La toilette sèche : une question de cohérence

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  • 7/29/2019 La toilette sche : une question de cohrence

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    La toilette sche : une questionde cohrence

    Par : Joseph ORSZGH,11, Clos des Tuileries, B-7000 MONSjoseph.orszagh@skynet.be

    Cest en 1982, au retour dune de mes missions en Afrique que jai eu la grande surprise de voir un seau hyginique la toilette. Le W-C classique a t partir de ce moment-l relgu au rang dobjet inutile et encombrant... Ma femme, Michlea dcrt que dsormais, ce sera notre toilette. Cest ainsi qua commenc lhistoire de mes recherches en matiredassainissement. Jai donc t pris au pige de mes propres thories, car jusque-l, javais souvent parl de la possibilit dercuprer nos djections des fins agricoles, mais pour moi ctait une sorte dexercice intellectuel. Il a fallu le pragmatismedune femme, la mienne, pour transposer la thorie sur le terrain.

    Il serait passionnant, mais trop long, de raconter notre chemin pour aboutir la ralisation dune maison en pleineville (avec un jardin de 750m) qui nest raccorde ni la distribution deau ni aux gouts. Nous buvons leau de pluie et nousrutilisons nos eaux grises pures pour arroser le jardin. Avec des investissements drisoires, nous sommes arrivs lautonomie hydrique complte avec une pollution nulle des eaux souterraines et des eaux de surface.

    Nous sommes videmment loin de notre seau hyginique qui sentait mauvais et ntait acceptable que pour quelques mordus pour lenvironnement. Actuellement, avec plus de six cent (et le nombre augmente tous les jours) de familles en

    Belgique et en France (juin 2003) nous partageons notre exprience concernant lusage de la toilette sche que nous avonsbaptise toilette litire biomatrise (TLB). Avis aux amateur dexercices linguistiques pour lui trouver un nom plus adapt !

    Du bon compost pour son jardin et de leau bonne boire

    Au dpart, notre dmarche na donc t inspire ni par une volontdoriginalit, ni par une proccupation particulire de protection des eaux, mais par lesouci de fertiliser notre petit jardin potager avec un compost produit sur place. Nousbuvions dj leau de pluie depuis longtemps, sans nous en porter plus mal que lesautres en dpit du fait que cette eau pouvait dans de rare cas ne pas tre lgalement potable . Cest plus tard que jai dcouvert quelle est mieux que potable : leau

    de pluie filtre est biocompatible1

    .

    Le confort dune bonne toilette sche

    La TLB est le rsultat dune observation fortuite, explique scientifiquementplus tard. En ajoutant de la sciure de bois ou des copeaux nos djections (urine +matire fcale), lodeur dsagrable disparat compltement. Cette toilette seprsente en fait comme une caisse sans fond, contenant un seau en plastique oumieux, en acier inoxydable et dont la planche suprieure (basculante) est percedune ouverture sur laquelle on a fix un abattant de W-C classique. La TLB trouvesa place nimporte o dans la maison, sans arrive deau, tuyau dvacuation ou

    systme daration. Laspect esthtique est un problme de menuiserie. Pourquoi nepas sinspirer de la chaise perce de Luis XVI pour la forme ? Certaines utilisatricesprtendent avoir moins de travail dentretien quavec un W-C classique. Des famillesqui navaient pas envisag lusage dune toilette sche lont adopte sans problmeset sur plus de six cent, aprs plusieurs mois ou dannes dexprience, notreconnaissance, deux familles en ont abandonn lusage.

    1 La consommation prolonge dune eau bio-compatible ne peut en aucune manire altrer la sant.On ne peut pas en dire autant de leau lgalement potable . Contrairement la position officielle, lechlore nest pas un produit dhygine , mais un produit chimique toxique, un biocide (qui tue la vie).

    La consommation prolonge de leau dsinfecte au chlore altre le systme immunitaire etsensibilise lorganisme une srie de maladies assez graves, comme les allergies, certains types decancer, ostoporose, coxarthrose, sclrose en plaque et augmente la sensibilit aux maladies virales.

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    Ct odeur, pas de problme. La contrainte de ce systme est lobligation devider le seau (nous conseillons une capacit de 15 20 litres) sur le carr compostdu jardin quand il est rempli. Cette opration est perue par plus dun comme unecorve assez dsagrable, bien quelle ne prend que quelques minutes. Je pensequil faudrait un incitant fiscal qui ferait payer le prix juste des nuisances dun W-C

    chasse pour sortir de limpasse environnementale cre par lpuration collective2

    .

    Les principes non noncs par les concepteurs des toilettessches

    Il est heureux que au dpart notre objectif ntait pas dinstaller un W-Ccologique, mais de fabriquer du compost, car, si javais consult la littratureabondante3 au sujet des toilettes sches, jaurais sans doute abouti des solutionsfort diffrentes. Cest posteriorique je ralise combien la finalit de la plupart desauteurs tait diffrente de la ntre.

    Le souci principal des concepteurs des toilettes sches est, par ordre depriorit : llimination dun dchet qui nous gne et nous encombre, en prenant bien soin

    dimiter, autant que se peut, le fameux water-closed, symbole du confort et ausside notre insouciance vis--vis de lenvironnement ;

    assurer le maximum de confort lutilisation ; conomiser leau ; soustraire nos djections (par exemple, en infiltrant lurine et en enfouissant les

    fces dans le sol) notre vue ; si llimination des eaux fcales a un impact favorable lenvironnement, tant

    mieux.

    Ce type de dmarche aboutit des solutions boiteuses et inconfortables. Ilfaut tre un mordu pour lenvironnement pour avoir recours volontairement auxsolutions dcrites dans la littrature.

    Les enjeux rels de lutilisation de la toilette sche

    On prsente gnralement la toilette sche comme un moyen dconomiserleau. Il est vrai que la suppression des chasses diminue la consommation desmnages de 25 35 %, ce qui est loin dtre ngligeable. Mais lconomie deaunest quun aspect mineur de ce problme. Mme si les techniciens en gniesanitaire semblent volontairement ignorer les ralits, le non rejet des djectionsdans leau est une option incontournable dans le respect du dveloppement durable.

    2 Le bilan azot de lpuration classique (oxydation biologique arobie) est tout simplementcatastrophique. Les quelques 5 10 % de lazote qui entre dans la station dpuration sort avec leseaux pures sous forme de nitrates. Cette quantit est largement suffisante pour asphyxier lesrivires avec les phosphates d'origine mtabolique (issus de nos W-C) et ceux contenus dans noslessives. Le restant de lazote sort de la station dpuration sous forme de boues et nattend, aprspandage sur les terres, que la premire pluie pour sinfiltrer dans la nappe phratique sous forme depollution par les nitrates ou ruisseler vers la rivire. Il ny a quune petite partie de lazote qui estassimil par les plantes. En rsum : lpuration classique transforme une matire premire prcieuse

    (les effluents de nos W-C) en pollution par les nitrates.3 Un exemple type de ce genre de littrature est le livre de Batrice Trlan, Water sans eau. Ed.Alternatives.

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    80 100% de la pollution organique de nos rivires est dorigine domestique.Cette matire organique est transforme par les stations dpuration en nitrates eten phosphates (y compris par les stations dpuration dites tertiaires ). Ces deuxsubstances sont responsables de lasphyxie des rivires. 97% de lazote et 50 80%

    de phosphore contenus dans les eaux uses urbaines viennent de nos W-C ! Leprogramme europen (trs coteux) dpuration des eaux urbaines ne rsoudra pasle problme de base de leutrophisation des rivires. On est prt dpenser desmilliards pour rien, alors quon refuse dattaquer le problme la source en mettanten place une lgislation encourageant labandon du W-C chasse, grandresponsable de nos problmes.

    Le jour o lon dcidera de ne plus rejeter les djections humaines et animalesdans leau, un grand pas sera franchi vers la protection efficace de notreenvironnement. Lintroduction gnralise des toilettes sches et des levagesindustriels sur litire biomatrise aurait des consquences actuellement

    inimaginables. En moins dun an, la plupart des petites rivires retrouveraient leurcaractre salmonicole (abritant des truites, des saumons) et 20 ans aprs, la teneuren nitrates des eaux souterraines tomberait une valeur compatible avec unepotabilisation facile. Et tout cela, sans dpenser un seul euro dans desinfrastructures dpuration lourdes et coteuses.

    Grands principes et ralits sur le terrain

    Revenons aux principes des toilettes sches. Jai beaucoup apprci lesrquisitoires de Franois Tanguay4 au Canada et de Pierre Lehmann en Suisse lencontre de notre cher water-closed. Ces rquisitoires sont bass sur le caractrepolluant de ces installations, ce qui est vrai, mais ce nest pas toute la vrit. Enralit, nos djections font partie intgrante de la biosphre, ce ne sont pas desdchets liminer. La pollution et le gaspillage de leau nest en fait quun aspectmineur du problme des W-C. La biomasse humaine tant devenue importante sur laterre, la destruction de nos djections sous prtexte dpuration est un facteurimportant de dsquilibre des cosystmes qui nous font vivre. Daprs une tudercente, faite lUniversit Catholique de Louvain (Belgique)5, le contenu azot desdjections humaines reprsente 40% de lazote utilis dans lagriculture mondiale. Labiomasse fcale humaine est dont loin dtre ngligeable. Sa destruction sous

    prtexte dpuration cre un dficit dans la fertilisation des sols, tandis quelpuration transforme lazote contenu dans les djections en pollution par lesnitrates. Malheureusement, lpuration nest pas la seule technique de destruction dela biomasse fcale (animale ou humaine). Toute technique ne respectant pasrigoureusement les conditions de la pdogense (formation de la matire humiquedu sol), soustrait la biomasse prcieuse du fonctionnement de la biosphre. On peutaisment montrer que lcobilan des techniques comme le lagunage, labiomthanisation, lpandage du lisier, lenfouissement de la matire organique dansle sol, etc., est ngatif. Je formulerais de la manire suivante le premier principe quidevrait guider la conception des toilettes cologiques et aussi des programmes de

    4 Franois TANGUAY, Petit manuel dautoconstruction. Ed. Mortagne. Canada5 Marco BERTAGLIA, in Sminaire en pollution de lenvironnement, Universit Catholique de Louvain(Belgique), Unit de gnie biologique (Prof. Patrick Grin) 1998-99.

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    restauration des cosystmes:

    Toute matire organique dtruite et non introduite dans le cycle deformation de la matire humique des sols est une perte grave pour labiosphre et une source de pollution pour les eaux.

    Toilettes sches et ides fausses

    Le premire chose est donc dessayer de runir les conditions pour lerecyclage le plus parfait possible de la matire fcale pour en faire de lhumus. Pource recyclage, il faut dabord ajuster le rapport carbone/azote (C/N) des djections 60. Au dpart, ce rapport est de lordre de 7. Il faut donc y ajouter une matire richeen carbone vgtal6.

    Pour litire tout convient : broyat de vgtaux, sciure de bois, copeaux, feuillesmortes, pailles, rafles, fanes, mme cartons usags et dchiquets. En ce qui

    concerne ces derniers, dans le contexte dappauvrissement de nos cosystmesagricoles, il est plus utile de les composter que de les recycler en tant que papier debasse qualit. La matire carbone vgtale est aussi traite comme dchet, quon valorise parfois en brlant, au lieu de le composter7.

    La runion de la biomasse vgtale carbone et les djections humaines etanimales constituent la filire normale pour la formation de lhumus.

    Ce qui ne convient pas pour ajouter nos djections :

    La terre . Le rapport carbone/azote de nos djections est trop faible pour la

    formation de lhumus. De ce fait, une bonne partie de lazote organique est perduepar minralisation spontane (transformation en nitrates, en nitrites et enammonium), faute de carbone. Le pouvoir fertilisant du fumier non compost

    6 Lurine contient 60 80 % de lazote contenu dans nos djections. Grce laction dun enzymenaturellement prsent, lurase, lazote contenu dans lurine se transforme spontanment enammoniac en quelques heures. La prsence de lignine et de la cellulose contenus dans les vgtaux(dans la litire de la TLB) semble inhiber laction de lurase et bloque la formation de lammoniac.Ds lors, lazote organique des djections commence tre intgr dans le processus biologique deformation de lhumus. Les odeurs disparaissent par la mme occasion.Lorsquon recueille lurine sparment, pour le stockage dans un rservoir, ou pour infiltration dans lesol, la formation de lammoniac, suivie de celle des nitrates, est invitable. Ds lors, il ny a plus deformation dhumus, mme en prsence de matriaux vgtaux. La prsence dazote ammoniacal etnitrique explique videmment le pouvoir fertilisant , mais il sagit dune fertilisation chimique quinose pas dire son nom. Le lessivage des nitrates dans les eaux souterraines est le rsultat final decette opration.Cest la raison pour laquelle les effluents des toilettes sches dans lesquelles on a spar lurine et lamatire fcale ne conviennent pas pour la rgnration des terres. De ce fait, lcobilan de cestoilettes sches nest pas favorable.7 La valorisation nergtique de la biomasse est un mythe tenace dans les milieux desenvironnementalistes. Dans le contexte actuel de gigantisme nergtique, la valeur de lnergieobtenue (combustible solide, biomthane, carburant liquide, etc.) en dtruisant la biomasse est tout fait drisoire par rapport la valeur biologique du matriau organique soustrait aux grands cycles dela biosphre. On pourra peut-tre un jour envisager la valorisation nergtique dune petite partie de la

    biomasse dans un monde qui utilisera bon escient et des besoins essentiels toutes les formesdnergies disponibles et renouvelables.

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    provient prcisment de cette minralisation, mais son action est identique celledes engrais chimiques.

    La tourbe . Bien que le rapport carbone/azote peut tre ajust avec de la tourbe, ilne faut pas oublier quil sagit dun produit non renouvelable. De plus, on observeque la tourbe, probablement cause de son caractre acide, matrise moins bien

    les odeurs que la matire vgtale sche. Les cendres ou la chaux. Le caractre fortement basique de ces substances (la

    potasse) inhibe laction des micro-organismes pour la transformation de la matireorganique en humus. On ne peut envisager que ladjonction de petites quantitsde cendre pendant le compostage, mais pas dans une toilette. Les vieux paysansdisent toujours : la chaux enrichit le pre et ruine le fils . La chaux et la potasseacclrent la dcomposition spontane de lhumus dans le sol, en librantrapidement lazote et le phosphore organiques. Il en rsulte une forteaugmentation des rendements au dtriment des rserves du sol. Le chaulage ducompost, prconis par certains spcialistes en agriculture, interrompt leprocessus de rgnration des sols.

    La sparation de lurine et de la matire fcale nest pas utile en vue duncompostage. Lhumidit contenue dans lurine est ncessaire pour imprgner lamatire organique sche indispensable lajustage du rapport carbone/azote. Sansurine, il faut arroser le tas de compost ne contenant que les fces et les vgtaux.On justifie la sparation de lurine par la rduction du volume traiter, mais que fairealors avec lurine ? Son infiltration dans le sol ou son utilisation pour irriguer est uneabsurdit cologique. Entre 60 et 80% de lazote contenu dans les djections setrouve prcisment dans lurine. Faute de carbone, lurine dans le sol estintgralement minralise et alimente gnreusement les eaux de ruissellement etles eaux souterraines en azote nitrique et ammoniacal. Lazote contenu dans lurineest indispensable la transformation en humus de la matire vgtale carbone.Linfiltration de lurine dans le sol est donc une perte la fois de la matire azote etcarbone, tout en gnrant une pollution des eaux.

    Lvaporation de leau contenue dans les fces est justifie par le souci derduire la masse traiter et espacer les manutentions. Le milieu humide bactriendans les fces assure un bon dmarrage des processus de transformation enhumus. Il est dommage dinterrompre ces processus naturels par vaporation ethumidification au moment du compostage.

    Le compostage interne dans un rservoir situ sous la toilette sinspiretoujours du souci dviter de soccuper autant que se peut de nos djections.Malheureusement, il nest pas possible de raliser dans une cuve ou dans une fosseles conditions arobies ncessaires pour un bon compostage. Le vritablecompostage se fait sur le sol mme, en symbiose avec la faune qui vit dans le sol.Toute fermentation anarobie, invitable dans les cuves, soustrait lazote et aussiune bonne partie du carbone au processus de formation de lhumus, tout en librant,en prime, la pollution par les nitrates et lammonium.

    Le syndrome de lempereur chinois. On raconte souvent que les empereurschinois, contrairement leurs sujets, ne consommaient pas les aliments rcolts sur

    des terres fertilises avec des djections humaines. On cite galement le refus desruminants de manger lherbe qui pousse sur leurs djections. La rticence utiliser

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    les djections humaines est en fait de nature psychologique et culturelle, de mmeque la crainte de la contamination bactrienne. Il ne faut pas perdre de vue que : les Chinois ne compostaient pas leurs djections, mais lutilisaient directement sur

    le sol ; lherbe des prairies engraisses avec du fumier compost est bien accepte par

    les animaux.Il ne fait pas de doute que les djections non compostes (autant que le lisier, lesgadoues de fosses septiques et les boues dpuration actuellement pandues grande chelle, ce qui ne semble pas inquiter les personnes soucieuses dhygine)introduisent un grand nombre de germes pathognes dans le milieu de production denos aliments. Par contre, lutilisation du compost de djections dune toilette schene prsente pas cet inconvnient. La teneur en bactries pathognes de ce type decompost est beaucoup plus faible que celle des gadoues des fosses septiques ou dulisier dlevage. La peur de la manipulation et de lutilisation des djections humainesest dpourvue de base objective (mme si lon trouve toujours une justification). Elleest dorigine culturelle et psychologique.

    Lagunage ? Oui, quand on ne peut pas se passe du W-C chasse

    Limage bucolique du plan deau avec les jolies-petites-plantes-qui-purent-tout colle la peau des environnementalistes et occulte une vision plus globale etplus pragmatique. La grande popularit des techniques de lagunage tient au faitquelles ne remettent pas en question nos (mauvaises) habitudes concernant lesusages de leau. Un lagunage remplace purement et simplement la stationdpuration, mais rien ne change en amont. La rduction de la pollution est ladiscrtion de lusager.

    Nous venons de montrer que le mal est fait au moment du dversement desdjections dans leau et le facteur de dsquilibre est la destruction de la biomassefcale par puration. La pollution azote des degrs divers ne vient quen prime.Lidologie de base de la conception dun lagunage et dune station dpuration est lamme : dtruire la charge polluante, sans tenir compte de la valeur biologique de labiomasse dtruite. Dans un systme qui fonctionne suivant le concept dudveloppement durable, le lagunage na pas sa place. Si on le souhaite et si lesconditions climatiques et daphiques le permettent, on peut crer une zone humide la sortie dun systme dpuration des eaux uses non fcales (eaux grises ousavonneuses), mais dans la plupart des cosystmes, leau est trop prcieuse pour

    tre gaspille dans de telles installations.

    Dans les pays climat sec, on dplore le fait que les eaux uses urbainessont impropres lirrigation des terres agricoles. Les eaux fcales contiennent, eneffet, trop de germes pathognes et surtout des ufs de parasites intestinaux. Aprscette constatation, la conclusion la plus logique serait de ne pas rejeter la matirefcale dans leau, mais cette ventualit nest mme pas envisage par lestechniciens et les dcideurs politiques. Dans les eaux grises (eaux savonneuses), il ya mille dix mille fois moins de germes et de parasites que dans les eaux fcales.Dans un pays o chaque litre deau est convoit pour lirrigation des culturesvivrires, lusage dun W-C chasse est un acte lourd de consquences. Mais les

    techniciens spcialistes en puration prfrent perptuer lirresponsabilitinstitutionnalise. Lassainissement par gouts et stations dpuration est une affaire

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    commerciale qui obit aux lois du march. Pourtant, rien que la suppression deschasses rduirait la consommation deau des mnages denviron 30%. Dbarrassedes eaux fcales, les eaux uses urbaines deviendraient disponibles pourlagriculture, sans risques sanitaires. Prconiser des systmes de lagunage (cela sefait pourtant par des spcialistes de rputation mondiale) dans des pays climat sec

    o au moins 60% de leau est vapore pendant lpuration et une autre partie seperd par infiltration, cest faire preuve dun mpris ou dune mconnaissance dufonctionnement des cosystmes agricoles. Ou bien on a dautres motivations.

    Lutilisation du compost de djections augmente la capacit de rtention deaudes terres et, de ce fait, diminue les besoins en eau dirrigation. Chaque kg decompost qui remplace lengrais chimique diminue la pollution agricole et aussi lesbesoins en pesticides.

    Il serait trop long danalyser les impacts environnementaux des systmes delagunage, y compris dans les pays climat humide. Mme en cas de rcupration

    de la matire vgtale produite, la rupture des grands cycles naturels, comme celuide lazote, est consomme. Lors du compostage des vgtaux rcuprs dulagunage, pour ajuster le rapport carbone/azote une valeur correcte, il faut encoreajouter du fumier : il faut remplacer lazote dtruite pendant lpuration. Lecompostage direct des djections conomise un cycle annuel dnergie solaire.

    Lusage dune toilette litire biomatrise (TLB) et son compostage ncessiteun investissement bien moindre et beaucoup moins de travail quun systme delagunage, sans parler des impacts sur lenvironnement.

    Le lagunage nest justifiable que dans la mesure o lon est incapable derenoncer lusage dun W-C chasse deau. En ce sens, cest un moyen techniquepour se donner bonne conscience, tout en continuant gaspiller, polluer leau etappauvrir la biosphre.

    La toilette sche, pour nos animaux aussi

    Dans des rgions (comme la Flandre ou la Normandie) o lon pratique grande chelle llevage hors sol, la biomasse fcale dorigine animale estimportante. Pour viter la production de ce dchet polluant, et pouvoir recycler lesdjections animales dans la formation de lhumus, la technique de llevage sur litire

    biomatrise est une solution satisfaisante et conomiquement acceptable. Desessais faits au Japon et aussi dans plusieurs pays europens montrent la faisabilitde ce systme qui limine par la mme occasion toutes les nuisances olfactives deces levages et celles des pandages du lisier. Des montagnes de dchets carbons(palettes en bois, cartons, dchets forestiers, etc.) attendent leur valorisation en tantque litire pour neutraliser la pollution azote par lpandage du lisier. Par la mmeoccasion, on augmenterait la teneur en humus des terres et on diminuerait lapollution par les pesticides.

    La position des spcialistes officiels en gnie sanitaire

    Lors de la confrence europenne des 28 et 29 mai 1996 tenue Bruxellessur la politique de leau de la Communaut Europenne, jai propos dintgrer dans

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    la lgislation concernant les eaux rsiduaires urbaines des incitants pour lestechniques dassainissement bases sur le principe de prvention. Il taitvidemment question du systme dassainissement TRAISELECTou le traitementslectif des eaux uses domestiques dont la pice matresse est la toilette litirebiomatrise (TLB) qui pourrait constituer une alternative crdible (bien que

    facultative) au W-C classique.

    Cette toilette na toutefois pas sduit les personnes prsentes et a tsurnomm de bac chat par un des membres de la dlgation officielle belge ettire en drision.

    Par la suite, les exposs des dlgations des pays du sud de lEurope ontbien mis en vidence les graves problmes de pnurie deau, notamment pourlagriculture. A titre dexemple, une ville comme Barcelone rejette dans la mer unerivire deau use inutilisable dans lagriculture cause de la contamination fcale.Aprs le constat dchec de la politique actuelle deau, un grand spcialiste espagnol

    a conclu en disant que ce nest pas de bacs chats dont nous avons besoin, maisdeau pour lirrigation . Quand on sait que le traitement slectif des eaux grises etlusage des toilettes sches rduirait les besoins en eau de villes de 25 30 % et latotalit des eaux grises pures pourrait servir lirrigation, on reste rveur devantlattitude de refus catgorique des spcialistes officiels en gnie sanitaire. Il est sansdoute plus motivant dinaugurer des grands travaux hydrauliques que denvisagerdes solutions lmentaires, bien que trs efficaces.

    Conclusions

    Une rflexion approfondie sur le fonctionnement des cosystmes aboutit laconclusion suivant laquelle tous les problmes relatifs leau dans le monde trouventleur origine dans la mauvaise gestion de la biomasse. Vu le poids des activitshumaines, la biomasse fcale dorigine humaine ou mme animale ne doit enaucune manire tre rejete dans leau, mais injecte dans le processus deformation de lhumus. De cette manire on prvient plus de 97% la pollution deseaux par les nitrates et aussi en grande partie par les phosphates.

    Lusage des toilettes sches et llevage sur litire biomatrise liminerait lasource la presque totalit de la pollution azote et la majorit de la pollutionphosphate des eaux naturelles. Le recyclage correct des djections est un lment

    primordial pour rgnrer les cosystmes agricoles dgrads et un facteurimportant dconomie deau. En intgrant les principes noncs plus haut concernantle fonctionnement des cosystmes dans la conception des toilettes sches, onaboutit des solutions techniques trs efficaces et plus quacceptables au point devue psychologique.

    Quand on se dit favorable la rduction de la pollution, utiliser une toilettesche correcte est une question de cohrence. Cest la dmarche quotidienne deloin la plus efficace pour la protection de lenvironnement.

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    29.Mode demploi TLB

    La toilette litire biomatrise(mode demploi)

    1. Comme litire, utiliser :- des dchets vgtaux secs : broyats de branchages, de feuilles,

    de tiges, des fanes, etc.- copeaux et sciure de bois;- tous les lments ci-dessus peuvent tre mlangs.

    2. Ce quil ne faut pas utiliser comme litire :- copeaux et sciure de bois tropicaux exotiques qui peuvent gnrer

    de mauvaises odeurs et provoquer des allergies;- trop de sciure, source de poussire dans la maison ;- uniquement des feuilles sches broyes qui nabsorbent pas

    suffisamment lhumidit.3. On dpose au dpart une couche de quelques centimtres de litire au fond

    du rservoir de la toilette. Une bonne paisseur de litire de dpart se jugelors de la vidange : si elle est trop sche, cela signifie quelle est en excset se compostera mal ; si par contre, elle baigne dans lurine cest signedinsuffisance et de pollution de la terre par infiltration.

    4. Aprs chaque utilisation, couvrir les selles avec une feuille de papier detoilette quon humidifie laide dun pulvrisateur pour plantes dintrieur etun peu de litire. Tous les papiers de toilette conviennent et sont jets dansle rservoir. Cette toilette accepte galement les tampons hyginiques et lescouches culottes compostables.

    5.

    Ne pas attendre le que rservoir soit trop rempli et lourd pour vidanger dansle carr compost.6. Rincer le rservoir avant de remettre en service. Sil est en plastique, il vaut

    mieux en avoir deux : lun tant en service, lautre est ar lextrieur.Pour enlever les odeurs absorbes par le plastique, on peut y mettre,pendant laration, de leau contenant un peu dargile. Cette eau peut servirplusieurs fois. Leau savonneuse des nettoyages par terre convientgalement.

    7. Le carr compost qui reoit les effluents de la toilette (un mtre carr parpersonne) est amnag dans un coin du jardin labri des regards. On ydposera galement tous les dchets du jardin et de la cuisine. Afin dviter

    la multiplication des mouches, aprs chaque dversement, couvrir avec unpeu de dchet de jardin, tonte dherbe, feuilles mortes, mauvaises herbesarraches ou paille.

    8. Au mois de novembre de chaque anne, le carr compost est vid. Soncontenu est entass pour faire un tas en forme de toit et couvert dunecouche dau moins 20 cm de paille. Aprs une anne de repos, le compostobtenu est prt lemploi dans le jardin, y compris le potager.

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