immdiats concernant la qualit de larticle ou
de lmission, ce qui ntait pas possible au pralable dans les mdias traditionnels.
Certains journaux en ligne donnent ainsi une part importante aux commentaires des
internautes pour chaque article, et utilisent parfois ces commentaires comme partie intgrante
de linformation. Le site du New York Times donne accs aux commentaires travers un encart
plac en page daccueil. Le site 20minutos.es affiche le nombre de commentaires par article
sur la page daccueil. Lorsque lon envisage la place que prennent les micro-trottoirs dans les
journaux tlviss et radiodiffuss, cette tendance est relativise. Cette fois, les commentaires
sont modrs (souvent ex-post) par le Webmaster et propices des rponses de la part
dautres internautes. Les commentaires peuvent tre contredits par chacun, et anonymement.
Lanonymat dans les commentaires reste la norme, mais linitiative dune start-up MyBlogLog
est intressante. Elle permet de donner aux internautes un profil (nom, photo) utilisable
automatiquement chaque commentaire laiss. Il est trop tt pour savoir qui du besoin dereconnaissance ou de la facilit de lanonymat lemportera (55% des blogueurs amricains
utilisent lanonymat, Pew Internet & American Life Project, juillet 2006). Notons que la
transparence nest pas lapanage des crateurs, mais quelle concerne galement les
contributeurs.
Si les avis ont t perus par les blogs et certains mdias traditionnels comme un moyen de
confronter une vision de lactualit aux internautes, les sites marchands ont rapidement peru
que la voix des pairs a une porte bien plus forte que les discours commerciaux traditionnels
en terme dincitation (ou non) lachat. Lobjectivit des marques dcrire leurs propres
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
11/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
11
produits ou celle des mdias traditionnels vanter les mrites de produits pousss par des
attachs de presse, est peu vidente. En vertu de cette transparence, les internautes jouent un
rle croissant dans le processus de recommandation pr achat, au ct des publicits.
Les wikis :
La cration de contenu sur Internet par tout internaute semble relever jusquici de la
juxtaposition de contributions, sans rel dialogue. Le wiki, popularis par Wikipedia partir de
2001, permet la fusion des contributions. Constatant lchec de Nupedia, une encyclopdie en
ligne lapproche hirarchique classique, eut lide dassocier les internautes la cration
darticles. Le site Wikipedia est n. Comme tout wiki, chaque membre peut modifier les articles
cres par dautres membres. Trois principes dominent le concept.
Louverture dune encyclopdie lensemble des internautes permet une exhaustivit et une
universalit des contenus quaucune encyclopdie traditionnelle ne peut obtenir. Il existe
aujourdhui 4 millions darticles, dont la croissance par mois est de 6 9%. Moins dun tiers de
ces articles sont en anglais. Ce simple outil permet chacun daccder gratuitement dans sa
langue une somme de savoirs apports spontanment par des personnes spcialistes et
passionnes.
Les encyclopdies traditionnelles ne peuvent, en rmunrant leurs contributeurs, parvenir ce
niveau dexhaustivit. La gratuit de la contribution est la contrepartie de sa facilit daccs.
Les nouveaux membres peuvent immdiatement, sans contrainte ditoriale autre que la
recherche de lobjectivit, participer la construction dune somme du savoir humain
(Jimmy Wales). La cohrence du projet, qui exclue la publicit et se rmunre grce aux dons
de la communaut, permet galement que de plus en plus de contributeurs acceptent dy
prendre part.
Enfin, le principe dautocontrle de la communaut est fascinant. En autorisant tout membre
modifier larticle dpos par un autre membre, Wikipedia sassure de la fracheur des
contenus. Les articles peuvent tre modifis la vole, au rythme de lactualit. Le savoir fig
des encyclopdies traditionnelles sefface au profit dun savoir vivant et actuel. Inversement, la
libert donne aux internautes peut donner limpression de compromettre la technicit etlobjectivit attendues. Chaque article nest pas contrl avant publication par un secrtaire de
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
12/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
12
rdaction et un rdacteur en chef, mais par lensemble des internautes lisant larticle suite
une recherche et pouvant dcider de lamliorer. Cest pourquoi James Suriowecki parle de
Sagesse des foules. Lattention collective agit comme un filtre retenant les informations
incorrectes et les informations biaises. La qualit de larticle nest pas arrte un moment
donn, comme pour une publication, mais ne cesse de samliorer.
La syndication Web :
La cration et la co-cration de contenus ne trouvent leur justification que dans la mise
disposition de ceux-ci. La syndication permet un site de rcuprer des donnes concernant
un site tiers, grce des flux dinformation. Les flux les plus courants sont en formats RSS
(acronyme de Reach Site Summary, Netscape 1999, puis de Really Simple Syndication, Dave
Winer 2002) et Atom. Ces flux permettent denrichir en information le site de destination et de
gnrer du trafic vers le site metteur en retour. Les flux apparaissent sur le site de destination
sous forme de modules (prvision mto, diaporama, recherche), ou de liens, qui signalent
lapparition de nouveaux articles sur le site metteur. Les sites destinataires peuvent tre des
sites traditionnels, ou bien des sites personnalisables et entirement ddis la rception de
flux dinformation. On parle alors de pages daccueil personnalisables, ou plutt dagrgateurs
de contenus. Chaque internaute peut se rendre sur un site commeNetvibes, ouvrir son compte
et disposer dun espace personnalisable dans la structure, et surtout dans la nature des fils
ajouts. Ils proviennent des sites sur lesquels le membre sest abonn aux fils. Le concept
dabonnement prend ici une nouvelle tournure. Labonnement est immdiat, gratuit et rsiliable
tout moment. La gratuit et linstantanit du Web 2.0 bouleversent une fois de plus les
conceptions classiques.
Les agrgateurs donnent linternaute la possibilit de choisir ses sources, de les organiser,
dtre en contact permanent avec elles et de les supprimer ds quil le souhaite. Linternaute
ne va plus linformation, celle-ci vient lui. Les moteurs de recherche ont peru le
changement qui tait en train de soprer, et proposent leur propre agrgateur (My Google, My
Yahoo!, Microsoft Live). Chaque agrgateur fonctionne comme un journal, dont linternaute
serait la fois le rdacteur en chef et lunique lecteur. Il compose son architecture en crant
plusieurs pages (grce aux onglets), il choisit ses sources parmi lensemble des blogs, sites et
journaux en ligne qui lintressent et les dispose librement sur chaque page. Il a dans le mme
temps dun outil dinformation parfaitement original et en permanence ractualis. Larrive
dagrgateurs pour tlphones portables, comme Mob-it ou LiteFeeds, concurrencedirectement les journaux et radios en rendant mobile cette nouvelle forme de journal.
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
13/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
13
Lultime menace pour les mdias traditionnels de la part des agrgateurs de contenus provient
de lamlioration en continu de loutil. Tim OReilly parle dans son article fondateur de services
en bta permanente , signifiant par l que les versions dfinitives nexistent plus. Des
amliorations, mme minimes de loutil, sont sans cesse apportes par les quipes du site etpar les utilisateurs eux-mmes, placs comme co-dveloppeurs , selon le principe des
logiciels open source. Netvibes propose un cosystme , donnant chaque internaute les
moyens denrichir des programmes en ligne ou API (Application Programming Interface) et
de partager leurs crations avec les autres membres. Si les mdias traditionnels sont senss
remettre la qualit de leur information en permanence en question, ils ne peuvent faire de
mme concernant la forme de leur journal. Ce journal est dautant plus susceptible de plaire
laudience, que cette dernire participe son laboration.
b. Des outils dchange de contenus
Les internautes, la fois crateurs et lecteurs, sont dans un processus permanent de cration
(les blogs et avis), de co-cration (les wikis) ou de recration (les agrgateurs). Certains outils
ont t spcifiquement conus pour lchange. Cet change repose sur le partage (de liens, de
photos, de vidos), la cration de liens (amicaux, professionnels), et sur le travail en quipe.
Les plateformes de partage :
Afin de rassembler des contenus de mme type, souvent parpills sur le Web, les plateformes
mettent profit les internautes afin de classer des contenus sans cesse plus nombreux, avec
toujours la mme prcision de recherche.
On distingue les plateformes :
de contenus multimdia (photos, vidos) ;
de liens (articles, favoris).
Ces deux types de plateformes ne se distinguent pas seulement par la nature du contenu
quelles abritent, mais galement par la place quoccupe linternaute. Dans le premier cas, il est
diffuseur. Dans le second, il joue le rle dun relais.
Les plateformes de partage de photos, comme FlickR, ou de partage de vidos, comme
YouTube (30,5 millions de visiteurs uniques en octobre 2006), Revver (16 millions de visiteurs
en juillet 2006, ComScore) ou Dailymotion (10,2 millions de visiteurs uniques en dcembre
2006, source interne), donnent la possibilit chacun de crer gratuitement un espace sur
lequel il peut dposer ses crations. Concernant les vidos, les contraintes de format de
lcran, de dure maximale des clips et de qualit des images, sont moins des freins que des
aides la cration. La mise en ligne de contenus cres par des tiers et souvent protgs par
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
14/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
14
des droits dauteurs, pose le principal problme de plateformes bases sur lchange libre de
contenus. En attendant de mettre au point des mcanismes de dtection automatique de
contenus protgs, les plateformes sengagent retirer tout contenu repr comme tant en
infraction avec la lgislation sur les droits dauteur. Face aux nouveaux moyens de
consommer sons et images, une rforme de la lgislation sur les droits dauteurs serait labienvenue.
La simplicit des outils permet de constituer une base extrmement riche en contenus
originaux : 65 000 vidos sont dposes chaque jour sur YouTube en juillet 2006, pour plus de
100 millions de vidos vues (source : HitWise). La qualit et la varit des contenus dposs
sont susceptibles de samliorer au fur et mesure que les exigences des internautes
grandissent. Si les vidos dposs sur YouTube sont parfois considres comme relevant plus
de gags, que dune relle dmarche artistique, FlickR ne peut tre accus de proposer un
contenu de faible qualit. Une mulation naturelle sest instaure entre les membres, dont
certains ont un compte professionnel. Le fait davoir propos un outil parfaitement adapt aux
attentes de professionnels a permis de tirer lensemble des contenus vers le haut.
Limportance du nombre de contenus ncessite la mise en place de systmes de classement
efficaces. Les recherches sont constitues de mots. Il est ais de retrouver des textes
contenant les mots-cl recherchs. En attendant le perfectionnement de la reconnaissance
automatique des images sur laquelle travaillent notamment Riya, LTU Technologies ou
Neven Vision, rachet par Google photos et vidos ne sont pas indexables par des moteurs
de recherche. Les crateurs de contenus sont mis contribution pour attribuer des tiquettes
ou tags leurs crations. En attribuant des mots-cls chaque photo quils dposent, les
crateurs synthtisent le contenu de la photo en quelques notions cl. Les internautes la
recherche de contenus sexpriment dans un langage qui leur est propre et sont susceptibles
de trouver du contenu tagu par des crateurs utilisant le mme langage. Google va plus
loin. Il cherche avec son service Image Labeler, obtenir des tags dposs par plusieurs
internautes ne stant pas concerts. Ludique, Image Labeler propose une mme image,
indexe par Google, deux internautes. Ils ont un temps limit pour fournir un mme mot-cl,
avant de passer une autre photo. Google garantit ainsi la pertinence de son classement,gnr par les membres.
La puissance daide la recherche que fournissent les tags franchit une tape supplmentaire
avec le marquage profond ou deep tagging . Il est dsormais possible de marquer des
lments dun contenu, sparment. Des lments de photos sur FlickR sont isolables puis
associs des tags. Les podcasts audio peuvent galement tre tagus par squence, grce
notamment Veotag. En vido, le marquage de squences particulires avec des tags,
permettant daccder directement celles-ci, nest encore possible quau moment du montage.
Cest ce que proposent des sites comme Jumpcut, rachet par Yahoo!, MotionBox, ou Click.tv.
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
15/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
15
Les contenus multimdia sont en passe dtre aussi facilement indexables que le contenu
textuel. La richesse des contenus ne doit pas tre un obstacle lefficacit des rsultats de
recherche.
Certains types de plateforme de partage sont entirement vous faciliter les recherches decontenus. Le site de partage de favoris del.icio.us, rachet par Yahoo!, en fait partie. Les
favoris constituent un catalogue de liens privilgis, classs par besoins dinformation. Si
chaque internaute partage ses favoris avec lensemble des internautes, en dcrivant au
pralable chacun des liens quil rpertorie, chacun a sa disposition un rpertoire de liens
intelligent. Lexpression du besoin dinformation est formule en terme de mots-cl. La
rponse la demande prsente toutes les sources tagues des mmes mots-cl. Del.icio.us a
concrtis cette hypothse. Si les recherches de moteurs ne suffisent parfois pas obtenir le
type de sources dinformations recherches, un annuaire collectif peut y parvenir. Celui-ci est
dautant plus puissant que le nombre de membres est important.
Lorsque les internautes souhaitent rechercher des sources dinformation dactualit, les pages
daccueil des sites ont moins dutilit que les dpches et articles de dernire minute. La
rcence des actualits est un paramtre indiscutable de classement. La popularit des
informations est un second paramtre qui permet de ne pas confronter les visiteurs uneprofusion dinformations non hirarchises. Dun clic, les membres votent pour un article
quils trouvent satisfaisant. Les apporteurs de contenus taguent au pralable les articles, afin
dapporter un tri supplmentaire. Digg fut le premier site de remonte dactualits values par
la communaut des membres. Chaque membre ne se contente pas de voter pour les actualits,
il dpose sur le site les liens vers les articles, les tague et les commente brivement. Dautres
sites conus sur le mme principe, les digg-like , remontent automatiquement le contenu
dun grand nombre de sources dinformation, couvrant de multiples domaines, afin dviter la
partialit de la slection des sources. Le franais Wikio a fait ce choix et utilise prs de 15 000
sources, values par les membres et remontes au ct des informations apportes par ceux-
ci.
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
16/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
16
Les rseaux sociaux :
Les communauts ne servent pas forcment un objectif dinformation ou de divertissement,
elles peuvent tout simplement rpondre au besoin, dabord goste, de connaissance de
personnes partageant des points communs. La finalit peut tre sentimentale, culturelle ouprofessionnelle. Les rseaux sociaux se distinguent des autres communauts du Web 2.0, par
le fait que les outils disposition dun membre servent dabord un besoin dlargissement de
son rseau dinfluence. Les rencontres virtuelles gagnent de lintrt lorsquelles ne sont pas
la simple duplication des contacts rencontrs par des voies traditionnelles.
Le rseau professionnel LinkedIn utilise comme point de dpart les connaissances existantes,
pour des raisons de confidentialit. Chaque membre est sens renseigner lensemble de ses
contacts professionnels, qui, sils lacceptent, deviennent membres leur tour. Les contacts
directs constituent un cercle de relations de premier degr. Les relations de ces relations
constituent un cercle de second degr et ainsi de suite. Lintrt de ce type de rseaux ne
rside pas dans la simple exposition du nombre de contacts collects, mais dans la mise en
relation avec des membres du mme secteur et avec dventuels recruteurs. Lorsque ces
contacts sont au-del du premier niveau, lutilisation des services de mise en relation
automatique est payante. Ce systme semble en contradiction avec louverture de mise dans
les services Web 2.0. Il sagit ici, en plus dune source de revenus supplmentaire, dune
prcaution propre aux services de mise en relation professionnelle. En effet, certains membres
risqueraient dtre assaillis de demande demploi.
Les rseaux sociaux les plus populaires ont pour objectif le divertissement, et facilitent
lextension du rseau de chaque membre. La plateforme dorigine corenneCyworld compte
20 millions dabonns, soit 40% de la population corenne et 3 millions dutilisateurs
trangers. Ce rseau est rsolument tourn vers les loisirs : il est construit en trois
dimensions, sous forme de pixel art. Chaque membre essaie de reproduire son espace de vie
virtuellement, en lenjolivant plus ou moins. Afin de dcorer son appartement virtuel et
dhabiller son avatar, ou reprsentation fictive, des biens virtuels peuvent tre achets.
Cyworld ralise un chiffre daffaires quotidien de 300 000 dollars. La satisfaction de son ego etla rencontre dautres membres, via leurs avatars, ne sont pas les seuls intrts de cette
communaut. Les utilisateurs tlchargent 6 millions de chansons par mois et postent 100 000
vidos par jour. La cration de contenus par les internautes est un moteur dcisif des rseaux
sociaux. Le rseau MySpace, cre en 2003, incite la mise en avant sur son profil personnel de
musiques ou de vidos originales. Il est trs vite devenu un outil de promotion incontournable
pour les groupes de musique et pour les promoteurs dvnement. Selon Ross Levinsohn,
prsident de Fox Interactive, le site compterait 127 millions de membres dbut 2006. Il sarroge
80% des visites des rseaux sociaux aux Etats-Unis (source : Alexa). La dcouverte de
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
17/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
17
contenus musicaux exclusifs joue un levier important de fidlisation. Laffichage des proches
permet de dcouvrir des groupes similaires.
La dcouverte par affinits est un des outils emblmatiques du Web 2.0. Les mdias
traditionnels imposent laudience le choix des sujets. Les moteurs de recherche, appartenant
en apparence au Web de premire gnration, permettent de rechercher parmi des centres
dintrt dj connus. La recherche par affinit permet, par le croisement des affinits de
chacun, de proposer un membre des contenus quil est susceptible dapprcier. La
communaut culturelle U.[lik] est base sur ce principe. Les taux daffinit avec dautres
membres et avec les contenus quils apprcient, sont exprims en pourcentage. La
collaboration est ici au service de la personnalisation. Le rseau agit comme un outil de
conseil personnalis aux gots du membre. Plus le nombre de membres augmente et plus
chacun de ceux-ci renseignent leur profil, plus loutil est susceptible dtre puissant. Les
chroniques de films ou de musique perdent de leur intrt. La dcouverte par affinits permet
de prendre en compte les avis de personnes partageant coup sr un certain nombre de
points communs.
Le travail collaboratif :
La collaboration peut servir un objectif bien plus pragmatique. Certains outils permettent le
partage dun espace de travail accessible en ligne. Les logiciels traditionnels de bureautique
sont remplacs par des services similaires en ligne. Mme si des failles de scurit empchent
des outils, comme la suite de 37 Signals, de Zoho ou de Google, de devenir aujourdhui la
rfrence en matire de suite bureautique, la conception du travail quotidien est remise encause par le Web 2.0. Les documents ne sont plus conus comme tant le fruit dun travail
individuel, pouvant tre partag par la suite, il est le fruit dun travail dquipe tout au long de
sa conception.
Les journalistes, traditionnels ou citoyens, peuvent trouver l loccasion dun gain de temps et
dune amlioration potentielle de leurs travaux, grce au filtre de la collaboration. Le site de
journalisme citoyen Agoravox a mis en place en dcembre 2006 un wiki permettant tout
membre de participer la rdaction denqutes collectives dinvestigation sur des sujets
prcis, en collaboration avec des experts ou des journalistes d'investigation.
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
18/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
18
Chaque internaute a aujourdhui en sa possession, parfois sans le savoir, la possibilit de se
substituer aux mdias en matire de cration et dchange de contenus, sil exploitait la pleine
capacit des services du Web 2.0 Quels sont les concepts qui sous-tendraient une telle remise
en question ?
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
19/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
19
2. De nouveaux concepts, ouvrant le champ des
possibles
Le premier des concepts sous-jacents au Web 2.0 est celui de production des contenus par les
internautes. Laugmentation du nombre de connexions en haut dbit et la mise disposition
doutils simplifis de cration de contenus donnent chacun la possibilit de faire entendre sa
voix.
a. Le user generated content
Le moteur du Web 2.0, qui a engendr sa suite dautres phnomnes, est le rle nouveau de
lindividu. Il net plus simplement lecteur mais aussi rdacteur. Il est la fois consommateur et
crateur, ou plutt co-crateur, aux cts de ses pairs. Les termes de consommauteur ou
de consommacteur refltent cette ralit. Les sites de deuxime gnration sont parfois
qualifis de coquilles vides, que les consommacteurs viendront remplir de leurs crations. Il se
produit un mouvement daspiration du contenu gnr par les internautes : le user generated
content lorsque lon se place du point de vue de linternaute, ou crowdsourcing lorsque
lon se met la place des sites.
Le crowdsourcing :
Ce terme pourrait faire penser une exploitation des internautes par les sites. Toutefois, les
sites 2.0 se crent afin de rpondre des besoins partags par les internautes. YouTube est n
de la volont de deux amis dchanger facilement leurs vidos. Digg est n de la volont
dobtenir une information pertinente et difficile daccs. Del.icio.us provient du besoin
dchange de favoris. Ces besoins sont partags par une masse importante dinternautes.
La mise disposition dun outil gratuit facilite son adoption. Plus le nombre dutilisateurs du
service est important, plus celui-ci est en mesure de fournir un service de base gratuit, en sermunrant par de la publicit et/ou des services premium. Qui plus est, les crateurs de
contenus peuvent souvent tirer une contrepartie financire, directe ou indirecte de leurs
contributions.
Le site Scoopt agit comme une agence photo traditionnelle, mettant la disposition des
mdias des photographies dvnements. Seulement, celles-ci sont prises par les membres, de
leur portable. Les prix sont ngocis. Les commissions sont partages avec les ayant droits. Il
sagit dun des nombreux exemples de modle win-win-win . A partir du moment o les
membres commencent toucher un revenu substantiel dune activit journalistique, la
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
20/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
20
frontire entre journalisme et Web 2.0 est extrmement tnue. Les seules images diffuses au
public des attentats du 7 juillet 2005 dans le mtro londonien, proviennent du camraphone
dAdam Stacey, simple passager du mtro londonien.
Un autre point commun runit consommacteurs et journalistes : les revenus publicitaires. Laplateforme vido Revver partage les revenus issus des publicits contextuelles places sur
chaque page prsentant des vidos, ou chanes , avec les crateurs des vidos. Deux
particuliers ayant scnaris une exprience partir de 300$ de paquets de Mentos et de
bouteilles de Diet Coke, ont rapidement rcolt 15 000$. Le Web 2.0 ne permet pas simplement
de soumettre ses crations aux yeux du monde, mais aussi den tirer un revenu. Ce revenu,
mme sil ne constitue pas un revenu principal, constitue un levier supplmentaire agissant
sur la qualit du contenu propos. La qualit ditoriale des mdias traditionnels pourrait tre
rattrape par lusage de plus en plus frquent de la rmunration des internautes. YouTube
rentre dans le processus, mais reculons. Les revenus peuvent tre partags, mais
uniquement pour des chanes prslectionnes, notamment par le nombre de lectures des
vidos prcdentes. Les membres dEepy Bird ayant ralis lexprience Mentos/Diet Coke,
dcrite prcdemment, en font partie. La qualit perue gnre du bouche--oreille, qui peut
gnrer des revenus, gage de qualit.
La rtribution financire doit tre perue comme laboutissement dun mix marketing dont le
produit est lindividu lui-mme. Guillaume Rotrou dveloppe cette ide dans le blog
eMarketingGarden de lagence Sqli. Sa valeur est proportionnelle laudience de son blog ou
de son profil pouvant contenir des contenus quil a cre et du nombre de liens qui
lunissent dautres membres. Sa promotion est assure par les plateformes de contenus et
leurs multiples modes de classement, notamment derniers contenus ajouts , puis par le
bouche--oreille. Les flux de syndication agissent comme un rseau de distribution.
Il est important de prciser que le produit de ce marketing mix est centr sur la personne et
non sur sa production. En allant plus loin, on peut penser que la porte de la voix dans le
rseau prvaut au contenu du message. Christine Dolce, membre de longue date du rseau
MySpace, sest constitue un rseau de prs dun million de contacts. En ayant rejoint lerseau (plus de 115 millions de membres en dcembre 2006) dans les trois premiers mois, en
se prsentant sous ses meilleurs atours et en acceptant chaque demande dajout son rseau,
elle est parvenu ce rsultat. Sa page est aujourdhui sponsorise par deux marques de
grande consommation, Zippo et Axe, elle dispose dun manager et de sa propre marque de
jeans.
Si lon se place du ct des annonceurs, les profils de rseaux sociaux, comme les mdias
traditionnels, ne sont que des vecteurs permettant de toucher une cible. La nature du contenu
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
21/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
21
dtermine le profil et la taille de laudience associe. Il nexiste pas de hirarchie de valeurs
entre ces diffrents types de supports.
Chaque internaute est un support potentiel pour les annonceurs. Il a sa disposition
lensemble des images, vidos, sons, textes et programmes qui circulent sur Internet pourcrer un contenu indit base de contenus existant. On parle de mashup . La
commercialisation par Campbells, de botes de soupe indites aux couleurs des tableaux
dAndy Warhol, reflte lintgration de cette tendance par certaines compagnies.
Les mashups :
Il existe deux principaux types de mashups : les mashups de contenus, et le mashups
dapplications. Les mashups de contenus consistent utiliser diffrents matriaux multimdia
pour en faire une cration originale. Certains internautes sen font une spcialit.DJ Zebra en
France, ou DJ BC aux Etats-Unis, combinent au moins deux pistes, dont les voix et lesinstrumentaux sont spars au pralable, afin de crer un titre indit. Les vidos se prtent au
mme exercice, avec le doublage comme lment supplmentaire. Les vidos en franais de
Mozinor ont acquis une certaine rputation. Ce type dexercice prexistait Internet, mais la
profusion des matriaux disposition et la facilit dusage des outils de recration nont
jamais atteint un tel niveau.
Ce type de pratique est en porte--faux avec la lgislation en matire de droits dauteur,
lorsque les contenus sont protgs. Le CD de DJ Danger Mouse mlangeant la musique des
Beatles de leur White Album, et les voix de Jay-Z sur son Black Album, le tout pour crer unGrey Album, a t retir de la vente. Les producteurs du contenu originel, au premier rang
desquels se situent les majors, nont pas reconnu cet exercice comme uvre part entire. La
lgislation actuelle appuie leur position. Selon larticle L113-4 du code de la proprit
intellectuelle, l'oeuvre composite est la proprit de l'auteur qui l'a ralise, sous rserve des
droits de l'auteur de l'oeuvre prexistante . On entend par uvre composite une uvre
nouvelle laquelle est incorpore une uvre prexistante, sans la collaboration de lauteur de
cette dernire .
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
22/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
22
Certaines majors peroivent nanmoins des mashups comme moyens de promotion gratuits et
cratifs des uvres originelles. La socit Nickelodeon a mis disposition de sa jeune
audience des extraits de sa production Avatar : The Last Airbender. En quelques semaines,
150 000 mashups ont t produits, et laudience du site a t multiplie par 6. Selon Lawrence
Lessig, ces mashups de contenu procdent de ce quil nomme la Free Culture, dontlaboutissement serait la libralisation totale des changes de contenus multimdia. Alban
Martin dans Lge de Peer tente mme de dmontrer que lindustrie culturelle a un intrt
financier exploiter correctement cette libralisation des contenus. Une fois de plus, les
internautes sont autant de relais des annonceurs, mais des relais actifs et gratuits,
contrairement aux mdias traditionnels, exposant simplement des publicits.
Si les mdias traditionnels peuvent servir un objectif dinformation, lutilit des ces mashups
napparat pas ici clairement. Il en va autrement de lautre catgorie de mashups, les mashups
dapplications. Comme dcrit prcdemment, certains sites, comme Netvibes, mettent
disposition des dveloppeurs, au sein dun cosystme, des applications informatiques, ou
API, afin quils en composent de nouvelles. De nouveaux types de services peuvent ainsi voir
le jour. Le site HousingMaps combine les petites annonces de CraigsList avec la carte de
Google Maps, pour permettre aux internautes souhaitant acheter un bien immobilier de le
localiser sur une carte. Lutilit du service traditionnel de mise en relation via petites annonces
progresse de faon notoire.
Le nombre de contenus et de services possibles est dmultipli par les mashups. La
consquence pour les contenus est quune majorit de ceux-ci nest connue que dun petit
nombre dindividus, alors quune faible partie est connue de la majorit. Intressons nous ce
phnomne.
b. La longue trane
Chris Anderson, rdacteur en chef du magazine Wired, a cre lexpression de Long tail , que
lon peut rapprocher du mcanisme de 80/20 . Il dsigne lensemble des produits de fonds
de catalogue qui se vendent en faible quantit, et dont la somme des ventes peut
collectivement dpasser la vente des produits les plus vendus. Les vendeurs en ligne nayant
pas les contraintes de distribution des magasins physiques, ils peuvent tirer partie de la
commercialisation des fonds de catalogue et articles rares.
Par extension, la long tail ou longue trane dsigne la majorit des contenus sur Internet,
peu visible mais susceptible de rencontrer une demande. Les mdias traditionnels sont
contraints par des exigences de revenus traiter, sinon dun sujet susceptible dintresser
laudience, du moins de sujets pas trop confidentiels. Dautre part, les mdias sont contraints
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
23/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
23
par des limites dexhaustivit. Ces deux contraintes permettent de nombreux sites, diffusant
dune manire exclusive et gratuite un contenu cibl, de rencontrer une demande importante.
Le site Citizenbay permet de proposer des informations concernant sa ville. Le site nest pas
centr sur les petites annonces comme CraigsList mais sintresse galement aux actualits etaux vnements locaux. Les contributions les plus populaires chaque jour sont rtribues.
Chaque membre est la fois lecteur et journaliste local. La viabilit de ce modle conomique
na cependant pas encore t prouve.
Le rle proactif des sites en matire dexploration de la longue trane dpasse la simple mise
en relation dune offre et dune demande dinformation. Amazon a cre son propre systme
didentifiant, le code ASIN. Celui-ci correspond au code ISBN, lorsquil existe, et cre un code
quivalent, lorsquil nexiste pas. Les sites organisent eux-mmes la profusion de contenus
existant sur, et en dehors du Web.
c. La folksonomy
Face la profusion de contenus, nat un besoin de classement et de facilitation de la
recherche. Larchitecture mme du Web va dans ce sens. Depuis quelques annes, il y a une
coupure entre un Web dsordonn, dstructur, qui correspond au Web classique, et la
production de donnes XML les blogs en sont un parfait exemple -, dun Web structurindexable, quon a appel au dpart le Web smantique explique Tariq Krim sur le blog de
Jean-Michel Billaut. On saperoit que ce Web structur crot plus vite que le Web
traditionnel poursuit-il. Le Web de deuxime gnration se structure, en reposant le plus
possible sur les bases de donnes. Il permet une meilleure indexation des pages sur les
moteurs de recherche.
Cependant, certaines mthodes de dveloppement, comme lAjax, indissociable du Web de
deuxime gnration, sont mal supports par les moteurs en terme de rfrencement. La
taxinomie , ou science du classement, consistant organiser habituellement les contenusau sein dun site selon une arborescence rigide, connat une seconde limite. Le nombre de
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
24/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
24
pages classer et relier larchitecture classique, pour un site communautaire contenant
des millions de membres, dpasse le travail habituel des Webmasters. Limportance de la
tche contraint mettre contribution les internautes. La taxinomie utilise les gens ( folks )
et lon parle dsormais de folksonomy .
Chaque contributeur attribue des tags au contenu ajout. En effectuent une recherche par mot-
cl, on obtient toutes les entres marques par le tag recherch. Il est galement possible de
cliquer au sein dun nuage de tags ou tag cloud sur les tags dernirement utiliss, leur
taille indiquant leur frquence dutilisation. Une navigation transversale et intuitive sorganise.
Larchitecture est flottante, elle nest jamais arrte. Elle repose uniquement sur les individus
ajoutant du contenu et le nommant subjectivement.
Lorsque la subjectivit de millions de membres se compense, lancienne taxinomie dpend
toute entire de la subjectivit dun individu, le Webmaster. La libert pour les utilisateurs de
nommer eux-mmes le contenu, garantit la comprhension mutuelle des contributeurs et des
chercheurs, qui utilisent le mme langage. De plus, elle permet aux diteurs du site
dapprendre de leurs membres de nouveaux termes, de nouveaux comportements et les types
de contenus ayant le plus de succs. Cela permet au site dvoluer dans le sens voulu par les
internautes, et non linverse.
Les mdias traditionnels ne disposent pas de moyens de sadapter automatiquement aux
attentes de leur audience. Ils font face ce que Tim OReilly nomme des plateformes
dintelligence collective . Cette intelligence est le fruit de connexions entre de multiples
axones, les utilisateurs. Le tagging se prte des associations multiples et redondantes,
plus semblables celles que notre cerveau ralise, qu des catgories rigides .
Contrairement aux journaux prsentant une Une et une progression linaire, les nouvelles
plateformes sont protiformes. Elles prsentent un visage diffrent chaque visiteur mesure
quil navigue de tag en tag.
La personnalisation est un des enjeux auxquels font face les mdias traditionnels au fur et
mesure que les services de nouvelle gnration toffent leurs rseaux.
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
25/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
25
3. La remise en cause des modles traditionnels
Les mdias traditionnels sont aujourdhui confronts un nombre grandissant de sites, se
dfinissant comme des communauts, mettant profit leurs membres pour fournir et classer
du contenu. Ces sites poursuivent une mission dinformation et de divertissement. Le temps et
les moyens de production font souvent dfaut aux crateurs lors de la phase de production.
Par la suite, ils utilisent leur rseau pour contrler, commenter et diffuser leur contenu produit.
La force de ce rseau en terme de production et de diffusion, pris dans son ensemble et non
crateur par crateur, fait dire au journaliste et enseignant Philip Meyer, dans son livre The
Vanishing Newspaper, que la mort des journaux est annonce pour 2043.
Selon une tude ralise par Jupiter Research et publie le 9 octobre 2006 par le Financial
Times, les europens passeraient en moyenne 4 heures par semaine sur Internet, soit deux
fois plus quen 2003, contre 3 heures en moyenne lire journaux et magazines. Les franais
possderaient le temps pass sur Internet le plus lev dEurope, avec 5 heures
hebdomadaires moyennes. Si le temps consacr par les Europens regarder la tlvision est
toujours trois fois plus lev (12 heures par semaine), les temps moyens de consommation
sont quivalents aux Etats-Unis (14 heures par semaine).
Laugmentation du temps pass saccompagne dune modification des comportements. En
parlant du cas franais, KR Media parle de passage dune consommation squentielle unefrquentation cumulative . En mme temps que le Web 2.0 contribue laugmentation du
temps pass sur Internet, la disponibilit des internautes permet de leur soumettre de
nouveaux services, tout en les mettant contribution pour les services existant. Si ces
tendances perdurent, Internet est, sous limpulsion du Web 2.0, en passe de devenir le support
majeur dinformation et de divertissement.
La publicit suit cette tendance, avec retard certes, mais fournit des revenus toujours plus
importants aux sources dinformations sur Internet, quelles proviennent de communauts
spontanes ou de mdias traditionnels. Au premier trimestre 2006, le-pub sur les sites de
journaux amricains augmente de 35% par rapport 2005, alors que la publicit papier stagne.
La publicit papier du Wall Street Journal ne reprsente plus que trois fois les revenus de le-
pub.
La mise niveau des revenus publicitaires sur Internet semble dpendre non seulement du
nombre dusagers et du temps pass, mais galement de la qualit ditoriale perue par les
annonceurs. Dune part, les exigences lors de la production de contenus augmentent. Ensuite
et contrairement aux mdias traditionnels, le Web 2.0 recourt lautocontrle.
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
26/75
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
27/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
27
dattester de la vracit dun contenu, quune quelconque individualit. Si le consommateur
prend le pouvoir, le lecteur le prend galement. La filire inverse de Galbraith devient
anachronique; dans les mdias tout du moins. La volont du Ministre franais de la Culture,
Renaud Donnedieu de Vabres, dtablir une certification accordant uniquement aux
journalistes professionnels de vrais signatures comme gage d authenticit va lencontre totale de ce phnomne. Pire, si elle se concrtisait, elle crerait une discrimination
gratuite et fige entre divers acteurs de linformation sur le Web, apprenant mutuellement les
uns des autres et laborant des projets en commun.
Une fois de plus, la puissance du Web 2.0 en terme de vecteur efficace dinformations et de
divertissement, tient dans le fait que les contenus et services quil propose, sont le fruit de la
rencontre de multiples sources. Il ne sagit pas de plusieurs acteurs diffusant chacun leur
contenu et responsables de celui-l seulement. Les internautes se servant du Web participatif,
reprsentent un acteur part entire, individuellement producteur mais mutuellement
responsable. Chacun dispose des moyens de produire du contenu. Les contenus existant
peuvent servir de matire premire de nouvelles crations. Lorsque celles-ci sont
apprcies, elles sont diffuses des pairs. Lorsque ce nest pas le cas, elles peuvent faire
lobjet de commentaires qui le mentionnent. Chacun dispose des moyens de montrer son
insatisfaction lgard dun producteur. Les processus viraux de mcontentement circulent
tout aussi efficacement que les processus viraux ludiques. La rgulation de linformation est
dynamique et partage. Elle ne repose plus sur les courriers des lecteurs.
De nouvelles formes dinformations :
Cette dynamique densemble, mettant contribution chaque membre pour progresser, permet
mme la cration de contenus innovants. Les sites ChicagoCrime ou BerkeleyCA CrimeLog,
parmi dautres, utilisent lapplication Google Maps pour localiser les exactions perptres dans
la municipalit depuis quelques mois. Les exactions peuvent tre tries par catgories. Les
rubriques des chiens crass nont plus de valeur face un outil embrassant dans son
ensemble les questions de scurit que peuvent se poser les habitants de certains quartiers.
Les mashups peuvent crer de nouveaux services permettant comme ici damliorer lequotidien. Si chaque crateur de contenu ou dAPI conservait sa cration de manire isole
limage des mdias traditionnels, nacceptant de cder lutilisation de leurs contenus que sous
certaines conditions (financires notamment), le Web ne serait quun vaste terrain dexposition
publicitaire, le Web de premire gnration en somme.
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
28/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
28
Les innovations issues de la cration collaborative concernent galement les contenus. De
nouvelles formes dorganisations productrices dinformations voient le jour. Lorganisation,
par une dizaine de journalistes, des ressources apportes par une majorit dinternautes, est lepremier essai de journalisme citoyen. Le site coren Ohmynews.com, le franais Agoravox ou
le paneuropen Cafebabel, en sont de parfaits exemples. Lquipe de journalistes
professionnels garantit lexercice des standards journalistiques : cadrage ditorial, vrification
des sources, prsentation claire Les internautes slectionns soumettent bnvolement et
librement leurs contributions. Ce modle est une des rponses aux sceptiques dun
crowdsourcing autorgul. Ce premier essai, tablissant deux niveaux de contributeurs, ne
peut tre considr comme un reflet du Web collaboratif. Le projet NewAssignement.net,
renonce galement une part de spontanit des contributions pour gagner en objectivit et
en qualit, mais les diffrents participants sont placs sur un pied dgalit. Des maisons de
presse, des fondations but non lucratif, des blogueurs et des journalistes, cherchent
raliser et financer en commun des enqutes de fond. Cette initiative ne repose pas sur
lexhaustivit des contributeurs potentiels, ni sur la spontanit des contributions mais a
vocation servir de titre rfrence au sein du Web 2.0. On peut y faire rfrence en tant que
blog partag, o la collaboration entre membres est active, o la diversit des profils des
crateurs est un gage de qualit et o lexigence de moyens est mutuellement partage.
La diffrence est extrmement tnue entre des internautes collaborant des sitesdinformation ambitieux et des pigistes. Les plateformes de blogs verticaux , cest--dire de
blogs spcialiss dans des domaines varis, rmunrant des blogueurs slectionns, lont
compris. On parle encore ici de nanopublishing pour des entreprises commeWeblogs, Inc.,
YouVox ou The Social Media Group. Pour son prsident, Christophe Labedan, cest bien le
semi professionnalisme qui garantit lquilibre entre fracheur du point de vue et motivation
crire. Dans une interview donne Neteco le 25 septembre 2006, il dit avoir fait le pari de
donner la parole des gens qui voulaient partager leur passion plus que chercher un emploi
rmunr . Et au final cest cette passion qui se ressent dans le contenu et fait le succs de
[leurs] blogs .
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
29/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
29
Sil peut exister des sources de rfrence au sein du Web 2.0, celles-ci disposent de moins de
contraintes que les mdias traditionnels. Au premier rang de celles-ci se situe la chronologie
des mdias.
b. Le bouleversement de la chronologie
Aucun mdia, avant lutilisation dInternet, ne donnait accs en continu des informations
renouveles en permanence. Les journaux fournissent des informations renouveles au mieux
tous les 24 heures. Les chanes de radio et de tlvision diffusent des informations en continu
ou presque mais ne rpondant pas toujours aux attentes de laudience. Une des raisons tient
au fait que lors des horaires creux, les programmes sont particulirement destins certaines
cibles dmographiques (14-16 h : personnes ges, 16-18h : enfants). De plus, les diffrents
acteurs des mdias ne cherchent pas cooprer. Le statut de concurrence permanente limite
les collaborations des vnements ponctuels.
Internet reprsente, loppos, un vecteur dinformations choisies par linternaute, sans
interruption de production et de diffusion de contenus. La mobilit accentue encore ce
phnomne. Le dveloppement des capacits des terminaux mobiles et lapparition de
navigateurs de poche, comme le Sony Mylo ou les tablet PC, permettent laccroissement du
nombre daccs et de contributions linformation. En jonglant dun appareil lautre, chaque
internaute peut tre en permanence reli la toile.
Radio et tlvision imposent laudience dadapter ses horaires ses programmes. Internet ne
connat pas dhoraires. Les changes entre internautes se font de manire continue. Les grilles
horaires sont en contradiction avec le besoin de souplesse et de personnalisation souhait par
les consommateurs de mdia. Lessor naissant de la VOD ou vido la demande, suit cette
direction. Il en va de mme pour les podcasts de chanes de radio. Les efforts sur Internet des
mdias traditionnels doivent dpasser la simple duplication des contenus pour ne pas tre
distancs par linteractivit et la personnalisation du Web 2.0.
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
30/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
30
Les podcasts sont des fichiers audio insrs dans un fil dinformation auquel peut sabonner
un internaute, comme via le site Odeo, avant de le transfrer sur un baladeur numrique. De
nombreuses chanes de radio sont disponibles sous cette forme. Les missions, peu importe
leur crneau horaire, sont accessibles en podcasts tout moment. Elles sont places sur un
pied dgalit. La qualit perue des missions devient le principal moteur de laudience (partlchargements). La grille des programmes voit son influence diminuer sur le succs ou non
dune mission. Le consommateur juge dgal gal des missions que rien ne semble
distinguer, une fois sous format numrique.
Contrairement aux mdias traditionnels, linteractivit du Web 2.0, qui place lindividu au
centre de la plateforme, ncessite une attention accrue. Alors que la duplication des mdias
dans leur consommation devient courante, Internet permet une meilleure rtention des
messages, notamment publicitaires. Selon KR Media, 40% des 13-24 ans internautes regardent
galement la tlvision entre 20 et 21 heures. Les mdias traditionnels ne doivent plus
seulement prendre en compte la part daudience quils recueillent, mais galement la qualit de
lattention de leur audience. Lenjeu est ici de retenir des annonceurs conscients des
changements intervenus dans les modes de consommation des mdias.
La nature mme des formats publicitaires, apportant une exposition plus longue quen radio ou
tlvision et cibls bien plus prcisment que dans les journaux, permet galement Internet
de gagner lintrt croissant des annonceurs. Ceux-ci prennent un poids considrable dans les
revenus des mdias, mesure que le nombre de sources dinformations et de divertissement
gratuites augmente. Le public shabitue rapidement cette contrepartie de la gratuit, peu
intrusive si elle respecte un certain nombre de rgles.
c. Le pari du gratuit
La mise en ligne de contenus sur Internet peut tre gratuite. Les barrires lentre sont
reprsentes par lquipement en micro-ordinateur et connexion Internet. En dcembre 2006,
prs de 20 millions de franais, de plus de 11 ans, se sont connects lInternet haut dbit
depuis leur domicile (source : Mdiamtrie). Pour de nombreux blogueurs, crateurs de photos
ou de vidos, lobtention de revenus de leurs productions nest ni une obligation pour la
continuation de leur activit, ni une obligation pour leur subsistance. Sils souhaitent obtenir
un revenu complmentaire, cela ne peut se faire en aucun cas par la cration dun page
pralable au contenu. Celui-ci doit tre libre, changeable, compilable. La publicit est la
source de revenus permettant dajouter un type de contenus supplmentaire au cur du
message, sans altrer celui-ci.
Parmi les diffrents types de publicit, les publicits contextuelles sont faciles daccs, non
perturbantes et adaptes au contenu. La longue trane de Chris Anderson trouve ici une
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
31/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
31
application supplmentaire. Tout annonceur, dun secteur aussi confidentiel soit-il, dispose de
supports de communication potentiels, en affinit avec le message et la cible de lannonceur.
Le sociologue Jean-Claude Burgelman, dans une interview au Monde du 21 octobre 2006,
anticipe la prochaine tape de ce modle. Mme si un blog nest lu que par cinq personnes, il
sera possible, lavenir, de connatre le profil de ces utilisateurs et de leur envoyer de lapublicit cible.
Dans ce contexte, les agrgateurs de flux dinformation agissent comme des places de march
transparentes, prsentant des contenus issus de divers producteurs, blogueurs en particulier.
La frquence de mise jour et la qualit perue des articles permettent une exposition plus ou
moins importante leurs messages publicitaires.
Labonnement et le paiement lunit deviennent des concepts lointains. Lre du numrique
est non seulement celle de la cration, mais galement celle de la reproduction et de la
diffusion. Lensemble des contenus existant ou reproductibles sous format numrique est
susceptible de circuler sans contrainte. Les kiosques numriques sont des plateformes
interactives qui permettent de lire ou de tlcharger, de manire payante, des magazines en
ligne. Ils apparaissent en France en aot 2006 avec Monkiosque (Cyber Press Publishing) et
Hachette Distribution Services Digital, qui sappuient sur les sites Relay et Virginmega. Ils
donnant accs de manire protge et payante leurs titres de presse. Dans le mme temps,
le site chinois Zinoku propose en anglais une vaste slection de magazines tlchargeables
gratuitement et sans protection DRM via le client de Peer-to-peer BitTorrent. Cela prfigure
dj la non viabilit du modle des kiosques numriques payants.
Plutt que de lutter contre la gratuit, tous les crateurs de contenus, quelque soit leur canal
dorigine, se doivent de sadapter elle. La publicit est le business model aujourdhui le plus
courant, mais elle existe sous plusieurs formes et elle peut tre un complment dautres
formes de revenus, dont beaucoup sont inventer.
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
32/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
32
II. LE WEB 2.0, AUJOURDHUI DANS LINCAPACITE DE SE
SUBSTITUER AUX MEDIAS TRADITIONNELS, JOUE UN
RLE COMPLMENTAIRE
Le Web 2.0 est souvent la cible de sceptiques, de natures opposes, dailleurs. Pour les uns, le
Web 2.0 nest quun concept marketing cherchant relancer les applications du Web, un et
indivisible, la suite du traumatisme post-clatement de la bulle. Pour les autres, les nouvelles
applications suscitent un engouement draisonn de la part des investisseurs, faisant craindre
une nouvelle bulle.
Cela serait oublier que le Web communautaire apporte aux mdias traditionnels des dfis de
taille, au premier rang desquels, la gratuit et la participation. Cela ne signifie pas pour autant
que le Web 2.0 ait atteint sa pleine maturit ou mme quil puisse remplacer les mdias
traditionnels. Certaines tapes sont franchir. Mais le Web 2.0 doit galement se confronter
ses paradoxes, sil souhaite jouer un rle grandissant dans le monde de linformation et du
divertissement.
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
33/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
33
1. Les faiblesses conjoncturelles
La rcente utilisation des services Web de deuxime gnration explique la persistance
dimperfections, limitant leur adoption gnralise. Si nombre de celles-ci vont se rsorber
delles-mmes, il est utile de les identifier afin de mesurer la rapidit avec laquelle le Web 2.0 a
atteint la maturit, aux cts des mdias traditionnels.
Une des imperfections, trop souvent ignore, tient linscurit des sites dvelopps laide
des nouvelles techniques de programmation, dont Ajax. Ils prsentent une plus grande surface
dattaque. Mme si Ajax en soi nest pas source de nouvelles vulnrabilits, elle permet de
reproduire de vieilles erreurs plus facilement. Comme les failles que connurent les PC il y a
une dizaine dannes, ces failles peuvent tre corriges par la formation et le partage des best
practices des dveloppeurs (source : Zdnet, 4 aot 2006).
Dautres imperfections concernent, dune manire gnrale, la viabilit conomique et donc la
prennit des services 2.0.
a. Les business models
Les services courants reposent sur la gratuit. Seule la publicit contextuelle et non perue
comme intrusive, est susceptible de gnrer un revenu substantiel. Les services premium ne
doivent tre considrs comme autre chose quune source de revenus dappoint. Steve
Olechowski est le crateur de Feedburner, une solution permettant de crer des flux
dinformations partir de tout site. Il confie au Journal du Net du 17 octobre 2006, que leurs
revenus viennent essentiellement de [leur] rseau publicitaire . Il prcise surtout concernant
les abonnements Pro pour la gestion des fils et laccs aux statistiques , quils le leur
rapporte pas normment , mais que cela na jamais t [leur] but . Nombreux sont les
sites 2.0 ayant cet tat desprit. La mise en avant des services premium, utilisables contre le
paiement dun forfait, ne va pas dans le sens de louverture et du partage, valeurs sur
lesquelles reposent les services de base, vecteur de limage de marque.
La dpendance publicitaire :
Il est cohrent dans cette situation, de ne pas chercher de multiples sources de revenus. Le
rseau social Myspace en fournit lexemple le plus extrme. News Corporation, aprs avoir
achet la socit-mre Intermix Media, 580 millions deuros, pendant lt 2005, vend un an
plus tard Google lexclusivit de la publicit pour 900 millions de dollars. Le potentiel de
revenus publicitaires issus des rseaux sociaux, et dune manire plus gnrale des sites dedeuxime gnration, ne peut tre surestim par la plus importante rgie publicitaire sur
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
34/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
34
Internet (99% de son chiffre daffaires annuel au troisime trimestre 2006, soit 2.9 milliards de
dollars, provient de la publicit).
Le retour sur investissement est ici bien loin de la norme. Pierre Chappaz, prsident de Wikio,
explique au Journal du Net dans une interview du 13 fvrier 2006, que les revenus seront
probablement uniquement grs par les liens sponsoriss () [Ils visent] la rentabilit en 2008
si tout va bien. Le croisement de ces deux exemples ne fait que confirmer le fait que lorsque
la totalit des revenus est de nature publicitaire, les revenus sont proportionnels au trafic sur
le site. Le profit passe par laugmentation continue du trafic.
Cette dernire nest pas obligatoirement en contradiction avec le principe de longue trane du
Web 2.0 ; au contraire. La profondeur des contenus sur chaque plateforme vido, sur chaque
plateforme dinformations, augmente avec le nombre de contributeurs. Or internautes et
contributeurs ne font dsormais quun. La publicit est ainsi formidablement adapte au Web
2.0, et forme un modle win-win-win. Elle finance lenrichissement des contenus (YouTube paie
environ 100 000$ de bande passante pour 100 000$ de revenus publicitaires, par jour) etpermet aux internautes dobtenir un contenu toujours plus proche de leurs attentes. Il est ainsi
possible pour les annonceurs de bnficier dun trafic de plus en plus qualifi.
Une nouvelle bulle Internet ?
Ce cercle vertueux justifie-t-il les valorisations des champions du Web deux ? Si News Corp. a
achet Intermix 7 fois son chiffre daffaires, lquivalent du ratio actuel de Yahoo!, des rumeurs
parlent dun rachat possible de Digg autour de 200 millions de dollars, soit 67 fois son chiffre
daffaires. Ce genre de valorisations prend en compte la valorisation de limage de marque. Elleconstitue un avantage concurrentiel majeur pour des services fortement dupliqus. Les sites
considrs comme des pionniers ou des emblmes, bnficient de ce mcanisme, qui ne doit
en rien tre imput la sphre du Web 2.0 dans son ensemble. Un seul autre site veille
aujourdhui les convoitises la mesure de Digg, ou de YouTube, achet 1,65 milliards de
dollars par Google. Il sagit de Facebook le rseau social tudiant. Il demande 2 milliards de
dollars pour son rachat. Nombreux sont ceux, comme CNN Money.com le 16 aot 2006, qui
parle dune nouvelle bulle.
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
35/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
35
En 2000, la survalorisation des actifs tait une des raisons endognes de la constitution de la
bulle. Cette survalorisation est sans commune mesure avec les valorisations actuelles, hormis
les rares marques-stars du Web 2.0, dont il vient dtre question. Selon la National Venture
Capital Association, 1,8 milliard de dollars ont t investis dans les start-up aux Etats-Unis au
premier semestre 2006. En 2000, les investissements annuels slevaient 43,4 milliards dedollars. Le contexte a profondment chang. Le nombre et la maturit des internautes ont
autant t modifis que le nombre et la maturit des investissements publicitaires. Enfin, les
circonstances exognes connues en 2000, comme la survalorisation des licences de troisime
gnration lors de leur vente aux oprateurs mobiles, ont peu de chances de se reproduire du
fait de lapprentissage des erreurs prcdentes.
Le risque deffondrement de lcosystme et des industries connexes est donc trs faible.
Ouriel Ohayon lavance dans la srie darticles de son blog, Techcrunch, consacrs
lventualit dune deuxime bulle Internet. Il distingue dans le Web, trois sphres de socits :
les gants du Web, les nouvelles socits finances par le capital risque et la multitude de
services auto-financs. La solidit des gants semble les mettre labri de toute secousse. Le
jour o Google achte YouTube 1,65 milliards de dollars, la capitalisation boursire de Google
augmente de 5 fois ce montant... Les valorisations des socits finances par capital risque
sont comprises entre 3 et 20 millions de dollars. Si la majorit de ces socits disparaissaient,
par le simple jeu de la concurrence, les capitaux-risqueurs se rattraperaient par la vente
dautres socits des gants des mdias ou dInternet. Enfin, si tous les petits services
venaient disparatre, il ny aurait dimpact que pour ceux qui les ont cre . On ne peut
parler de bulle. La cration de valeur est omniprsente, mais pour un service similaire, seul les
acteurs apportant le plus de valeur ajout subsisteront. Les sorties par rachat sont prfres
aux introductions en bourse. Les disparitions ont peu de chances daffecter le fonctionnement
de lcosystme.
Malgr tout, la dpendance dune source unique de revenus constitue une fragilit. Qui plus
est, si cette source de revenus est tributaire des fluctuations de la conjoncture, alors la
prudence est de mise.
b. Linteroprabilit
Lefficacit dun modle conomique, reposant essentiellement sur la publicit, est
directement lie au nombre de visiteurs uniques du site, dutilisateurs du service. Si certains
sites proposent le mme service, leffet de rseau donne lavantage au service parvenant le
premier capter une masse critique dutilisateurs. Le calendrier en ligne Kiko, qui rpond aux
mmes besoins que loutil Google Calendar, en a fait les frais.
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
36/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
36
La plupart des services sont captifs. Ils ncessitent louverture dun compte et deviennent de
plus en plus utiles au fur et mesure des utilisations. Lorsque louverture dun compte se fait
suite linvitation dun pair (pour regarder son album photo sur FlickR par exemple),
linternaute risque de possder plusieurs comptes de services quivalents. Ces services sont
souvent incompatibles. Pour Hubert Guillaud, nos rseaux sociaux nous imposent leursservices et ceux-ci nous imposent leurs contraintes, en pleine connaissance de cause : il
sagit, dune part, dattirer notre tour nos relations dans leurs filets et dautre part, de rendre
la migration vers des services concurrents plus difficile .
Une priode transitoire se met en place. Chaque utilisateur teste les diffrents services. Les
internautes dans leur ensemble attendent quun des fournisseurs du service ait pris lavantage.
Plus le nombre dutilisateurs dun rseau augmente, plus lavantage peru de chaque nouvel
entrant augmente. Chaque internaute se fixe un seuil personnel partir duquel il souhaite
entrer dans le rseau le plus utilis dun certain service. Quelques leaders apparaissent. Nous
sommes proches de marchs winner-take-all , o le leader profite dun effet boule de neige.
La non compatibilit des sites de plusieurs services (travail collaboratif, partage de photos, de
vidos, calendrier en ligne) peut aujourdhui freiner la transition vers le tout en ligne .
Certains services en ont pris conscience et proposent un pont entre les services, afin
dacclrer la convergence des rseaux dutilisateurs. Meebo propose ainsi de rassembler sur
une page Web les contacts de ses diffrentes messageries instantanes, et dinteragir
simultanment avec eux.
Le Web 2.0 a besoin de la leve de ces obstacles techniques pour fonctionner vritablement
comme une sphre dchanges. La croissance consquente du nombre de ses membres en
dpend. 18,3% des internautes espagnols ont utilis le podcasting et 15,3% des internautes
franais ont cre un blog (source : Novatris NetObserver Europe, juin 2006). Ces pratiques
disposent dune forte marge de progression avant de devenir des activits intgres au
quotidien de toutes les catgories de la population.
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
37/75
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
38/75
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
39/75
-
8/14/2019 2006 06 - These professionnelle Cabanis
40/75
Alexandre Cabanis Thse professionnelle Dcembre 2006
40
en 3D au sein du monde virtuel Second Life. Dautres, comme Sony Pictures, FoxNews, CBS
ou VH1, ont opt pour des chanes ddies, sur les plateformes vido, afin de mettre en avant
des produits ou des artistes.
Dans ce contexte, la continuit de la dpendance du web 2.0 aux mdias traditionnels est
souhaitable, puisquelle permet de contrebalancer linfluence grandissante des marques, qui
ne doit en aucun cas devenir la source principale de contenus extrieurs, du web 2.0, au risque
de briser un des moteurs du Web deux, la transparence.
Mais la dpendance aux mdias traditionnels comporte un problme majeur : le cadre lgal
dexploitation de ces sources.
b. Les problmes de droits dauteurs
Le Web 2.0 repose sur lchange libre de contenus. Ceux-ci sont parfois originaux, parfois
copis sans consentement, parfois faisant de contenus protgs mlangs une uvreoriginale. Les deux derniers cas de figure posent problme en ltat actuel de la lgislation sur
les droits dauteur. Tous les propritaires de contenus exploits sans accord pralable, au
premier rang desquels les majors du divertissement, sont susceptibles de porter plainte pour
violation du droit dauteur. Les consquences financires pour les acteurs du web 2.0 ne sont
pas les plus craindre. Le retrait de tous les contenus soumis des droits dauteur, soit la
majorit des contenus de qualit professionnelle, risque de nuire lintrt gnral de la
plateforme, selon Josh Bernoff et Ted Schadler, analystes chez Forrester Research. Comme le
cabinet IDC avant eux, ils affirment mme, que YouTube sera poursuivi et perdra . Le
nombre dexemples de vidos succs cres spcifiquement pour les sites communautaires
ne cesse pourtant daugmenter (Lonelygirl15, Ask a Ninja, Tiki Bar TV).
Le risque de retrait de nombreuses vidos gnrant une audience importante est dautant plus
forte que le nombre dacteurs concerns par la violation des droits de proprit intellectuelle
est grand et que ceux-ci demandent le simple retrait, lamiable, des vidos. Les menaces du
cl